Les affrontements et le transport maritime.par Said Abdourahim Université Nelson Mandela de Dakar - Master II en droit des activités maritimes et portuaires 2017 |
III. PARTIE DEUXIEME :IV. LA REGLEMENTATION DU TRANSPORT MARITIME DE MARCHANDISE251657216 L'évolution du cadre législatif international du transport des marchandises s'est faite de manière lente à partir d'usage et de coutume progressivement ancrés et finalement admis comme règles contraignante ; ou à partir de conventions négociées généralement sous l'égide des nations unies et signées par un nombre important d'états au fil des décennies. Ces conventions qui se sont multipliées dans plusieurs décennies concernent pour l'essentiel trois principaux domaines, l'amélioration de la sécurité de navigation et de l'environnement maritime, la réglementation de la protection des travailleurs marins ou les gens de mers et enfin la réglementation des rapports juridiques entre le transporteur maritime et son cocontractant. Ainsi donc dans nos développements nous allons évoquer dans un premier temps, les différents textes applicables au contrat de transport de marchandises (chapitre I), et dans une seconde partie le contentieux du contrat de transport de marchandises (chapitre II). VIII. CHAPITRE1 : LES DIFFERENTS TEXTES APPLICABLES AU CONTRAT DE TRANSPORT DE MARCHANDISESDans cette partie nous allons étudier en premier lieu les textes nationaux et internationaux (section 1), en deuxième lieu les obligations des parties au contrat de transport de marchandise (section2) et enfin les fondements de la responsabilité du transporteur (section 3). Section1 : les textes nationaux et internationauxDès le XIX ème siècle avec l'essor du libre échangisme et l'intensification du commerce international, les grandes nations maritimes vont rapidement percevoir la nécessité d`appliquer un droit maritime uniforme à l'échelle internationale qui permettrait de faciliter les relations économiques et éviter les conflits inutiles de lois. De là donc débute le phénomène d'internationalisation du droit maritime. La production des normes en la matière va être ainsi possible grâce à la création d'instances, d'organismes qui seront chargés spécialement de promouvoir l'unification internationale du droit maritime en général et du droit maritime commercial en particulier. C'est ainsi que fut créée en France comme textes internationaux, la convention de Bruxelles de 192431(*) et comme loi interne , la loi du 18 juin 1966 et son décret d'application du décembre 1966 et au Sénégal on a comme textes internationaux la convention de Hambourg née de la convention des nations unies du 31 mars 1978 portant sur la transport de marchandise par mer ratifiée par de nombreux états africains dont le Sénégal ce qui fera l'objet de notre travail, vu qu'on est en train d'étudier la réglementation du transport maritime le cas du Sénégal et qui a comme textes internes la loi n°2002-22 du 16 aout 2002 portant code de la marine marchande. Parallèlement à cette internationalisation, s'est développé dans certaines régions du monde un mouvement de communautarisation du droit maritime. C'est le cas en Afrique avec la charte d'Abidjan sur les transports maritimes et les différentes résolutions de la CMEAOC (conférence ministérielle des états de l'Afrique de l'ouest) et d'autre part, la réalisation en Afrique centrale en 1994 du premier code communautaire de la marine marchande applicable aux états de l'UDEAC (union douanière des états de l'Afrique centrale). Jugeant que les précédentes conventions ne faisaient pas l'unanimité mais aussi pour des besoins de célérité dans les transactions, la CNUDCI32(*) adoptât les règles de Rotterdam qui apportent une innovation quant au fond et à la forme, il procédera à une extension des documents de transport à travers la dématérialisation des documents de transport maritime. Avec la règle de ROTTERDAM33(*), arrive la reconnaissance des documents électroniques. « Et grâce à l`internet, le commerce va aller plus vite et mieux ». La convention a retenu, en effet, que les documents de transport doivent être strictement réglementés, ce qui est fait à travers son chapitre 3et8. Cette option n'a jamais été fondamentalement remise en cause par une frange de négociants de cette convention, parce que le connaissement ne sera pas une condition sine qua non d'application de la convention, ensuite parce que les documents électroniques sont devenus incontournables dans tout mode de transport. Il faut noter que remplacer les documents écrits par des documents électroniques n'a pas été une tâche facile pour les règles de ROTTERDAM. Pour cela il reconnait l'existence de documents « support papier » et son mode de mouvement, mais règlementant également l'émission et l'échange des documents de transport électroniques ainsi que la conversion des documents « papier en électronique » et vice versa. Ainsi donc qu'en est-il de la substitution d'un document de transport négociable ou d'un document électronique de transport non négociable. Seules les parties au contrat ont vocation à décider de la forme du contrat les liants. Comme nous pouvons l'observer, les règles de ROTTERDAM34(*) établissent un système que certains n'hésitent pas à qualifier de « prêt à portée contractuelle ». La liberté contractuelle est de mise. Or, à l'égard de l'insertion des documents électroniques, les règles permettrons de franchir une nouvelle étape. Et quand à la règle de fond il se rapporte plus ou moins à la convention de Hambourg concernant les obligations et la responsabilité du transporteur ainsi que les cas où il verra sa responsabilité écarté. Ainsi donc nous allons voir en premier temps son champ d'application (paragraphe I), et en deuxième temps les documents de transport (paragraphe II) Paragraphe I : Son champ d'applicationL'article 2 des règles de Hambourg définit le champ d'application de la convention dont on peut le regrouper en deux : -Un critère stable et constant : le caractère international du transport cela veut dire qu'il doit s'effectuer entre deux états différents et que l'un des états est un état contractant. -Un critère variable : Le port de chargement ou de déchargement prévu dans le contrat est situé dans un état contractant. Soit le port à option de déchargement mentionné dans le contrat devient le port effectif de déchargement ; ce port doit être situé dans un état contractant. Soit le connaissement ou tous autres documents similaires faisant preuve du contrat et émis dans un état contractant. Et ceux quel que soit la nationalité du navire, du transporteur, du transporteur substitué, du chargeur, du destinataire ou de toutes autre personne intéressée. C'est ce qui est prévu aussi dans l'article 442 du code de la marine marchande. Cette convention apporte quelques innovations qui sont au nombre de trois : Elles s'appliquent pour les marchandises transportées en pontée Il en est de même pour les animaux vivants Et enfin la réglementation du retard dans l'expédition Il faut noter aussi que la convention de Hambourg ne prend pas en compte dans son champ d'application l'affrètement, mais s'agissant des règles Hambourg lorsqu'un connaissement est émis en vertu d'un contrat d'affrètement, ce connaissement sera soumis à la règle de Hambourg35(*) dans les relations entre le transporteur et le porteur du connaissement art 2 paragraphe 3. A- Droit applicableLa logique juridique du contrat de transport de marchandises (marchandises diverses le plus souvent aujourd'hui regroupées en conteneur) diffère assez profondément de celle du contrat d'affrètement au voyage d'un navire. Il en est ainsi pour plusieurs raisons. Ici l'affréteur reçoit la disposition d'un navire ; là un chargeur remet une marchandise pour son déplacement. Ici le contenu du contrat est le produit de la volonté totalement libre des contractants ; là il est pour l'essentiel la reprise de règles légales d'application impérative. Ici, une collaboration nécessaire qui fait du capitaine un préposé aux ordres du fréteur et de l'affréteur au voyage, doit s'établir entre les contractants ; là chargeur et transporteur pourraient presque totalement s'ignorer. Ici le navire est au premier plan ; là il disparait, pas totalement cependant parce qu'il est le moyen d'exécution mais non l'objet du contrat. Et pourtant, on doit se demander si la nature juridique des deux contrats est vraiment différente : dans les deux cas, ne s'agit-il pas d'une prestation de services : une personne (fréteur ou transporteur) s'oblige envers une autre (affréteur ou chargeur) à accomplir une prestation (mise à disposition d'un navire pour une expédition maritime et déplacement d'une chose). Ce n'est d'ailleurs que très progressivement et de façon tardive, c'est-à-dire assez récemment, que les deux contrats se sont différenciés, à la suite de la réaction des chargeurs contre les stipulations unilatérales et injustes que leur imposaient les armateurs. Parti des Etats Unis d'Amérique, l'ampleur du phénomène conduisit à l'adoption d'une convention internationale destinée à régir impérativement la relation juridique née d'un transport sous connaissement. L'existence du transport sous connaissement par navire affrété pose de délicates questions sur lesquelles nous reviendrons ci-dessous. Par ailleurs, les textes dont l'application s'impose au juge français ont la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles relatives au connaissement et les deux Protocoles qui l'ont modifiée, celui de 1968 et celui de 1979, ainsi que la loi du 18 juin 1966 et son décret d'application du 31 décembre 1966. Il faut d'ailleurs constater que toutes les nations maritimes ont, chacune, leur propre loi interne. La hiérarchie constitutionnelle des lois dispose que les conventions internationales l'emportent sur les lois internes. La règle qui fait problème quant à sa nature juridique, est exprimée positivement, par une disposition très particulière, l'article 16 de la loi précitée : « [elle] est applicable aux transports effectués au départ ou à destination d'un port français, qui ne sont pas soumis à une convention internationale à laquelle la France est partie... » Elle a été également rendue applicable, en raison de son caractère subsidiaire, au litige qui, par suite de la défaillance de la loi étrangère, ne trouve pas la règle à appliquer. Aussi, l'existence de règles particulières destinés à régir un contrat international, c'est-à-dire d'un droit matériel dont l'application est réservée à une situation juridique présentant un conflit de lois, suscite un débat parmi les experts du droit international privé. L'alternative est la suivante : le droit matériel international conventionnel est-il directement applicable ou, au contraire, n'est-il rendu applicable que par la loi interne désignée par la règle de conflit de lois ? On sait en effet qu'il existe une convention internationale européenne, signée à Rome en 1980 et relative à la loi applicable aux obligations contractuelles. La position du droit français n'est pas des plus claires sur ce point. Du moins peut-on citer deux arrêts rendus à très peu de temps d'intervalle par la Cour d'appel de Paris faisant état d'une doctrine contraire : l'arrêt navire Lucy36(*) a mis en oeuvre la règle de conflit de lois tandis que l'arrêt navire Aton a directement appliqué la convention internationale et de la loi française. L'application cumulative de la convention internationale et de la loi française est même rendue possible dans une situation particulière qui, toutefois, ne cesse pas d'être relativement problématique. Au final, on doit considérer que ce n'est que dans l'hypothèse où les parties contractantes, dans la matière dont il dispose librement, auraient clairement renoncé à ce que leur litige soir tranché en application du droit étranger applicable, que le juge français doit s'abstenir de toute recherche de ce droit. Qui plus est, le caractère impératif de la convention est encore affirmé alors même que, non applicable à raison de ses propres dispositions, son application au contrat particulier résulte de la clause Paramount dont l'objet est de rendre applicable ladite convention internationale. Ratifiée aujourd'hui par vingt-huit Etats, cette convention internationale ne serait que très peu appliquée si le stratagème qu'est la clause Paramount n'en accroissait pas son audience. S'il est, en effet, acquis en droit français que les Règles de Hambourg ne sont pas d'application immédiate par le juge français, ce contre quoi certains juges semblent s'insurger, elles sont rendues applicables par ladite clause. Toute difficulté n'en est pas pour autant écartée et l'on constate qu'elle est de nature à poser de délicates questions relatives aux conditions de leur application. On s'est, notamment, demandé si les Règles de Hambourg ne pourraient pas être déclarées indirectement applicables en tant que loi de police étrangère. En effet, la Convention de Rome en son article 7.137(*) réserve l'application de la loi de police étrangère dans la mesure où le contrat présente des liens étroits avec ledit Etat étranger. Certes, aucune obligation ne pèse véritablement sur le juge saisi du litige qui, compte tenu des termes mêmes de la Convention, dispose d'une certaine marge de manoeuvre puisqu'il lui appartient de tenir compte de sa nature, de son objet et des conséquences qui découleraient de son application ou de son inapplication . Une autre difficulté résultera de ce que le connaissement n'a pas été signé par le chargeur. Mais la question la plus délicate résultera de la rédaction même de la clause Paramount du connaissement. Au fond, en outre, ces Règles présentent, selon nous, une assez grande équivoque : avoir laissé croire qu'elles ont plus favorables aux chargeurs que ne l'étaient les Règles de La Haye-Visby. Nous serions plutôt persuadés du contraire. Autrement dit, l'arbre que fût la disparition du cas excepté de responsabilité liée à la faute nautique du capitaine a caché la forêt qu'est la substitution d'une présomption de responsabilité et notamment le fait que désormais le transporteur maritime peut s'affranchir de la responsabilité qui pesait nécessairement sur lui lorsque le dommage résultait d'un évènement de cause inconnue. La pluralité de conventions internationales de droit matériel dédiées au transport maritime de marchandises diverses ou de conteneurs rend très délicate la solution du conflit de lois en matière internationale car elle conduit à des conflits de conventions internationales alors même que, dans le même temps, existe une convention internationale sur la loi applicable aux obligations contractuelles. La situation actuelle est loin d'être satisfaisante. La CNUDCI38(*) en a pris acte. Elle a mis en chantier la rédaction d'une nouvelle convention internationale extrêmement ambitieuse puisqu'elle s'appliquera probablement également au transport multimodal contenant une phase maritime. En discussion depuis environ six ans, la convention, si elle voit le jour, est naturellement appelée à se substituer aux deux systèmes existant aujourd'hui. Ce projet, qui contient des dispositions très discutables et qui, au fond, manque totalement d'une doctrine juridique essentielle, présente malgré tout le mérite de s'intéresser à de nouvelles formes d'exploitation des navires et de transport de marchandises. Elles apparaissent à l'occasion de la question capitale qu'est son domaine d'application. Dans cet ordre d'ide, il met au jour l'existence du contrat de tonnage et de transport non régulier dont le développement ne cessera de se faire et qui, en effet, méritent d'être distingués du pur contrat de tramping à la cueillette. Pour finir, le caractère impératif des règles applicables fait de l'étendue du contrat de transport maritime une question capitale. Le document de transport appelé connaissement, du fait de sa très grande spécificité, est le deuxième élément en importance. Les obligations pesant sur chacun des contractants sont l'épine dorsale du régime juridique du transport. La responsabilité du transporteur et le contentieux en constituent les derniers aspects. * 31Convention internationale pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, signée à Bruxelles, le 25 août 1924 * 32A été créée par l'Assemblée générale des Nations unies par sa résolution 22051 (XXI session) du 7 décembre 1966 pour promouvoir l'harmonisation et l'unification progressives du droit commercial international. * 33 Adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU le 11 décembre 2008, "les règles de Rotterdam" établissent un régime juridique uniforme et moderne régissant les droits et obligations des chargeurs, transporteurs et destinataires en vertu d'un contrat de transport de porte à porte comprenant une étape maritime internationale. * 34Le projet des règles dit de Rotterdam a été examiné par une comite juridique internationale des Nations Unies le 20 octobre 2008. La version définitive du projet de convention a été arrêtée lors de la 21° session du groupe de travail III (droit des transports) de la CNUDCI à Vienne le 25 janvier 2009. * 35Les Règles de Hambourg (dites aussi Convention des Nations Unies sur le transport de marchandises par mer) sont entrées en vigueur en novembre 1992. Ces règles établissent un régime juridique
uniforme applicable
aux droits et obligations des chargeurs, transporteurs * 36Dans l'arrêt navire Lucy rendu par la Cour d'Appel de Paris le 2 décembre 1998, il s'agissait d'un contrat de transport qui a été conclu en 1994 au Kenya, pays du port de départ et de l'émission du connaissement, et s'est exécuté en Italie, pays de livraison. * 37Conv. ROME 19 juin 1980 sur la Loi applicable art.7.1 P4/6 * 38La Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), créée par la résolution 2205 (XXI) de l'Assembléegénérale des Nations Unies en date du 17 décembre1966, joue un rôle important dans la mise en place de ce cadre conformément a` son mandat qui est d'encourager l'harmonisation et la modernisation progressives du droit commercial international |
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