Les conséquences du principe que de responsabilité pénale des personnes morales en droit camerounais.par Ivan De Nguimbous Tjat Limbang Université de Yaoundé II - Soa - Master en droit privé 2018 |
B. Les modalités d'application des sanctions pénales à la personne morale66. La détermination des modalités d'application des sanctions pénales aux personnes morales, marque un tournant décisif. Cette détermination a redonné à l'obligation pesant sur les personnes morales de subir la répression toute sa splendeur. À ce sujet, le législateur fixe les modalités d'application des sanctions patrimoniales (1) et celles extrapatrimoniales(2). 1- Les modalités d'application des sanctions patrimoniales 67. Dans cette catégorie, l'on classe les sanctions qui touchent directement le patrimoine et donc le portefeuille de la personne morale à savoir l'amende, les confiscations, et mêmes celles qui retentissent indirectement sur le patrimoine de la personne morales comme les sanctions touchant l'activité de la personne morale. 68. Pour ce qui est de l'amende, le législateur de 2016 indique que le taux maximum de celle appliquée à la personne morale doit être égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques189(*). Bien plus, lorsque la personne morale est coupable d'un crime pour lequel seul la peine d'emprisonnement est prévue, le législateur préconise que le juge lui applique une amende dont le montant oscille entre un million (1 000 000) à cinq cents million (500 000 000) de francs190(*). Ces différentes amendes semblent dérisoires si l'on considère la taille de certaines personnes morales, mais elles peuvent également être lourdespour d'autre191(*).Le juge devra donc nécessairement, dans le choix du montant de l'amende applicable aux personnes morales, jouer avec les taux plancher et plafond, en fonction des personnes morales, soit pour éviter que la peine d'amende ne soit trop légère, soit pour éviter qu'elle ne pousse la personne morale à la cessation de paiement.Mais le critère principal devrait rester le degré de gravité de l'infraction. 69. Pour ce qui est des confiscations, l'article 35 du Code pénal camerounais prévoit que cette sanction s'applique sur tous les biens meubles ou immeubles appartenant au condamné, lesquels biens sont saisis lorsque ceux-ci ont servi d'instrument pour commettre l'infraction ou qu'ils en sont le produit. Cette sanction est facile à mettre en oeuvre lorsque le « corpus delicti » se trouve au Cameroun. La personne morale peut n'être que propriétaire apparent des biens confisqués ayant servis à la commission de l'infraction. Mais si les biens ont été volés au véritable propriétaire, on envisagera bien que ces derniers lui soient restitués. 70. D'autres sanctions visant l'activité de la personne morale et retentissant sur son patrimoine sont également appliquées suivant des modalités particulières. Il s'agira donc pour les instances compétentes de faire appliquer les peines telle la fermeture d'établissement, ou de succursales ayant servi à la commission des faits incriminés, le placement sous assistance judiciaire et l'interdiction de s'investir dans une activité précise pour une durée déterminée. Pour être appliqué la fermeture d'établissement ne dois pas excéder cinq (05) ans, pendant lesquels la personne morale sera interdite d'exercer l'activité à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise192(*). Le placement sous assistance judiciaire nécessite pour son application la désignation d'un mandataire de justice dont la mission de contrôle et la durée seront précisée par la juridiction de jugement193(*). Le mandataire doit rendre compte au parquet de façon régulière de l'accomplissement de sa mission194(*), cette mission ne pouvant porter que sur l'activité à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise. Le parquet compétent saisit à la fin de la mission du mandataire et sur la base du compte rendu de celui-ci la juridiction qui a prononcé le placement sous surveillance judiciaire, laquelle relève la personne morale de ladite mesure195(*). L'application de la peine d'interdiction pour la personne morale de s'investir directement ou indirectement porte sur l'une ou plusieurs activités prévues par son objet social. Il s'agit donc de toucher la personne dans sa raison d'être. L'interdiction peut devenir perpétuelle en cas de récidive196(*). Le législateur a aussi envisagé l'application des sanctions extra patrimoniales. 2- Les modalités d'application des sanctions extrapatrimoniales 71. Les sanctions extrapatrimoniales, sont celles qui ne touchent pas le patrimoine. Elles visent en partie l'existence de la personne morale, mais aussi son image de marque. S'agissant l'existence de la personne morale, elle est atteinte par la peine de dissolution. Son application consiste en « la mise à mort de la personne morale »197(*). Concrètement, pour appliquer la peine de dissolution, la décision la prononçant doit comporter le renvoi de celle-ci devant la juridiction compétente pour procéder à la liquidation à la diligence de la personne morale198(*). Les règles applicables à la dissolution dépendront de la nature de la morale et de sa situation financière. Ainsi dans le cas des sociétés commerciales in bonis, il s'agira d'appliquer les articles 266 et suivants, 902 et suivants de l'AUSCGIE. 72. S'agissant de l'image de marque de la personne morale, elle est atteinte par la publication de la décision sanctionnant la personne la sanctionnant. Cette sanction est appliquée pour une durée de deux (02) mois au maximum en cas de crime ou délit, et de quinze (15) jours au maximum en cas de contravention. Cette publication peut aussi se faire par voie de presse au frais du condamné et peut se limiter au dispositif de la décision. Et tous commentaires objectifs de la décision sont libres199(*). * 189 Article 21-1 CP alinéa 2 code pénale de 2016 « Le maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques ». * 190 Article 25-1 alinéa 3 code pénal de 2016 « Lorsqu'une personne morale est coupable d'un crime pour lequel seule une peine d'emprisonnement est prévue, l'amende encourue est d'un million (1 000 000) à cinq cents millions (500 000 000) de franc ». * 191SOH FOGNO (D. R.) « La sanction pénale des personnes morales en droit camerounais » op.cit. p.79 * 192 Article 25-3 code pénal de 2016. * 193 Article 34-1 alinéa 1 CP« la peine de placement sous surveillance judiciaire est applicable aux personnes morales pénalement responsable et consiste dans la désignation d'un mandataire de justice dont la mission de contrôle et la durée sont précisées par la juridiction de jugement ». * 194 Article 34-1 alinéa 2 CP. * 195 Article 34-1 alinéa 4 CP. * 196 Voir Article 36 alinéa 3 et 4 CP. * 197SOH FOGNO (D. R.) « La sanction pénale des personnes morales en droit camerounais »,op.cit. p. 60. * 198 Article 25-2 alinéa 3 du code pénal de 2016. * 199 Article 33 alinéa 1, 2, 3, 4, 5, 6 CP. |
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