La protection juridique des personnes vulnérables au Niger.par Taher ABDOU Université d'Abomey-Calavi /FADESP - Master II en droit et institutions judiciaires 2017 |
SectionII : Les normesinfra-universelles de protectionAu plan régional et national, le Niger enregistre une avancée considérable avec la signature et la ratification de plusieurs normes régionales susceptibles de protéger les personnes vulnérables (paragrapheI) et certaines normes qui offrent une protection sur un territoire donné, d'où les normes nationales de protection (paragraphe II). Paragraphe I : Lesnormes régionalesdeprotectionBien que l'Afrique n'ait pas adopté plusieurs instruments régionaux, il est nécessaire de saluer l'effort apporté dans la protection des droits de l'Homme avec sa fameuse Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (A) et quelques conventions catégorielles (A). A-LaCharteafricainedesdroitsdel'hommeetdespeuplesLes personnes vulnérables font l'objet d'une protection au niveau régional. Ainsi la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples s'inscrit dans cette logique. Instrument de protection générale au plan régional, la Charte africaine a été adoptée lors de la 18ème conférence des chefs d'États et des gouvernements de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), actuelle Union Africaine (AU), le 18 juin 1981 à Nairobi au Kenya. Cette Charte est entrée en vigueur le 21 octobre 1986.Elle est ratifiée par le Niger le 15 juillet 1986. L`adoption de ce texte sous la forme juridique d'une Charte et non sous la forme d'une déclaration lui confère une force contraignante95(*), ce qui implique que, dès son entrée en vigueur, la Charte africaine fait naitre à la charge des États parties l'obligation d'assurer la jouissance et l'exercice effectif des droits et libertés qu'elle consacre. L'originalité de cette Charte africaine des droits de l'homme et des peuples réside dans le fait qu'elle proclame non seulement des droits mais également des devoirs. Tout en reconnaissant les droits économiques, sociaux, culturels, ainsi que les droits civils et politiques, la Charte africaine se singularise en conférant aux peuples plusieurs droits de solidarité96(*), mais aussi des droits inhérents à la personne humaine97(*). Dans le contexte africain, les personnes vulnérables bénéficient également d'une protection prévue par les normes catégorielles au niveau régional. B - LesnormescatégoriellesdeprotectionauniveaurégionalLa vulnérabilité peut être celle d'une catégorie de personnes, alors certains instruments juridiques prévoient leur protection. C'est le cas de la Charte africaine des droits du bien-être de l'enfant (CADBE). Celle-ci a été adoptée le 11 juillet 1990 à Addis-Abeba, lors de la 26ème conférence des chefs d'États africains et de gouvernement de l'organisation de l'Unité Africain98(*). Elle est entrée en vigueur le 29 novembre 1999. En effet, la CADBE définit l'« Enfant » à son article 299(*). Elle consacre des droits aux enfants vulnérables, notamment le droit de l'enfant au repos, aux loisirs, aux activités récréatives et culturelles100(*), les États parties s'engagent dans la mesure des ressources disponibles, à fournir à l'enfant handicapé et ceux qui sont chargés de son entretien l'assistance qui aura été demandée101(*), aussi l'enfant est protégé contre l'apatridie et la discrimination102(*), il est égalementprotégé contre le trafic, la traite, l'enlèvement, et la mendicité103(*). En outre l'enfant, même en conflit avec la loi bénéficie d'une protection. Pendant la détention, les Etats doivent veiller à ce qu'aucun enfant détenu ou emprisonné ou autrement dépourvu de sa liberté, ne soit soumis à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants104(*). En plus de la CADBE certains instruments catégoriels au niveau régional assurentla protection des personnes vulnérables, d'où la convention relative aux réfugiés. La convention relative aux réfugiés est celle de l'Organisation de l'Union Africaine (OUA), régissant les aspects propres au problème des réfugiés en Afrique. Elle a été adoptéele 10 septembre 1969 et entrée en vigueur le 20 juin 1974. Elle se définit elle-même comme « le complément régional efficace » de la convention des Nations Unies au statut des réfugiés adoptée à Genève le 28 juillet 1951105(*). En outre, l'Union Africaine a adopté lors de sa Session extraordinaire du 22 et 23 octobre 2009 tenue à Entebbe en Ouganda une Convention sur la protection et l'assistance des personnes déplacées en Afrique106(*). La Convention de Kampala entrée en vigueur le 6 décembre 2012 après ratification de 15 Etats107(*). Cet instrument juridique essentiel du droit de la personne nécessite de porter une attention particulière aux besoins des femmes et des filles déplacées qui font face aux obstacles majeurs et à des abus avant, pendant et après le déplacement108(*). La Convention recommande aux États de promouvoir la protection des personnes déplacées en Afrique, en particulier des populations vulnérables109(*). Éliminer les pratiques discriminatoires110(*), et néfastes111(*). Supprimer les obstacles que les femmes rencontrent dans l'accès à la justice et la prise des mesures par les États pour aider les femmes déplacées à échapper au cycle de la pauvreté112(*). En dehors des normes catégorielles de protection régionale, d'autres normes garantissent les droits fondamentaux des personnes vulnérables au plan national. * 95RenéDEGNI-SEGUI, op.cit., p.32. * 96 Le droit au développement économique, social et culturel ; le droit à la jouissance du patrimoine commun de l'humanité et le droit à un environnement satisfaisant. * 97 Le droit à la vie ; le droit au respect de sa vie privée ; le droit au respect de la dignité de la personne humaine ; le droit de ne pas être soumis à la torture physique ou morale, aux peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; le droit à la liberté et à la sécurité de la personne. * 98 Le Niger est parti à cette CADBE depuis 1992. * 99 Il ressort de cet article 2 de la CADBE que l' « Enfant est tout être humain âgé de moins de 18 ans » * 100 Art.12 de la CADBE. * 101 Art. 13 de la CADBE. * 102 Art. 26 de la CADBE. * 103 Art. 29 de la CADBE. * 104AlouADOULRAZAK, La protection des mineurs en conflit avec la loi au Niger, Mémoire de Master II Droit pénal et sciences criminelles, Université de Parakou, 2018, p.40. * 105Cf. recueil des traités et autres textes de droit international concernant les réfugiés, par l'office du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, Genève 1990, p.229. * 106 Cette Convention dite « Convention de Kampala », est un instrument juridiquement contraignant qui engage les États africains à prévenir les déplacements, à protéger et assister les personnes déplacées sur le continent. * 107 Le Bénin, le Burkina Faso, la République Centrafricaine, le Gabon, la Gambie, la Guinée-Bissau, le Lesotho, l'Ouganda le Niger, le Nigeria, le Sierra Leone, le Swaziland, le Tchad, le Togo et la Zambie. * 108 Art. 9 de la Convention de Kampala. * 109 Art. 5 de la Convention de Kampala. * 110 Al. 2 de l'article 9 de la Convention de Kampala. * 111LaConventiondeKampaladéfinitlespratiquesnéfastesensonarticle 4comme « tous comportements, attitudes et/ ou pratiques qui affectent négativement les droits fondamentaux des personnes, tels qu'entre autres le droit à la vie, à la santé, à la dignité, à l'intégrité mentale et physique et l'éducation » * 112 Art. 12 de la Convention de Kampala. |
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