Licence Professionnelle Gestion des accompagnements des
Parcours Professionnels et Personnels
Dynamiques identitaires et enjeux de
bifurcation suite à un licenciement économique : Le cas
de personnes accompagnées dans le cadre d'un Contrat de
Sécurisation Professionnelle.
Sous la direction de Nahima LAIEB, Tutrice
universitaire
Et de Anne BERTHON, Tutrice professionnelle
Aude Le Garrec
N° d'étudiant : 11702933 Année
universitaire 2016/2017
Sommaire
Remerciements
Introduction...............................................................................................
1
Première partie
1. Un contexte socio-économique particulier
...............................4
2. ID
Formation..................................................................
5
3. Ma mission dans le cadre du Contrat de
sécurisation
professionnelle...............................................................
10
4. Observations, constats et
questionnements .............................. 14
Deuxième partie
1. Au coeur du métier de Conseiller en
Insertion Professionnelle...... 18
2. Au plus près des accompagnés
............................................. 21
Troisième partie
1. Dispositif
méthologique ......................................................
32
2. Analyse des données et
interprétation .................................... 37
3. Discussion et perspectives
................................................... 50
Conclusion
...........................................................................................
52
Bibliographie.........................................................................................
54
Tables des annexes
.................................................................................
56
Annexes
...............................................................................................
57
Tables des
matières.................................................................................
91
Remerciements
Ce mémoire est la concrétisation d'une
année intense que ce soit au niveau émotionnel ou des
enseignements.
Je remercie dans un premier temps Mr Bruno Sergent, Conseiller
en insertion professionnelle sans qui je n'aurais peut-être pas eu
connaissance de l'existence de la licence GA 3P, gestion des
accompagnements des parcours professionnels et personnels.
Dans un deuxième temps, je tiens à remercier ma
tutrice professionnelle pour ses précieux conseils, sa patience, le
temps qu'elle a bien voulu m'accorder pour m'accompagner lors de ma
professionnalisation. Un énorme merci pour les conseils concernant les
dossiers et l'entretien d'entrée en licence, qui m'ont permis de prendre
confiance et sans lesquels, cette aventure n'aurait peut être pas
existée. Je la remercie aussi pour ses explications à toute heure
du vocabulaire si spécifique rencontré lors de mes
différentes lectures. Un immense merci aussi à Céline
Bayens, Anne Ménard, Hélène Dutriaux et Alexandra Jacquin,
conseillères en insertion professionnelle pour leur participation sans
failleet leur aide précieuse pendant mon année de stage.
Je remercie aussi énormément NahimaLaieb, ma
tutrice universitaire pour son aide, son soutien lors de mes moments de doute
et de stress, sa réactivité à mes nombreux mails. Merci
pour le temps que vous m'avez accordé, pour vos enseignements
précieux ainsi que pour les pistes de lectures riches et nombreuses.
Je tiens aussi à remercier toute l'équipe
pédagogique : les enseignants pour leurs cours enrichissants,
Virginie Labiau aussi pour sa disponibilité permanente.
Je remercie aussi Nacira Ait-Abdesselam de m'avoir fait
confiance lors de mon entretien de sélection.
Je n'oublie pas touteset tous mes collègues de
promotion, en particulier Florence Malfaisan, Nora Khiter, Dalila Tahri, et
Stéphanie Drieux avec lesquelles, j'ai partagé joie, stress,
rires et larmes. Nous nous sommes toujours soutenues tout au long de cette
précieuse année qui n'aurait pas été pareille sans
elles.
Je remercie aussi la patience et le soutien de mon mari
Raphaël qui m'a beaucoup aidée tout au long de cette année,
et je remercie aussi mes enfants, Valentine et Arthuro, qui m'ont de nombreuses
fois répété à quel point ils étaient fiers
de leur maman. Vers une reconversion
professionnelle
Après une dizaine d'années dans le commerce,
j'ai travaillé pendant 9 années dans l'entreprise familiale dans
le secteur de la pêche, créée par mon arrière
grand-père.
C'est ensuite mon grand-père qui lui succèdera
puis mon père et enfin mon frère. Je souhaitais depuis longtemps
intégrer l'entreprise familiale. Titulaire d'un BTS secrétariat,
j'ai eu donc l'opportunité, suite à un départ en retraite
d'une des secrétaires, d'exercer le métier d'assistante
d'exploitation au sein de la société familiale. Je gérais
alors les stocks de plusieurs entrepôts frigorifiques.
Je me suis sentie dès les premières semaines en
tension entre la Direction, représentée par ma famille et les
autres salariés. Très vite, j'ai compris que je
représentais une menace pour eux, ce que je pouvais comprendre. Je
n'arrivais pas à les convaincre de ma sincérité et de ma
volonté de travailler avec eux tout simplement. Les années
passaient et la tension identitaire que je ressentais était de plus en
plus insupportable. L'image que les salariés avaient de moi
n'était absolument pas en adéquation avec mon identité
propre.
Progressivement, je réfléchissais à la
manière de me retrouver et de m'épanouir professionnellement.
Mon grand regretétait d'avoir arrêté mes
études...
Après de longues discussions en famille et un bilan de
compétence approfondi, je décidais de quitter l'entreprise
familiale. Décision difficile à prendre au vu du risque financier
que cela impliquait. Ma volonté d'accomplir un projet professionnel dans
lequel je me retrouvais l'emporta. Libérée de ces tensions
identitaires, je pouvais me concentrer sur la concrétisation de mon
projet professionnel dans le domaine de l'insertion professionnelle.
Début janvier 2016, je signais une rupture
conventionnelle avec l'entreprise familiale et me voilà prête pour
un nouveau challenge. Je découvrais concrètement ce que
représentait la reconversion professionnelle.
C'est un conseiller d'ACTIV EMPLOI qui m'a parlé de la
licence GA3P à l'Université de Lille 1. Il m'a conseillé
d'accomplir un stage chez ID FORMATION à Boulogne sur mer afin de
confirmer mon choix d'orientation, ce que j'ai fait en avril 2016.
Cette immersion m'a énormément plu, c'est
pourquoi j'ai accepté avec enthousiasme lorsque la structure m'a
proposé d'accomplir le stage de licence en son sein. Je me suis rendu
compte de la variété et de la richesse de ce métier.
Cette licence me permettrait d'obtenir toutes les clés
pour accompagner un public en difficulté que ce soient des personnes en
période de transition professionnelle ou d'autres dans l'obligation pour
une raison ou une autre de changer de métier (maladie, handicap,
licenciement économique...). La notion de reconversion professionnelle
m'interpelle particulièrement car elle fait écho à mon
propre parcours. Bien qu'à l'inverse du public que je vais accompagner
lors de ma mission, ce fut mon propre choix, mûrement
réfléchi. J'ai eu le temps d'intégrer l'idée de
cette reconversion, de penser longuement à mon futur projet.
Dans mon cas, sans en avoir réellement conscience,
j'avais besoin de ce changement car mon identité passée, en tant
que salariée et membre familial dans l'entreprise m'oppressait. Cette
rupture m'a permis de retrouver mon identité en m'épanouissant
professionnellement.
Ces personnes ont été mises devant le fait
accompli sans avoir le recul que j'ai pu prendre, temps nécessaire pour
assimiler la situation. C'est cette résonnance avec mon propre parcours
et la rencontre avec les personnes à accompagnerqui m'ont permis
d'élaborer l'objet demon futur mémoire.
Une négociation identitaire
souhaitée
Dans le cadre de mon stage chez ID Formation, J'ai pu
participer à des activités diverses : ateliers collectifs de
stratégie de recherche d'emploi, entretiens individuels de demandeurs
d'emploi...J'intervenais accompagnée ou seule : il était
difficile pour moi de trouver ma place car souvent les conseillers me
demandaient de cacher mon statut de stagiaire au public accueilli. Je n'avais
normalement pas l'autorisation de procéder aux tâches que l'on me
confiait en tant que simple stagiaire.
Au bout de quelques temps, j'ai fait part de ce malaise
à ma tutrice professionnelle en lui révélant mon mal
être de ne pas être reconnue avec mon véritable statut. Elle
l'a très bien entendu, et me voilà avec le nouveau titre de
stagiaire consultante.
Suite à cette discussion, j'ai négocié ma
mission que je détaillerai par la suite.
La cellule d'appui à la Sécurisation
Professionnelle : un outil pour les reconversions professionnelles
« contraintes »
Dans un premier temps, j'ai découvert la Cellule
d'appui à la Sécurisation Professionnelle (CASP) concernant 260
personnes susceptibles d'être licenciées suite à un plan
social au sein de leur usine située à Boulogne sur mer. Ce
dispositif n'est pas obligatoire mais juste proposé aux salariés
faisant partie du plan social. Ces personnes pouvaient y venir librement sur
leur temps de travail avant et après avoir reçu leur lettre de
licenciement. Je constatais rapidement que tous n'y venaient pas.
La CASP est un lieu d'échange, d'écoute et de
conseils pour ces personnes. Grâce à ce dispositif, les
salariés pouvaient s'informer sur les différentes
démarches et leurs droits, trouver des réponses à
certaines problématiques (adhésion au CSP contrat de
sécurisation professionnelle, formation et retraite) et préparer
leur nouveau projet professionnel. Finalement, parmi ces 260 personnes
concernées par le plan social, 70 ont été
licenciées. Ces personnes ont toutes accepté le Contrat de
Sécurisation Professionnelle. Contrat qui leur permettrait de
bénéficier pendant une année du maintien de leur salaire
et d'un suivi personnalisé dans leur recherche d'emploi ou de
reconversion professionnelle.
Parallèlement, j'ai pu accompagner des personnes
contraintes de se reconvertir suite à un problème de
santé.
Après mûre réflexion, je décidais
de me concentrer sur le suivi des personnes licenciées
économiquement de la même usine située à Boulogne
sur mer.
Ce sujet me touchant particulièrement, je demandais
à accompagner ces personnes dans le cadre de ma mission de stage. Ma
tutrice a validé ma demande. Concrètement, je recevrais tous les
10 jours en entretien individuel une dizaine de personnes
bénéficiaires du Contrat de Sécurisation Professionnelle.
Je les accompagnerai lors de cette période de transition.
Dans une première partie, j'exposerai le contexte
économique où se situe mon lieu de stage et décrirai la
structure dans laquelle je suis. Puis je décrirai ma mission et
définirai le dispositif dans lequel j'évolue. Je continuerai sur
mes observations, constats et questionnements. Il convient dans une
deuxième partie, à l'aune d'un cadre théorique d'approcher
le métier de conseiller en insertion ainsi que le statut
d'accompagnés. Je détaillerai ensuite la méthodologie
à laquelle j'ai eu recours pour mes investigations de terrain et enfin
je procèderai à l'analyse de mes entretiens qui me permettra
d'apporter des éléments de réponse à ma question de
recherche.
Première Partie
1. Un contexte socio-économique
particulier
Je pense nécessaire de commencer par définir le
contexte socio-économique du territoire où se situe ID Formation.
En effet, il sera alors plus aisé de comprendre la situation
compliquée que vont rencontrer les personnes que je vais accompagner.
Le pays Boulonnais est divisé en 3
intercommunalités pour un total de 74 communes et 162 043 habitants
soit une densité de population par km² de 255.7hab/km² ce qui
est inférieur à la moyenne régionale. La tendance est
à l'exode rural avec un accroissement démographique pour les
zones rurales et périurbaines au détriment de Boulogne-sur-Mer et
des communes avoisinantes. Le territoire boulonnais apparait en
difficulté dans de nombreux domaines par rapport à la moyenne
régionale. Le coeur urbain (Boulogne-sur-Mer, Outreau, Le Portel,
Saint-Martin Les Boulogne) et les zones rurales concentrent les plus grandes
difficultés. L'éducation et les revenus sont les domaines les
plus problématiques du territoire.
L'actualité difficile du marché du travail
impacte fortement le pays boulonnais, la situation étant plus
défavorable sur la moyenne régionale. Le taux de chômage
est de 14,1% contre 12,8% en région et les conditions d'emploi sont
particulièrement moins avantageuses que pour le reste de la
Région avec une moindre part de CDI à temps complet et davantage
d'emplois à temps partiel.
La zone de CAPECURE où est situé ID formation
est particulièrement touchée : les usines ferment
régulièrement. Ainsi, une usine de production d'aliments pour
animaux, que nous nommerons « S » vient de procéder
à un plan social de 260 personnes dont 85 seront réellement
licenciées. Nous en parlerons un peu plus loin puisque c'est ID
formation qui les accompagnera.
Outre ces nombreux désavantages, le pays boulonnais,
plus particulièrement son coeur urbain, abrite un nombre important
d'habitants allocataires de minima sociaux.
Ce sont les grandes agglomérations qui concentrent
l'ensemble des offres de formations et le plus d'emplois et de services du
territoire. Le territoire se caractérise par une population relativement
plus jeune que la moyenne nationale. Quelle que soit l'échelle
géographique observée, les employés et les ouvriers sont
les deux catégories socioprofessionnelles les plus
représentées sur le territoire français. Les ouvriers sont
surreprésentés sur le territoire (+ 6,7 points qu'en France
métropolitaine) alors qu'à l'inverse, la part des professions
intellectuelles supérieures est bien plus faible qu'au niveau national
(10,8 % contre 16,8 %). D'ailleurs, la majorité des personnes
concernées par le plan social cité ci-dessus font partie de la
catégorie des ouvriers. J'expliquerai pourquoi un peu plus loin dans le
texte.
A fin décembre 2014, deux tiers des demandeurs d'emploi
ont un niveau de formation inférieur au niveau Bac. Seulement 5,7 % des
DEFM (demandeurs d'emploi en fin de mois) ont un niveau supérieur
à Bac + 2 (contre 8,5 % à l'échelle régionale).
Les cadres représentent 2,5 % de la demande d'emploi
contre 3,8 % à l'échelle régionale. La part des DELD
(demandeur d'emploi longue durée) dans la demande d'emploi dans le
Boulonnais est comparable à la moyenne régionale (48,0 % contre
48,1 %). Sur les 7 637 DELD, 57,2 % présentent une durée
d'inscription de plus de 24 mois. Dans cette catégorie, les seniors de
50 ans et plus sont les plus touchés, avec 68,2 % d'entre eux qui sont
inscrits depuis plus de 24 mois.
L'enquête annuelle «Besoins en Main-d'oeuvre»
est, depuis plusieurs années, un élément essentiel de
connaissance du marché du travail. Chaque année, Pôle
emploi adresse un questionnaire à plus de 1,6 million
d'établissements afin de connaître leurs besoins en recrutement
par secteur d'activité et par bassin d'emploi. L'enquête BMO 2015
recense 3 205 projets de recrutements pour le territoire contre 2 548 en 2014
soit une hausse de près de 20%. Cette prévision optimiste est
encourageante et témoigne d'une embellie à venir perçue
par les recruteurs. Les intentions d'embauche revêtent cependant un
caractère saisonnier important (32.9%) plus marqué que sur la
région (25.9%). 1(*)
2. Id Formation
2.1 Historique
Je vais maintenant vous présenter la structure
proprement dite. Innovation Développement FORMATION est une
société Coopérative Ouvrière de Production :
une SCOP. Après en avoir évoqué l'historique, je
tâcherai de vous la décrire.
La SCOP a été créée en
Décembre 1994 par 34 associés salariés et 10
associés extérieurs suite au dépôt de bilan de
l'association SIGMA FORMATION. Le siège est situé au 68 rue
Jordens à Lille. Un accord de participation est signé en avril
1996. En Décembre 1996, Eric FAIDHERBE est nommé Directeur
Général. En juin 1998, un accord d'intéressement est
signé. En 1999, une action d'Engagement de Développement de la
formation (EDDF) est mise en oeuvre et conclue avec les Directions
Départementales du Travail, de l'Emploi et de la Formation
professionnelle (DDTEFP) qui veillent au respect du droit du travail dans les
entreprises.
En 1999, le siège social est transféré au
113 rue de Lannoy suite à l'acquisition des locaux. L'inauguration du
siège s'est faite le 10 avril 2000. La même année, en juin,
Eric FAIDHERBE est nommé nouveau Président du Conseil
d'administration.
En 2001, une charte de qualité est mise en place avec
le Conseil Régional Nord Pas de Calais (actuellement des Hauts de
France). Progressivement, ID FORMATION s'implante à Hazebrouck, Calais,
Boulogne-sur-Mer, St Omer, Denain, Roubaix, Grande Synthe, Noyelles Godaux...
Depuis 2009, la structure diversifie des activités
entreprises hors de la Région des Hauts de France en Ile De France,
Rhône Alpes, Centre, Picardie, Champagne Ardennes... En 2016, ID
FORMATION possède 49 sites sur l'ensemble du territoire français.
2.2 Type de structure et son
fonctionnement
Une SCOP, juridiquement Société
coopérative et participative, est une entreprise commerciale de type SA
ou SARL dont les salariés sont associés majoritaires au capital.
ID Formation est de type SA Société Anonyme.
Elle repose sur le principe coopératif de
démocratie économique et de répartition équitable
des résultats. Elle est à statut juridique
spécifique : des principes coopératifs, un management
participatif, le partage des richesses produites.
L'objectif d'une SCOP est de permettre à ses
salariés d'y exercer ensemble leur métier, de développer
leur outil de travail et leur savoir-faire en partageant les risques, les
profits, les décisions. ID est une société commerciale de
type SA qui a pour objet social toute activité entrant dans le champ de
la Formation Professionnelle Continue.
La responsabilité financière des associés
est limitée au montant de leurs apports. ID Formation dépend de
la Convention Collective Nationale des Organismes de formation. Le capital est
variable. La pérennité financière de l'entreprise est
assurée par la constitution de réserves impartageables.
Les grandes décisions sont prises selon un principe
démocratique : tout salarié associé détient une
voix lors des assemblées générales, quel que soit le
montant de son capital. Majoritaires au capital, les salariés
désignent leurs dirigeants lors du conseil d'administration. En dehors
des assemblées générales, les salariés respectent
l'organisation et la direction de l'entreprise qu'ils ont collectivement
choisies et approuvées.
Le partage des résultats est équitable
entre : les salariés, le plus souvent sous forme de participation,
l'entreprise sous forme de réserves, les associés,
majoritairement des salariés qui perçoivent des dividendes.
ID Formation emploie 456 salariés actuellement. La
pyramide des âges est jeune (42 ans d'âge moyen) ; chaque
salarié en contrat à durée indéterminée a
vocation à devenir associé de la SCOP. Il peut présenter
sa candidature comme associé, rédigée sur papier libre et
la remettre au PDG. Le salarié peut donc avoir une double
qualité :
- En tant qu'associé : apport en capital
progressif, participation aux assemblées, exercice éclairé
de la responsabilité d'associé en échange, il est donc
informé de la vie économique et financière de la
société, vote aux assemblées Générales et
possibilité de percevoir des dividendes,
- En tant que salarié : doit contribuer à
la bonne marche de l'entreprise en échange duquel il perçoit une
rémunération et partage les fruits de l'expansion de l'entreprise
(participation et intéressement).
Le salarié perçoit donc, au-delà d'une
ancienneté de 3 mois dans l'entreprise, une participation,
bloquée pendant 5 ans et qui en contrepartie n'est ni imposable, ni
soumise aux charges sociales et un intéressement qui est égal
à 15% du résultat courant avant impôt,
exonéré de charges sociales mais soumis à l'impôt
sur le revenu.
Les délégués du personnel et le
comité d'entreprise forment la délégation unique du
personnel.
2.3 Philosophie, atouts et
contraintes
Lutter contre l'exclusion et favoriser l'éducation et
la formation tout au long de la vie est l'adage de cette structure. Quels que
soient les différents dispositifs sur lesquels les salariés
interviennent, ils s'engagent à être garants des valeurs
fondamentales de l'économie sociale, affirmant ainsi des principes
humanistes.
Les conseillers et les formateurs doivent allier
réactivité, l'humain (qualité) avec la productivité
(quantité).
Les contraintes concernent les relations avec les financeurs.
Par exemple, Pôle Emploi peut envoyer 500 personnes (Activ Emploi)
à recevoir en peu de temps et ID Formation doit être capable de
s'adapter à leur demande que ce soit en termes de locaux disponibles,
mais surtout en nombre de conseillers suffisants pour la réalisation de
la prestation. La gestion des ressources humaines n'est pas facilitée
par le manque de vision à long terme. ID Formation doit aussi respecter
le cahier des charges des financeurs et respecter la date de début de
prestation convenue avec eux ainsi que le nombre de participants aux
formations.
ID FORMATION répond à de nombreux appels
d'offre, la concurrence est très importante dans le secteur de l'emploi
et de la formation. Les concurrents à Boulogne sur mer sont l'AFPA, FORM
AVENIR, OPALE FORMATION, AXIS...
La santé financière de cette structure repose
essentiellement sur tous les marchés obtenus. Les conseillers doivent
rendre un travail qualitatif et quantitatif pour atteindre des objectifs et ne
pas perdre les marchés. Si elle perd trop de marchés, le
personnel pourrait être réduit, les enjeux économiques sont
donc très importants.
ID FORMATION doit donc faire très attention à
respecter le cahier des charges de chaque marché conquis.
Dernièrement, ils ont obtenu le marché de la Cellule d'appui
à la Sécurisation Professionnelle pour l'entreprise Continentale
Production (alimentation pour animaux). Il a permis de montrer un nouveau
côté de compétences de la structure et d'obtenir celui
d'une CASP sur Calais qui débutera début novembre. Leur
notoriété augmente donc au fil des marchés obtenus.
2.4 Organisation interne locale
La structure est située dans le quartier
économique et industriel Capécure, à proximité
d'une gare et d'un réseau urbain TCRB.
Le site est composé de 3 locaux : l'agence
principale (une salle informatique, 4 salles de formations, 6 bureaux
informatisés), l'atelier pour les formations aux métiers du
bâtiment (2 salles de cours, 2 salles de pratique professionnelle), les
bureaux ID FORMATION /CAP EMPLOI.
A Boulogne-sur-Mer, le personnel s'élève
à 17 personnes2(*) dont un responsable de site, une assistante
administrative et 15 conseillers/formateurs. Le responsable de site coordonne
les conseillers/formateurs, répond aux appels d'offre, fait le lien
entre les différents partenaires et financeurs... Les conseillers
formateurs accueillent le public et le forment. L'assistante administrative
gère tous les dossiers de formation, le planning des salles de
formation, le planning des formations...
2.5 Les activités et partenaires d'Id
formation
2.5.1 Les activités
Cette structure représente un organisme important de la
région. Cette coopérative propose des formations aux
métiers du tertiaire et de l'industrie à vocation
professionnelle, des qualifications, un apprentissage de la langue
française et la maîtrise des savoirs de base. Elle offre aux
demandeurs d'emploi une médiation à l'emploi et le placement des
personnes en entreprise.
ID Formation participe à différentes
démarches qualité. La mise en oeuvre de sa démarche
qualité s'appuie sur des agréments pour valider / certifier
(Agrément DIRECCTE) et des chartes et labels qualité (CLEA,
charte H+, label FLI Charte PEPH...).
La structure propose des formations professionnelles et
qualifiantes (CAP Electricien d'équipement, CAP Maçonnerie, un
accompagnement à l'insertion professionnelle, et à
l'orientation/réorientation (Bilan de compétences, Bilan
d'orientation et Validation du Projet Professionnel).
2.5.2 Les partenaires
Son modèle économique est basé sur des
partenariats avec des collectivités et financeurs publics (Fond
solidaire Européen, Conseil Régional, Pôle Emploi,
OFFII...) engagés dans le développement de l'économie
sociale et solidaire.
Quelques partenaires d'ID Formation : Uniformation, PLIE,
Pôle Emploi, Mission locale...
Quelques financeurs : La région, Pôle
emploi, Cap Emploi, l'Europe (Fond de solidarité européen),
DIRECCTE, Opcalia, OPCALIM, FORCO, OPCA, Agefos PME, AGEFIPH...
3. Ma mission dans le cadre du contrat de
sécurisation professionnelle
3.1 Négociation de ma mission
Dans un premier temps, j'ai découvert la Cellule
d'appui à la Sécurisation Professionnelle (CASP) comme je l'ai
expliqué dans l'introduction.
ID FORMATION a répondu à un appel d'offre de
Pôle emploi et a obtenu le contrat. Cette cellule est financée par
la DIRRECTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de
la Consommation, du Travail et de l'Emploi) à hauteur de 100.000
€ : c'est une gestion déconcentrée au niveau
Régional de l'Etat, qui garde le pouvoir sur elle.
La CASP est un lieu d'échange, d'écoute et de
conseils pour ces personnes. Grâce à ce dispositif, les
salariés pouvaient s'informer sur les différentes
démarches et leurs droits, trouver des réponses à
certaines problématiques (adhésion au CSP contrat de
sécurisation professionnelle, formation et retraite) et préparer
leur nouveau projet professionnel.
Les consultantes se montraient très investies ;
elles avaient installé un bureau accueillant avec des tables et plein
d'affiches d'informations au sujet des ateliers (développer son projet
professionnel, valoriser ses atouts et compétences, acteur de son
projet, découvrir ses ressources...) accrochées au mur. J'ai
constaté que les bénéficiaires de la CASP se sentaient
bien, venaient souvent et à n'importe quel moment de la journée.
Elles étaient toujours accueillies avec un petit mot gentil par l'une ou
l'autre des consultantes.
Lors de cette période, j'ai notamment contacté
toutes les personnes bénéficiaires du CSP pour les inviter
à venir rencontrer des agences d'intérimaires : les
réactions ont été très diverses. Certains
étaient tellement assommés par le choc du licenciement qu'ils ne
souhaitaient pas venir, pour d'autres c'était un premier pas vers une
nouvelle vie, d'autres encore m'ont dit qu'ils allaient changer de
région donc ne viendraient pas.
Lors du premier atelier auquel j'ai assisté dans le
cadre de la CASP, j'ai pu me rendre compte de la pression qui pesait sur les
épaules de toutes ces personnes : elles étaient toute en
attente de cette « maudite » lettre recommandée,
guettaient leur boîte aux lettres, sursautaient à chaque coup de
téléphone... Un monsieur d'une cinquantaine d'année,
n'ayant travaillé essentiellement que dans cette société,
s'est effondré lorsque son épouse lui a annoncé avoir
reçu le recommandé. D'autres étaient soulagés car
ils venaient d'apprendre qu'ils n'étaient pas concernés pour
cette fois ci (un autre plan social sera mis en place dans 2 ans).
Finalement, parmi ces 260 personnes concernées par le
plan social, 70 ont été licenciées. Ces personnes ont
toutes accepté le Contrat de Sécurisation Professionnelle.
Contrat qui leur permettrait de bénéficier pendant une
année du maintien de leur salaire et d'un suivi personnalisé dans
leur recherche d'emploi ou de reconversion professionnelle.
Parallèlement, j'ai pu accompagner des personnes
contraintes de se reconvertir suite à un problème de
santé.
Après mûre réflexion, je décidais
de me concentrer sur le suivi de ces personnes licenciées
économiquement de la même usine située à Boulogne
sur mer.
Ensuite, suite à une année difficile
économiquement à Boulogne sur mer, d'autres personnes
licenciées économiquement d'autres sociétés, sont
venus rejoindre le dispositif du CSP.
Ma mission se voyait enrichie d'autres personnes.
C'est à ce moment là, que j'ai commencé
à me poser des questions :
Comment doit-on se comporter vis-à-vis de ce
public ? Comment réagir et comment l'accompagner au mieux dans
un contexte économique difficile ?
Mais avant toute chose, il convient de définir ce
qu'est le contrat de sécurisation professionnelle qui encadre ma
mission.
3.2 Le Contrat de sécurisation
professionnelle3(*)
Le Contrat de sécurisation professionnelle (CSP) permet
d'assurer aux salariés dont le licenciement pour motif économique
est envisagé, dans une entreprise de moins de 1 000 salariés ou
dans un établissement (quel que soit son effectif) en redressement ou
liquidation judiciaire, un ensemble de mesures leur permettant de retrouver au
plus vite du travail.
Chaque salarié susceptible de bénéficier
du CSP doit être informé par son employeur, individuellement et
par écrit, du contenu du contrat de sécurisation professionnelle
et de la possibilité qu'il ait d'en bénéficier.
L'employeur doit donc remettre au salarié, contre un
récépissé, un document d'information écrit au sujet
du CSP.
Le salarié dispose
d'un délai de réponse de 21 jours pour
accepter ou refuser d'adhérer au CSP. Pendant ce délai de
réflexion, le salarié bénéficie d'un entretien
d'information réalisé par Pôle emploi afin de lui expliquer
les modalités du CSP et de l'aider à prendre sa décision.
L'employeur contribue au financement de l'allocation spécifique de
sécurisation : il verse le montant que le salarié aurait
reçu pendant son préavis.
Le salarié a donc 21 jours pour donner sa
réponse. L'absence de réponse est considérée comme
un refus. Le contrat de sécurisation professionnelle a pour objet
l'organisation et le déroulement d'un parcours de retour à
l'emploi.
Ce parcours débute par une phase de
pré-bilan, d'évaluation des compétences et d'orientation
professionnelle en vue de l'élaboration d'un projet professionnel tenant
compte, au plan territorial, de l'évolution des métiers et de la
situation du marché du travail, un point d'étape est
réalisé à la fin du 4ème mois, afin que
le conseiller référent et le bénéficiaire analysent
conjointement tout ce qui a été mis en oeuvre jusqu'à ce
jour.. Des ajustements ou des changements de direction peuvent être mis
en place.
La période du CSP comprend des mesures
d'accompagnement, notamment d'appui au projet professionnel, ainsi que des
périodes de formation et de travail.
L'accompagnement des bénéficiaires du CSP est
confié à Pôle emploi qui pourra déléguer cet
accompagnement à d'autres organismes choisis par appel d'offres. C'est
ainsi qu'ID Formation a obtenu ce marché. En cas de reprise d'emploi en
contrat à durée indéterminée, en contrat à
durée déterminée ou contrat de travail temporaire d'une
durée de plus de 6 mois, la rupture du contrat de travail pendant la
période d'essai permet une reprise du contrat de sécurisation
professionnelle et du versement de l'allocation de sécurisation
professionnelle sans modification du terme fixé lors de
l'adhésion au dispositif.
La possibilité de percevoir une indemnité
différentielle de reclassement : Une indemnité
différentielle de reclassement (IDR) est versée au
bénéficiaire du CSP qui, avant le terme de ce contrat, reprend un
emploi dont la rémunération est, pour un nombre identique
d'heures hebdomadaires de travail, inférieure au
précédent.
La possibilité de percevoir une prime de
reclassement : le bénéficiaire du contrat de
sécurisation professionnelle qui retrouve avant la fin du dixième
mois du dispositif un emploi sous forme de contrat de travail à
durée indéterminée, de contrat de travail à
durée déterminée ou de contrat de travail temporaire d'une
durée d'au moins six mois, cesse de bénéficier du contrat
de sécurisation professionnelle, et peut solliciter le versement d'une
prime au reclassement. Le premier versement intervient au plus tôt au
lendemain de la date de reprise d'emploi ;le second versement intervient
trois mois après la date de reprise d'emploi, sous réserve que
l'intéressé exerce toujours cet emploi. Cette prime ne peut se
cumuler, pour le même emploi, avec l'indemnité
différentielle de reclassement.
Le contrat de sécurisation professionnelle est conclu
pour une durée de 12 mois et prend effet dès le lendemain de la
fin du contrat de travail. Cette durée est allongée des
périodes d'activités professionnelles et intervenues après
la fin du 6ème mois du contrat de sécurisation professionnelle,
dans la limite de trois mois supplémentaires. La durée
du contrat de sécurisation professionnelle ne peut donc
excéder 15 mois de date à date.
Pendant la durée du CSP, le bénéficiaire
de ce contrat conserve la qualité d'assuré et
bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du
régime obligatoire d'assurance maladie, invalidité,
maternité, décès, qu'il s'agisse des prestations en nature
(remboursement des dépenses de santé, dans la limite des tarifs
de la Sécurité sociale) ou des prestations en espèces
(indemnités journalières). Il dispose en outre d'une couverture
au titre du régime des accidents du travail survenus par le fait ou
à l'occasion des actions favorisant son reclassement.
Pendant la durée de son contrat de sécurisation
professionnelle et en dehors des périodes de travail qu'il peut
être amené à effectuer et au titre desquelles il sera
rémunéré directement par l'entreprise ou l'organisme qui
l'emploie, le bénéficiaire du CSP : cette allocation
spécifique de sécurisation professionnelle est versée
mensuellement.Elle est égale à 75 % du salaire journalier de
référence.
Le bénéficiaire du contrat de
sécurisation professionnelle qui, au terme de ce contrat est à la
recherche d'un emploi, peut bénéficier de l'allocation d'aide au
retour à l'emploi, dès son inscription comme demandeur d'emploi,
sans différé d'indemnisation, ni délai d'attente.
Afin de s'assurer de l'engagement des deux parties, ID
Formation fait signer une chartre d'engagement à l'accompagnement CSP
lors du premier rendez-vous.4(*)
A partir de tous les éléments proposés
par ce contrat détaillés ci-dessus, mes observations et mes
constats,j'ai continué à me questionner. La partie suivante y
sera consacrée.
4. Observations, constats et
questionnements
4.1 En observation
Dans un premier temps, je me suis attelée à
tenir consciencieusement un journal de bord. En effet, lors de mes entretiens
individuels avec les bénéficiaires du Contrat de
Sécurisation professionnel, je notais les faits observés sur une
page et dans une autre page mes commentaires, mes questionnements...
Le support du journal de bord m'a permis de faire
émerger les premiers questionnements, questionnements qui m'ont
amenée à diverses lectures.
Au début de mon stage, je participais activement aux
activités, accompagnée ou seule, ce qui m'empêchait de
prendre le recul nécessaire à l'observation de la situation.
Depuis le mois de novembre, j'alterne les périodes d'observations
directes et participantes.
L'observation est une méthode scientifique.
« L'observation directe est une démarche d'un savoir au
service de finalités multiples, qui s'insère « dans un
projet global de l'homme pour décrire, comprendre son environnement et
les évènements qui s'y déroulent » ».
(Massonat, 1987 : 17)5(*).
Il existe deux formes principales d'observation :
l'observation directe et l'observation participante. Dans la première,
l'observateur recueille des données pour ensuite les inscrire dans son
journal de bord. Il reste en retrait du groupe.
La deuxième, est l'observation participante :
« L'observation participante est une technique de recherche
qualitative par laquelle le chercheur recueille des données de nature
surtout descriptive en participant à la vie quotidienne du groupe, de
l'organisation, de la personne qu'il veut étudier. »
(Deslauriers, 1991 : 46). E. Dans l'observation participante,
l'observateur s'insère dans le groupe qu'il étudie et prend part
à ses activités. Il doit définir alors les limites de son
observation car il aboutira à des conclusions différentes selon
son degré d'implication. Observer en participant permet une meilleure
compréhension de ce qui est vécu mais peu impliquerune trop
grande identification au milieu. Il faut trouver un juste milieu.
L'observateur doit être patient, tolérant et
sympathique, il ne doit pas juger, ni prendre parti. Le défi est de
perturber le moins possible le milieu observé. Ce que je peux retenir de
cette méthodologie, est que l'observation qu'elle soit directe ou
participante est un outil précieux pour le chercheur. Le recueil des
données doit être pratiqué le plus méticuleusement
possible afin de procéder par la suite à une analyse la plus
complète et précise possible. Le chercheur doit donner de la
cohérence à ces notes, il ne suffit pas de les lister mais aussi
de les exploiter et de les interroger.
4.2 Constats
Les différentes observations, actions, entretiens
conduits auprès de ce public m'amènent à certains
constats :
- Ce sont pour la grande majorité des personnes qui ont
exercé le même métier pendant de longues années,
à un poste très précis (travail à la chaîne,
cariste, nettoyeur graisseur...)
- Ce sont des travailleurs pour la plupart très peu
diplômés, qui ont débuté leur métier
très jeunes.
- Ces personnes se sentent dépassées et
ressentent une perte d'identité consécutivement à leur
perte d'emploi
- Un petit nombre plus jeune voit une opportunité
à se reconvertir complètement.
- Leur connaissance du numérique est très
faible, ils se sentent perdu face aux nouvelles technologies
- Ils sont très peu mobiles : soit parce qu'ils ne
possèdent pas de permis de conduire ou de véhicule, soit parce
qu'ils n'ont jamais eu l'habitude de devoir se déplacer loin pour
travailler.
- Je me suis rendue compte que le fait de les aider à
refaire leur curriculum vitae et une lettre de motivation les
déstabilisaient voire les effrayaient car cet activité
dévoilait leur possible manque de diplôme, leurs
compétences qu'ils pensent restreintes...
4.3 L'élaboration d'un questionnement
Suite à ces constats, je me suis posée un
certain nombre de questions pour élaborer ma question centrale.
En quoi les modes d'accompagnement en insertion
professionnelle permettent aux personnes contraintes à quitter leur
métier de s'orienter vers une reconversion professionnelle ?
Cette question s'est affinée au fur et à mesure,
je l'ai ainsi reformulée :
En quoi le contrat de sécurisation
professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes
à quitter leur métier ?
Quelles sont les tensions identitaires qui traversent ce
public contraint à se reconvertir ?
Quel rapport ont-ils vis-à-vis de l'accompagnement
proposé par les professionnels ?
La biographisation peut-elle être
considérée comme un outil dans leur accompagnement ?
En quoi l'accompagnement professionnel est-il un apport pour
leur orientation ?
Quel usage font-ils de l'accompagnement professionnel ?
Pour commencer, il me semble important de rentrer au coeur du
métier de Conseiller en Insertion professionnelle dans le cadre du CSP.
Il convient ainsi de définir la notion d'accompagnement, socle de ce
métier.
Deuxième partie
1. Au coeur du métier de Conseiller en
Insertion professionnelle
1.1 Vers un accompagnement
La notion d'accompagnement étant saillante dans notre
mission, il convient de situer l'existence de différentes pratiques.
Cette notion est difficile à définir
précisément. L'accompagnement est toujours cadré
institutionnellement, politiquement et financièrement et se compose
d'une relation entre deux personnes.
PAUL6(*)
parle d'une « Nébuleuse » composée,
selon elle, de huit formes d'accompagnement. Il existe : le coaching dont
l'idée dominante est la résolution d'un problème, le
counselling qui prend ses origines dans le courant humaniste (écoute
active, bienveillance, centré sur la réalisation d'un individu
qui s'épanouit au travers de la relation de confiance établie).
Ensuite, vient le conseil ou consultance centré sur les
éléments apportés par l'accompagnateur pour que
l'accompagné fasse ses choix. Le tutorat est basé sur une
formation en alternance associée à l'idée du facilitateur
où le professionnel connait et donc guide le novice. Le mentorat est la
figure du passeur intergénérationnel. La médiation met en
avant la notion du tiers intermédiaire (règlement d'un litige).
Le compagnonnage est basé sur le partage entre deux
générations (Compagnon du devoir). Et le sponsoring ou le
parrainage, dans lesquels l'accompagnateur va faire profiter à l'autre
de son réseau, ses ressources.
M. PAUL décrit des pratiques d'accompagnement
« Elles sont toutes fondées sur une dimension relationnelle
forte et l'idée d'un cheminement en commun (processus,
développement séquentiel dans le temps 7(*)».
Le counselling et le conseil me semblent à ce
stadeêtre les formes les plus appropriées de ces pratiques pour
accompagner le public dont je m'occupe. Ce n'est qu'une hypothèse que je
tenterai de confirmer tout au long de mon étude. La démarche
compréhensive et l'écoute active que nous utilisons auprès
de ces personnes semblent dans la lignée de ces formes
d'accompagnement.
1.2 Vers une démarche
compréhensive
A l'instar de Mokhtar KADDOURI, nous nous inscrivons dans une
démarche compréhensive pour étudier ce qui se joue pour
les sujets concernés par ce licenciement.
« Du point de vue de la pratique professionnelle,
les professionnels ont une marge de manoeuvre pour faire parler le dispositif
autrement que comme orientations institutionnelles. Mais cela suppose
d'être à l'écoute des émergences, et pas seulement
d'être une courroie de transmission et d'imposition d'un discours
officiel. C'est toute la différence que l'on peut faire entre
dispositifs d'accompagnement compréhensif et dispositifs
d'accompagnement gestionnaire. La démarche compréhensive permet,
tout en étant garant du dispositif institutionnel, d'être à
l'écoute des émergences pour voir comment articuler offre et
demande de transition. Cela suppose aussi tout un travail de communication pour
faire évoluer les représentations qui structurent les rapports
des sujets à ces dispositifs.8(*) »
Ce que je retiens de cet extrait, c'est la possibilité
pour le professionnel de s'octroyer dans sa relation avec l'accompagné
un certain recul par rapport au cadre institutionnel. Il peut ainsi aider cette
personne à se trouver, à se comprendre pour avancer dans son
parcours. Dans le cadre de ma mission, lors d'entretiens individuels, c'est
l'écoute active qui me permet de d'identifier des mots,
des expressions, des intonations particulières chez ce public. Cette
écoute active participe à cette démarche
compréhensive.
1.3L'écoute au service de
l'accompagnement
L'écoute active est préconisée par Carl
Rogers, psychologue américain. Elle implique la reformulation
systématique des propos de l'usager afin d'être sûr de les
avoir bien compris et de ne pas les déformer et de recueillir son
approbation. La personne se sent donc en confiance et donc peut progresser plus
facilement dans sa réflexion. Elle permet de recueillir l'information la
plus complète possible dans une relation de confiance qui permet
à chacun de se sentir reconnu et compris. Elle démontre de
l'intérêt de l'accompagnant qui s'empêche de juger et
d'interpréter.
Les conseillers sont là pour donner l'impulsion, poser
des questions pertinentes pour que l'usager progresse et pour relever dans ses
propos des détails qui paraissent à priori insignifiants mais
qui en fait vont l'aider à trouver des solutions et enlever des
barrières que l'individu se met sans en être conscient :
« Il n'y a pas de détails. Tout est
signe. »9(*)
« En remarquant ces signes, nous restructurons sans la trahir la vie
sociale réelle qui, dans son immédiateté peut rester
confuse, mais qui n'en comporte pas moins un sens pour les personnes ayant
besoin, comme tout un chacun au sein des pratiques d'accompagnement, d'un
minimum de considération »10(*).LHOTELLIER préconise aussi
l'importance de lire entre les lignes pour un accompagnant et de percevoir ce
qui ne s'énonce pas suffisamment clairement.
1.4 L'orientation comme perspective
La notion d'orientation qui est, un des objectifs du processus
de l'accompagnement auprès de ce public, nous semble également
intéressante à situer :
« Un présupposé fort accompagne
l'usage du terme orientation : l'affirmation conjointe de
l'indétermination du devenir humain et de l'emprise possible de l'homme
sur la gestion de son avenir. La référence
« éducative » souvent associée à ce
terme signifie de manière implicite que les médiations sociales
proposées se justifient par la reconnaissance d'une certaine
incompétence de l'adulte à résoudre par lui-même ses
propres problèmes et comporte l'hypothèse que des interventions
externes peuvent contribuer à réduire celle-ci et à
accroître par là ses chances d'adaptation à des situations
professionnelles nouvelles. 11(*)»
Ce qui sous-entend que ces personnes auraient des
difficultés à trouver elles-mêmes leur nouvelle
orientation. Le professionnel n'est pas là pour influencer l'individu
dans son orientation mais il doit l'aider à trouver par lui-même
ce qui lui correspond le mieux.
Les personnes que je suis, ont d'autant plus besoin de cet
accompagnement dans leur orientation qu'elles n'ont pas pu anticiper cette
transition.
Ce qui peut être difficile pour le professionnel est
l'urgence que certaines de ces personnes mettent dans cette quête
d'orientation. Nous suivons un bénéficiaire d'une cinquantaine
d'années qui, même s'il n'a pas de rendez vous, vient presque tous
les jours nous montrer l'avancement de ses démarches pour sa formation
de cariste. Il nous pose beaucoup de questions et voudrait qu'il soit possible
de lui répondre à l'instant. Il avait au départ
changé de nombreuses fois de projets : gardien d'immeuble, agent
d'entretien du bâtiment pour terminer par cariste en passant par une
formation. Ces nombreux projets démontrent le stress
généré par cette nouvelle situation et le besoin
d'accompagnement qui en découle. Nous lui avons expliqué
patiemment que les demandes de financement de sa formation prennent un certain
temps car les décisions sont prises lors de commissions spéciales
chez le mandataire.
Finalement, les personnes que j'accompagne se trouvent, pour
leur orientation future, semblerait-il devant quatre possibilités :
- Celui de continuer à exercer le même
métier,
- Celui de continuer le même métier mais en se
formant auparavant pour acquérir de nouvelles compétences et
progresser dans ce même domaine,
- Celui de se reconvertir,
- Ou celui de créer son entreprise.
L'accompagnement d'un professionnel semble à ce stade,
au vu des entretiens que j'ai pu mener une aide précieuse. Le
professionnel est présent ne serait-ce que pour soutenir la personne
dans l'acceptation de sa nouvelle situation, et par la suite la guider vers une
nouvelle orientation. Cela reste une hypothèse à confirmer.
Dans la partie suivante, j'évoquerai trois notions qui
semblent saillantes pour les personnes accompagnées.
2. Au plus près des accompagnés
2.1 Des situations singulières face au risque
de reconversion
Afin de répondre à ces questions, je vais
établir d'autres hypothèses que j'infirmerai ou confirmerai en
mettant en place des investigations méthodologiques qualitatives. Les
modes d'accompagnement du professionnel de ce public vont dépendre d'un
certain nombre de facteurs :
- Capacité de l'individu à accepter la situation
actuelle : injonction à se reconvertir, à changer de travail
même si cela reste dans le même domaine.
- Capacité de l'individu à se projeter.
Cette capacité va dépendre de l'âge de
l'individu, de son sexe, de son niveau d'études, de son attachement
à son ancienne entreprise...Certains individus ont choisi de faire
partie du plan social et donc d'être licenciés
économiquement car ils étaient capables de se projeter dans un
nouveau projet professionnel ou tout simplement prêts à partir en
retraite. Mais tout le monde n'est pas en capacité à se projeter
comme le précise Sophie Denave. Comme elle le souligne, il existe
différentes attitudes face à la prise de risque, qui
dépendent des conditions d'existence présente, de la conjoncture
économique et des conditions de vie passée « qui vont
nous amener à appréhender plus ou moins la prise de
risque 12(*)».
Elle indique qu'en général la majorité des personnes
cherchent à sécuriser au maximum leur trajectoire.
J'ai pu le constater au cours des entretiens avec les
personnes concernées par ce licenciement : certaines prennent un
nouvel élan et ce licenciement est perçu comme une chance
à trouver enfin un accomplissement professionnel et d'autres semblent
perdus et se sentent en perte de stabilité personnelle et
professionnelle. Mais tous semblent vouloir retrouver la stabilité
passée.
Comme dans de nombreux domaines de l'insertion
professionnelle, la notion de projet apparait et il semble intéressant
de l'étudier dans le cadre du contrat de sécurisation
professionnelle.
2.2 Le CSP : une usine à
projets ?
La notion de projet nous apparait pertinente à
mobiliser. Le projet peut être défini comme la manière
d'atteindre un objectif, ou l'action de se fixer un but, un objectif13(*).
Denave parle de « nouveau prêt à
porter » 14(*) : «On pourrait désormais parler
d'une organisation générale de la société par
projets15(*), suggérant une conception
« quasi-managériale » de le condition humaine
procédant par objectifs et moyens16(*). En phase avec les logiques de l'individualisation
et du volontarisme de notre « culture
« postmoderne 17(*)», le projet tend à s'imposer comme une
norme sociale dominante à laquelle chacun doit se soumettre18(*). »
Le CSP est en lui-même un projet ambitieux : celui
de permettre un retour rapide à l'emploi concernant les personnes
licenciées économiquement. Les personnes y adhérant
doivent alors à leur tour formuler un projet dans le but soit d'une
reconversion, soit d'une bifurcation ou d'une création d'entreprise dont
le but est de retrouver un emploi dès que possible. Le projet apparait
d'ailleurs à de nombreuses reprises dans la chartre d'engagement que les
bénéficiaires du CSP doivent signer lors du premier
rendez-vous.19(*)
Une personne ayant un projet bien défini aurait donc
plus de chances de retrouver un emploi. D'ailleurs, le contrat de
sécurisation professionnelle lui offre des moyens de le
concrétiser.
« Nous pouvons alors définir le
modèle du projet comme l'ensemble formé par :
- La conviction selon laquelle une personnea d'autant plus de
chances de réussir son insertion sociale et professionnellequ'elle a un
projet et qu'elle y tient ;
- L'ensemble des dispositifs et des pratiques mis en oeuvre en
conséquence : entretien d'analyse ou de clarification du projet,
modules de définition du projet, enquêtes ou stages de
vérification du projet, etc... 20(*)».
Mais est-il aisé pour une personne venant d'être
licenciée économiquement et donc dans une situation
précaire de penser à un projet ? Le CSP est il une
réelle aide à cette réalisation de projet ? Le CSP
ne dirige t'il pas les personnes au devant de désillusions encore plus
violentes ?
Pour mieux comprendre, il convient de mobiliser
également les notions de reconversion et de bifurcation.
2.3 Reconversion ou bifurcation
Dans ce paragraphe, nous allons étudier les concepts
de reconversion et de bifurcation qui font partie de l'élaboration du
projet évoqué précédemment. De nos jours, rares
sont les personnes travaillant de longues années dans la même
entreprise. La dégradation du marché du travail et la
multiplication des plans sociaux y participent certainement.
« Ces dernières années, l'idée
commune d'une intensification de la mobilité s'est
répandue. Les vies professionnelles seraient désormais
marquées par une plus grande mobilité professionnelle :
chacun devrait s'attendre à changer d'emploi, éventuellement de
profession plusieurs fois en cours de vie active21(*). »
(Germe, cité par Denave).
C'est ainsi que la notion de reconversion est utilisée
de plus en plus souvent :
« La mobilité professionnelle recouvre
différentes situations : il peut s'agir de changements
d'entreprise, de secteur, de catégorie socioprofessionnelle, de
fonction, de statut, voire d'emploi (actif occupé, chômeur,
inactif). La reconversion en serait une déclinaison particulière
sous-tendant une idée de transformation ou d'acquisition de nouvelles
compétences. Mais l'usage commun fait souvent l'amalgame entre de
situations très distinctes comme une juriste devenue fleuriste ou un
médecin partie travailler dans l'humanitaire ou bien encore un cuisinier
ouvrant son restaurant.22(*) »
Pour Denave, le terme de reconversion est utilisé dans
beaucoup trop de situations que ce soit dans de « simples glissements
de situations dans des secteurs voisins» ou dans des changements
radicaux. C'est pourquoi, elle préfère différencier les
deux situations :
« Parler de rupture professionnelle est ainsi une
façon de se démarquer du terme de reconversion qui agrège
des phénomènes trop
hétérogènes. 23(*)». En ce sens, nous partageons cette analyse.
Les ruptures professionnelles que Denave appelle aussi
bifurcations ou réorientations professionnelles doivent remplir de son
point de vue trois conditions :
- Un changement radical de métier et de domaine
professionnel
- Un changement effectif et non un projet
- Une ancienneté minimale dans le métier initial
pour exclure les « petits boulots » où l'on change
régulièrement.
Elle différencie donc la reconversion d'une
bifurcation. Cette distinction nous est apparue essentielle dans l'analyse
ultérieure des données.
« Le passage d'une situation professionnelle
à une autre occasionne toujours des modifications ressenties de la part
des protagonistes : métier plus ou moins différent, nouvelle
organisation du travail, environnement plus ou moins
distinct,etc. 24(*)».
Il convient maintenant d'appréhender d'autres notions
qui participent de la construction de notre cadre théorique.
2.4 Dynamiques identitaires et transition
professionnelles
Face à cette pluralité de situations, une des
hypothèses concerne leur identité. En effet, le sujet a besoin
de faire le point sur lui-même, de se retrouver, que la reconversion soit
voulue ou subie.
2.4.1 Des dynamiques identitaires
variées
En effet, le sujet se trouve en tension identitaire entre son
identité passée et future : il vit une rupture identitaire
qu'il faut surmonter. Poursuivons nos investigations en étudiant le
concept de dynamique identitaire qui est sous-jacent à cette
hypothèse. Selon Kaddouri, « Dans ce moment culminant, dans
lequel le sens même de l'identité personnelle est
questionné, la personne est acculée à agir, à
mettre en place des stratégies identitaires pour gérer et
atténuer les tensions à vivre. Ces stratégies sont
plurielles et varient en fonction de la dynamique (de continuité, de
rupture, de redéfinition de soi) dans laquelle l'individu est
engagé.25(*) »
Ainsi, la personne est amenée à mettre en place
des stratégies identitaires pour réduire ses tensions et remanier
son identité pour retrouver un équilibre. La question des
dynamiques nous intéresse, au sens où elle ne fige pas
l'identité. Kaddouri préfère parler de dynamique
identitaire, « qui renvoie à un processus et montre que rien
n'est figé, que l'identité se remanie en fonction des situations,
des interactions sociales, au concept d'identité, qui expose à
mon sens au risque de l'étiquetage, de l'assignation.26(*) »
La difficulté identitaire va dépendre de la
manière dont la personne va aborder cette rupture, ici sa perte
d'emploi. La rupture identitaire se fera d'autant plus pesante pour les
personnes qui vivent cette perte d'emploi comme une catastrophe dans leur
parcours biographique. La reconstruction identitaire sera d'autant plus
difficile.
D'autres voient en cette transition une opportunité
à changer de domaine professionnel. Ils n'auraient peut être pas
osé quitter leur emploi d'eux-mêmes. Peut-être voient-ils
apparaître des voies professionnelles possibles jusqu'alors
imaginées inaccessibles. Cet évènement, au départ
contraint, sera vécu comme une chance.
Kaddouri décrit la dynamique identitaire
également comme suit : « Il s'agit d'une totalité
complexe, jamais stabilisée puisque soumise de façon permanente
à un travail identitaire de construction, de destruction et de
reconstruction de soi. 27(*)»
Selon leur situation actuelle, ces personnes se trouvent dans
des dynamiques identitaires singulières. Selon Kaddouri, il en existe
cinq :
- « Les dynamiques de continuité
identitaire » : la personne veut prolonger une identité
qu'elle considère comme satisfaisante. Il appelle cette action aussi
« le projet d'entretien de soi »ou « projet
de préservation de soi » selon le manque possible de
ressources personnelles pour y arriver.
Il me semble que cela concerne les personnes qui ont
très mal vécu le licenciement, leur identité à ce
moment là leur convenait entièrement.Pour la conserver, la
personne met alors en place des stratégies.
Il en existe trois : « La préservation
conflictuelle conduit le sujet à mettre en place une stratégie
d'affrontement avec un autrui significatif qui constitue pour lui une menace
identitaire.28(*) », « La préservation
collaborative conduit à l'adoption d'une stratégie d'arrangement,
explicite ou tacite, avec un autrui vis-à-vis duquel le sujet est
socio-affectivement dépendant », et enfin « la
préservation par repliement conduit à s'inscrire dans une
stratégie d'isolement. N'ayant pas les ressources d'affrontement ni
celles de l'alliance avec autrui, le sujet choisit ou est condamné
à le faire, de se retirer de la scène de l'interaction et de la
confrontation. ».
- « Les dynamiques de transformation
identitaire » : la personne souhaite acquérir une
nouvelle identité et abandonner l'actuelle. Ces stratégies pour
la réalisation de la transformation identitaire peuvent être
soutenues ou non par autrui.
- « Les dynamiques de gestation
identitaire » : dans lesquels, le projet de l'identité
est en cours de réflexion. On y retrouve « le projet de
confirmation de soi », « le projet de reconstruction de
soi » qui est particulièrement intéressant dans mon
étude car cela concerne des personnes ayant vécu « une
blessure identitaire causée par un autrui significatif dont ils
dépendent institutionnellement et affectivement ».
« L'enjeu identitaire est de réussir la
restauration et la réhabilitation de leur identité. Il s'agit de
retrouver l'estime de soi d'autrefois, c'est-à-dire, le retour à
un état identitaire antérieur. ». Ensuite, vient le
« projet de redéfinition de soi » dont l'enjeu est
« la redéfinition d'un soi devenu flou ».
- « Les dynamiques de destructivité
identitaires et la dynamique d'anéantissement
identitaires ».
Dans quelles dynamiques identitaires se situent les personnes
que j'accompagne ? Quelle stratégie utilisent-elles ?
2.4.2 Transitionsprofessionnelles
Au sujet de cette période particulière, se
situant entre la perte de leur emploi et une nouvelle période
d'activité encore indéfinie, Mazade et Hinault
écrivent :
« La transition est une situation d'affrontement
à l'incertitude et un moment d'épreuves (chômage,
contrôle de la recherche d'emploi, la stabilisation et la
(re)construction d'une identité professionnelle, éventuelles
difficultés d'intégration dans les milieux de travail, etc...).
Dans certaines circonstances, par exemple, lors de licenciement
économiques, les transitions professionnelles sont un moment de
« crise biographiques » (Mazade, 2011) qui met à
l'épreuve le milieu conjugal et familial. Dans d'autres cas de figure,
les transitions professionnelles réactivent des projets enfouis et des
aspirations contrariées pendant la scolarité (Négroni,
2007).29(*) ».
Parmi les personnes que je suis régulièrement,
je reçois une dame, âgée de 55 ans dans l'obligation de
travailler encore 5 ans avant de partir en retraite. Cette dame a
commencé à travailler à l'âge de 16 ans et semble
complètement perdue depuis son licenciement. Son mari l'accompagnait
à chaque séance. J'en étais d'ailleurs
étonnée et en faisait part à ma tutrice de stage. Quel
pouvait être le bénéfice de la présence
perpétuelle de son mari pour elle ?
Je pense que ce n'est pas en étant toujours
accompagnée de son mari, qu'elle pourrait progresser. Elle a besoin de
se retrouver seule avec un professionnel pour prendre le recul
nécessaire à sa nouvelle situation. Cette dame vit pour l'instant
une véritable « crise biographique30(*) ».
Dans une autre situation, un monsieur de 59 ans qui sera
à la retraite d'ici six mois. Pour lui, c'est une véritable
opportunité qui s'est présenté à lui : pouvoir
préparer sa retraite pendant cette période de transition tout en
ayant un maintien de salaire pendant un an. « Cet agencement
institutionnel transforme le chômage en transition autorisant ces acteurs
à s'engager dans des activités qui forment un nouveau cadre
social d'identification, qui deviendra celui de la retraite. 31(*)». Il pourra aussi
bénéficier d'une formation informatique, ce qui le rassure pour
l'avenir.
Un autre cas concerne un homme de 45 ans, cariste au sein de
l'usine, qui a décidé rapidement de créer son entreprise
dans l'hydro-dipping (processus qui consiste à transférer
grâce à l'eau des images sur des objets). En effet, pour lui le
licenciement est une opportunité à créer sa
société. Il y pensait depuis quelques temps sans bien sûr
oser se lancer. Titulaire d'un CDI, il se trouvait alors dans une situation
stable et rassurante.
« De plus en plus de salariés aspirent
à un autre avenir professionnel. Mais rares sont ceux qui franchissent
le pas. Quitter son métier, c'est-à-dire entrer dans la
deuxième phase dite de désengagement, est tributaire du
degré de flexibilité des institutions, des métiers et
secteurs professionnels, ainsi que des caractéristiques sociales
des acteurs (position sociale et géographique, dispositions et
capitaux)32(*) ».
Il semble difficile pour des salariés de prendre le
risque de se retrouver dans une situation précaire en réalisant
le projet désiré.
Ces trois exemples soulignent la pluralité de
réactions qui apparaissent face à la situation actuelle (le
licenciement). Chaque individu va tenter de se reconstruire en mobilisant des
stratégies identitaires propres.
2.5 La biographisation au service de
l'accompagnement
A ce stade, il convient de mobiliser la notion de
biographisation, celle-ci apparait féconde pour notre sujet.
Cette notion est liée à la dynamique identitaire
car elle permet à la personne de raconter ses expériences
professionnelles, familiales et autres, et, de se construire par le
récit.
Delory-Momberger appelle
« biographisation le travail psycho-cognitif de
configuration temporelle et narrative, par lequel les hommes donnent une forme
propre au déroulement et aux expériences de leur
vie. 33(*)»
L'énonciation du parcours de vie passé et
présent représente un point de départ pour le futur.
« En tant que pratique, le recours à la
reconstitution des évènements de vie dans leurs interactions
sociales et environnementales et la production de significations sont
considérés comme des moments essentiels de la construction des
projets d'orientation. L'histoire de vie articule dans le présent le
passé de la personne et son futur possible et souhaitable34(*). »
Ces personnes contraintes à se reconvertir qui n'ont pu
se préparer à cet évènement, ontbesoin de faire le
point sur leur parcours de vie. Cette démarche leur permettra de
progresser sur l'appropriation de leur nouvelle identité et les aideront
à se projeter dans l'avenir.
Les questions posées par ces personnes sont : Qui
suis-je maintenant que je ne suis plus où j'avais l'habitude
d'être, de travailler ? Quelles sont mes acquis pour cette nouvelle
orientation ? Comment puis-je mettre à profit mon passé pour
construire mon futur ? En quoi l'accompagnement d'un professionnel peut
m'aider à accepter ma nouvelle situation afin de pouvoir me conduire
dans une nouvelle orientation ?
La biographisation permet d'essayer de répondre
partiellement à ces questions. Dans le cadre du travail que j'ai
engagé lors de ma reconversion, et les mises en mots partagées
dans le cadre des écrits universitaires et des entretiens
d'accompagnement au mémoire participent de ce processus. Ainsi, lors de
mon bilan de compétence, j'ai pu écrire mon parcours
professionnel et discuter de mon parcours personnel avec la psychologue
chargée de mon suivi. C'est ainsi que j'ai avancé dans ma
progression sur le plan professionnel et personnel et résoudre mon
mal-être. C'est pourquoi, ce travail d'écriture et de
verbalisation serait intéressant et enrichissant pour ces personnes
rencontrées dans le cadre de la mission, d'autant plus qu'elles n'ont pu
anticiper tous ces changements. « L'accompagnement d'un bilan
combine à la fois l'apport des informations nécessaires pour
faire des projets et les conseils qui permettent au bénéficiaire
de se situer35(*). »
Le bilan de compétences n'est pas le seul outil qui
permet de mieux se connaître, l'accompagnant peut aussi utiliser des
tests de personnalité et de découverte du profil professionnel.
Toutes ces techniques y compris les échanges verbaux
entre les accompagnants et accompagnés font partie de la
biographisation. Le travail du professionnel semble être un atout pour ce
public qui seul aurait plus de difficultés à y parvenir.
D'ailleurs, certains auteurs rendent compte de l'effet de
l'absence des dispositifs d'accompagnements des transitions (C.Graille36(*)et F.Dubois/ P.Terral)37(*) : les individus sont
alors renvoyés à leurs ressources propres (en termes de
compétences, de réseaux, de capitaux...) pour tenir dans ces
périodes d'incertitude, produisant des inégalités fortes
quant à l'issue possible de l'entre-deux.38(*)
Les personnes accompagnées peuvent donc s'appuyer sur
les ressources et le réseau du professionnel et semblent avoir plus de
chances de parvenir à atteindre leur objectif.
Dans la partie suivante,j'aborderai la construction de mon
dispositif méthodologique aux fins de répondre à ma
question de recherche.
Troisième partie
1. Dispositif méthodologique
Dans la mesure où notre recherche se veut
compréhensive, il apparait que l'utilisation de l'entretien
semi-directif est la plus appropriée pour mieux comprendre les
dynamiques identitaires en jeu concernant les sujets engages dans le dispositif
CSP.
1.1 Définition et explicitation du choix de
l'outil : L'entretien semi-directif
J'ai choisi l'entretien semi directif comme technique de
recherche pour collecter mes données. En effet, il permet une
communication et une interaction plus vaste que le questionnaire. La personne
interviewée est libre de s'exprimer autour des questions principales.
Dans un de ses ouvrages, Combessie explique : « Parmi les
diverses formes possibles de collectes d'informations orales, le sociologue
accorde une importance particulière à l'entretien semi-directif,
nommé aussi entretien centré : il préfère ces
appellations à celle d'entretien non- directif dans la mesure où
il choisit et annonce au préalable le thème ou les thèmes
et qu'il dispose d'un guide d'entretien. 39(*)». Nous souscrivons à cette option.
Ainsi, j'ai établi un guide d'entretien40(*), qui est comme le
définit Combessie, « « un
mémento » (un pense-bête). Il est rédigé
avant l'entretien et comporte la liste des thèmes ou des aspects du
thème qui devront avoir été abordés avant la fin de
l'entretien. 41(*)»
J'ai ensuite élaboré ma grille d'entretien avec
une dizaine de questions42(*) :« L'objectif de l'entretien
semi-directif est d'obtenir des entretiens de contenu homogène où
tous les points de vue seront prévus abordés.43(*) ».
C'est-à-dire « obtenir des informations
approfondies et de qualité sur le vécu, le ressenti ou la
réflexion de personnes pour l'intérêt de leur apport
à l'objet qui a justifié le recours à cette
technique44(*). »
1.2 Construction de l'échantillon
Le choix de l'échantillon concerne des personnes
adhérentes au CSP, c'est-à-dire inscrites depuis octobre 2016.
Cette construction nécessite d'être abordée au regard de la
complexité d'une double implication quant à mon positionnement
à la fois d'accompagnatrice auprès de ces personnes mais
également d'étudiante dans une posture de recherche.
Difficultés
rencontrées
Au départ, j'avais choisi d'interviewer des personnes
de la même usine. J'ai changé d'avis en m'apercevant que je
suivais ces personnes régulièrement et donc que je les
connaissais déjà beaucoup, ce qui constituait un biais possible
dans mon travail de recherche. De plus, la posture à adopterlors de ces
entretiens avec des personnes qui me connaissent en tant que professionnelle,
n'était pas évidente à trouver, ce qui paraît
légitime. En effet, elles me voyaient souvent et avaient donc du mal
à me considérer en tant qu'étudiante. Ceci dit, deux
personnes dans mon échantillon font partie des personnes que je suis
régulièrement. En effet, faute de trouver d'autres personnes
disponibles, je les ai quand même inclues dans mes entretiens. J'ai
dû me positionner clairement au départ. Je leur ai dit qu'il
fallait qu'elle me considère comme une étudiante et non comme la
professionnelle qui les reçoit habituellement. Je les ai
prévenues que j'allais leur poser des questions dont je connaissais
déjà la réponse mais que cela faisait partie du processus
de l'entretien. Il ne fallait pas qu'elles soient étonnées. Une
l'a très bien compris, l'autre moins bien.
De même, initialement, je désirais me focaliser
sur des personnes adhérant au CSP depuis environ 6 mois mais encore une
fois pour une question de disponibilité je n'ai pu prolonger ma phase de
recueil des données, ainsi une des personnes n'est adhérente que
depuis 3 mois. Je décidais de recevoir cette personne lors d'un
entretien exploratoire, ne pouvant l'inclure dans mon échantillon.
Ce sont des hommes et des femmes âgés de 32
à 59 et demi. Lors de toute la préparation des entretiens, je me
suis vraiment rendu compte de la difficulté concrète à
construire un échantillon viable.La liste définitive de mon
échantillonnage se présente ainsi. Par respect d'anonymat, j'ai
choisi de remplacer les prénoms par des prénoms d'emprunt.
NOM PRENOM
|
SEXE
|
AGE
|
NIVEAU SCOLAIRE
|
ANCIEN POSTE
|
DATE DEBUT CSP
|
Gérard
|
H
|
52 ans
|
Niveau VI
|
Gardien
|
Octobre 2016
|
Mathieu
|
H
|
37 ans
|
Bac pro maintenance
|
Cariste pointeur
|
Octobre 2016
|
Francine
|
F
|
32 ans
|
CAP BEP Fleuristerie
|
Commerciale pharmaceutique
|
Novembre 2016
|
Danièle
|
F
|
54 ans et demi
|
CAP couture
|
Livreuse en boulangerie
|
Février 2017
|
Béatrice
|
F
|
55 ans
|
Niveau VI
|
Ouvrière agro alimentaire
|
Octobre 2016
|
Claude
|
H
|
35 ans
|
Bac pro carrossier
|
Opérateur de production
|
Octobre 2016
|
Ludovic
|
H
|
59 et demi
|
Certificat d'études
|
Cariste expédition
|
Octobre 2016
|
1.3 L'expérience de l'entretien
exploratoire
Afin de pouvoir tester la pertinence de ma grille d'entretien,
j'ai procédé à deux entretiens exploratoires auprès
d'autres bénéficiaires de ce contrat, Gérard et
Danièle.
Le premier, Gérard, est un homme de 52 ans,
marié, peu diplômé, travaillant depuis une quinzaine
d'années dans l'entreprise qui l'a licencié. Il est en CSP depuis
octobre 2016. La deuxième,Danièle est une femme de 54 et demi,
vivant maritalement. Titulaire d'un CAP de couture, elle a commencé
à travailler jeune. Ses trois grands enfants ne sont plus à sa
charge. Licenciée d'une boulangerie, pour laquelle elle effectuait les
livraisons, elle adhère au CSP depuis février 2017. C'est
pourquoi je n'ai pu l'inclure dans mon échantillon. En effet, je
trouvais intéressant de choisir des personnes adhérant au CSP
depuis 6 mois c'est-à-dire à mi-parcours. Pour autant, je me suis
rendue compte que les propos de Danièle ne différaient pas de
ceux des autres personnes inscrites depuis plus longtemps.
Ces entretiens m'ont permis de prendre conscience de la
difficulté de l'exercice. Quelques jours avant, je m'étais
assurée de la disponibilité d'une salle et l'avait
réservée. Lorsque je suis arrivée, la salle était
occupée. J'ai donc dû improviser et m'installer dans un autre
bureau inoccupé. Je souhaitais rendre le cadre convivial et moins formel
qu'à l'accoutumé. Je positionnais donc deux fauteuils l'un
à côté de l'autre afin d'adopter une posture
d'égalité et de convivialité. Lorsque le monsieur ou la
dame sont entrés, je leur ai proposé un café. J'ai
également mis un écriteau sur la porte pour éviter que
quelqu'un n'entre en cours d'entretien et n'interrompe l'enregistrement.
Je me suis rendu compte que le fait d'enregistrer la personne
compliquait le déroulement de l'entretien que ce soit pour la personne
interviewée ou moi-même. Dès l'enclenchement de
l'enregistrement, l'ambiance est plus pesante. Un malaise s'installe. Chaque
mot est pesé. Ces entretiens m'ont permis de m'en apercevoir et de
pouvoir y remédier autant que possible pour les suivants. Ainsi,
j'essayais d'instaurer un climat plus détendu en discutant un peu avant
le début de l'enregistrement. Je disais à la personne que je
savais qu'il n'était pas évident d'être enregistré
ni pour elle, ni pour moi mais que nous allions essayer de l'oublier.
Malgré une préparation que je pensais
consciencieusement accomplie, je n'ai pas réussi à
« faire parler »les personnes comme je le désirais.
J'ai ressenti un blocage dû je pense, en grande partie, à l'enjeu
lié à la réalisation du mémoire et à la
réussite de ma recherche.
1.4 La conduite des entretiens
semi-directifs
Forte de l'expérience dans le cadre exploratoire, j'ai
pris en compte un certain nombre d'éléments pour garantir aux
mieux de bonnes conditions de passation. Ainsi, la question du lieu n'est pas
anodine. Il m'apparait important d'en faire un commentaire et d'aborder
également le travail de transcription effectué.
1.4.1 Le lieu
J'ai mené mes entretiens dans d'autres locaux plus
grands que ceux dans lesquels je travaille habituellement, appartenant aussi
à ID Formation.
J'ai choisi ce lieu car ils possèdent plus de salles
et bureaux avec possibilité d'être plus isolé et au calme.
Je désirais vraiment créer un cadre agréable et convivial
pour mettre à l'aise les personnes interviewées. Cette fois, j'ai
vérifié à plusieurs reprises, que la salle
réservée serait bien disponible les deux jours pendant lesquelles
je faisais mes entretiens.
1.4.2 Le travail de retranscription
Au départ, lorsque je me suis attelée à
la retranscription des enregistrements, je me suis questionnée sur
ce qui doit figurer dans la retranscription finale. Je me suis appuyée
sur l'orientation du sociologue Bourdieu45(*). Face à ce problème, Bourdieu choisit
de supprimer les éléments qui informent sur le contexte de
l'échange : attitudes lors de l'entretien, tonalité
marquées de certaines réflexions, longueur des silences.
Pour la retranscription des entretiens, j'ai choisi de ne pas
retranscrire tous les « euh », toutes les phrases qui
commençaient par un mot. Je n'ai pas corrigé les fautes de
grammaire. J'ai retranscris certaines répétitions, les silences
et les soupirs quand ils me paraissaient importants : « Dans ses
choix de retranscription, P. Bourdieu accepte de reformuler les propos de ses
interlocuteurs, de sorte de faire apparaître plus clairement les
situations rencontrées et les réactions qu'elles
suscitent. »46(*).
L'étape qui suit concerne le choix de l'analyse pour
mes entretiens de recherche. J'ai choisi l'analyse thématique.
2. Analyse des données et
interprétation
2.1 Mode d'exploitation des données
Pour l'analyse de mes entretiens de recherche47(*), j'ai opté pour
l'analyse thématique. « L'analyse thématique a comme
but de dégager les éléments sémantiques
fondamentaux en les regroupant à l'intérieur des
catégories.48(*) »J'ai choisi ce type d'analyse car il me
semblait intéressant de faire ressortir les thèmes dominants.
Ma question de recherche concerne ainsi les personnes suivies
lors du CSP. Je souhaite comprendre en quoi ce dispositif favorise la
reconversion.
En quoi le contrat de sécurisation professionnelle
favorise t'il la reconversion des personnes contraintes à quitter leur
métier ?
En relisant attentivement les entretiens et en les analysant,
j'ai pu en retirer un certain nombre de réflexions. En premier lieu, je
voulais savoir pourquoi elles avaient accepté d'adhérer à
ce contrat. Dans un deuxième temps, j'évoquerai leur ressenti
lors de cette période ainsi que leur possible besoin de reconstruction
identitaire et je parlerai de ce que l'accompagnement dans le CSP leur apporte
sur ces points. Ensuite, je ferai un point sur leur projet soit de
reconversion, de bifurcation ou autre...
Une dernière partie sera consacrée à la
discussion des résultats.
2.2 Raisons du choix du CSP
Pour commencer, il parait intéressant de questionner
les personnes interviewées à propos des raisons de leur
adhésion au CSP.
2.2.1 Accompagnement
Toutes les personnes que j'ai interviewées ont choisi
au départ d'adhérer au CSP pour l'accompagnement
personnalisé qu'il « offrait »que ce soit pour les
formations, unsoutien psychologique ou uneaide administrative. Voici quelques
extraits d'entretiens permettant de situer la projection des personnes
:
Matthieu m'a répondu lorsque je lui ai posé
la question : « déjà au niveau du suivi, des
facilités, plus de facilités pour les formations par rapport
à un chômeur normal qui est en ARE... »(L 12/13
P1)
Pour Claude, le choix du CSP repose sur « le
fait de pouvoir accéder à une formation
professionnelle... »(L 13 /14P1). Quant à Ludovic,
lorsqu'il a été licencié, il s'est dit « de
toute manière si je suis dans les licenciements, ben, il va falloir que
je sois encadré parce que subir un licenciement c'est jamais
agréable au contraire c'est terrible ». (L20 à 22
P1)
Béatrice, elle, reste mal à l'aise lors de
l'entretien. Elle bouge beaucoup sur sa chaise. Lorsque je lui pose la
question, elle semble perdue mais finit par me répondre
« pour moi, c'est plutôt pour reprendre le travail, j'ai fait
pas mal de démarches pour les entreprises au cas où il y aurait
du travail. » (L12/13 P1).
Et, enfin, pour Francine, la situation est un peu
compliquée. En effet, elle avait opté pour le CSP pour suivre une
formation de secrétaire/comptable afin de créer une entreprise
avec son mari. Elle me confie : « Alors c'est tout le
problème en ce moment, la majorité de mon CSP normalement
était consacré à chercher des formations, parce que mon
conjoint et moi-même avons le projet d'ouvrir notre
société. »(L29/31 P1). Mais hélas, son
projet a du être révisé suite à un refus des
banques. Son mari avait dû démissionner pour débuter leur
projet mais suite au licenciement de Francine, les banques ne veulent plus les
financer. Elle doit donc retrouver du travail au plus vite, si elle veut
pouvoir un jour concrétiser la création de leur
société. Elle me dit avec amertume : « ...et
du coup, je recherche pleinement du travail parce que j'ai plus le choix pour
ouvrir la société, il faut au moins que je travaille, ce qui est
un peu dommage. » (L 2/3P2)
Avec du recul, ces personnes sont en demande toutes d'un
accompagnement particulier. Si nous référons à
la « Nébuleuse » de Paul49(*), la forme d'accompagnement qui
me semble la plus appropriée est celle du counselling.
« Le counselling est ainsi un type d'accompagnement
caractérisé par la centration sur des personnes « normales
», la prise en compte de leur développement à l'occasion
d'une situation-problème, la mobilisation de leurs ressources,
l'intégration de l'interaction personne-environnement50(*). »
Ainsi, dans l'accompagnement du CSP, les conseillers
reçoivent toujours les mêmes personnes à un rythme
régulier et peuvent les guider en apprenant à les
connaître. Les professionnels peuvent se concentrer sur chaque personne
et développer une réelle relation de confiance.
2.2.2 Avantages financiers
La plupart des personnes interrogées ont opté
pour le CSP pour bénéficier des avantages financiers qu'il offre.
En effet, pendant une année, elles bénéficieront de 75% de
leur salaire brut. C'est le cas Mathieu qui l'évoque clairement :
« ...et aussi le maintien de salaire pendant 1
an ».(L13 P1). Claude va également dans ce
sens : « ...et moi personnellement plus avantageux de
pouvoir adhérer au CSP, tout d'abord pour le maintien de salaire pendant
12 mois... » (L10 à 12 P1). Francine le souligne vivement
aussi : « ...ben le CSP, je ne vais pas vous mentir, au
niveau finances, y a pas photo ! »(L16/17 P5). Quant à
Ludovic et Béatrice, ils n'en ont pas parlé.
Les personnes interviewées ont ainsichoisi au
départ le CSP pour son aide personnalisée dans les
démarches administratives (les formations, recherche d'emploi...) ou sur
le plan psychologique. L'attrait financier représente un atout mais qui
arrive en deuxième position selon leurs réponses, d'ailleurs deux
ne l'ont pas évoqué.
Nous allons maintenant tenter de comprendre au travers de
leurs propos de quelle manière le CSP peut accompagner ces personnes
vers une reconversion.
2.3 Une transition difficile
Toutes les personnes interrogées ont vécu le
licenciement de façon singulière comme nous allons pouvoir le
constater à travers leurs propos.
Tout d'abord, tous appréciaient leur métier et
auraient souhaité rester dans leur entreprise.
En effet, lorsque je demande à Béatrice si elle
aurait aimé rester dans l'entreprise s'il n'y avait pas eu de plan
social, elle me répond :« Oh oui oui. J'aimais bien
mon travail, j'étais motivée. J'étais toujours correcte
avec eux et j'aimais bien mon travail. » (L26/27 P1)
etFrancinepartage également avec force ce point de
vue: « Très très bien c'était
l'idéal, j'ai toujours travaillé dans le commerce donc y a pas de
soucis. » (L13 P1) et elle ajoute « Oui, si tout ne
s'était pas passé comme ça, je serais restée
plusieurs années parce que la majorité d'ancienneté
là-bas c'est 14,16 ans donc c'est vraiment des emplois qui passionnent
beaucoup de monde ...» (L 22/23 P1).
Claude affirme aussi : « ...oui
personnellement j'aimais bien ce que je faisais. » (L9/10
P2).Mathieu s'exclame : « Ah bien ! Ca s'est
toujours bien passé... » (L16 P1). Enfin
quantà Ludovic, il m'explique: « Bien, comme je
travaillais perso, je dépendais de moi-même, j'avais un chef, mais
je dépendais de moi-même donc je l'ai bien
vécu... » ( L2/3 P2).
Le changement de situation est d'autant plus difficile que
toutes ces personnes appréciaient leur métier.A propos de cette
période de transition, nous rejoignons ce que Denaveà
écrit : « Or cette phase de transition entre deux
emplois est précisément la plus anxiogène pour les
salariés redoutant le chômage de longue durée ou les
emplois précaires lors d'une bifurcation professionnelle. La France
connaît effectivement une faible sécurité de l'emploi (la
probabilité du chômage est plus forte en France que la moyenne des
pays européens) et les transitions du chômage vers l'emploi
(comme du contrat à durée déterminée vers le
contrat à durée indéterminée) sont également
faibles. Les risques pèsent plus fortement sur les plus
âgées et les moins qualifiés (qui connaissent une plus
forte probabilité de rester longtemps au chômage).51(*) »
Cette situation semble compliquée pour eux, ces
personnes relatent les propos suivants :
Mathieu avoue en soupirant : « Y a des
moments ça va et y a des moments, ça va moins
bien ». (L 34 P 1. Claude exprime son
appréhension de la situation par rapport à sa famille :
« C'est très compliqué, surtout avec 3 enfants.
Après 14 ans, le coup est dur à encaisser mais... »
(L2/3P4). Un long silence suit ses propos. Puis il ajoute
« Après c'est une appréhension de ne pas pouvoir
retrouver du travail au plus vite. ». (L20/21
P4).Béatrice confirme le vécu de la violence du
licenciement
: « Un peu très dur parce que je
pensais pas être licenciée et donc c'était dur parce que
j'ai toujours travaillé ! c'est pas évident !
Arrivé à ce point là c'est vrai que c'est très
dur ! » (L21/22 P2). Quant à Francine, elle
évoque le choc de la nouvelle du licenciement :
« Mais au début, c'était très dur, hein
forcément, on annonce ça comme ça, c'est très dur
surtout quand on s'y attend pas, surtout une boîte aussi énorme
que celle-ci. » (L30/31 P3) et elle me confie un plus
tard : « Mais là,je ressens une baisse de
confiance en moi comme la société ne peut pas s'ouvrir si je ne
trouve pas d'emploi du coup tout repose sur moi en ce moment. C'est un peu
délicat, surtout que mon conjoint a du démissionner de son CDI
pour ouvrir la boîte, et arrivés là, on ne peut pas ouvrir
la boîte du coup, on est dans une panade pas possible ! »
(L34 à 38 P3). Ludovic partage leurs avisà tous quand
il dit au sujet du licenciement : « Très mal !
Au départ très mal. » (L17 P3)
J'ai ressenti dans leurs mots un poids, une lourdeur, une
foule de questions qui se bousculent dans leur tête. « En
définitive, quel que soit le type de transition, une
légitimité professionnelle est à reconstruire, une phase
de deuil et de désengagement/réengagement toujours
éprouvante apparait,une réorganisation des sphères de vie
et une construction identitaire se dessinent52(*) ». (Jourdain, cité par Mazade et
Hinault).
2.4 L'existence de tensions identitaires
En introduction de cette partie, il me semble judicieux de
m'appuyer sur des propos de Kaddouri qui explique que « Dans
ces contextes, les personnes concernées s'inscrivent le plus souvent
dans un travail de redéfinition identitaire, de clarification et de
repositionnement conduisant à une bifurcation, mais pas
nécessairement. 53(*)». En effet, à travers les propos des
personnes interviewées, nous allons nous apercevoir que même si
ces personnes se sentent en tension, toutes ne souhaitent pas un changement
total de leur identité.
La personne se trouve en tension identitaire entre son
identité passée liée à son ancien métier et
son identité future, à ce stade encore floue. Pour y
remédier, elle devra mettre en place des « stratégies
identitaires » comme l'explique Kaddouri54(*).
J'ai retrouvé parmi les personnes interrogées
trois types de dynamiquesidentitaires. La « dynamique de
continuité identitaire » semble correspondre à
Béatrice. Cette dame souhaite absolument conserver son identité
passée car elle lui convenait parfaitement. Elle mettra en place une
stratégie de « préservation identitaire
collaborative » avec le dispositif du CSP afin de
réussir à retrouver son identité passée.
D'ailleurs, elle me déclare : « Le CSP, euh, rester
toujours sur ma branche. Comme, quoi j'ai toujours travaillé dans le
poisson et moi, je voudrais rester dans ma branche dans la
production » L1/2 P2 et elle ajoute « J'ai quitté
à l'école à 15 ans et demi, j'ai commencé à
travailler à 16 ans, j'ai jamais été au chômage.
J'ai toujours travaillé depuis là ». (L8/9 P2) pour
terminer par « Un peu très dur parce que je pensais pas
être licenciée et donc c'était dur parce que j'ai toujours
travaillé ! c'est pas évident ! Arrivé à
ce point là c'est vrai que c'est très dur ! ».
(L21/22 P2).
La « dynamique de transformation
identitaire » semble convenir à Ludovic. Ce monsieur a suivi
une formation au numérique pour se préparer à la retraite.
Il était terrifié par la nouvelle technologie. Il me
confie : « Et puis, j'ai fait un stage informatique qui m'a
aidé. Ça a été trois mois peut-être intenses,
parce que lorsqu'on connait pas ben c'est intense. Mais arrivé
là, c'était bien c'est ce que je voulais. J'enviais tous les gens
qui étaient devant leur ordinateur maintenant je peux le
faire. » (L 29 P3 et 1/2P 4)et il continue en me disant
« Du coup la retraite va être ...Elle va être bien
prise ! Oui et je vais sur les sites de retraite et je peux
préparer les papiers. Je me prépare déjà, je me
prépare tout doucement ». (L5/6 P5).
Pour les autres, la « dynamique de gestation
identitaire » se rapproche de leur profil. Leur projet identitaire
est en cours de réflexion. Ils ne sont pas encore
déterminés sur ce qu'ils veulent devenir. Francine pensait
créer son entreprise avec son mari suite à son licenciement et
profiter du CSP pour suivre une formation de secrétaire comptable. Mais
des éléments extérieurs sont venus contrariés son
projet qu'elle doit remettre à plus tard. Elle est donc un peu perdue et
doit trouver un emploi rapidement mais ne sait où travailler
réellement. On ressent dans cet extrait toutes les questions qu'elle se
posent : « Mais là ,je ressens une baisse de
confiance en moi comme la société ne peut pas s'ouvrir si je ne
trouve pas d'emploi du coup tout repose sur moi en ce moment. C'est un peu
délicat, surtout que mon conjoint a du démissionner de son CDI
pour ouvrir la boîte, et arrivés là, on ne peut pas ouvrir
la boîte du coup, on est dans une panade pas possible ! ».
(L 34 à 38 P3).Claude était cariste et a souhaité
suivre une formation de technicien de maintenance pendant la première
partie de son CSP. Il souhaite se reconvertir mais réfléchit
encore. En questionnant les boîtes intérimaires, il s'est
aperçu que toutes exigeaient une première expérience dans
le métier de technicien de maintenance. Etant marié et ayant 3
enfants, il a besoin de retrouver du travail au plus vite :
« L'objectif premier c'est d'obtenir le diplôme, ensuite
j'aimerai bien m'orienter vers le métier de technicien mais après
en ayant déjà eu des entretiens avec les boîtes
d'intérimaire, eux, ils recherchent du monde mais qui ont de
l'expérience. C'est par rapport à la demande du client.
Après il y a très peu d'entreprises qui sont prêtes
à prendre quelqu'un qui vient juste de sortir d'un parcours de formation
pour la former sur place, la prendre, la former et ensuite l'embauché
dans l'entreprise mais vraiment la former sur site. Après je ne mets pas
un frein là-dessus parce que je sais très bien que ça va
être compliqué. Par rapport aussi à mon expérience,
je ne vais pas me fixer qu'un objectif à partir dans la maintenance si
j'ai des propositions en tant qu'opérateur ou en tant que cariste, enfin
tout ce qui concerne un peu les différents postes de l'industrie,
j'accepterai avec plaisir la mission. Après le but, c'est de rentrer
dans l'entreprise en tant qu'opérateur et après essayer
d'évoluer en tant que technicien si possible. Ce serait un peu dommage
d'avoir suivi un cours de formation, d'avoir passé un diplôme sans
le faire. Tout ce qu'on apprend là-bas, ça ne peut être que
bénéfique pour moi. Mais tout de suite après ça
risque d'être compliqué ! » L13 à 26
P5.
Quant à Mathieu, c'est le seul qui a retrouvé un
emploi et qui donc se sent mieux. Il sait ce qu'il veut, il dit
d'ailleurs : « moi personnellement, je le vis bien parce que
je suis actif dans mes recherches. Donc je ne suis pas de nature à me
laisser aller sur moi-même à partir du moment où l'on
montre aux employeurs, on peut retrouver du travail rapidement. »
(L6/8P4).
Finalement, l'accompagnement inclus dans le contrat de
sécurisation professionnelle peut-il les aider dans leur quête
identitaire qui est, je pense, le point de départ de cette nouvelle vie.
2.5 Le CSP, une aide à la reconstruction
identitaire ?
Toutes les personnes interviewées sont plus ou moins
à la recherche d'une nouvelle identité. Fragilisées par
leur licenciement, privées d'un métier qu'elles aimaient elles
cherchent à se reconstruire. Au sujet du CSP,
Francine souligne: « C'est un peu plus que le
pôle emploi normal, euh après à la base c'est plus
après l'accompagnement d'une personne toujours attitrée. C'est
sympathique aussi, parce que moi voir 50 000 personnes moi ça
m'intéresse pas parce que s'il faut raconter notre histoire à
chaque personne, je veux dire, on n'a pas fini, le pôle emploi, ils ont
pas que deux hein ! Donc c'est vrai que c'est un peu délicat et
puis mais c'est vrai que là, le CSP m'a apporté, c'est vrai
peut-être de la confiance... ».(L 17 à 22 P5).
Ludovic explique aussi : « J'ai eu l'occasion d'avoir
une conseillère qui a su me comprendre, on a su dialoguer ensemble. Elle
a su ce que je voulais, ce que je recherchais. Elle m'a fait comprendre que
peut-être je n'aurais plus le même travail, qu'il fallait qu'on
trouve autre chose. Je lui ai parlé un petit d'informatique et du coup,
elle m'a orienté sur ça. Au début cela a été
une petite galère, mais après ça s'est avéré
satisfaisant. » (L12 à 17 P4)
Claude parle lui d'une remise en question lors de cette
période : « Donc là aujourd'hui, je me suis
remis en question, par rapport à la cellule d'accompagnement, pour
m'orienter vers vraiment ce qui me convenait le plus. »
(L16/17P4).
Perdue car elle a toujours
travaillée,Béatricerépète à
plusieurs reprises son envie de retrouver du travail. Pendant cette
période, elle garde ses habitudes : « Je me
lève comme si j'allais travailler » (L7 P3). Elle
déclare aussi : « Ca fait 6 mois que je n'ai pas
travaillé. J'espère retrouver du travail d'ici la fin du CSP.
Mais pour l'instant, je n'ai rien du tout. Je cherche un peu partout mais...
c'est très dur quand même. Le temps passe trop vite. »
(L28 à 30 P3) et de nouveau dit :« Oui
très difficile. Avec l'âge que j'ai. J'ai toujours
travaillé et puis c'est très dur de retrouver du
travail ». (L16/17 P3). Ses propos montrent la place importante que
tient celle du travail dans sa vie. Il est même difficile de la faire
parler d'autre chose, de lui demander son avis sur le dispositif. Son
inquiétude principale reste celle de retrouver du travail. Mathieu lui
s'était préparé à ce licenciement, et il
déclare à ce sujet : « Ben pffff, plus ou
moins bien parce que je m'y étais préparé... »
(L16/17 P2). Volontaire, il ajoute : « ... de toutes
façons même moi, je ne suis pas de nature défaitiste donc
je me dis, je suis encore jeune j'ai des capacités, je vais rebondir
rapidement... » (L30/31 P2).
Toutes les personnes interrogées ont ressenti le besoin
d'être écoutées, rassurées et comprises :
« L'individu possède en lui-même des
ressources considérables pour se comprendre, se percevoir
différemment, changer ses attitudes fondamentales et son comportement
vis-à-vis de lui-même. Mais seul un climat bien
définissable, fait d'attitudes psychologiques facilitatrices, peut lui
permettre d'accéder à ses ressources. »
(Rogers,1962).
Les conseillers vont en écoutant attentivement ces
personnes, les aider à puiser en eux les ressources qui leur permettront
de progresser.
2.6 Différentesattitudes face à un
avenir professionnel
Lors de ces entretiens, j'ai rencontré cinq personnes.
Chacune ont des perspectives et des attitudes différentes face à
leur avenir ce qui entraînent différentes appropriation du CSP.
Au fil des entretiens, ils mes les ont
détaillés :
Augmentation des compétences
Mathieu, âgé de 37 ans, vivant en concubinage, 1
enfant, aimait son ancien travail et a souhaité augmenter ses
compétences afin de retrouver du travail rapidement.
Mathieu est quelqu'un de volontaire qui a su vite rebondir et
utiliser ce que le CSP lui offrait comme opportunité pour les
formations. Il a passé ces permis CACES55(*) et passé dans la foulée des entretiens
dans plusieurs entreprises.
« Ah ben, j'en ai profité pour remettre
à niveau mes formations, vu que moi j'étais cariste. J'en ai
profité pour repasser tous mes CACES, déjà et après
moi ce que je veux, c'est retravaillé rapidement, j'ai
déjà eu des entretiens dans plusieurs entreprises, j'attends des
réponses (silence) ». (L1 à 4 P2)
Lors de notre entretien, nous avons été
d'ailleurs interrompus, (L 14 P2), par l'appel d'un employeur qui lui a
proposé un rendez vous pour passé des tests suite à un
entretien.
Si Mathieu réussit les tests, il décrochera un
CDD de 18 mois. Il l'explique à la fin de l'entretien :
« Non pour une mission de 18 mois, je dois passer des tests
à Dunkerque chez A. et ensuite si c'est validé je démarre
ma mission ». (L12/13 P4)
Création d'entreprise
contrariée
Francine est âgée de 32 ans, elle vit
maritalement et a 2 enfants. Choquée d'avoir été
licenciée, elle faisait partie d'une grosse entreprise dont
l'activité était la prise de photographies des
bébés dans les maternités. Elle aimait son métier
même si cela lui demandait de l'investissement en termes de
déplacements. Elle avait pensé utiliser la période de CSP
pour se former en tant que secrétaire comptable afin de créer une
société avec son compagnon. Tout était mis en place avec
sa conseillère quand les banques ont mis leur veto. Quelques mois
auparavant, son compagnon avait dû démissionner de son emploi dans
la perspective de créer cette société. Malheureusement,
maintenant qu'elle aussi se trouve au chômage, les banques ne veulent pas
prendre le risque de les financer. Il faut qu'elle retrouve un emploi
rapidement pour pouvoir créer son entreprise. Juste avant de venir me
rencontrer, elle sortait du bureau de sa conseillère pour faire le
point. Elle expose donc la situation qu'elle est entrain de vivre :
« Donc j'aurais voulu faire une formation secrétaire
comptable étant donné que j'aurais été dans la
partie administrative, papiers, et comptabilité de la
société sauf que ça ne s'est pas déroulé
comme prévu. Donc, étant donné que notre projet arrive au
bout, les banques ont refusé notre projet si je n'avais pas d'emploi.
Parce que forcément mon emploi est une sécurité en plus
pour entre guillemets, en plus pour notre vie de famille, ce qui est normal,
hein, attention mais ils comptaient pas du tout sur le CSP mais un emploi en
CDI. Donc j'ai du refuser mes formations, ce que je viens d'annoncer à
ma conseillère qui a fait des pieds et des mains à l'OPCA et tout
pour avoir mes formations et du coup, je recherche pleinement du travail parce
que j'ai plus le choix pour ouvrir la société, il faut au moins
que je travaille, ce qui est un peu dommage ...». (L31 à36 P1)
et (L1 à 4 P2)
Son projet est donc remis à plus tard, elle doit
maintenant retrouver un emploi au plus vite si elle veut le concrétiser
à un moment donné.
Volonté de conserver le même
métier
Mme B. est âgé de 54 ans, elle est mariée
sans enfants. Elle a commencé à travailler à 16 ans dans
les magasins de marée en tant qu'ouvrière de conditionnement et
n'a jamais cessé de travailler jusqu'à son licenciement
économique. Elle me raconte son parcours : « J'ai
quitté à l'école à 15 ans et demi, j'ai
commencé à travailler à 16 ans, j'ai jamais
été au chômage. J'ai toujours travaillé depuis
là. » (L8/9 P2). Elle est très affectée et
répète sans arrêt qu'elle désire retrouver un
travail identique au précédent.Même quand je l'interroge
sur autre chose, elle revient dessus. Lorsque je lui demande de me parler de
son ressenti vis-à-vis de l'accompagnement qui lui est proposé.
Elle me déclare : « Euh
là depuis que je suis en CSP, je suis avec A.B, ils font très
bien leur travail (grand silence). J'allais dire aussi, j'ai du mal à
trouver du travail et je voudrais, comme je cherche dans ma branche mais pour
l'instant, pour l'instant, je n'ai rien du tout pour
l'instant. ». Je rebondis et lui demande si le travail est
difficile à trouver et elle me répond: » Oui
très difficile. Avec l'âge que j'ai. J'ai toujours
travaillé et puis c'est très dur de retrouver du
travail ». (L 10 à 17 P3).
Pour essayer de l'aider à reprendre confiance en elle,
la conseillère lui a proposé une formation informatique.
Béatrice a acceptée, même si sa priorité reste de
retrouver un emploi dans son domaine.
« Ca fait 6 mois que je n'ai pas
travaillé. J'espère retrouver du travail d'ici la fin du CSP.
Mais pour l'instant, je n'ai rien du tout. Je cherche un peu partout mais...
c'est très dur quand même. Le temps passe trop vite. D'ici la fin
du CSP, si je n'ai pas de travail, ça va être long bon ben
là, je vais faire la formation informatique pour apprendre plus mais
pour l'instant j'ai rien du tout. J'attends. » (L28 à 32
P3)
Cette dame semble avoir du mal à se projeter vers autre
chose que son ancien emploi, elle a peur des conséquences que cela
pourrait avoir sur son avenir. Il n'est pas certain qu'elle éprouve un
réel épanouissement dans ce métier mais retrouver un
emploi similaire à l'ancien la rassurerait.
« Le métier peut n'être qu'un simple
moyen de subsistance et la question des plaisirs liés à son
exercice ne se pose pas systématiquement. Les enquêtés qui
recherchent, avant tout emploi salaire, et sécurité (à
moyen ou à long terme) sont majoritairement issus des milieux
populaires. 56(*)»
De plus, tout le monde n'a pas les capacités à
se projeter, cette personne est issue d'un milieu populaire, « Or les
situations socio-économiques les plus précaires
« tendent à éloigner des pratiques
d'anticipation »57(*)(D Thin, cité par Denave)
Bifurcation professionnelle
Claude est âgé de 35 ans, marié, 3
enfants. Opérateur/ conducteur de ligne dans son ancien emploi, il a
saisi l'occasion de se reconvertir en tant que technicien de maintenance. Il
suit une formation pour obtenir le titre professionnel dans ce domaine. Les
différents ateliers et entretiens individuels auquel il a
participé, lui ont permis de découvrir qu'il avait des
compétences pour ce métier. Il explique : « A
la base, j'aurai voulu justement améliorer mes compétences en
tant qu'opérateur-conducteur de ligne mais aussi après je me suis
un peu rendu compte, suite aux ateliers, qui ont été
proposé dans le cadre du CSP. Je ne sais pas comment vous expliquer
ça. Je me suis rendu compte que j'avais quelques compétences qui
correspondaient justement à ce métier. Je me suis aussi
renseigné sur le marché du travail dans ce secteur, donc
apparemment c'était un secteur assez prometteur donc voilà, j'ai
voulu tenter ma chance et essayer de me reconvertir en tant que technicien de
maintenance ». (L 16 à 22 P1)
Il est vrai que dans son ancien métier, il était
frustré de ne pas avoir de possibilité d'évolution. Il
avoue lors de l'entretien : « Bon après, il n'y avait
pas trop de possibilité d'évolution ». (L 8P2)
Le choc du licenciement passé, il a semble avoir saisit
une chance de pouvoir augmenter en compétences et se reconvertir dans un
métier où il est possible d'évoluer. Il reste quand
même prudent, car, père de 3 enfants, travailler reste, pour lui,
une priorité. Il se dit prêt à revenir dans un emploi
similaire à l'ancien pour avoir un emploi s'il n'en trouve pas dans son
nouveau domaine : « Par rapport aussi à mon
expérience, je ne vais pas me fixer qu'un objectif à partir dans
la maintenance si j'ai des propositions en tant qu'opérateur ou en tant
que cariste, enfin tout ce qui concerne un peu les différents postes de
l'industrie, j'accepterai avec plaisir la mission. Après le but, c'est
de rentrer dans l'entreprise en tant qu'opérateur et après
essayer d'évoluer en tant que technicien si possible. Ce serait un peu
dommage d'avoir suivi un cours de formation, d'avoir passé un
diplôme sans le faire. Tout ce qu'on apprend là-bas, ça ne
peut être que bénéfique pour moi. Mais tout de suite
après ça risque d'être compliqué ! »
. (L19 à 26 P 5)
Pour lui, l'accompagnement du CSP lui permis de mieux se
connaître, à reprendre confiance en lui et surtout à bien
s'orienter. Il le répète à plusieurs reprises à
différents endroits : « Et être guidé
aussi dans l'orientation, de ce qui correspond à nos compétences.
Moi, j'ai participé à tous les ateliers, parce que moi tout ce
qui est création de CV, lettre de motivation et préparation
d'entretien d'embauche, moi c'est des chose par lesquelles, je ne suis jamais
passé donc ça c'était une appréhension , c'est
encore une appréhension. D'ailleurs quand on a un entretien. Mais
ça m'a permis de me découvrir, repasser par là, de nous
préparer à des éventuels entretiens, beaucoup de chose
comme celles-ci. » L28 à 34 P 4)et« Et puis
aussi savoir se décrire en quelques mots, ça parait peu mais
c'est beaucoup parce que le jour où je suis arrivée et qu'on m'a
posé la question et je vous avouerais que j'ai eu un moment de doutes.
Je ne savais pas quoi répondre. Et ben le fait de participer à
tous ces ateliers m'a permis de prendre un pu plus confiance en moi aussi, de
savoir plus m'exprimer par rapport aux éventuels entretiens sur beaucoup
de choses. Moi, j'ai bien aimé c'est l'accompagnement et l'aide qu'on a
eu pour la création de Cv et tout ça et aussi la
préparation aux entretiens qui m'ont été très
bénéfiques aussi « (L1 à 7 P5)
« Ca m'a permis de me redécouvrir un
petit peu, de bien m'orienter. Là, actuellement je sais que j'ai pris la
bonne décision, enfin j'ai pris la décision par rapport à
des conseils de la cellule d'accompagnement et, là à l'heure
actuelle, je suis arrivé à la moitié de ma session, je
n'ai aucun doute, je me suis bien orienté. » L1 à 4
P6
Une formation pour un départ en retraite
serein
Ludovic, âgé de 59 ans et demi, il vit seul. Il a
commencé à travailler à l'âge de 16 ans. Cariste en
fin de carrière, il pensait terminer sa carrière dans
l'entreprise qui l'a licencié. Malgré le choc du licenciement et
le fait de devoir quitter un métier qu'il appréciait, il se
résigne en attendant la retraite « maintenant, je laisse
venir. Je n'ai pas à me plaindre... Oui mieux que certains qui ont
encore quelques années à faire. Moi, je suis déjà
plus serein. » (L26 et 28 P3). Sa conseillère
s'apercevant de la peurde Ludovic pour l'informatique, lui propose de
l'inscrire à une formation. Un peu réticent au départ, il
finit par accepter. Il le confirme : « Je lui ai parlé un
petit d'informatique et du coup, elle m'a orienté sur ça. Au
début cela a été une petite galère, mais
après ça s'est avéré satisfaisant. »
(L15/17 P4). Et insiste ensuite sur son soulagement à avoir
accepté cette formation : « J'ai plus peur de
l'ordinateur, avant c'était mon cauchemar et maintenant au contraire je
cherche à aller plus loin. » (L23/24 P4). Il s'en sert
même pour ses loisirs, heureux présage pour sa future
retraite : « Surtout oui, je fais de l'aquariophilie, les
oiseaux, je fais de la reproduction d'oiseaux donc ça m'est utile pour
les accouplements, les pontes, les éclosions. Donc maintenant, ce n'est
plus sur un calendrier comme avant, c'est sur internet, je sors des
imprimés, je sors des fiches. » (L27 à 29 P4)
.
De ces cinq situations singulières, j'en déduis
donc les personnes ont une manière très différentes de
s'approprier le CSP. Le contrat est le même pour tous, son apport sera
différent selon les personnes.
Au cours de ces entretiens, j'ai pu constater que le CSP
apportait une aide psychologique à ces personnes. Les personnes
apprécient le suivi personnalisé et l'écoute dont elles
font l'objet et le fait de rencontrer toujours la même personne.
Je retire de tous ces entretiens que l'accompagnement au cours
du CSP leur apporte une aide certaine sur le plan identitaire et un soutien
indéniable dans cette transition.
3 Discussion et perspectives
Au regard des résultats obtenus lors des entretiens, je
constate que le contrat de sécurisation professionnelle est une aide
pour ces personnes contraintes à quitter leur métier. L'aide se
ressent notamment au niveau d'un étayage spécifique comme appui
(entretien individuel, appui social et psychologique...). Ce dispositif
structure l'année de transition de ces personnes par ses rendez vous
réguliers. (Environ tous les 10 jours). C'est un soutien aussi pour
toutes les démarches administratives et un
« confort » financier.
C'est ce climat de confiance établi entre la personne
suivie et le conseiller qui va permettre la reconstruction identitaire qui
permettra à son tour de progresser. Cette écoute et cette
démarche compréhensive 58(*) sont, au regard des entretiens effectués, une
partie essentielle de l'accompagnement dans le cadre du CSP.
Il existe aussi un dispositif plus approfondi mis en place
spécialement pour les adhérents du CSP. C'est un appui social et
psychologique. Une des personnes que j'ai interrogées en a
bénéficié. Si la conseillère ressent un quelconque
signe de détresse de la part du bénéficiaire, elle peut la
diriger vers un autre service où interviennent des psychologues.
Toutes les personnes que j'ai interrogées ont suivi au
moins une formation : passage de CACES59(*), informatique, titre professionnel... Une formation
a été reportée à cause d'évènements
extérieurs, ici il s'agit d'un refusde financement des banques pour la
création d'une entreprise qui concerne Francine.
Ce dispositif favorise donc le suivi de formation.
En revanche, j'ai constaté qu'une seule personne sur
les 5 inscrites depuis six mois a retrouvé un emploi. A ce stade et au
terme de 6 mois de suivi, je constate que le nombre de personnes étant
en reconversion effective ou en emploi n'est pas élevé. Mais il
convient de rester prudent car ses résultats sont au regard d'un
échantillon peu important et à mi-parcours. Il est à noter
que le climat économique du Boulonnais se dégrade, cela peut
poser question au niveau local. Ce dispositif les aide à ne pas se
décourager pendant cette étape qui se veut transitoire. A ce
stade sur les 5 personnes, aucune n'est en emploi dans un autre domaine que
précédemment.Je me suis projetée en termes de
réflexionaussi après la fin du dispositif. Qu'adviendra t'il des
personnes n'ayant pas retrouvé de travail ? Ces personnes ont
été accompagnées régulièrement pendant une
année, les conseillers les ont accompagnées, guidées.
Certaines ont suivi une formation, et donc avec l'espoir de retrouver du
travail dans un nouveau domaine. Si ce n'est pas le cas à la fin de
cette année, après tant d'espérance, le retour à la
réalité n'est-il pas encore plus difficile ? Elles vont se
retrouver à nouveau seules, sans suivi personnalisé, face
à leur situation.
Cependant,je note néanmoins la force du dispositif dans
sa capacité à prendre en considération la personne dans sa
singularité, dans un étayage qui joue une fonction rassurante
dont les effets peuvent être réinvestis. Il s'agit
également d'un espace de parole, d'échanges
privilégiésqui peuvent entrainer des effets positifs pour la
suitesans ignorer la complexité de l'issue. Ainsi, une recherche
à un an, voire plus, de la sortie du CSP pourrait donner d'autres
enseignements et ouvrir une autre lecture de l'usage du CSP dans la trajectoire
des personnes qui ont été contraintes à un
licenciement.
Conclusion
Tout d'abord, il convient de revenir à l'origine de
mon questionnement. En stage chez ID Formation, j'ai eu l'opportunité de
suivre des personnes adhérentes au contrat de sécurisation
professionnelle. Ces personnes licenciées économiquement
étaient susceptibles de se reconvertir. Ce sujet m'intéressait
particulièrement car il faisait écho à ma propre
expérience. Suite à une période d'observation et de
réflexion, je décidais de focaliser ma recherche, dans le cadre
mon mémoire, sur ces personnes inscrites en CSP.
Je m'intéressais aux tensions identitaires les
traversant lors de cette période de transition. Je souhaitais comprendre
comment ce dispositif les accompagnait vers une reconversion.
A travers la lecture de l'ouvrage de Sophie Denave60(*) intitulé,
`Reconstruire sa vie professionnelle », j'ai pu approfondir les
divers aspects théoriques de la reconversion ou de la bifurcation. J'ai
découvert ce que signifiait la notion de
« biographisation » grâce à Christine
Delory-Monberger61(*). En
effet, ce terme m'interpellait particulièrement. J'ai pu donc
saisir la place de l'énonciation du parcours de vie, que ce soit oral
ou écrit, dans la progression des personnes. Ces mises en mots les
amènent à la réflexivité nécessaire pour la
construction de leur futur.
Suite à l'étude des concepts, je suis
allée confronter mes hypothèses au terrain, en interrogeant un
échantillon de cinq personnes adhérentes au CSP depuis environ 6
mois.
Je voulais comprendre en quoi le CSP les aidait à se
reconvertir.
Chaque personne interviewée a ressenti un soutien moral
qui leur a permis de « s'accrocher » malgré le choc
du licenciement économique. L'accompagnement s'avère primordial
dans ces moments de doute, de reconstruction identitaire et professionnelle.
Je rejoins Kaddouri62(*)
lorsqu'il parle de « dynamique identitaire » :
identité en mouvement perpétuel. La tension ressentie entre
l'identité passée et future met en route des
« stratégies identitaires », «
stratégies identitaires » qui permettront de réguler
cette tension.
Le parcours de ces personnes a une résonnance
particulière avec mon expérience personnelle. Au cours de la
période de transition, j'ai ressenti comme eux ces tensions, ce
questionnement incessant sur ma capacité à avancer, à
réussir ma reconversion. L'accompagnement bienveillant et
compréhensif, en stage et à l'université, de mes tutrices,
la mise en mots pour la réalisation de mon mémoire m'ont permis
d'avancer pas à pas. J'ai aussi énormément
apprécié les temps de lecture. J'ai enfin posé des mots,
des notions sur ce que j'étais entrain de vivre. Cette année de
professionnalisation m'a permis d'apprendre un nouveau métier lors de
mon stage mais aussi, lors de mes cours à l'université, de
nouvelles attitudes à adopter. La distanciation aux idées
reçues, aux jugements me parait maintenant une évidence.
Ce que je retiens de mon expérience au coeur du CSP,
c'est la dimension humaine que les conseillers conservent précieusement.
Pendant cette année, le mot « accompagnement » a
pris tout son sens.
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Sitographie
Site diagnostic du territoire 2015 de l'agglomération du
Boulonnais
Sites : www.gouv.fr
Table des annexes
Annexe 1 : Organigramme ID Formation Boulogne sur mer
................................. 57
Annexe 2 : Chartre d'engagement à l'accompagnement
CSP................................. 58
Annexe 3 : Guide d'entretien
..................................................................... 59
Annexe 4 : Grille d'entretien
..................................................................... 64
Annexe 5 : Entretien avec Mathieu
.............................................................. 65
Annexe 6 : Entretien avec
Francine............................................................... 69
Annexe 7 : Entretien avec Claude
................................................................ 75
Annexe 8 : Entretien avec Béatrice
............................................................... 81
Annexe 9 : Entretien avec Ludovic
............................................................... 85
Table des matières
Remerciements
Vers une reconversion professionnelle
......................................................... 1
Une négociation identitaire souhaitée
........................................................... 2
La cellule d'appui à la Sécurisation
Professionnelle : un outil pour les reconversions professionnelles
« contraintes »
..................................................................
3
Première partie
1. Un contexte socio-économique
particulier........................ 4
2. Id
Formation...............................................................
5
2.1 Historique
......................................................................
6
2.2 Type de structure et son fonctionnement
................................ 6
2.3 Philosophie, atouts et contraintes
......................................... 8
2.4 Organisation interne locale
................................................. 9
2.5 Les activités et
partenaires.................................................. 9
2.5.1 Les activités
.................................................................................
9
2.5.2 Les partenaires
.............................................................................
10
3. Ma mission dans le cadre du Contrat de
sécurisation
professionnelle.................................................................................10
3.1 Négociation de ma mission
................................................... 10
3.2 Le contrat de sécurisation professionnelle
................................ 12
4.Observations, constats et questionnements
................................. 14
4.1 En observation
..................................................................14
4.2Constats
...........................................................................
16
4.3 L'élaboration d'un questionnement
........................................ 16
Deuxième partie
1. Au coeur du métier de Conseiller en
Insertion
Professionnelle......................................................................
18
1.1Vers un accompagnement
................................................... 18
1.2 Vers une démarche compréhensive
....................................... 18
1.3 L'écoute au service de l'accompagnement
............................... 19
1.4 L'orientation comme
perspective..........................................20
2.Au plus près des
accompagnés...........................................
21
2.1 Des situations singulières face au risque de
reconversion ............... 22
2.2 Le CSP : une usine à projets ?
............................................... 23
2.3 Reconversion ou bifurcation
................................................ 24
2.4 Dynamiques identitaires et transitionprofessionnelles
............... 25
2.4.1 Dynamiques identitaires variées
......................................................... 26
2.4.2 Transition professionnelles
.................................................................
28
2.5 La biographisation au service de
l'accompagnement.................. 29
Troisième partie
1. Dispositif
méthodologique..............................................
32
1.1 Définition et explicitation du choix de
l'outil : L'entretien
semi-directif......................................................................... .......
32
1.2 Construction de l'échantillon
............................................... 33
1.3 L'expérience de l'entretien exploratoire
................................. 34
1.4 La conduite de l'entretien semi-directif
.................................. 35
1.4.1 Le lieu
..........................................................................................36
1.4.2 Le travail de retranscription
..............................................................36
2. Analyse des données et
interprétation............................. 37
2.1 Raisons du choix du CSP
................................................... 37
2.1.1 Accompagnement
...........................................................................
37
2.1.2 Avantages financiers
.......................................................................
39
2.2 Une transition difficile
...................................................... 39
2.3 L'existence de tensions identitaires
....................................... 41
2.4 Le CSP, une aide à la reconstruction ?
................................... 43
2.5 Différentes attitudes faces à leur
avenir professionnel ................ 45
3. Discussion et
perspectives.............................................. 50
Conclusion
............................................................................................52
Bibliographie.........................................................................................
54
Tables des annexes
.................................................................................
56
Annexes ...............................................................................................
57
Tables des matières
................................................................................
91
Dynamiques identitaires et enjeux de
bifurcation suite à un licenciement économique : Le cas de
personnes accompagnées dans le cadre d'un Contrat de Sécurisation
Professionnelle.
......................
Le licenciement économique est un
évènement se multipliant malheureusement de plus en plus
fréquemment en France ces dernières années. Le Boulonnais
a été particulièrement impacté cette année.
ID Formation, organisme de formations, a été
chargée par le Pôle emploi de suivre certaines personnes
licenciées économiquement. Lors du licenciement, ces personnes
acceptent ou non d'adhérer à un dispositif mis en place
spécifiquement pour ce cas de figure. Il s'agit du contrat de
sécurisation professionnelle.
Dans le cadre de mon stage de Licence Professionnelle de
Gestion et Accompagnement des Parcours Professionnels et Personnels (GA3P),
j'ai suivi des personnes inscrites dans ce dispositif.
J'ai choisi de focaliser mon étude de recherche pour
l'élaboration de mon mémoiredans le cadre du CSP.
Ma question de recherche est la suivante :
En quoi le contrat de sécurisation
professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes
à quitter leur métier ?
C'est en confrontant mes hypothèses à la
théorie de certains auteurs et à mes investigations de terrain
lors d'entretiens que j'y répondrai.
Mots Clés
Dynamiques identitaires, contrat de sécurisation
professionnelle, bifurcation, transition et biographisation.
*
1Source :http://www.agglo-boulonnais.fr/uploads/tx_abdownloads/files/Diagnostic-Territorial-2015.pdf
* 2 Annexe 1 : organigramme
Id formation Boulogne sur mer
* 3 Données du site
www.gouv.fr
* 4 Annexe 2: Chartre
d'engagement à l'accompagnement CSP
* 5Deslauriers, Mayer. (2000).
L'observation directe .In :
« Méthodes de recherche en intervention
sociale » (pp.136). Montréal-Paris : Gaétan
Morin Editeur. 2000. Chap. 6.
* 6 Paul, M.
L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique
.Paris : L'Harmattan.2004. Chap1.
* 7Ibid : 51
* 8 Entretien avec Mokhtar
Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques
identitaires et singularisation des parcours dans les transitions
professionnelles. Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28), p.18
* 9Lhotellier, A. (2001).
Accompagner et tenir conseil : démarche fondamentale ou
anesthésie sociale. In :Tenir
Conseil : délibérer pour agir (pp. 114), Chap 1.
Paris : SéliArslan,
* 10Ibid, p 114
* 11Aubret,J. (2011).
L'orientation professionnelle des adultes.
In : Carre,Caspar, Traité des
sciences et techniques de la formation (pp. 527), Chap 25.
Paris : Psycho Sup, Dunod. . 3ème édition.
*
12Denave,S.(2016).Maître de Conférences,
Université Lumière Lyon 2, équipe MEPS du Centre Max
Weber dans le cadre d'une journée organisée par le
pôle DIRF du laboratoire Trigone Cirel. Durée :
1 :19 :31
* 13 Cours de Thomas Dumet
(Licence GA3P 2017)
* 14Denave, S.(2015). Le
processus des ruptures professionnelles. Première partie.
In : Reconstruire sa vie professionnelle.
(pp.29). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de
France.
* 15Boltanski,L, Chiapello,E.
(1999). Le Nouvel Esprit du capitalisme. Paris : Gallimard, note de bas
de page N°2, p.681.
* 16 Voir Jaillet,
« De le généralisation de l'injonction au
projet », art. cité.
* 17Boutinet, JP. (1993).
Anthropologie de projet. Paris : Puf.
* 18 « Les notions de
projets, de motivation, de communication sont aujourd'hui des normes, en bas de
la hiérarchie sociale, nous avons appris à nous adapter plus ou
moins bien. » (A. Ehrenberg, La Fatigue d'être soi, paris,
Odile Jacob,1998, p14)
* 19 Annexe 2 : chartre
d'engagement
* 20Coquelles,C. (1994). Le
modèle du projet. In : Attention projet (pp.25).
Edition : Formation Emploi n°45.
* 21Denave, S. (2015).
Introduction générale. In : Reconstruire sa vie
professionnelle (pp.8).Edition Le lien Social, Paris Presses
Universitaires de France.
* 22Ibid : 3/4
* 23Ibid : 4
* 24Ibid : 5
* 25 Entretien avec Mokhtar
Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques
identitaires et singularisation des parcours dans les transitions
professionnelles. Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28), p.16
* 26Ibid : 16
* 27Kaddouri M.
(2006).Dynamiques identitaires et rapport à la formation.
In : Barbier,Bourgeois, de villers, Kaddouri.
Constructions identitaires et mobilisation des sujets en
formation.(pp.131). Editions : Lharmattan.
* 28Ibid : 131
* 29 Mazade,O,Hinault,
AC.(2014). Avant-propos, Sociologies pratiques 2014/1 (n°28),
p5.
* 30Terme emprunté
à O.Mazade
* 31Crunel, B, Frau, C. (2014).
Devenir chômeur. (pp.78). In : Des
parcours pluriel entre transition et état. Sociologies pratiques
2014/1 (n°28).
* 32Denave, S. (2015).
Conclusion générale. In :
Reconstruire sa vie professionnelle (pp.285). Edition : Le lien
Social, Paris Presses Universitaires de France.
* 33Delory-Monberger, C.
(2014). Filiations.In : De la recherche
biographique en éducation (pp.16). Paris :
Téraèdre. 1ère partie.
* 34Aubret, J. (2011).
L'orientation professionnelle des adultes. In :
Traité des sciences et techniques de la formation (pp.
536).Chap 25.
* 35Aubret, J. (2011).
L'orientation professionnelle des adultes. In :
Traité des sciences et techniques de la formation. (pp.535).
* 36 Graille, C. (2014). Enjeux
identitaires dans une entreprise en transition.
In : Les identités professionnelles
à l'épreuves des transitions. (pp87 à 97).
Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), Presses de Science Po.
* 37 Dubois, F, Terral,
P.(2014). La création d'entreprise dans le secteur du tourisme sportif.
In : Les identités professionnelles
à l'épreuve des transitions (pp53 à 62). Sociologies
pratiques 2014/1 (n°28), Presses de Science Po.
* 38.Mazade, O, Hinault, AC.
(2014). «Avant-propos» (pp. 5). Sociologies pratiques 2014/1
(n°28).
* 39Combessie JC.
Première partie Découverte et collecte des données.
In :Méthode sociologique. Editions La
Découverte. Paris. 2007. P 24.
* 40 Annexe 3 : Guide
d'entretien
* 41Ibid : P 24.
* 42 Annexe 4 : Grille
d'entretien
* 43Combessie JC.
Première partie Découverte et collecte des données. In
:Méthode sociologique. Editions La Découverte. Paris. 2007. P
24.
* 44 Cours de recueil et
analyse de données. Dominique DELACHE-CUEEP/USTL
* 45Guéranger, D.
(2006). A propos de trois problèmes pratiques de l'écriture
sociologique. : La retranscription d'un entretien par Pierre
Bourdieu.In : Enjeux (et) pratiques de
l'écriture en sciences sociales,Paris, France.
* 46Ibid : p7
* 47 Annexe 5 à 9 :
Entretiens
* 48Negura,L. (2206). L'analyse
du contenu d'une représentation sociale. In : L'analyse de
contenu dans une étude des représentations sociales, Revue
Sociologie. Paris : PUF.
* 49Paul,M. (2004).
L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique
.(Chap 1). Paris : L'Harmattan.
* 50Paul, M. (2002).
L'accompagnement: une nébuleuse. Éducation
permanente,153(4), 43-56.
* 51Denave, S. (2015).
Conclusion générale. In :
Reconstruire sa vie professionnelle (pp. 286/287). Edition : Le
lien Social, Paris Presses Universitaires de France.
* 52Mazade,O,
Hinault,AC.(2014). «Avant-propos» (pp.7). Sociologies
pratiques 2014/1 (n°28).
* 53 Entretien avec Mokhtar
Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques
identitaires et singularisation des parcours dans les transitions
professionnelles(pp.17). Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28).
* 54Kaddouri,M. (2006).
Dynamiques identitaires et rapport à la formation. In :
Barbier, Bourgeois, de Villers, Kaddouri. Constructions identitaires et
mobilisation des sujets en formation. (pp.131). Editions :
Lharmattan. Paris.
* 55 Certificat d'aptitude
à la conduite : pour différents type de chariots
* 56Denave, S. (2015).Des
trajectoires et des transformations plurielles. In :
Reconstruire sa vie professionnelle (pp. 262)Edition Le lien Social,
Paris Presses Universitaires de France.
* 57Ibid : 33
* 58 Entretien avec Mokhtar
Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques
identitaires et singularisation des parcours dans les transitions
professionnelles. (pp.18).Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28).
* 59 Certificat d'aptitude
à la conduite : pour différents type de chariots
* 60Denave S. Des trajectoires
et des transformations plurielles. In : Reconstruire sa vie
professionnelle. Edition Le lien Social, Paris Presses Universitaires de
France, Paris 2015.
* 61Delory-Monberger, C.
(2014). Filiations.In : De la recherche
biographique en éducation (pp.16). Paris :
Téraèdre. 1ère partie.
* 62Kaddouri,M. (2006).
Dynamiques identitaires et rapport à la formation.
In : Barbier, Bourgeois, de Villers, Kaddouri.
Constructions identitaires et mobilisation des sujets en
formation.(pp.131). Editions : Lharmattan. Paris.
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