II.3- Nature des externalités budgétaires
Il est vraisemblable que la nature des effets de
débordement des politiques budgétaires nationales sera
différente dans une union monétaire et entre pays liés par
des taux de changes flexibles. Dans le modèle à deux pays de
Mundell-Fleming, avec la mobilité parfaite du capital et taux de change
flexible, une augmentation des dépenses publiques financée par
l'emprunt, par exemple, a des effets de transmission positifs sur la production
à l'étranger ; car la devise
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nationale s'apprécie en raison de la hausse des taux
d'intérêt internes ; ce qui induit un surplus d'exportations pour
les pays étrangers. Au contraire, avec des taux de change fixes et en
l'absence d'autres changements structurels, les effets de transmission seront
vraisemblablement négatifs, car cette augmentation des dépenses
publiques élève les taux d'intérêt dans le monde et
freine l'investissement dans le pays comme à l'étranger ; les
autres pays bénéficiant beaucoup moins d'une hausse de leurs
exportations.
Des recherches plus poussées à partir du
modèle de Mundell-Flemming donnent des résultats moins nets, car
les canaux de transmission deviennent plus complexes (Frenkel et Razin, 1987).
Ainsi, Masson et Taylor (1994) montrent que la hausse des dépenses
publiques génère un effet de débordement positif et
négatif sur l'activité économique d'un pays et celle de
ses partenaires commerciaux. L'effet de débordement positif s'observe
à travers le canal du commerce extérieur. Par contre, l'effet de
débordement négatif se traduit par la hausse éventuelle
des taux longs. Cette hausse est partagée par l'ensemble des pays de
l'union (zone euro). Elle dégrade la compétitivité du pays
en déficit et celle de ses partenaires de l'union.
Levine et Brociner (1994) attestent que l'augmentation de la
fiscalité engendre aussi bien un effet de débordement positif que
négatif dans l'économie du pays et dans celle des pays voisins.
L'externalité positive se manifeste à travers le canal de l'offre
de biens et services et/ou de l'offre de travail au niveau des entreprises
nationales, grâce à une politique fiscale souple. Pour Benassy et
Schalck (2007), elle favorise la production et stimule la demande nationale et
étrangère. L'augmentation de la fiscalité peut
également favoriser les activités et les comportements qui
procurent les effets de débordement positifs. D'après Cottarelli
(2011), elle permet de financer les biens publics qui ne seraient pas
spontanément produits par le marché. Elle assure le
fonctionnement des services publics et d'autres missions d'intérêt
général.
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Quant à l'effet de débordement négatif,
il s'effectue par le canal de la concurrence fiscale où une politique
fiscale agressive en faveur des entreprises nationales, diminue leur
compétitivité et handicape la croissance économique du
pays domestique, mais également celle des pays voisins (Laffer, 1998 ;
Sorenson, 2000). L'effet de débordement négatif se traduit aussi
par la baisse des taux d'imposition dans les pays voisins et des baisses des
revenus fiscaux dans le pays domestique. C'est ainsi que les pays membres
peuvent être affectés par les politiques fiscales de leurs voisins
; par le biais des canaux de transmission (Zodrov et Mieszkowski, 1986). Ces
effets de débordement sont généralement négatifs et
provoquent une réduction du bien-être du pays qui subit ce
débordement. D'après Benassy et Schalck (2007), l'effet de
débordement négatif s'apprécie aussi par un déficit
budgétaire détériorant les finances publiques dans le pays
qui est l'initiateur de la politique budgétaire. La nature des
externalités budgétaires reste mitigée selon les zones
d'études, les périodes choisies, la méthode
utilisée et les mécanismes de transmission des effets. Or,
l'intégration économique et monétaire devrait renforcer
les interdépendances entre les pays.
Sarr (2006) a mis en évidence les externalités
budgétaires dans l'UEMOA par le canal du commerce intrazone. Sur la base
d'un modèle VAR structurel, il conclut que la transmission des
externalités budgétaires dans la zone reste faible en raison du
faible taux d'échange des flux commerciaux soit environ 12%. Dans la
même zone, Ndiaye et Konté (2012) à l'aide d'un
modèle VAR en panel, démontrent que le taux d'importation
influence le solde budgétaire de base des pays de l'union par le canal
d'éventuelles flambées des prix extérieurs qui induisent
par voie de conséquence l'accroissement des prix intérieurs. Pour
Kane (2013), la crédibilité de la politique budgétaire
apparait ainsi fortement liée au degré de convergence des
économies des pays membres de l'UEMOA. Récemment, les recherches
menées par Sene (2014) sur la solvabilité de la dette publique
à partir d'un VAR en panel à effets fixes, montrent qu'une
détérioration de la situation budgétaire d'un pays envoi
un mauvais signal aux investisseurs qui modifient leur comportent de risque
à l'égard des titres publics. Mais, cette
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situation particulière est observée lorsque le
gouvernement est en face d'une dette insoutenable. Ensuite Diop et Diaw (2015)
analysant la stabilité de la politique budgétaires dans l'UEMOA
par la technique du SVAR, montrent bien que les chocs sur les dépenses
en capital public ne conduisent pas à des tensions inflationnistes et
influencent positivement les investissements du secteur privé au Benin,
Mali et au Sénégal. La maîtrise de l'évolution des
dépenses de consommation publique apparait importante puisque ces
dépenses sont très sensibles à l'inflation dans les Etats
comme la Cote d'Ivoire et le Sénégal. Ils trouvent
également que les chocs sur le taux de pression fiscale ne comportent
que des effets négatifs sur l'activité économique des
Etats de l'union et aussi sur la consommation privée des ménages,
d'où un contrôle strict de son évolution afin de ne pas
créer des distorsions dans les économies de la zone.
En résumé, la présence des
externalités budgétaires dans les unions monétaires
résulte en dehors des comportements hétérogènes des
économies, du jeu non coopératif auquel les politiques
économiques sont soumises. Résultats, les dérives
budgétaires en termes de déficits sont excessives ; ce qui
à long terme, nuit aux conditions d'optimalité de l'union.
D'où un intérêt particulier pour les Etats membres de
l'UEMOA d'aller vers une convergence des politiques budgétaires.
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