WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Structure administrative et gestion de la population dans le département du Mbéré de 1983 à  2018


par Léandre TASSONA
Université de Ngaoundéré - Master 2 Histoire 2019
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3- Ancrage institutionnel

Il est important pour un parti politique ayant l'ambition de prendre le pouvoir de connaître le rôle et le fonctionnement des institutions ; d'avoir des soutiens au sein des institutions qui constituent les piliers clés du pouvoir politique central et des informations sur la situation réelle du pays ainsi que les principaux dossiers ; de connaître les rouages de l'appareil de l'Étatet des acteurs en son sein et d'intégrer ses membres au sein de certains organismes étatiques aux enjeux politiques indubitables (organe en charge des élections par exemple) ; d'encourager au sein des institutions universitaires des travaux de recherche qui analysent et diffusent les idées défendues par le parti99(*). Source

La politique évoquée ci-dessus est mêmela stratégie utiliséepar le RDPC dans le Département, à travers laquelle ce parti politique marque son omniprésence via l'administration dans les villages enclavés.À cet effet,le président de la République a reconnu lors du congrès extraordinaire du parti en juillet 2006 que le parti se confond souvent avec l'État. Il affirma que « la distinction entre l'administration, et le parti n'est pas évidente pour tous»100(*). La réalité des zones sinistrées du Département du Mbéré confirme cette théorie. Comme pour le Parti communiste chinois (PCC), chaque poste de responsabilité dans le secteur public ou parapublic (directeur d'entreprise, des grandes écoles publiques, recteur et doyen d'Université, juges, maires de grande ville, patron de police, d'audiovisuel, et de l'armée, administrateurs etc.) au Cameroun est doublé d'un poste politique du parti101(*). Ainsi, lors des élections ou autres évènements du parti, on compte beaucoup de véhicules administratifs, dans ces zones ruralesisolées pour la cause du RDPC.

Comme à l'ère du Parti unique, c'est tout l'appareil de l'État personnalisé qui fait le parti. D'où le parti-État. La majorité incarnée par le RDPC au Cameroun est devenue l'instrument par lequel le président de la République, chef de l'État, assoit son hégémonie au sein des institutions de l'État. Cela était vrai sous le règne du parti unique qui se confondait pratiquement avec l'État et dont le chef de l'État était le maître incontesté. Cela l'est également en cette période de balbutiements du « multipartisme administratif » au Cameroun102(*).

Pour le dire autrement, l'administration publique camerounaise est partiale, et apparaît comme l'une des plus importantes limites au rééquilibrage des rapports institutionnels entre l'opposition et la majorité au pouvoir.

Par ailleurs l'administration inféodée au RDPC prépare et conduit les opérations quel que soit le type d'élection considérée, dans le sens où les membres de l'administration malgré leur descente rarissime dans ces zones isolées « représentent » le parti au pouvoir. L'administration publique constitue ainsi, au sens de Roger Gabriel Nlep,

Le premier parti politique du pays » tant au plan qualitatif que quantitatif. RDPC et administration semblent ainsi se confondre dans la poursuite d'un but avéré : le maintien, voire le renforcement de l'hégémonie de la majorité constituée autour de l'ex-parti unique devenu aujourd'hui parti dominant. Les moyens humains, matériels et financiers de l'État, qu'il s'agisse de l'administration publique ou encore des entreprises publiques et parapubliques, sont systématiquement mis à contribution au cours des campagnes électorales du parti au pouvoir d'où le recours aux notions de «parti-État», « parti administratif » ou encore de « multipartisme administratif »103(*).

En d'autres termes, l'administration publique emploie ses moyens logistiques pour défendre à priori l'intérêt du parti au pouvoir que celui de l'État.

Ainsi, cette dernière partie montre que des villages isolés sont rattachés à leurs communautés culturelles ayant en partage certaines valeurs ou intérêts voire les mêmes convictions politiques, afin de consolider le poids électoral.

En un mot comme en mille, les découpages administratifs dans le Département du Mbéré ont été opéré avec beaucoup de subjectivité pour conforter non seulement une nostalgie sociologique, mais aussi et surtout d'assoir l'ancrage politique du régime en place.En effet, des ethnies qui à un moment de leur existence, vivaient ensemble, se sont sédentarisées de manière dispersée le long de la route sous la pression de l'administration coloniale afin de faciliter la collecte d'impôts. De ce fait, la répartition territorialea concilié ces ethnies, qui quel quesoit leur distance ou encore leurs emplacements, dans une même communauté d'intérêt.Bien plus,le découpage des divisions territoriales de ce départementest une stratégie politique qui a permis au régime en place de jouir d'une solide représentation locale.Il s'agit là d'une « politisation » du découpage des circonscriptions administratives ou d'un découpage administratif intéressé. C'est dire que la configuration de ces unités administratives a profondément déséquilibré l'UNDP qui avait un fort ancrage dans le Département du Mbéré.En effet, suite au conflit ethnique(Gbaya/foulbé)de Meiganga, il s'est créé un véritable repli identitaire autour des partis politiques. Les gbayas(ethnie majoritaire)militants de l'UNDP et d'autres groupes non musulmans ont déserté ce parti considéré comme propre aux Foulbé. Ainsi,l'État a divisé ces circonscriptions dans l'optique de réunir une population éparpillée géographiquement en vue de faire de ce groupe une majorité dans chacune des circonscriptions.Cependant,cette construction politico-historiqueentraveénormément le déploiement de l'administration ainsi que l'accès des citoyens aux services administratifs.

* 99F. E. Stiftung,2014,Manuel de structuration d'un parti politique, Yaoundé, Presses Universitaires d'Afrique, p.31

* 100 Discours de Paul Biya lors du Congrès extraordinaire du RDPC, Yaoundé, juillet 2006

* 101 Ibid.

* 102L. D. Sokeng, 1999, « État, autoritarisme et droits de l'homme : la problématique de l'ajustement libéral » in L. Sindjoun (Dir.), La révolution passive au Cameroun : État, société et changement, Série des livres du Codesria, Dakar, CODESRIA, p.26.

* 103R. G. Nlep, 1986, L'administration publique camerounaise : contribution à l'étude des systèmes africains d'administration publique, Paris, FNSP, p.35.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams