B. Place de la coutume dans la hiérarchie des
normes juridiques en droit
congolais
La République démocratique du Congo est un Etat
de droit. En effet, aussi bien les gouvernants que les gouvernés sont
tous soumis au droit ; nul n'est au-dessus du droit
établi.29
S'agissant de son système juridique, il convient de
relever que l'Etat congolais appartient à la famille romano-germanique
en ce sens que nul élément ne peut être d'application
juridique tant celle-ci ne soit pas préconstitué ou prévu
pour ces fins.
En effet, le droit est constitué de deux sources :
d'une part, nous avons les sources réelles, et d'autre part, les sources
formelles. En ce qui concerne les sources réelles, il convient de
relever que le législateur ne tire pas le droit du néant, il
obéit à des impératifs ou à ces
préoccupations qui constituent le véritable fondement du droit.
Parler de la source réelle, c'est parler autrement des
éléments fondamentaux du droit.
S'agissant des sources formelles, ce sont des
procédés par lesquels le droit se manifeste ou se
révèle. Pour ce dernier point, ces sources ne sont pas
conçues ou perçues de façon désordonnées ou
disparates mais hiérarchisée en forme pyramidale car elles n'ont
pas toutes la même force et ne sont pas de même
nature.30
A ce sujet, il revient de dire que la doctrine est
partagée quant à la hiérarchisation des normes juridiques.
Cette divergence résulte en ce que certains auteurs estiment que les
traités internationaux ont une primauté à la Constitution,
inversement les autres reconnaissent aisément que les traités
internationaux régulièrement conclus ont, dès leur
publication une autorité supérieure à celle des lois comme
le veut la Constitution du 18 février 2006 à son article
215.31
28 Toussaint KWAMBAMBA BALA, Droit coutumier congolais,
Université de Kinshasa, Faculté de droit, p.10, inédit
29 Article 12 de la Constitution : « Tous les Congolais
sont égaux devant la loi et ont droit à une égale
protection des lois ».
30 BOMPAKA NKEYI, op.cit. , p. 51
31 Article 215 de la Constitution du 18 février 2006 :
« Les traités et les accords internationaux
régulièrement conclus, ont dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve
pour chaque traité ou accord de son application par l'autre partie
».
10
A la lumière de ce qui précède, force est
de relever que nous épousons la position du professeur OMEYONGA qui est
également partagée par le professeur BOMPAKA NKEYI. En effet,
selon ces derniers au sommet de la hiérarchie des normes juridiques nous
trouvons la Constitution par après, les traités internationaux
puis des lois, et ensuite des actes administratifs.32
De manière schématique nous avons :
2
4
3
1
5
6
7
9
8
La Constitution, la loi organique
Les traités et accords internationaux Les lois
ordinaires
Les règlements : ordonnance, décret,
arrêté
Principes généraux du droit
La coutume
L'équité
La doctrine
La jurisprudence
Il convient de noter que la classification des
différentes sources du droit ne se résume pas à celle des
sources formelles et informelles. D'ailleurs, à ce propos, le professeur
BOMPAKA NKEYI classifie ses différentes sources en trois
catégories suivantes :
- Les sources de règles juridiques d'autorité :
dans cette catégorie on trouve la loi, la coutume, les principes
généraux du droit ;
- Les sources de règles juridiques particulières
: ici on trouve les actes juridiques et les jugements ;
32 B. OMEYONGA TONGOMO, Cours de Droit constitutionnel,
Faculté de Droit, Université Kongo, Mbanza-Ngungu, premier
graduat, 2015-2016, inédit
11
- Les sources de règles juridiques hybrides : dans cette
catégorie on retrouve la jurisprudence et la doctrine.33
De tout ce qui précède, il convient de constater
que la coutume occupe une place considérable en droit congolais, bien
qu'elle ait une force inférieure à la loi. Contrairement à
la famille de la Common law où la coutume est la source principale du
droit. A titre d'exemple, nous pouvons citer l'Angleterre où en
dépit de l'augmentation récente du nombre des statuts,
l'influence de la coutume prédomine à côté des
documents écrits.34
Cependant, il convient de distinguer trois types de coutume
à savoir : la coutume secundum legem, la coutume praeter
legem et la coutume contra legem. On attend par la coutume
secundum legem, tout usage qui aura force obligatoire à titre
des règles de droit, si la loi prescrit de s'y référer.
Tel est le cas en matière des terres occupées par les
communautés locales pour laquelle la loi se réfère
à la coutume,35 en matière de fiançailles, en
cas de rupture de fiançailles, la loi se réfère
également à la coutume des parties.36
S'agissant de la coutume praeter legem, il s'agit de
nombreux d'usage répétés et considérées par
la masse sociale comme juridiquement obligatoire intervenant dans les
matières que le législateur n'a pas expressément
réglées. C'est ici que s'assoie le décret du
1er mai 1886 cité supra qui prévoyait qu'en cas de
silence de la loi le législateur ordonne au juge de se
référer aux coutumes locales.
A propos de la coutume contra legem, il semble que
l'on ne puisse admettre qu'une coutume se dresse contre la loi, la
répétition de ces coutumes a fini
33 BOMPAKA NKEYI, Op.cit., p. 39, inédit
34 Edouard MPONGO-BOKAKO BAUTOLINGA, Institutions
politiques et droit constitutionnel, Kinshasa, XI édiction, pp.
77-78
35 BOMPAKA NKEYI, Op.cit., p. 51; Article 387 de la loi
foncière : « Les terres occupées par les communautés
locales deviennent, à partir de l'entrée en vigueur de la
présente loi, des terres domaniales » ;
Article 388 de la même loi : « Les terres
occupées par les communautés locales sont celles que ces
communautés habitent, cultivent ou exploitent d'une manière
quelconque individuelle ou collective conformément aux coutumes et
usages locaux » ; Article 389 de la loi précitée : «
Les droits de jouissances régulièrement acquis sur ces terres
seront réglés par une ordonnance du Président de la
République » ;
36 Article 340 du code la famille : « La forme des
fiançailles est réglée par la coutume des fiancés
».
Article 344 du code de la famille : « En cas de rupture
des fiançailles, les prestations et les valeurs données ou
échangées durant les fiançailles sont remboursées
conformément à la coutume ».
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par engendre dans le corps l'opinion qu'il s'agit là
des comportements licites à l'instar de pratique de sororat,
lévirat.37
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