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Dynamiques identitaires et enjeux de bifurcation suite à  un licenciement économique: le cas de personnes accompagnées dans le cadre d'un contrat de sécurisation professionnelle

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par Aude Le Garrec
Université Lille 1 - Licence GAP 2016
  

Disponible en mode multipage

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Licence Professionnelle Gestion des accompagnements des Parcours Professionnels et Personnels

Dynamiques identitaires et enjeux de bifurcation suite à un licenciement économique : Le cas de personnes accompagnées dans le cadre d'un Contrat de Sécurisation Professionnelle.

Sous la direction de Nahima LAIEB, Tutrice universitaire

Et de Anne BERTHON, Tutrice professionnelle

Aude Le Garrec

N° d'étudiant : 11702933 Année universitaire 2016/2017

Sommaire

Remerciements

Introduction............................................................................................... 1

Première partie

1. Un contexte socio-économique particulier ...............................4

2. ID Formation.................................................................. 5

3. Ma mission dans le cadre du Contrat de sécurisation

professionnelle............................................................... 10

4. Observations, constats et questionnements .............................. 14

Deuxième partie

1. Au coeur du métier de Conseiller en Insertion Professionnelle...... 18

2. Au plus près des accompagnés ............................................. 21

Troisième partie

1. Dispositif méthologique ...................................................... 32

2. Analyse des données et interprétation .................................... 37

3. Discussion et perspectives ................................................... 50

Conclusion ........................................................................................... 52

Bibliographie......................................................................................... 54

Tables des annexes ................................................................................. 56

Annexes ............................................................................................... 57

Tables des matières................................................................................. 91

Remerciements

Ce mémoire est la concrétisation d'une année intense que ce soit au niveau émotionnel ou des enseignements.

Je remercie dans un premier temps Mr Bruno Sergent, Conseiller en insertion professionnelle sans qui je n'aurais peut-être pas eu connaissance de l'existence de la licence GA 3P, gestion des accompagnements des parcours professionnels et personnels.

Dans un deuxième temps, je tiens à remercier ma tutrice professionnelle pour ses précieux conseils, sa patience, le temps qu'elle a bien voulu m'accorder pour m'accompagner lors de ma professionnalisation. Un énorme merci pour les conseils concernant les dossiers et l'entretien d'entrée en licence, qui m'ont permis de prendre confiance et sans lesquels, cette aventure n'aurait peut être pas existée. Je la remercie aussi pour ses explications à toute heure du vocabulaire si spécifique rencontré lors de mes différentes lectures. Un immense merci aussi à Céline Bayens, Anne Ménard, Hélène Dutriaux et Alexandra Jacquin, conseillères en insertion professionnelle pour leur participation sans failleet leur aide précieuse pendant mon année de stage.

Je remercie aussi énormément NahimaLaieb, ma tutrice universitaire pour son aide, son soutien lors de mes moments de doute et de stress, sa réactivité à mes nombreux mails. Merci pour le temps que vous m'avez accordé, pour vos enseignements précieux ainsi que pour les pistes de lectures riches et nombreuses.

Je tiens aussi à remercier toute l'équipe pédagogique : les enseignants pour leurs cours enrichissants, Virginie Labiau aussi pour sa disponibilité permanente.

Je remercie aussi Nacira Ait-Abdesselam de m'avoir fait confiance lors de mon entretien de sélection.

Je n'oublie pas touteset tous mes collègues de promotion, en particulier Florence Malfaisan, Nora Khiter, Dalila Tahri, et Stéphanie Drieux avec lesquelles, j'ai partagé joie, stress, rires et larmes. Nous nous sommes toujours soutenues tout au long de cette précieuse année qui n'aurait pas été pareille sans elles.

Je remercie aussi la patience et le soutien de mon mari Raphaël qui m'a beaucoup aidée tout au long de cette année, et je remercie aussi mes enfants, Valentine et Arthuro, qui m'ont de nombreuses fois répété à quel point ils étaient fiers de leur maman. Vers une reconversion professionnelle

Après une dizaine d'années dans le commerce, j'ai travaillé pendant 9 années dans l'entreprise familiale dans le secteur de la pêche, créée par mon arrière grand-père.

C'est ensuite mon grand-père qui lui succèdera puis mon père et enfin mon frère. Je souhaitais depuis longtemps intégrer l'entreprise familiale. Titulaire d'un BTS secrétariat, j'ai eu donc l'opportunité, suite à un départ en retraite d'une des secrétaires, d'exercer le métier d'assistante d'exploitation au sein de la société familiale. Je gérais alors les stocks de plusieurs entrepôts frigorifiques.

Je me suis sentie dès les premières semaines en tension entre la Direction, représentée par ma famille et les autres salariés. Très vite, j'ai compris que je représentais une menace pour eux, ce que je pouvais comprendre. Je n'arrivais pas à les convaincre de ma sincérité et de ma volonté de travailler avec eux tout simplement. Les années passaient et la tension identitaire que je ressentais était de plus en plus insupportable. L'image que les salariés avaient de moi n'était absolument pas en adéquation avec mon identité propre.

Progressivement, je réfléchissais à la manière de me retrouver et de m'épanouir professionnellement.

Mon grand regretétait d'avoir arrêté mes études...

Après de longues discussions en famille et un bilan de compétence approfondi, je décidais de quitter l'entreprise familiale. Décision difficile à prendre au vu du risque financier que cela impliquait. Ma volonté d'accomplir un projet professionnel dans lequel je me retrouvais l'emporta. Libérée de ces tensions identitaires, je pouvais me concentrer sur la concrétisation de mon projet professionnel dans le domaine de l'insertion professionnelle.

Début janvier 2016, je signais une rupture conventionnelle avec l'entreprise familiale et me voilà prête pour un nouveau challenge. Je découvrais concrètement ce que représentait la reconversion professionnelle.

C'est un conseiller d'ACTIV EMPLOI qui m'a parlé de la licence GA3P à l'Université de Lille 1. Il m'a conseillé d'accomplir un stage chez ID FORMATION à Boulogne sur mer afin de confirmer mon choix d'orientation, ce que j'ai fait en avril 2016.

Cette immersion m'a énormément plu, c'est pourquoi j'ai accepté avec enthousiasme lorsque la structure m'a proposé d'accomplir le stage de licence en son sein. Je me suis rendu compte de la variété et de la richesse de ce métier.

Cette licence me permettrait d'obtenir toutes les clés pour accompagner un public en difficulté que ce soient des personnes en période de transition professionnelle ou d'autres dans l'obligation pour une raison ou une autre de changer de métier (maladie, handicap, licenciement économique...). La notion de reconversion professionnelle m'interpelle particulièrement car elle fait écho à mon propre parcours. Bien qu'à l'inverse du public que je vais accompagner lors de ma mission, ce fut mon propre choix, mûrement réfléchi. J'ai eu le temps d'intégrer l'idée de cette reconversion, de penser longuement à mon futur projet.

Dans mon cas, sans en avoir réellement conscience, j'avais besoin de ce changement car mon identité passée, en tant que salariée et membre familial dans l'entreprise m'oppressait. Cette rupture m'a permis de retrouver mon identité en m'épanouissant professionnellement.

Ces personnes ont été mises devant le fait accompli sans avoir le recul que j'ai pu prendre, temps nécessaire pour assimiler la situation. C'est cette résonnance avec mon propre parcours et la rencontre avec les personnes à accompagnerqui m'ont permis d'élaborer l'objet demon futur mémoire.

Une négociation identitaire souhaitée

Dans le cadre de mon stage chez ID Formation, J'ai pu participer à des activités diverses : ateliers collectifs de stratégie de recherche d'emploi, entretiens individuels de demandeurs d'emploi...J'intervenais accompagnée ou seule : il était difficile pour moi de trouver ma place car souvent les conseillers me demandaient de cacher mon statut de stagiaire au public accueilli. Je n'avais normalement pas l'autorisation de procéder aux tâches que l'on me confiait en tant que simple stagiaire.

Au bout de quelques temps, j'ai fait part de ce malaise à ma tutrice professionnelle en lui révélant mon mal être de ne pas être reconnue avec mon véritable statut. Elle l'a très bien entendu, et me voilà avec le nouveau titre de stagiaire consultante.

Suite à cette discussion, j'ai négocié ma mission que je détaillerai par la suite.

La cellule d'appui à la Sécurisation Professionnelle : un outil pour les reconversions professionnelles « contraintes »

Dans un premier temps, j'ai découvert la Cellule d'appui à la Sécurisation Professionnelle (CASP) concernant 260 personnes susceptibles d'être licenciées suite à un plan social au sein de leur usine située à Boulogne sur mer. Ce dispositif n'est pas obligatoire mais juste proposé aux salariés faisant partie du plan social. Ces personnes pouvaient y venir librement sur leur temps de travail avant et après avoir reçu leur lettre de licenciement. Je constatais rapidement que tous n'y venaient pas.

La CASP est un lieu d'échange, d'écoute et de conseils pour ces personnes. Grâce à ce dispositif, les salariés pouvaient s'informer sur les différentes démarches et leurs droits, trouver des réponses à certaines problématiques (adhésion au CSP contrat de sécurisation professionnelle, formation et retraite) et préparer leur nouveau projet professionnel. Finalement, parmi ces 260 personnes concernées par le plan social, 70 ont été licenciées. Ces personnes ont toutes accepté le Contrat de Sécurisation Professionnelle. Contrat qui leur permettrait de bénéficier pendant une année du maintien de leur salaire et d'un suivi personnalisé dans leur recherche d'emploi ou de reconversion professionnelle.

Parallèlement, j'ai pu accompagner des personnes contraintes de se reconvertir suite à un problème de santé.

Après mûre réflexion, je décidais de me concentrer sur le suivi des personnes licenciées économiquement de la même usine située à Boulogne sur mer.

Ce sujet me touchant particulièrement, je demandais à accompagner ces personnes dans le cadre de ma mission de stage. Ma tutrice a validé ma demande. Concrètement, je recevrais tous les 10 jours en entretien individuel une dizaine de personnes bénéficiaires du Contrat de Sécurisation Professionnelle. Je les accompagnerai lors de cette période de transition.

Dans une première partie, j'exposerai le contexte économique où se situe mon lieu de stage et décrirai la structure dans laquelle je suis. Puis je décrirai ma mission et définirai le dispositif dans lequel j'évolue. Je continuerai sur mes observations, constats et questionnements. Il convient dans une deuxième partie, à l'aune d'un cadre théorique d'approcher le métier de conseiller en insertion ainsi que le statut d'accompagnés. Je détaillerai ensuite la méthodologie à laquelle j'ai eu recours pour mes investigations de terrain et enfin je procèderai à l'analyse de mes entretiens qui me permettra d'apporter des éléments de réponse à ma question de recherche.

Première Partie

1. Un contexte socio-économique particulier

Je pense nécessaire de commencer par définir le contexte socio-économique du territoire où se situe ID Formation. En effet, il sera alors plus aisé de comprendre la situation compliquée que vont rencontrer les personnes que je vais accompagner.

Le pays Boulonnais est divisé en 3 intercommunalités pour un total de 74 communes et 162 043 habitants soit une densité de population par km² de 255.7hab/km² ce qui est inférieur à la moyenne régionale. La tendance est à l'exode rural avec un accroissement démographique pour les zones rurales et périurbaines au détriment de Boulogne-sur-Mer et des communes avoisinantes. Le territoire boulonnais apparait en difficulté dans de nombreux domaines par rapport à la moyenne régionale. Le coeur urbain (Boulogne-sur-Mer, Outreau, Le Portel, Saint-Martin Les Boulogne) et les zones rurales concentrent les plus grandes difficultés. L'éducation et les revenus sont les domaines les plus problématiques du territoire.

L'actualité difficile du marché du travail impacte fortement le pays boulonnais, la situation étant plus défavorable sur la moyenne régionale. Le taux de chômage est de 14,1% contre 12,8% en région et les conditions d'emploi sont particulièrement moins avantageuses que pour le reste de la Région avec une moindre part de CDI à temps complet et davantage d'emplois à temps partiel.

La zone de CAPECURE où est situé ID formation est particulièrement touchée : les usines ferment régulièrement. Ainsi, une usine de production d'aliments pour animaux, que nous nommerons « S » vient de procéder à un plan social de 260 personnes dont 85 seront réellement licenciées. Nous en parlerons un peu plus loin puisque c'est ID formation qui les accompagnera.

Outre ces nombreux désavantages, le pays boulonnais, plus particulièrement son coeur urbain, abrite un nombre important d'habitants allocataires de minima sociaux.

Ce sont les grandes agglomérations qui concentrent l'ensemble des offres de formations et le plus d'emplois et de services du territoire. Le territoire se caractérise par une population relativement plus jeune que la moyenne nationale. Quelle que soit l'échelle géographique observée, les employés et les ouvriers sont les deux catégories socioprofessionnelles les plus représentées sur le territoire français. Les ouvriers sont surreprésentés sur le territoire (+ 6,7 points qu'en France métropolitaine) alors qu'à l'inverse, la part des professions intellectuelles supérieures est bien plus faible qu'au niveau national (10,8 % contre 16,8 %). D'ailleurs, la majorité des personnes concernées par le plan social cité ci-dessus font partie de la catégorie des ouvriers. J'expliquerai pourquoi un peu plus loin dans le texte.

A fin décembre 2014, deux tiers des demandeurs d'emploi ont un niveau de formation inférieur au niveau Bac. Seulement 5,7 % des DEFM (demandeurs d'emploi en fin de mois) ont un niveau supérieur à Bac + 2 (contre 8,5 % à l'échelle régionale).

Les cadres représentent 2,5 % de la demande d'emploi contre 3,8 % à l'échelle régionale. La part des DELD (demandeur d'emploi longue durée) dans la demande d'emploi dans le Boulonnais est comparable à la moyenne régionale (48,0 % contre 48,1 %). Sur les 7 637 DELD, 57,2 % présentent une durée d'inscription de plus de 24 mois. Dans cette catégorie, les seniors de 50 ans et plus sont les plus touchés, avec 68,2 % d'entre eux qui sont inscrits depuis plus de 24 mois.

L'enquête annuelle «Besoins en Main-d'oeuvre» est, depuis plusieurs années, un élément essentiel de connaissance du marché du travail. Chaque année, Pôle emploi adresse un questionnaire à plus de 1,6 million d'établissements afin de connaître leurs besoins en recrutement par secteur d'activité et par bassin d'emploi. L'enquête BMO 2015 recense 3 205 projets de recrutements pour le territoire contre 2 548 en 2014 soit une hausse de près de 20%. Cette prévision optimiste est encourageante et témoigne d'une embellie à venir perçue par les recruteurs. Les intentions d'embauche revêtent cependant un caractère saisonnier important (32.9%) plus marqué que sur la région (25.9%). 1(*)

2. Id Formation

2.1 Historique

Je vais maintenant vous présenter la structure proprement dite. Innovation Développement FORMATION est une société Coopérative Ouvrière de Production : une SCOP. Après en avoir évoqué l'historique, je tâcherai de vous la décrire.

La SCOP a été créée en Décembre 1994 par 34 associés salariés et 10 associés extérieurs suite au dépôt de bilan de l'association SIGMA FORMATION. Le siège est situé au 68 rue Jordens à Lille. Un accord de participation est signé en avril 1996. En Décembre 1996, Eric FAIDHERBE est nommé Directeur Général. En juin 1998, un accord d'intéressement est signé. En 1999, une action d'Engagement de Développement de la formation (EDDF) est mise en oeuvre et conclue avec les Directions Départementales du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle (DDTEFP) qui veillent au respect du droit du travail dans les entreprises.

En 1999, le siège social est transféré au 113 rue de Lannoy suite à l'acquisition des locaux. L'inauguration du siège s'est faite le 10 avril 2000. La même année, en juin, Eric FAIDHERBE est nommé nouveau Président du Conseil d'administration.

En 2001, une charte de qualité est mise en place avec le Conseil Régional Nord Pas de Calais (actuellement des Hauts de France). Progressivement, ID FORMATION s'implante à Hazebrouck, Calais, Boulogne-sur-Mer, St Omer, Denain, Roubaix, Grande Synthe, Noyelles Godaux...

Depuis 2009, la structure diversifie des activités entreprises hors de la Région des Hauts de France en Ile De France, Rhône Alpes, Centre, Picardie, Champagne Ardennes... En 2016, ID FORMATION possède 49 sites sur l'ensemble du territoire français.

2.2 Type de structure et son fonctionnement

Une SCOP, juridiquement Société coopérative et participative, est une entreprise commerciale de type SA ou SARL dont les salariés sont associés majoritaires au capital. ID Formation est de type SA Société Anonyme.

Elle repose sur le principe coopératif de démocratie économique et de répartition équitable des résultats. Elle est à statut juridique spécifique : des principes coopératifs, un management participatif, le partage des richesses produites.

L'objectif d'une SCOP est de permettre à ses salariés d'y exercer ensemble leur métier, de développer leur outil de travail et leur savoir-faire en partageant les risques, les profits, les décisions. ID est une société commerciale de type SA qui a pour objet social toute activité entrant dans le champ de la Formation Professionnelle Continue.

La responsabilité financière des associés est limitée au montant de leurs apports. ID Formation dépend de la Convention Collective Nationale des Organismes de formation. Le capital est variable. La pérennité financière de l'entreprise est assurée par la constitution de réserves impartageables.

Les grandes décisions sont prises selon un principe démocratique : tout salarié associé détient une voix lors des assemblées générales, quel que soit le montant de son capital. Majoritaires au capital, les salariés désignent leurs dirigeants lors du conseil d'administration. En dehors des assemblées générales, les salariés respectent l'organisation et la direction de l'entreprise qu'ils ont collectivement choisies et approuvées.

Le partage des résultats est équitable entre : les salariés, le plus souvent sous forme de participation, l'entreprise sous forme de réserves, les associés, majoritairement des salariés qui perçoivent des dividendes.

ID Formation emploie 456 salariés actuellement. La pyramide des âges est jeune (42 ans d'âge moyen) ; chaque salarié en contrat à durée indéterminée a vocation à devenir associé de la SCOP. Il peut présenter sa candidature comme associé, rédigée sur papier libre et la remettre au PDG. Le salarié peut donc avoir une double qualité :

- En tant qu'associé : apport en capital progressif, participation aux assemblées, exercice éclairé de la responsabilité d'associé en échange, il est donc informé de la vie économique et financière de la société, vote aux assemblées Générales et possibilité de percevoir des dividendes,

- En tant que salarié : doit contribuer à la bonne marche de l'entreprise en échange duquel il perçoit une rémunération et partage les fruits de l'expansion de l'entreprise (participation et intéressement).

Le salarié perçoit donc, au-delà d'une ancienneté de 3 mois dans l'entreprise, une participation, bloquée pendant 5 ans et qui en contrepartie n'est ni imposable, ni soumise aux charges sociales et un intéressement qui est égal à 15% du résultat courant avant impôt, exonéré de charges sociales mais soumis à l'impôt sur le revenu.

Les délégués du personnel et le comité d'entreprise forment la délégation unique du personnel.

2.3 Philosophie, atouts et contraintes

Lutter contre l'exclusion et favoriser l'éducation et la formation tout au long de la vie est l'adage de cette structure. Quels que soient les différents dispositifs sur lesquels les salariés interviennent, ils s'engagent à être garants des valeurs fondamentales de l'économie sociale, affirmant ainsi des principes humanistes.

Les conseillers et les formateurs doivent allier réactivité, l'humain (qualité) avec la productivité (quantité).

Les contraintes concernent les relations avec les financeurs. Par exemple, Pôle Emploi peut envoyer 500 personnes (Activ Emploi) à recevoir en peu de temps et ID Formation doit être capable de s'adapter à leur demande que ce soit en termes de locaux disponibles, mais surtout en nombre de conseillers suffisants pour la réalisation de la prestation. La gestion des ressources humaines n'est pas facilitée par le manque de vision à long terme. ID Formation doit aussi respecter le cahier des charges des financeurs et respecter la date de début de prestation convenue avec eux ainsi que le nombre de participants aux formations.

ID FORMATION répond à de nombreux appels d'offre, la concurrence est très importante dans le secteur de l'emploi et de la formation. Les concurrents à Boulogne sur mer sont l'AFPA, FORM AVENIR, OPALE FORMATION, AXIS...

La santé financière de cette structure repose essentiellement sur tous les marchés obtenus. Les conseillers doivent rendre un travail qualitatif et quantitatif pour atteindre des objectifs et ne pas perdre les marchés. Si elle perd trop de marchés, le personnel pourrait être réduit, les enjeux économiques sont donc très importants.

ID FORMATION doit donc faire très attention à respecter le cahier des charges de chaque marché conquis. Dernièrement, ils ont obtenu le marché de la Cellule d'appui à la Sécurisation Professionnelle pour l'entreprise Continentale Production (alimentation pour animaux). Il a permis de montrer un nouveau côté de compétences de la structure et d'obtenir celui d'une CASP sur Calais qui débutera début novembre. Leur notoriété augmente donc au fil des marchés obtenus.

2.4 Organisation interne locale

La structure est située dans le quartier économique et industriel Capécure, à proximité d'une gare et d'un réseau urbain TCRB.

Le site est composé de 3 locaux : l'agence principale (une salle informatique, 4 salles de formations, 6 bureaux informatisés), l'atelier pour les formations aux métiers du bâtiment (2 salles de cours, 2 salles de pratique professionnelle), les bureaux ID FORMATION /CAP EMPLOI.

A Boulogne-sur-Mer, le personnel s'élève à 17 personnes2(*) dont un responsable de site, une assistante administrative et 15 conseillers/formateurs. Le responsable de site coordonne les conseillers/formateurs, répond aux appels d'offre, fait le lien entre les différents partenaires et financeurs... Les conseillers formateurs accueillent le public et le forment. L'assistante administrative gère tous les dossiers de formation, le planning des salles de formation, le planning des formations...

2.5 Les activités et partenaires d'Id formation

2.5.1 Les activités

Cette structure représente un organisme important de la région. Cette coopérative propose des formations aux métiers du tertiaire et de l'industrie à vocation professionnelle, des qualifications, un apprentissage de la langue française et la maîtrise des savoirs de base. Elle offre aux demandeurs d'emploi une médiation à l'emploi et le placement des personnes en entreprise.

ID Formation participe à différentes démarches qualité. La mise en oeuvre de sa démarche qualité s'appuie sur des agréments pour valider / certifier (Agrément DIRECCTE) et des chartes et labels qualité (CLEA, charte H+, label FLI Charte PEPH...).

La structure propose des formations professionnelles et qualifiantes (CAP Electricien d'équipement, CAP Maçonnerie, un accompagnement à l'insertion professionnelle, et à l'orientation/réorientation (Bilan de compétences, Bilan d'orientation et Validation du Projet Professionnel).

2.5.2 Les partenaires

Son modèle économique est basé sur des partenariats avec des collectivités et financeurs publics (Fond solidaire Européen, Conseil Régional, Pôle Emploi, OFFII...) engagés dans le développement de l'économie sociale et solidaire.

Quelques partenaires d'ID Formation : Uniformation, PLIE, Pôle Emploi, Mission locale...

Quelques financeurs : La région, Pôle emploi, Cap Emploi, l'Europe (Fond de solidarité européen), DIRECCTE, Opcalia, OPCALIM, FORCO, OPCA, Agefos PME, AGEFIPH...

3. Ma mission dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle

3.1 Négociation de ma mission

Dans un premier temps, j'ai découvert la Cellule d'appui à la Sécurisation Professionnelle (CASP) comme je l'ai expliqué dans l'introduction.

ID FORMATION a répondu à un appel d'offre de Pôle emploi et a obtenu le contrat. Cette cellule est financée par la DIRRECTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi) à hauteur de 100.000 € : c'est une gestion déconcentrée au niveau Régional de l'Etat, qui garde le pouvoir sur elle.

La CASP est un lieu d'échange, d'écoute et de conseils pour ces personnes. Grâce à ce dispositif, les salariés pouvaient s'informer sur les différentes démarches et leurs droits, trouver des réponses à certaines problématiques (adhésion au CSP contrat de sécurisation professionnelle, formation et retraite) et préparer leur nouveau projet professionnel.

Les consultantes se montraient très investies ; elles avaient installé un bureau accueillant avec des tables et plein d'affiches d'informations au sujet des ateliers (développer son projet professionnel, valoriser ses atouts et compétences, acteur de son projet, découvrir ses ressources...) accrochées au mur. J'ai constaté que les bénéficiaires de la CASP se sentaient bien, venaient souvent et à n'importe quel moment de la journée. Elles étaient toujours accueillies avec un petit mot gentil par l'une ou l'autre des consultantes.

Lors de cette période, j'ai notamment contacté toutes les personnes bénéficiaires du CSP pour les inviter à venir rencontrer des agences d'intérimaires : les réactions ont été très diverses. Certains étaient tellement assommés par le choc du licenciement qu'ils ne souhaitaient pas venir, pour d'autres c'était un premier pas vers une nouvelle vie, d'autres encore m'ont dit qu'ils allaient changer de région donc ne viendraient pas.

Lors du premier atelier auquel j'ai assisté dans le cadre de la CASP, j'ai pu me rendre compte de la pression qui pesait sur les épaules de toutes ces personnes : elles étaient toute en attente de cette « maudite » lettre recommandée, guettaient leur boîte aux lettres, sursautaient à chaque coup de téléphone... Un monsieur d'une cinquantaine d'année, n'ayant travaillé essentiellement que dans cette société, s'est effondré lorsque son épouse lui a annoncé avoir reçu le recommandé. D'autres étaient soulagés car ils venaient d'apprendre qu'ils n'étaient pas concernés pour cette fois ci (un autre plan social sera mis en place dans 2 ans).

Finalement, parmi ces 260 personnes concernées par le plan social, 70 ont été licenciées. Ces personnes ont toutes accepté le Contrat de Sécurisation Professionnelle. Contrat qui leur permettrait de bénéficier pendant une année du maintien de leur salaire et d'un suivi personnalisé dans leur recherche d'emploi ou de reconversion professionnelle.

Parallèlement, j'ai pu accompagner des personnes contraintes de se reconvertir suite à un problème de santé.

Après mûre réflexion, je décidais de me concentrer sur le suivi de ces personnes licenciées économiquement de la même usine située à Boulogne sur mer.

Ensuite, suite à une année difficile économiquement à Boulogne sur mer, d'autres personnes licenciées économiquement d'autres sociétés, sont venus rejoindre le dispositif du CSP.

Ma mission se voyait enrichie d'autres personnes.

C'est à ce moment là, que j'ai commencé à me poser des questions :

Comment doit-on se comporter vis-à-vis de ce public ? Comment réagir et comment l'accompagner au mieux dans un contexte économique difficile ?

Mais avant toute chose, il convient de définir ce qu'est le contrat de sécurisation professionnelle qui encadre ma mission.

3.2 Le Contrat de sécurisation professionnelle3(*)

Le Contrat de sécurisation professionnelle (CSP) permet d'assurer aux salariés dont le licenciement pour motif économique est envisagé, dans une entreprise de moins de 1 000 salariés ou dans un établissement (quel que soit son effectif) en redressement ou liquidation judiciaire, un ensemble de mesures leur permettant de retrouver au plus vite du travail.

Chaque salarié susceptible de bénéficier du CSP doit être informé par son employeur, individuellement et par écrit, du contenu du contrat de sécurisation professionnelle et de la possibilité qu'il ait d'en bénéficier. L'employeur doit donc remettre au salarié, contre un récépissé, un document d'information écrit au sujet du CSP.

Le salarié dispose d'un délai de réponse de 21 jours pour accepter ou refuser d'adhérer au CSP. Pendant ce délai de réflexion, le salarié bénéficie d'un entretien d'information réalisé par Pôle emploi afin de lui expliquer les modalités du CSP et de l'aider à prendre sa décision. L'employeur contribue au financement de l'allocation spécifique de sécurisation : il verse le montant que le salarié aurait reçu pendant son préavis.

Le salarié a donc 21 jours pour donner sa réponse. L'absence de réponse est considérée comme un refus. Le contrat de sécurisation professionnelle a pour objet l'organisation et le déroulement d'un parcours de retour à l'emploi.

Ce parcours débute par une phase de pré-bilan, d'évaluation des compétences et d'orientation professionnelle en vue de l'élaboration d'un projet professionnel tenant compte, au plan territorial, de l'évolution des métiers et de la situation du marché du travail, un point d'étape est réalisé à la fin du 4ème mois, afin que le conseiller référent et le bénéficiaire analysent conjointement tout ce qui a été mis en oeuvre jusqu'à ce jour.. Des ajustements ou des changements de direction peuvent être mis en place.

La période du CSP comprend des mesures d'accompagnement, notamment d'appui au projet professionnel, ainsi que des périodes de formation et de travail.

L'accompagnement des bénéficiaires du CSP est confié à Pôle emploi qui pourra déléguer cet accompagnement à d'autres organismes choisis par appel d'offres. C'est ainsi qu'ID Formation a obtenu ce marché. En cas de reprise d'emploi en contrat à durée indéterminée, en contrat à durée déterminée ou contrat de travail temporaire d'une durée de plus de 6 mois, la rupture du contrat de travail pendant la période d'essai permet une reprise du contrat de sécurisation professionnelle et du versement de l'allocation de sécurisation professionnelle sans modification du terme fixé lors de l'adhésion au dispositif.

La possibilité de percevoir une indemnité différentielle de reclassement : Une indemnité différentielle de reclassement (IDR) est versée au bénéficiaire du CSP qui, avant le terme de ce contrat, reprend un emploi dont la rémunération est, pour un nombre identique d'heures hebdomadaires de travail, inférieure au précédent.

La possibilité de percevoir une prime de reclassement : le bénéficiaire du contrat de sécurisation professionnelle qui retrouve avant la fin du dixième mois du dispositif un emploi sous forme de contrat de travail à durée indéterminée, de contrat de travail à durée déterminée ou de contrat de travail temporaire d'une durée d'au moins six mois, cesse de bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle, et peut solliciter le versement d'une prime au reclassement. Le premier versement intervient au plus tôt au lendemain de la date de reprise d'emploi ;le second versement intervient trois mois après la date de reprise d'emploi, sous réserve que l'intéressé exerce toujours cet emploi. Cette prime ne peut se cumuler, pour le même emploi, avec l'indemnité différentielle de reclassement.

Le contrat de sécurisation professionnelle est conclu pour une durée de 12 mois et prend effet dès le lendemain de la fin du contrat de travail. Cette durée est allongée des périodes d'activités professionnelles et intervenues après la fin du 6ème mois du contrat de sécurisation professionnelle, dans la limite de trois mois supplémentaires. 
La durée du contrat de sécurisation professionnelle ne peut donc excéder 15 mois de date à date.

Pendant la durée du CSP, le bénéficiaire de ce contrat conserve la qualité d'assuré et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du régime obligatoire d'assurance maladie, invalidité, maternité, décès, qu'il s'agisse des prestations en nature (remboursement des dépenses de santé, dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale) ou des prestations en espèces (indemnités journalières). Il dispose en outre d'une couverture au titre du régime des accidents du travail survenus par le fait ou à l'occasion des actions favorisant son reclassement.

Pendant la durée de son contrat de sécurisation professionnelle et en dehors des périodes de travail qu'il peut être amené à effectuer et au titre desquelles il sera rémunéré directement par l'entreprise ou l'organisme qui l'emploie, le bénéficiaire du CSP : cette allocation spécifique de sécurisation professionnelle est versée mensuellement.Elle est égale à 75 % du salaire journalier de référence.

Le bénéficiaire du contrat de sécurisation professionnelle qui, au terme de ce contrat est à la recherche d'un emploi, peut bénéficier de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, dès son inscription comme demandeur d'emploi, sans différé d'indemnisation, ni délai d'attente.

Afin de s'assurer de l'engagement des deux parties, ID Formation fait signer une chartre d'engagement à l'accompagnement CSP lors du premier rendez-vous.4(*)

A partir de tous les éléments proposés par ce contrat détaillés ci-dessus, mes observations et mes constats,j'ai continué à me questionner. La partie suivante y sera consacrée.

4. Observations, constats et questionnements

4.1 En observation

Dans un premier temps, je me suis attelée à tenir consciencieusement un journal de bord. En effet, lors de mes entretiens individuels avec les bénéficiaires du Contrat de Sécurisation professionnel, je notais les faits observés sur une page et dans une autre page mes commentaires, mes questionnements...

Le support du journal de bord m'a permis de faire émerger les premiers questionnements, questionnements qui m'ont amenée à diverses lectures.

Au début de mon stage, je participais activement aux activités, accompagnée ou seule, ce qui m'empêchait de prendre le recul nécessaire à l'observation de la situation. Depuis le mois de novembre, j'alterne les périodes d'observations directes et participantes.

L'observation est une méthode scientifique. «  L'observation directe est une démarche d'un savoir au service de finalités multiples, qui s'insère « dans un projet global de l'homme pour décrire, comprendre son environnement et les évènements qui s'y déroulent » ». (Massonat, 1987 : 17)5(*).

Il existe deux formes principales d'observation : l'observation directe et l'observation participante. Dans la première, l'observateur recueille des données pour ensuite les inscrire dans son journal de bord. Il reste en retrait du groupe.

La deuxième, est l'observation participante : « L'observation participante est une technique de recherche qualitative par laquelle le chercheur recueille des données de nature surtout descriptive en participant à la vie quotidienne du groupe, de l'organisation, de la personne qu'il veut étudier. » (Deslauriers, 1991 : 46). E. Dans l'observation participante, l'observateur s'insère dans le groupe qu'il étudie et prend part à ses activités. Il doit définir alors les limites de son observation car il aboutira à des conclusions différentes selon son degré d'implication. Observer en participant permet une meilleure compréhension de ce qui est vécu mais peu impliquerune trop grande identification au milieu. Il faut trouver un juste milieu.

L'observateur doit être patient, tolérant et sympathique, il ne doit pas juger, ni prendre parti. Le défi est de perturber le moins possible le milieu observé. Ce que je peux retenir de cette méthodologie, est que l'observation qu'elle soit directe ou participante est un outil précieux pour le chercheur. Le recueil des données doit être pratiqué le plus méticuleusement possible afin de procéder par la suite à une analyse la plus complète et précise possible. Le chercheur doit donner de la cohérence à ces notes, il ne suffit pas de les lister mais aussi de les exploiter et de les interroger.

4.2 Constats

Les différentes observations, actions, entretiens conduits auprès de ce public m'amènent à certains constats :

- Ce sont pour la grande majorité des personnes qui ont exercé le même métier pendant de longues années, à un poste très précis (travail à la chaîne, cariste, nettoyeur graisseur...)

- Ce sont des travailleurs pour la plupart très peu diplômés, qui ont débuté leur métier très jeunes.

- Ces personnes se sentent dépassées et ressentent une perte d'identité consécutivement à leur perte d'emploi

- Un petit nombre plus jeune voit une opportunité à se reconvertir complètement.

- Leur connaissance du numérique est très faible, ils se sentent perdu face aux nouvelles technologies

- Ils sont très peu mobiles : soit parce qu'ils ne possèdent pas de permis de conduire ou de véhicule, soit parce qu'ils n'ont jamais eu l'habitude de devoir se déplacer loin pour travailler.

- Je me suis rendue compte que le fait de les aider à refaire leur curriculum vitae et une lettre de motivation les déstabilisaient voire les effrayaient car cet activité dévoilait leur possible manque de diplôme, leurs compétences qu'ils pensent restreintes...

4.3 L'élaboration d'un questionnement

Suite à ces constats, je me suis posée un certain nombre de questions pour élaborer ma question centrale.

En quoi les modes d'accompagnement en insertion professionnelle permettent aux personnes contraintes à quitter leur métier de s'orienter vers une reconversion professionnelle ?

Cette question s'est affinée au fur et à mesure, je l'ai ainsi reformulée :

En quoi le contrat de sécurisation professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes à quitter leur métier ?

Quelles sont les tensions identitaires qui traversent ce public contraint à se reconvertir ?

Quel rapport ont-ils vis-à-vis de l'accompagnement proposé par les professionnels ?

La biographisation peut-elle être considérée comme un outil dans leur accompagnement ?

En quoi l'accompagnement professionnel est-il un apport pour leur orientation ?

Quel usage font-ils de l'accompagnement professionnel ?

Pour commencer, il me semble important de rentrer au coeur du métier de Conseiller en Insertion professionnelle dans le cadre du CSP. Il convient ainsi de définir la notion d'accompagnement, socle de ce métier.

Deuxième partie

1. Au coeur du métier de Conseiller en Insertion professionnelle

1.1 Vers un accompagnement

La notion d'accompagnement étant saillante dans notre mission, il convient de situer l'existence de différentes pratiques.

Cette notion est difficile à définir précisément. L'accompagnement est toujours cadré institutionnellement, politiquement et financièrement et se compose d'une relation entre deux personnes.

PAUL6(*) parle d'une « Nébuleuse » composée, selon elle, de huit formes d'accompagnement. Il existe : le coaching dont l'idée dominante est la résolution d'un problème, le counselling qui prend ses origines dans le courant humaniste (écoute active, bienveillance, centré sur la réalisation d'un individu qui s'épanouit au travers de la relation de confiance établie). Ensuite, vient le conseil ou consultance centré sur les éléments apportés par l'accompagnateur pour que l'accompagné fasse ses choix. Le tutorat est basé sur une formation en alternance associée à l'idée du facilitateur où le professionnel connait et donc guide le novice. Le mentorat est la figure du passeur intergénérationnel. La médiation met en avant la notion du tiers intermédiaire (règlement d'un litige). Le compagnonnage est basé sur le partage entre deux générations (Compagnon du devoir). Et le sponsoring ou le parrainage, dans lesquels l'accompagnateur va faire profiter à l'autre de son réseau, ses ressources.

M. PAUL décrit des pratiques d'accompagnement « Elles sont toutes fondées sur une dimension relationnelle forte et l'idée d'un cheminement en commun (processus, développement séquentiel dans le temps 7(*)».

Le counselling et le conseil me semblent à ce stadeêtre les formes les plus appropriées de ces pratiques pour accompagner le public dont je m'occupe. Ce n'est qu'une hypothèse que je tenterai de confirmer tout au long de mon étude. La démarche compréhensive et l'écoute active que nous utilisons auprès de ces personnes semblent dans la lignée de ces formes d'accompagnement.

1.2 Vers une démarche compréhensive

A l'instar de Mokhtar KADDOURI, nous nous inscrivons dans une démarche compréhensive pour étudier ce qui se joue pour les sujets concernés par ce licenciement.

« Du point de vue de la pratique professionnelle, les professionnels ont une marge de manoeuvre pour faire parler le dispositif autrement que comme orientations institutionnelles. Mais cela suppose d'être à l'écoute des émergences, et pas seulement d'être une courroie de transmission et d'imposition d'un discours officiel. C'est toute la différence que l'on peut faire entre dispositifs d'accompagnement compréhensif et dispositifs d'accompagnement gestionnaire. La démarche compréhensive permet, tout en étant garant du dispositif institutionnel, d'être à l'écoute des émergences pour voir comment articuler offre et demande de transition. Cela suppose aussi tout un travail de communication pour faire évoluer les représentations qui structurent les rapports des sujets à ces dispositifs.8(*) »

Ce que je retiens de cet extrait, c'est la possibilité pour le professionnel de s'octroyer dans sa relation avec l'accompagné un certain recul par rapport au cadre institutionnel. Il peut ainsi aider cette personne à se trouver, à se comprendre pour avancer dans son parcours. Dans le cadre de ma mission, lors d'entretiens individuels, c'est l'écoute active qui me permet de d'identifier des mots, des expressions, des intonations particulières chez ce public. Cette écoute active participe à cette démarche compréhensive.

1.3L'écoute au service de l'accompagnement

L'écoute active est préconisée par Carl Rogers, psychologue américain. Elle implique la reformulation systématique des propos de l'usager afin d'être sûr de les avoir bien compris et de ne pas les déformer et de recueillir son approbation. La personne se sent donc en confiance et donc peut progresser plus facilement dans sa réflexion. Elle permet de recueillir l'information la plus complète possible dans une relation de confiance qui permet à chacun de se sentir reconnu et compris. Elle démontre de l'intérêt de l'accompagnant qui s'empêche de juger et d'interpréter.

Les conseillers sont là pour donner l'impulsion, poser des questions pertinentes pour que l'usager progresse et pour relever dans ses propos des détails qui paraissent à priori insignifiants mais qui en fait vont l'aider à trouver des solutions et enlever des barrières que l'individu se met sans en être conscient : «  Il n'y a pas de détails. Tout est signe. »9(*) « En remarquant ces signes, nous restructurons sans la trahir la vie sociale réelle qui, dans son immédiateté peut rester confuse, mais qui n'en comporte pas moins un sens pour les personnes ayant besoin, comme tout un chacun au sein des pratiques d'accompagnement, d'un minimum de considération »10(*).LHOTELLIER préconise aussi l'importance de lire entre les lignes pour un accompagnant et de percevoir ce qui ne s'énonce pas suffisamment clairement.

1.4 L'orientation comme perspective

La notion d'orientation qui est, un des objectifs du processus de l'accompagnement auprès de ce public, nous semble également intéressante à situer :

« Un présupposé fort accompagne l'usage du terme orientation : l'affirmation conjointe de l'indétermination du devenir humain et de l'emprise possible de l'homme sur la gestion de son avenir. La référence « éducative » souvent associée à ce terme signifie de manière implicite que les médiations sociales proposées se justifient par la reconnaissance d'une certaine incompétence de l'adulte à résoudre par lui-même ses propres problèmes et comporte l'hypothèse que des interventions externes peuvent contribuer à réduire celle-ci et à accroître par là ses chances d'adaptation à des situations professionnelles nouvelles. 11(*)»

Ce qui sous-entend que ces personnes auraient des difficultés à trouver elles-mêmes leur nouvelle orientation. Le professionnel n'est pas là pour influencer l'individu dans son orientation mais il doit l'aider à trouver par lui-même ce qui lui correspond le mieux.

Les personnes que je suis, ont d'autant plus besoin de cet accompagnement dans leur orientation qu'elles n'ont pas pu anticiper cette transition.

Ce qui peut être difficile pour le professionnel est l'urgence que certaines de ces personnes mettent dans cette quête d'orientation. Nous suivons un bénéficiaire d'une cinquantaine d'années qui, même s'il n'a pas de rendez vous, vient presque tous les jours nous montrer l'avancement de ses démarches pour sa formation de cariste. Il nous pose beaucoup de questions et voudrait qu'il soit possible de lui répondre à l'instant. Il avait au départ changé de nombreuses fois de projets : gardien d'immeuble, agent d'entretien du bâtiment pour terminer par cariste en passant par une formation. Ces nombreux projets démontrent le stress généré par cette nouvelle situation et le besoin d'accompagnement qui en découle. Nous lui avons expliqué patiemment que les demandes de financement de sa formation prennent un certain temps car les décisions sont prises lors de commissions spéciales chez le mandataire.

Finalement, les personnes que j'accompagne se trouvent, pour leur orientation future, semblerait-il devant quatre possibilités :

- Celui de continuer à exercer le même métier,

- Celui de continuer le même métier mais en se formant auparavant pour acquérir de nouvelles compétences et progresser dans ce même domaine,

- Celui de se reconvertir,

- Ou celui de créer son entreprise.

L'accompagnement d'un professionnel semble à ce stade, au vu des entretiens que j'ai pu mener une aide précieuse. Le professionnel est présent ne serait-ce que pour soutenir la personne dans l'acceptation de sa nouvelle situation, et par la suite la guider vers une nouvelle orientation. Cela reste une hypothèse à confirmer.

Dans la partie suivante, j'évoquerai trois notions qui semblent saillantes pour les personnes accompagnées.

2. Au plus près des accompagnés

2.1 Des situations singulières face au risque de reconversion

Afin de répondre à ces questions, je vais établir d'autres hypothèses que j'infirmerai ou confirmerai en mettant en place des investigations méthodologiques qualitatives. Les modes d'accompagnement du professionnel de ce public vont dépendre d'un certain nombre de facteurs :

- Capacité de l'individu à accepter la situation actuelle : injonction à se reconvertir, à changer de travail même si cela reste dans le même domaine.

- Capacité de l'individu à se projeter.

Cette capacité va dépendre de l'âge de l'individu, de son sexe, de son niveau d'études, de son attachement à son ancienne entreprise...Certains individus ont choisi de faire partie du plan social et donc d'être licenciés économiquement car ils étaient capables de se projeter dans un nouveau projet professionnel ou tout simplement prêts à partir en retraite. Mais tout le monde n'est pas en capacité à se projeter comme le précise Sophie Denave. Comme elle le souligne, il existe différentes attitudes face à la prise de risque, qui dépendent des conditions d'existence présente, de la conjoncture économique et des conditions de vie passée « qui vont nous amener à appréhender plus ou moins la prise de risque 12(*)». Elle indique qu'en général la majorité des personnes cherchent à sécuriser au maximum leur trajectoire.

J'ai pu le constater au cours des entretiens avec les personnes concernées par ce licenciement : certaines prennent un nouvel élan et ce licenciement est perçu comme une chance à trouver enfin un accomplissement professionnel et d'autres semblent perdus et se sentent en perte de stabilité personnelle et professionnelle. Mais tous semblent vouloir retrouver la stabilité passée.

Comme dans de nombreux domaines de l'insertion professionnelle, la notion de projet apparait et il semble intéressant de l'étudier dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle.

2.2 Le CSP : une usine à projets ?

La notion de projet nous apparait pertinente à mobiliser. Le projet peut être défini comme la manière d'atteindre un objectif, ou l'action de se fixer un but, un objectif13(*).

Denave parle de « nouveau prêt à porter » 14(*) : «On pourrait désormais parler d'une organisation générale de la société par projets15(*), suggérant une conception « quasi-managériale » de le condition humaine procédant par objectifs et moyens16(*). En phase avec les logiques de l'individualisation et du volontarisme de notre « culture « postmoderne 17(*)», le projet tend à s'imposer comme une norme sociale dominante à laquelle chacun doit se soumettre18(*). »  

Le CSP est en lui-même un projet ambitieux : celui de permettre un retour rapide à l'emploi concernant les personnes licenciées économiquement. Les personnes y adhérant doivent alors à leur tour formuler un projet dans le but soit d'une reconversion, soit d'une bifurcation ou d'une création d'entreprise dont le but est de retrouver un emploi dès que possible. Le projet apparait d'ailleurs à de nombreuses reprises dans la chartre d'engagement que les bénéficiaires du CSP doivent signer lors du premier rendez-vous.19(*)

Une personne ayant un projet bien défini aurait donc plus de chances de retrouver un emploi. D'ailleurs, le contrat de sécurisation professionnelle lui offre des moyens de le concrétiser.

« Nous pouvons alors définir le modèle du projet comme l'ensemble formé par :

- La conviction selon laquelle une personnea d'autant plus de chances de réussir son insertion sociale et professionnellequ'elle a un projet et qu'elle y tient ;

- L'ensemble des dispositifs et des pratiques mis en oeuvre en conséquence : entretien d'analyse ou de clarification du projet, modules de définition du projet, enquêtes ou stages de vérification du projet, etc... 20(*)».

Mais est-il aisé pour une personne venant d'être licenciée économiquement et donc dans une situation précaire de penser à un projet ? Le CSP est il une réelle aide à cette réalisation de projet ? Le CSP ne dirige t'il pas les personnes au devant de désillusions encore plus violentes ?

Pour mieux comprendre, il convient de mobiliser également les notions de reconversion et de bifurcation.

2.3 Reconversion ou bifurcation 

Dans ce paragraphe, nous allons étudier les concepts de reconversion et de bifurcation qui font partie de l'élaboration du projet évoqué précédemment. De nos jours, rares sont les personnes travaillant de longues années dans la même entreprise. La dégradation du marché du travail et la multiplication des plans sociaux y participent certainement.

«  Ces dernières années, l'idée commune d'une intensification de la mobilité s'est répandue.  Les vies professionnelles seraient désormais marquées par une plus grande mobilité professionnelle : chacun devrait s'attendre à changer d'emploi, éventuellement de profession plusieurs fois en cours de vie active21(*)» (Germe, cité par Denave).

C'est ainsi que la notion de reconversion est utilisée de plus en plus souvent :

« La mobilité professionnelle recouvre différentes situations : il peut s'agir de changements d'entreprise, de secteur, de catégorie socioprofessionnelle, de fonction, de statut, voire d'emploi (actif occupé, chômeur, inactif). La reconversion en serait une déclinaison particulière sous-tendant une idée de transformation ou d'acquisition de nouvelles compétences. Mais l'usage commun fait souvent l'amalgame entre de situations très distinctes comme une juriste devenue fleuriste ou un médecin partie travailler dans l'humanitaire ou bien encore un cuisinier ouvrant son restaurant.22(*) »

Pour Denave, le terme de reconversion est utilisé dans beaucoup trop de situations que ce soit dans de « simples glissements de situations  dans des secteurs voisins» ou dans des changements radicaux. C'est pourquoi, elle préfère différencier les deux situations :

« Parler de rupture professionnelle est ainsi une façon de se démarquer du terme de reconversion qui agrège des phénomènes trop hétérogènes. 23(*)». En ce sens, nous partageons cette analyse.

Les ruptures professionnelles que Denave appelle aussi bifurcations ou réorientations professionnelles doivent remplir de son point de vue trois conditions :

- Un changement radical de métier et de domaine professionnel

- Un changement effectif et non un projet

- Une ancienneté minimale dans le métier initial pour exclure les « petits boulots » où l'on change régulièrement.

Elle différencie donc la reconversion d'une bifurcation. Cette distinction nous est apparue essentielle dans l'analyse ultérieure des données.

« Le passage d'une situation professionnelle à une autre occasionne toujours des modifications ressenties de la part des protagonistes : métier plus ou moins différent, nouvelle organisation du travail, environnement plus ou moins distinct,etc. 24(*)».

Il convient maintenant d'appréhender d'autres notions qui participent de la construction de notre cadre théorique.

2.4 Dynamiques identitaires et transition professionnelles

Face à cette pluralité de situations, une des hypothèses concerne leur identité. En effet, le sujet a besoin de faire le point sur lui-même, de se retrouver, que la reconversion soit voulue ou subie.

2.4.1 Des dynamiques identitaires variées

En effet, le sujet se trouve en tension identitaire entre son identité passée et future : il vit une rupture identitaire qu'il faut surmonter. Poursuivons nos investigations en étudiant le concept de dynamique identitaire qui est sous-jacent à cette hypothèse. Selon Kaddouri, «  Dans ce moment culminant, dans lequel le sens même de l'identité personnelle est questionné, la personne est acculée à agir, à mettre en place des stratégies identitaires pour gérer et atténuer les tensions à vivre. Ces stratégies sont plurielles et varient en fonction de la dynamique (de continuité, de rupture, de redéfinition de soi) dans laquelle l'individu est engagé.25(*) »

Ainsi, la personne est amenée à mettre en place des stratégies identitaires pour réduire ses tensions et remanier son identité pour retrouver un équilibre. La question des dynamiques nous intéresse, au sens où elle ne fige pas l'identité. Kaddouri préfère parler de dynamique identitaire, « qui renvoie à un processus et montre que rien n'est figé, que l'identité se remanie en fonction des situations, des interactions sociales, au concept d'identité, qui expose à mon sens au risque de l'étiquetage, de l'assignation.26(*) »

La difficulté identitaire va dépendre de la manière dont la personne va aborder cette rupture, ici sa perte d'emploi. La rupture identitaire se fera d'autant plus pesante pour les personnes qui vivent cette perte d'emploi comme une catastrophe dans leur parcours biographique. La reconstruction identitaire sera d'autant plus difficile.

D'autres voient en cette transition une opportunité à changer de domaine professionnel. Ils n'auraient peut être pas osé quitter leur emploi d'eux-mêmes. Peut-être voient-ils apparaître des voies professionnelles possibles jusqu'alors imaginées inaccessibles. Cet évènement, au départ contraint, sera vécu comme une chance.

Kaddouri décrit la dynamique identitaire également comme suit : « Il s'agit d'une totalité complexe, jamais stabilisée puisque soumise de façon permanente à un travail identitaire de construction, de destruction et de reconstruction de soi. 27(*)»

Selon leur situation actuelle, ces personnes se trouvent dans des dynamiques identitaires singulières. Selon Kaddouri, il en existe cinq :

- « Les dynamiques de continuité identitaire » : la personne veut prolonger une identité qu'elle considère comme satisfaisante. Il appelle cette action aussi « le projet d'entretien de soi »ou «  projet de préservation de soi » selon le manque possible de ressources personnelles pour y arriver.

Il me semble que cela concerne les personnes qui ont très mal vécu le licenciement, leur identité à ce moment là leur convenait entièrement.Pour la conserver, la personne met alors en place des stratégies.

Il en existe trois : « La préservation conflictuelle conduit le sujet à mettre en place une stratégie d'affrontement avec un autrui significatif qui constitue pour lui une menace identitaire.28(*) », « La préservation collaborative conduit à l'adoption d'une stratégie d'arrangement, explicite ou tacite, avec un autrui vis-à-vis duquel le sujet est socio-affectivement dépendant », et enfin « la préservation par repliement conduit à s'inscrire dans une stratégie d'isolement. N'ayant pas les ressources d'affrontement ni celles de l'alliance avec autrui, le sujet choisit ou est condamné à le faire, de se retirer de la scène de l'interaction et de la confrontation. ».

- « Les dynamiques de transformation identitaire » : la personne souhaite acquérir une nouvelle identité et abandonner l'actuelle. Ces stratégies pour la réalisation de la transformation identitaire peuvent être soutenues ou non par autrui.

- « Les dynamiques de gestation identitaire » : dans lesquels, le projet de l'identité est en cours de réflexion. On y retrouve « le projet de confirmation de soi », « le projet de reconstruction de soi » qui est particulièrement intéressant dans mon étude car cela concerne des personnes ayant vécu « une blessure identitaire causée par un autrui significatif dont ils dépendent institutionnellement et affectivement ».

« L'enjeu identitaire est de réussir la restauration et la réhabilitation de leur identité. Il s'agit de retrouver l'estime de soi d'autrefois, c'est-à-dire, le retour à un état identitaire antérieur. ». Ensuite, vient le « projet de redéfinition de soi » dont l'enjeu est « la redéfinition d'un soi devenu flou ».

- « Les dynamiques de destructivité identitaires et la dynamique d'anéantissement identitaires ».

Dans quelles dynamiques identitaires se situent les personnes que j'accompagne ? Quelle stratégie utilisent-elles ?

2.4.2 Transitionsprofessionnelles 

Au sujet de cette période particulière, se situant entre la perte de leur emploi et une nouvelle période d'activité encore indéfinie, Mazade et Hinault écrivent :

« La transition est une situation d'affrontement à l'incertitude et un moment d'épreuves (chômage, contrôle de la recherche d'emploi, la stabilisation et la (re)construction d'une identité professionnelle, éventuelles difficultés d'intégration dans les milieux de travail, etc...). Dans certaines circonstances, par exemple, lors de licenciement économiques, les transitions professionnelles sont un moment de « crise biographiques » (Mazade, 2011) qui met à l'épreuve le milieu conjugal et familial. Dans d'autres cas de figure, les transitions professionnelles réactivent des projets enfouis et des aspirations contrariées pendant la scolarité (Négroni, 2007).29(*) ».

Parmi les personnes que je suis régulièrement, je reçois une dame, âgée de 55 ans dans l'obligation de travailler encore 5 ans avant de partir en retraite. Cette dame a commencé à travailler à l'âge de 16 ans et semble complètement perdue depuis son licenciement. Son mari l'accompagnait à chaque séance. J'en étais d'ailleurs étonnée et en faisait part à ma tutrice de stage. Quel pouvait être le bénéfice de la présence perpétuelle de son mari pour elle ?

Je pense que ce n'est pas en étant toujours accompagnée de son mari, qu'elle pourrait progresser. Elle a besoin de se retrouver seule avec un professionnel pour prendre le recul nécessaire à sa nouvelle situation. Cette dame vit pour l'instant une véritable « crise biographique30(*) ».

Dans une autre situation, un monsieur de 59 ans qui sera à la retraite d'ici six mois. Pour lui, c'est une véritable opportunité qui s'est présenté à lui : pouvoir préparer sa retraite pendant cette période de transition tout en ayant un maintien de salaire pendant un an. « Cet agencement institutionnel transforme le chômage en transition autorisant ces acteurs à s'engager dans des activités qui forment un nouveau cadre social d'identification, qui deviendra celui de la retraite. 31(*)». Il pourra aussi bénéficier d'une formation informatique, ce qui le rassure pour l'avenir.

Un autre cas concerne un homme de 45 ans, cariste au sein de l'usine, qui a décidé rapidement de créer son entreprise dans l'hydro-dipping (processus qui consiste à transférer grâce à l'eau des images sur des objets). En effet, pour lui le licenciement est une opportunité à créer sa société. Il y pensait depuis quelques temps sans bien sûr oser se lancer. Titulaire d'un CDI, il se trouvait alors dans une situation stable et rassurante.

« De plus en plus de salariés aspirent à un autre avenir professionnel. Mais rares sont ceux qui franchissent le pas. Quitter son métier, c'est-à-dire entrer dans la deuxième phase dite de désengagement, est tributaire du degré de flexibilité des institutions, des métiers et secteurs professionnels, ainsi que des caractéristiques sociales des acteurs (position sociale et géographique, dispositions et capitaux)32(*) ».

Il semble difficile pour des salariés de prendre le risque de se retrouver dans une situation précaire en réalisant le projet désiré.

Ces trois exemples soulignent la pluralité de réactions qui apparaissent face à la situation actuelle (le licenciement). Chaque individu va tenter de se reconstruire en mobilisant des stratégies identitaires propres.

2.5 La biographisation au service de l'accompagnement

A ce stade, il convient de mobiliser la notion de biographisation, celle-ci apparait féconde pour notre sujet.

Cette notion est liée à la dynamique identitaire car elle permet à la personne de raconter ses expériences professionnelles, familiales et autres, et, de se construire par le récit.

Delory-Momberger appelle « biographisation le travail psycho-cognitif de configuration temporelle et narrative, par lequel les hommes donnent une forme propre au déroulement et aux expériences de leur vie. 33(*)»

L'énonciation du parcours de vie passé et présent représente un point de départ pour le futur.

« En tant que pratique, le recours à la reconstitution des évènements de vie dans leurs interactions sociales et environnementales et la production de significations sont considérés comme des moments essentiels de la construction des projets d'orientation. L'histoire de vie articule dans le présent le passé de la personne et son futur possible et souhaitable34(*). »

Ces personnes contraintes à se reconvertir qui n'ont pu se préparer à cet évènement, ontbesoin de faire le point sur leur parcours de vie. Cette démarche leur permettra de progresser sur l'appropriation de leur nouvelle identité et les aideront à se projeter dans l'avenir.

Les questions posées par ces personnes sont : Qui suis-je maintenant que je ne suis plus où j'avais l'habitude d'être, de travailler ? Quelles sont mes acquis pour cette nouvelle orientation ? Comment puis-je mettre à profit mon passé pour construire mon futur ? En quoi l'accompagnement d'un professionnel peut m'aider à accepter ma nouvelle situation afin de pouvoir me conduire dans une nouvelle orientation ?

La biographisation permet d'essayer de répondre partiellement à ces questions. Dans le cadre du travail que j'ai engagé lors de ma reconversion, et les mises en mots partagées dans le cadre des écrits universitaires et des entretiens d'accompagnement au mémoire participent de ce processus. Ainsi, lors de mon bilan de compétence, j'ai pu écrire mon parcours professionnel et discuter de mon parcours personnel avec la psychologue chargée de mon suivi. C'est ainsi que j'ai avancé dans ma progression sur le plan professionnel et personnel et résoudre mon mal-être. C'est pourquoi, ce travail d'écriture et de verbalisation serait intéressant et enrichissant pour ces personnes rencontrées dans le cadre de la mission, d'autant plus qu'elles n'ont pu anticiper tous ces changements. « L'accompagnement d'un bilan combine à la fois l'apport des informations nécessaires pour faire des projets et les conseils qui permettent au bénéficiaire de se situer35(*). »

Le bilan de compétences n'est pas le seul outil qui permet de mieux se connaître, l'accompagnant peut aussi utiliser des tests de personnalité et de découverte du profil professionnel.

Toutes ces techniques y compris les échanges verbaux entre les accompagnants et accompagnés font partie de la biographisation. Le travail du professionnel semble être un atout pour ce public qui seul aurait plus de difficultés à y parvenir.

D'ailleurs, certains auteurs rendent compte de l'effet de l'absence des dispositifs d'accompagnements des transitions (C.Graille36(*)et F.Dubois/ P.Terral)37(*) : les individus sont alors renvoyés à leurs ressources propres (en termes de compétences, de réseaux, de capitaux...) pour tenir dans ces périodes d'incertitude, produisant des inégalités fortes quant à l'issue possible de l'entre-deux.38(*) 

Les personnes accompagnées peuvent donc s'appuyer sur les ressources et le réseau du professionnel et semblent avoir plus de chances de parvenir à atteindre leur objectif.

Dans la partie suivante,j'aborderai la construction de mon dispositif méthodologique aux fins de répondre à ma question de recherche.

Troisième partie

1. Dispositif méthodologique

Dans la mesure où notre recherche se veut compréhensive, il apparait que l'utilisation de l'entretien semi-directif est la plus appropriée pour mieux comprendre les dynamiques identitaires en jeu concernant les sujets engages dans le dispositif CSP.

1.1 Définition et explicitation du choix de l'outil : L'entretien semi-directif

J'ai choisi l'entretien semi directif comme technique de recherche pour collecter mes données. En effet, il permet une communication et une interaction plus vaste que le questionnaire. La personne interviewée est libre de s'exprimer autour des questions principales. Dans un de ses ouvrages, Combessie explique : « Parmi les diverses formes possibles de collectes d'informations orales, le sociologue accorde une importance particulière à l'entretien semi-directif, nommé aussi entretien centré : il préfère ces appellations à celle d'entretien non- directif dans la mesure où il choisit et annonce au préalable le thème ou les thèmes et qu'il dispose d'un guide d'entretien. 39(*)». Nous souscrivons à cette option.

Ainsi, j'ai établi un guide d'entretien40(*), qui est comme le définit Combessie, « « un mémento » (un pense-bête). Il est rédigé avant l'entretien et comporte la liste des thèmes ou des aspects du thème qui devront avoir été abordés avant la fin de l'entretien. 41(*)»

J'ai ensuite élaboré ma grille d'entretien avec une dizaine de questions42(*) :« L'objectif de l'entretien semi-directif est d'obtenir des entretiens de contenu homogène où tous les points de vue seront prévus abordés.43(*) ».

C'est-à-dire « obtenir des informations approfondies et de qualité sur le vécu, le ressenti ou la réflexion de personnes pour l'intérêt de leur apport à l'objet qui a justifié le recours à cette technique44(*). »

1.2 Construction de l'échantillon

Le choix de l'échantillon concerne des personnes adhérentes au CSP, c'est-à-dire inscrites depuis octobre 2016. Cette construction nécessite d'être abordée au regard de la complexité d'une double implication quant à mon positionnement à la fois d'accompagnatrice auprès de ces personnes mais également d'étudiante dans une posture de recherche.

Difficultés rencontrées 

Au départ, j'avais choisi d'interviewer des personnes de la même usine. J'ai changé d'avis en m'apercevant que je suivais ces personnes régulièrement et donc que je les connaissais déjà beaucoup, ce qui constituait un biais possible dans mon travail de recherche. De plus, la posture à adopterlors de ces entretiens avec des personnes qui me connaissent en tant que professionnelle, n'était pas évidente à trouver, ce qui paraît légitime. En effet, elles me voyaient souvent et avaient donc du mal à me considérer en tant qu'étudiante. Ceci dit, deux personnes dans mon échantillon font partie des personnes que je suis régulièrement. En effet, faute de trouver d'autres personnes disponibles, je les ai quand même inclues dans mes entretiens. J'ai dû me positionner clairement au départ. Je leur ai dit qu'il fallait qu'elle me considère comme une étudiante et non comme la professionnelle qui les reçoit habituellement. Je les ai prévenues que j'allais leur poser des questions dont je connaissais déjà la réponse mais que cela faisait partie du processus de l'entretien. Il ne fallait pas qu'elles soient étonnées. Une l'a très bien compris, l'autre moins bien.

De même, initialement, je désirais me focaliser sur des personnes adhérant au CSP depuis environ 6 mois mais encore une fois pour une question de disponibilité je n'ai pu prolonger ma phase de recueil des données, ainsi une des personnes n'est adhérente que depuis 3 mois. Je décidais de recevoir cette personne lors d'un entretien exploratoire, ne pouvant l'inclure dans mon échantillon.

Ce sont des hommes et des femmes âgés de 32 à 59 et demi. Lors de toute la préparation des entretiens, je me suis vraiment rendu compte de la difficulté concrète à construire un échantillon viable.La liste définitive de mon échantillonnage se présente ainsi. Par respect d'anonymat, j'ai choisi de remplacer les prénoms par des prénoms d'emprunt.

NOM PRENOM

SEXE

AGE

NIVEAU SCOLAIRE

ANCIEN POSTE

DATE DEBUT CSP

Gérard

H

52 ans

Niveau VI

Gardien

Octobre 2016

Mathieu

H

37 ans

Bac pro maintenance

Cariste pointeur

Octobre 2016

Francine

F

32 ans

CAP BEP Fleuristerie

Commerciale pharmaceutique

Novembre 2016

Danièle

F

54 ans et demi

CAP couture

Livreuse en boulangerie

Février 2017

Béatrice

F

55 ans

Niveau VI

Ouvrière agro alimentaire

Octobre 2016

Claude

H

35 ans

Bac pro carrossier

Opérateur de production

Octobre 2016

Ludovic

H

59 et demi

Certificat d'études

Cariste expédition

Octobre 2016

1.3 L'expérience de l'entretien exploratoire

Afin de pouvoir tester la pertinence de ma grille d'entretien, j'ai procédé à deux entretiens exploratoires auprès d'autres bénéficiaires de ce contrat, Gérard et Danièle.

Le premier, Gérard, est un homme de 52 ans, marié, peu diplômé, travaillant depuis une quinzaine d'années dans l'entreprise qui l'a licencié. Il est en CSP depuis octobre 2016. La deuxième,Danièle est une femme de 54 et demi, vivant maritalement. Titulaire d'un CAP de couture, elle a commencé à travailler jeune. Ses trois grands enfants ne sont plus à sa charge. Licenciée d'une boulangerie, pour laquelle elle effectuait les livraisons, elle adhère au CSP depuis février 2017. C'est pourquoi je n'ai pu l'inclure dans mon échantillon. En effet, je trouvais intéressant de choisir des personnes adhérant au CSP depuis 6 mois c'est-à-dire à mi-parcours. Pour autant, je me suis rendue compte que les propos de Danièle ne différaient pas de ceux des autres personnes inscrites depuis plus longtemps.

Ces entretiens m'ont permis de prendre conscience de la difficulté de l'exercice. Quelques jours avant, je m'étais assurée de la disponibilité d'une salle et l'avait réservée. Lorsque je suis arrivée, la salle était occupée. J'ai donc dû improviser et m'installer dans un autre bureau inoccupé. Je souhaitais rendre le cadre convivial et moins formel qu'à l'accoutumé. Je positionnais donc deux fauteuils l'un à côté de l'autre afin d'adopter une posture d'égalité et de convivialité. Lorsque le monsieur ou la dame sont entrés, je leur ai proposé un café. J'ai également mis un écriteau sur la porte pour éviter que quelqu'un n'entre en cours d'entretien et n'interrompe l'enregistrement.

Je me suis rendu compte que le fait d'enregistrer la personne compliquait le déroulement de l'entretien que ce soit pour la personne interviewée ou moi-même. Dès l'enclenchement de l'enregistrement, l'ambiance est plus pesante. Un malaise s'installe. Chaque mot est pesé. Ces entretiens m'ont permis de m'en apercevoir et de pouvoir y remédier autant que possible pour les suivants. Ainsi, j'essayais d'instaurer un climat plus détendu en discutant un peu avant le début de l'enregistrement. Je disais à la personne que je savais qu'il n'était pas évident d'être enregistré ni pour elle, ni pour moi mais que nous allions essayer de l'oublier.

Malgré une préparation que je pensais consciencieusement accomplie, je n'ai pas réussi à « faire parler »les personnes comme je le désirais. J'ai ressenti un blocage dû je pense, en grande partie, à l'enjeu lié à la réalisation du mémoire et à la réussite de ma recherche.

1.4 La conduite des entretiens semi-directifs

Forte de l'expérience dans le cadre exploratoire, j'ai pris en compte un certain nombre d'éléments pour garantir aux mieux de bonnes conditions de passation. Ainsi, la question du lieu n'est pas anodine. Il m'apparait important d'en faire un commentaire et d'aborder également le travail de transcription effectué.

1.4.1 Le lieu

J'ai mené mes entretiens dans d'autres locaux plus grands que ceux dans lesquels je travaille habituellement, appartenant aussi à ID Formation.

J'ai choisi ce lieu car ils possèdent plus de salles et bureaux avec possibilité d'être plus isolé et au calme. Je désirais vraiment créer un cadre agréable et convivial pour mettre à l'aise les personnes interviewées. Cette fois, j'ai vérifié à plusieurs reprises, que la salle réservée serait bien disponible les deux jours pendant lesquelles je faisais mes entretiens.

1.4.2 Le travail de retranscription

Au départ, lorsque je me suis attelée à la retranscription des enregistrements, je me suis questionnée sur ce qui doit figurer dans la retranscription finale. Je me suis appuyée sur l'orientation du sociologue Bourdieu45(*). Face à ce problème, Bourdieu choisit de supprimer les éléments qui informent sur le contexte de l'échange : attitudes lors de l'entretien, tonalité marquées de certaines réflexions, longueur des silences.

Pour la retranscription des entretiens, j'ai choisi de ne pas retranscrire tous les « euh », toutes les phrases qui commençaient par un mot. Je n'ai pas corrigé les fautes de grammaire. J'ai retranscris certaines répétitions, les silences et les soupirs quand ils me paraissaient importants : « Dans ses choix de retranscription, P. Bourdieu accepte de reformuler les propos de ses interlocuteurs, de sorte de faire apparaître plus clairement les situations rencontrées et les réactions qu'elles suscitent. »46(*).

L'étape qui suit concerne le choix de l'analyse pour mes entretiens de recherche. J'ai choisi l'analyse thématique.

2. Analyse des données et interprétation

2.1 Mode d'exploitation des données

Pour l'analyse de mes entretiens de recherche47(*), j'ai opté pour l'analyse thématique. « L'analyse thématique a comme but de dégager les éléments sémantiques fondamentaux en les regroupant à l'intérieur des catégories.48(*) »J'ai choisi ce type d'analyse car il me semblait intéressant de faire ressortir les thèmes dominants.

Ma question de recherche concerne ainsi les personnes suivies lors du CSP. Je souhaite comprendre en quoi ce dispositif favorise la reconversion.

En quoi le contrat de sécurisation professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes à quitter leur métier ?

En relisant attentivement les entretiens et en les analysant, j'ai pu en retirer un certain nombre de réflexions. En premier lieu, je voulais savoir pourquoi elles avaient accepté d'adhérer à ce contrat. Dans un deuxième temps, j'évoquerai leur ressenti lors de cette période ainsi que leur possible besoin de reconstruction identitaire et je parlerai de ce que l'accompagnement dans le CSP leur apporte sur ces points. Ensuite, je ferai un point sur leur projet soit de reconversion, de bifurcation ou autre...

Une dernière partie sera consacrée à la discussion des résultats.

2.2 Raisons du choix du CSP

Pour commencer, il parait intéressant de questionner les personnes interviewées à propos des raisons de leur adhésion au CSP.

2.2.1 Accompagnement

Toutes les personnes que j'ai interviewées ont choisi au départ d'adhérer au CSP pour l'accompagnement personnalisé qu'il « offrait »que ce soit pour les formations, unsoutien psychologique ou uneaide administrative. Voici quelques extraits d'entretiens permettant de situer la projection des personnes :

Matthieu m'a répondu lorsque je lui ai posé la question : « déjà au niveau du suivi, des facilités, plus de facilités pour les formations par rapport à un chômeur normal qui est en ARE... »(L 12/13 P1)

Pour Claude, le choix du CSP repose sur « le fait de pouvoir accéder à une formation professionnelle... »(L 13 /14P1). Quant à Ludovic, lorsqu'il a été licencié, il s'est dit « de toute manière si je suis dans les licenciements, ben, il va falloir que je sois encadré parce que subir un licenciement c'est jamais agréable au contraire c'est terrible ». (L20 à 22 P1)

Béatrice, elle, reste mal à l'aise lors de l'entretien. Elle bouge beaucoup sur sa chaise. Lorsque je lui pose la question, elle semble perdue mais finit par me répondre « pour moi, c'est plutôt pour reprendre le travail, j'ai fait pas mal de démarches pour les entreprises au cas où il y aurait du travail. » (L12/13 P1).

Et, enfin, pour Francine, la situation est un peu compliquée. En effet, elle avait opté pour le CSP pour suivre une formation de secrétaire/comptable afin de créer une entreprise avec son mari. Elle me confie : « Alors c'est tout le problème en ce moment, la majorité de mon CSP normalement était consacré à chercher des formations, parce que mon conjoint et moi-même avons le projet d'ouvrir notre société. »(L29/31 P1). Mais hélas, son projet a du être révisé suite à un refus des banques. Son mari avait dû démissionner pour débuter leur projet mais suite au licenciement de Francine, les banques ne veulent plus les financer. Elle doit donc retrouver du travail au plus vite, si elle veut pouvoir un jour concrétiser la création de leur société. Elle me dit avec amertume : « ...et du coup, je recherche pleinement du travail parce que j'ai plus le choix pour ouvrir la société, il faut au moins que je travaille, ce qui est un peu dommage. » (L 2/3P2)

Avec du recul, ces personnes sont en demande toutes d'un accompagnement particulier. Si nous référons à la « Nébuleuse » de Paul49(*), la forme d'accompagnement qui me semble la plus appropriée est celle du counselling. « Le counselling est ainsi un type d'accompagnement caractérisé par la centration sur des personnes « normales », la prise en compte de leur développement à l'occasion d'une situation-problème, la mobilisation de leurs ressources, l'intégration de l'interaction personne-environnement50(*). »

Ainsi, dans l'accompagnement du CSP, les conseillers reçoivent toujours les mêmes personnes à un rythme régulier et peuvent les guider en apprenant à les connaître. Les professionnels peuvent se concentrer sur chaque personne et développer une réelle relation de confiance.

2.2.2 Avantages financiers

La plupart des personnes interrogées ont opté pour le CSP pour bénéficier des avantages financiers qu'il offre. En effet, pendant une année, elles bénéficieront de 75% de leur salaire brut. C'est le cas Mathieu qui l'évoque clairement : « ...et aussi le maintien de salaire pendant 1 an ».(L13 P1). Claude va également dans ce sens : « ...et moi personnellement plus avantageux de pouvoir adhérer au CSP, tout d'abord pour le maintien de salaire pendant 12 mois... » (L10 à 12 P1). Francine le souligne vivement aussi : « ...ben le CSP, je ne vais pas vous mentir, au niveau finances, y a pas photo ! »(L16/17 P5). Quant à Ludovic et Béatrice, ils n'en ont pas parlé.

Les personnes interviewées ont ainsichoisi au départ le CSP pour son aide personnalisée dans les démarches administratives (les formations, recherche d'emploi...) ou sur le plan psychologique. L'attrait financier représente un atout mais qui arrive en deuxième position selon leurs réponses, d'ailleurs deux ne l'ont pas évoqué.

Nous allons maintenant tenter de comprendre au travers de leurs propos de quelle manière le CSP peut accompagner ces personnes vers une reconversion.

2.3 Une transition difficile

Toutes les personnes interrogées ont vécu le licenciement de façon singulière comme nous allons pouvoir le constater à travers leurs propos.

Tout d'abord, tous appréciaient leur métier et auraient souhaité rester dans leur entreprise.

En effet, lorsque je demande à Béatrice si elle aurait aimé rester dans l'entreprise s'il n'y avait pas eu de plan social, elle me répond :« Oh oui oui. J'aimais bien mon travail, j'étais motivée. J'étais toujours correcte avec eux et j'aimais bien mon travail. » (L26/27 P1)

etFrancinepartage également avec force ce point de vue: « Très très bien c'était l'idéal, j'ai toujours travaillé dans le commerce donc y a pas de soucis. » (L13 P1) et elle ajoute « Oui, si tout ne s'était pas passé comme ça, je serais restée plusieurs années parce que la majorité d'ancienneté là-bas c'est 14,16 ans donc c'est vraiment des emplois qui passionnent beaucoup de monde ...» (L 22/23 P1).

Claude affirme aussi : « ...oui personnellement j'aimais bien ce que je faisais. » (L9/10 P2).Mathieu s'exclame : « Ah bien ! Ca s'est toujours bien passé... » (L16 P1). Enfin quantà Ludovic, il m'explique: « Bien, comme je travaillais perso, je dépendais de moi-même, j'avais un chef, mais je dépendais de moi-même donc je l'ai bien vécu... » ( L2/3 P2).

Le changement de situation est d'autant plus difficile que toutes ces personnes appréciaient leur métier.A propos de cette période de transition, nous rejoignons ce que Denaveà écrit : « Or cette phase de transition entre deux emplois est précisément la plus anxiogène pour les salariés redoutant le chômage de longue durée ou les emplois précaires lors d'une bifurcation professionnelle. La France connaît effectivement une faible sécurité de l'emploi (la probabilité du chômage est plus forte en France que la moyenne des pays européens) et les transitions du chômage vers l'emploi (comme du contrat à durée déterminée vers le contrat à durée indéterminée) sont également faibles. Les risques pèsent plus fortement sur les plus âgées et les moins qualifiés (qui connaissent une plus forte probabilité de rester longtemps au chômage).51(*) »

Cette situation semble compliquée pour eux, ces personnes relatent les propos suivants :

Mathieu avoue en soupirant : « Y a des moments ça va et y a des moments, ça va moins bien ». (L 34 P 1. Claude exprime son appréhension de la situation par rapport à sa famille : « C'est très compliqué, surtout avec 3 enfants. Après 14 ans, le coup est dur à encaisser mais... » (L2/3P4). Un long silence suit ses propos. Puis il ajoute « Après c'est une appréhension de ne pas pouvoir retrouver du travail au plus vite. ». (L20/21 P4).Béatrice confirme le vécu de la violence du licenciement

 : « Un peu très dur parce que je pensais pas être licenciée et donc c'était dur parce que j'ai toujours travaillé ! c'est pas évident ! Arrivé à ce point là c'est vrai que c'est très dur ! » (L21/22 P2). Quant à Francine, elle évoque le choc de la nouvelle du licenciement : « Mais au début, c'était très dur, hein forcément, on annonce ça comme ça, c'est très dur surtout quand on s'y attend pas, surtout une boîte aussi énorme que celle-ci. » (L30/31 P3) et elle me confie un plus tard : « Mais là,je ressens une baisse de confiance en moi comme la société ne peut pas s'ouvrir si je ne trouve pas d'emploi du coup tout repose sur moi en ce moment. C'est un peu délicat, surtout que mon conjoint a du démissionner de son CDI pour ouvrir la boîte, et arrivés là, on ne peut pas ouvrir la boîte du coup, on est dans une panade pas possible ! » (L34 à 38 P3). Ludovic partage leurs avisà tous quand il dit au sujet du licenciement : « Très mal ! Au départ très mal. » (L17 P3)

J'ai ressenti dans leurs mots un poids, une lourdeur, une foule de questions qui se bousculent dans leur tête. « En définitive, quel que soit le type de transition, une légitimité professionnelle est à reconstruire, une phase de deuil et de désengagement/réengagement toujours éprouvante apparait,une réorganisation des sphères de vie et une construction identitaire se dessinent52(*) ». (Jourdain, cité par Mazade et Hinault).

2.4 L'existence de tensions identitaires

En introduction de cette partie, il me semble judicieux de m'appuyer sur des propos de Kaddouri  qui explique que « Dans ces contextes, les personnes concernées s'inscrivent le plus souvent dans un travail de redéfinition identitaire, de clarification et de repositionnement conduisant à une bifurcation, mais pas nécessairement. 53(*)». En effet, à travers les propos des personnes interviewées, nous allons nous apercevoir que même si ces personnes se sentent en tension, toutes ne souhaitent pas un changement total de leur identité.

La personne se trouve en tension identitaire entre son identité passée liée à son ancien métier et son identité future, à ce stade encore floue. Pour y remédier, elle devra mettre en place des « stratégies identitaires » comme l'explique Kaddouri54(*).

J'ai retrouvé parmi les personnes interrogées trois types de dynamiquesidentitaires. La « dynamique de continuité identitaire » semble correspondre à Béatrice. Cette dame souhaite absolument conserver son identité passée car elle lui convenait parfaitement. Elle mettra en place une stratégie de « préservation identitaire  collaborative » avec le dispositif du CSP afin de réussir à retrouver son identité passée. D'ailleurs, elle me déclare : « Le CSP, euh, rester toujours sur ma branche. Comme, quoi j'ai toujours travaillé dans le poisson et moi, je voudrais rester dans ma branche dans la production » L1/2 P2 et elle ajoute « J'ai quitté à l'école à 15 ans et demi, j'ai commencé à travailler à 16 ans, j'ai jamais été au chômage. J'ai toujours travaillé depuis là ». (L8/9 P2) pour terminer par « Un peu très dur parce que je pensais pas être licenciée et donc c'était dur parce que j'ai toujours travaillé ! c'est pas évident ! Arrivé à ce point là c'est vrai que c'est très dur ! ». (L21/22 P2).

La « dynamique de transformation identitaire » semble convenir à Ludovic. Ce monsieur a suivi une formation au numérique pour se préparer à la retraite. Il était terrifié par la nouvelle technologie. Il me confie : « Et puis, j'ai fait un stage informatique qui m'a aidé. Ça a été trois mois peut-être intenses, parce que lorsqu'on connait pas ben c'est intense. Mais arrivé là, c'était bien c'est ce que je voulais. J'enviais tous les gens qui étaient devant leur ordinateur maintenant je peux le faire. » (L 29 P3 et 1/2P 4)et il continue en me disant « Du coup la retraite va être ...Elle va être bien prise ! Oui et je vais sur les sites de retraite et je peux préparer les papiers. Je me prépare déjà, je me prépare tout doucement ». (L5/6 P5).

Pour les autres, la « dynamique de gestation identitaire » se rapproche de leur profil. Leur projet identitaire est en cours de réflexion. Ils ne sont pas encore déterminés sur ce qu'ils veulent devenir. Francine pensait créer son entreprise avec son mari suite à son licenciement et profiter du CSP pour suivre une formation de secrétaire comptable. Mais des éléments extérieurs sont venus contrariés son projet qu'elle doit remettre à plus tard. Elle est donc un peu perdue et doit trouver un emploi rapidement mais ne sait où travailler réellement. On ressent dans cet extrait toutes les questions qu'elle se posent : « Mais là ,je ressens une baisse de confiance en moi comme la société ne peut pas s'ouvrir si je ne trouve pas d'emploi du coup tout repose sur moi en ce moment. C'est un peu délicat, surtout que mon conjoint a du démissionner de son CDI pour ouvrir la boîte, et arrivés là, on ne peut pas ouvrir la boîte du coup, on est dans une panade pas possible ! ». (L 34 à 38 P3).Claude était cariste et a souhaité suivre une formation de technicien de maintenance pendant la première partie de son CSP. Il souhaite se reconvertir mais réfléchit encore. En questionnant les boîtes intérimaires, il s'est aperçu que toutes exigeaient une première expérience dans le métier de technicien de maintenance. Etant marié et ayant 3 enfants, il a besoin de retrouver du travail au plus vite : « L'objectif premier c'est d'obtenir le diplôme, ensuite j'aimerai bien m'orienter vers le métier de technicien mais après en ayant déjà eu des entretiens avec les boîtes d'intérimaire, eux, ils recherchent du monde mais qui ont de l'expérience. C'est par rapport à la demande du client. Après il y a très peu d'entreprises qui sont prêtes à prendre quelqu'un qui vient juste de sortir d'un parcours de formation pour la former sur place, la prendre, la former et ensuite l'embauché dans l'entreprise mais vraiment la former sur site. Après je ne mets pas un frein là-dessus parce que je sais très bien que ça va être compliqué. Par rapport aussi à mon expérience, je ne vais pas me fixer qu'un objectif à partir dans la maintenance si j'ai des propositions en tant qu'opérateur ou en tant que cariste, enfin tout ce qui concerne un peu les différents postes de l'industrie, j'accepterai avec plaisir la mission. Après le but, c'est de rentrer dans l'entreprise en tant qu'opérateur et après essayer d'évoluer en tant que technicien si possible. Ce serait un peu dommage d'avoir suivi un cours de formation, d'avoir passé un diplôme sans le faire. Tout ce qu'on apprend là-bas, ça ne peut être que bénéfique pour moi. Mais tout de suite après ça risque d'être compliqué ! » L13 à 26 P5.

Quant à Mathieu, c'est le seul qui a retrouvé un emploi et qui donc se sent mieux. Il sait ce qu'il veut, il dit d'ailleurs : « moi personnellement, je le vis bien parce que je suis actif dans mes recherches. Donc je ne suis pas de nature à me laisser aller sur moi-même à partir du moment où l'on montre aux employeurs, on peut retrouver du travail rapidement. » (L6/8P4). 

Finalement, l'accompagnement inclus dans le contrat de sécurisation professionnelle peut-il les aider dans leur quête identitaire qui est, je pense, le point de départ de cette nouvelle vie.

2.5 Le CSP, une aide à la reconstruction identitaire ?

Toutes les personnes interviewées sont plus ou moins à la recherche d'une nouvelle identité. Fragilisées par leur licenciement, privées d'un métier qu'elles aimaient elles cherchent à se reconstruire. Au sujet du CSP, Francine souligne: « C'est un peu plus que le pôle emploi normal, euh après à la base c'est plus après l'accompagnement d'une personne toujours attitrée. C'est sympathique aussi, parce que moi voir 50 000 personnes moi ça m'intéresse pas parce que s'il faut raconter notre histoire à chaque personne, je veux dire, on n'a pas fini, le pôle emploi, ils ont pas que deux hein ! Donc c'est vrai que c'est un peu délicat et puis mais c'est vrai que là, le CSP m'a apporté, c'est vrai peut-être de la confiance... ».(L 17 à 22 P5). Ludovic explique aussi : « J'ai eu l'occasion d'avoir une conseillère qui a su me comprendre, on a su dialoguer ensemble. Elle a su ce que je voulais, ce que je recherchais. Elle m'a fait comprendre que peut-être je n'aurais plus le même travail, qu'il fallait qu'on trouve autre chose. Je lui ai parlé un petit d'informatique et du coup, elle m'a orienté sur ça. Au début cela a été une petite galère, mais après ça s'est avéré satisfaisant. » (L12 à 17 P4)

Claude parle lui d'une remise en question lors de cette période : « Donc là aujourd'hui, je me suis remis en question, par rapport à la cellule d'accompagnement, pour m'orienter vers vraiment ce qui me convenait le plus. » (L16/17P4).

Perdue car elle a toujours travaillée,Béatricerépète à plusieurs reprises son envie de retrouver du travail. Pendant cette période, elle garde ses habitudes : « Je me lève comme si j'allais travailler » (L7 P3). Elle déclare aussi : « Ca fait 6 mois que je n'ai pas travaillé. J'espère retrouver du travail d'ici la fin du CSP. Mais pour l'instant, je n'ai rien du tout. Je cherche un peu partout mais... c'est très dur quand même. Le temps passe trop vite. » (L28 à 30 P3) et de nouveau dit :« Oui très difficile. Avec l'âge que j'ai. J'ai toujours travaillé et puis c'est très dur de retrouver du travail ». (L16/17 P3). Ses propos montrent la place importante que tient celle du travail dans sa vie. Il est même difficile de la faire parler d'autre chose, de lui demander son avis sur le dispositif. Son inquiétude principale reste celle de retrouver du travail. Mathieu lui s'était préparé à ce licenciement, et il déclare à ce sujet : « Ben pffff, plus ou moins bien parce que je m'y étais préparé... » (L16/17 P2). Volontaire, il ajoute : « ... de toutes façons même moi, je ne suis pas de nature défaitiste donc je me dis, je suis encore jeune j'ai des capacités, je vais rebondir rapidement... » (L30/31 P2).

Toutes les personnes interrogées ont ressenti le besoin d'être écoutées, rassurées et comprises : «  L'individu possède en lui-même des ressources considérables pour se comprendre, se percevoir différemment, changer ses attitudes fondamentales et son comportement vis-à-vis de lui-même. Mais seul un climat bien définissable, fait d'attitudes psychologiques facilitatrices, peut lui permettre d'accéder à ses ressources. » (Rogers,1962).

Les conseillers vont en écoutant attentivement ces personnes, les aider à puiser en eux les ressources qui leur permettront de progresser.

2.6 Différentesattitudes face à un avenir professionnel

Lors de ces entretiens, j'ai rencontré cinq personnes. Chacune ont des perspectives et des attitudes différentes face à leur avenir ce qui entraînent différentes appropriation du CSP.

Au fil des entretiens, ils mes les ont détaillés :

Augmentation des compétences

Mathieu, âgé de 37 ans, vivant en concubinage, 1 enfant, aimait son ancien travail et a souhaité augmenter ses compétences afin de retrouver du travail rapidement.

Mathieu est quelqu'un de volontaire qui a su vite rebondir et utiliser ce que le CSP lui offrait comme opportunité pour les formations. Il a passé ces permis CACES55(*) et passé dans la foulée des entretiens dans plusieurs entreprises.

« Ah ben, j'en ai profité pour remettre à niveau mes formations, vu que moi j'étais cariste. J'en ai profité pour repasser tous mes CACES, déjà et après moi ce que je veux, c'est retravaillé rapidement, j'ai déjà eu des entretiens dans plusieurs entreprises, j'attends des réponses (silence) ». (L1 à 4 P2)

Lors de notre entretien, nous avons été d'ailleurs interrompus, (L 14 P2), par l'appel d'un employeur qui lui a proposé un rendez vous pour passé des tests suite à un entretien.

Si Mathieu réussit les tests, il décrochera un CDD de 18 mois. Il l'explique à la fin de l'entretien : « Non pour une mission de 18 mois, je dois passer des tests à Dunkerque chez A. et ensuite si c'est validé je démarre ma mission ». (L12/13 P4)

Création d'entreprise contrariée

Francine est âgée de 32 ans, elle vit maritalement et a 2 enfants. Choquée d'avoir été licenciée, elle faisait partie d'une grosse entreprise dont l'activité était la prise de photographies des bébés dans les maternités. Elle aimait son métier même si cela lui demandait de l'investissement en termes de déplacements. Elle avait pensé utiliser la période de CSP pour se former en tant que secrétaire comptable afin de créer une société avec son compagnon. Tout était mis en place avec sa conseillère quand les banques ont mis leur veto. Quelques mois auparavant, son compagnon avait dû démissionner de son emploi dans la perspective de créer cette société. Malheureusement, maintenant qu'elle aussi se trouve au chômage, les banques ne veulent pas prendre le risque de les financer. Il faut qu'elle retrouve un emploi rapidement pour pouvoir créer son entreprise. Juste avant de venir me rencontrer, elle sortait du bureau de sa conseillère pour faire le point. Elle expose donc la situation qu'elle est entrain de vivre : « Donc j'aurais voulu faire une formation secrétaire comptable étant donné que j'aurais été dans la partie administrative, papiers, et comptabilité de la société sauf que ça ne s'est pas déroulé comme prévu. Donc, étant donné que notre projet arrive au bout, les banques ont refusé notre projet si je n'avais pas d'emploi. Parce que forcément mon emploi est une sécurité en plus pour entre guillemets, en plus pour notre vie de famille, ce qui est normal, hein, attention mais ils comptaient pas du tout sur le CSP mais un emploi en CDI. Donc j'ai du refuser mes formations, ce que je viens d'annoncer à ma conseillère qui a fait des pieds et des mains à l'OPCA et tout pour avoir mes formations et du coup, je recherche pleinement du travail parce que j'ai plus le choix pour ouvrir la société, il faut au moins que je travaille, ce qui est un peu dommage ...». (L31 à36 P1) et (L1 à 4 P2)

Son projet est donc remis à plus tard, elle doit maintenant retrouver un emploi au plus vite si elle veut le concrétiser à un moment donné.

Volonté de conserver le même métier

Mme B. est âgé de 54 ans, elle est mariée sans enfants. Elle a commencé à travailler à 16 ans dans les magasins de marée en tant qu'ouvrière de conditionnement et n'a jamais cessé de travailler jusqu'à son licenciement économique. Elle me raconte son parcours : « J'ai quitté à l'école à 15 ans et demi, j'ai commencé à travailler à 16 ans, j'ai jamais été au chômage. J'ai toujours travaillé depuis là. » (L8/9 P2). Elle est très affectée et répète sans arrêt qu'elle désire retrouver un travail identique au précédent.Même quand je l'interroge sur autre chose, elle revient dessus. Lorsque je lui demande de me parler de son ressenti vis-à-vis de l'accompagnement qui lui est proposé. Elle me déclare : «  Euh là depuis que je suis en CSP, je suis avec A.B, ils font très bien leur travail (grand silence). J'allais dire aussi, j'ai du mal à trouver du travail et je voudrais, comme je cherche dans ma branche mais pour l'instant, pour l'instant, je n'ai rien du tout pour l'instant. ». Je rebondis et lui demande si le travail est difficile à trouver et elle me répond: » Oui très difficile. Avec l'âge que j'ai. J'ai toujours travaillé et puis c'est très dur de retrouver du travail ». (L 10 à 17 P3).

Pour essayer de l'aider à reprendre confiance en elle, la conseillère lui a proposé une formation informatique. Béatrice a acceptée, même si sa priorité reste de retrouver un emploi dans son domaine.

« Ca fait 6 mois que je n'ai pas travaillé. J'espère retrouver du travail d'ici la fin du CSP. Mais pour l'instant, je n'ai rien du tout. Je cherche un peu partout mais... c'est très dur quand même. Le temps passe trop vite. D'ici la fin du CSP, si je n'ai pas de travail, ça va être long bon ben là, je vais faire la formation informatique pour apprendre plus mais pour l'instant j'ai rien du tout. J'attends. » (L28 à 32 P3)

Cette dame semble avoir du mal à se projeter vers autre chose que son ancien emploi, elle a peur des conséquences que cela pourrait avoir sur son avenir. Il n'est pas certain qu'elle éprouve un réel épanouissement dans ce métier mais retrouver un emploi similaire à l'ancien la rassurerait.

« Le métier peut n'être qu'un simple moyen de subsistance et la question des plaisirs liés à son exercice ne se pose pas systématiquement. Les enquêtés qui recherchent, avant tout emploi salaire, et sécurité (à moyen ou à long terme) sont majoritairement issus des milieux populaires. 56(*)»

De plus, tout le monde n'a pas les capacités à se projeter, cette personne est issue d'un milieu populaire, « Or les situations socio-économiques les plus précaires « tendent à éloigner des pratiques d'anticipation »57(*)(D Thin, cité par Denave)

Bifurcation professionnelle

Claude est âgé de 35 ans, marié, 3 enfants. Opérateur/ conducteur de ligne dans son ancien emploi, il a saisi l'occasion de se reconvertir en tant que technicien de maintenance. Il suit une formation pour obtenir le titre professionnel dans ce domaine. Les différents ateliers et entretiens individuels auquel il a participé, lui ont permis de découvrir qu'il avait des compétences pour ce métier. Il explique : « A la base, j'aurai voulu justement améliorer mes compétences en tant qu'opérateur-conducteur de ligne mais aussi après je me suis un peu rendu compte, suite aux ateliers, qui ont été proposé dans le cadre du CSP. Je ne sais pas comment vous expliquer ça. Je me suis rendu compte que j'avais quelques compétences qui correspondaient justement à ce métier. Je me suis aussi renseigné sur le marché du travail dans ce secteur, donc apparemment c'était un secteur assez prometteur donc voilà, j'ai voulu tenter ma chance et essayer de me reconvertir en tant que technicien de maintenance ». (L 16 à 22 P1)

Il est vrai que dans son ancien métier, il était frustré de ne pas avoir de possibilité d'évolution. Il avoue lors de l'entretien : « Bon après, il n'y avait pas trop de possibilité d'évolution ». (L 8P2)

Le choc du licenciement passé, il a semble avoir saisit une chance de pouvoir augmenter en compétences et se reconvertir dans un métier où il est possible d'évoluer. Il reste quand même prudent, car, père de 3 enfants, travailler reste, pour lui, une priorité. Il se dit prêt à revenir dans un emploi similaire à l'ancien pour avoir un emploi s'il n'en trouve pas dans son nouveau domaine : « Par rapport aussi à mon expérience, je ne vais pas me fixer qu'un objectif à partir dans la maintenance si j'ai des propositions en tant qu'opérateur ou en tant que cariste, enfin tout ce qui concerne un peu les différents postes de l'industrie, j'accepterai avec plaisir la mission. Après le but, c'est de rentrer dans l'entreprise en tant qu'opérateur et après essayer d'évoluer en tant que technicien si possible. Ce serait un peu dommage d'avoir suivi un cours de formation, d'avoir passé un diplôme sans le faire. Tout ce qu'on apprend là-bas, ça ne peut être que bénéfique pour moi. Mais tout de suite après ça risque d'être compliqué ! » . (L19 à 26 P 5)

Pour lui, l'accompagnement du CSP lui permis de mieux se connaître, à reprendre confiance en lui et surtout à bien s'orienter. Il le répète à plusieurs reprises à différents endroits : « Et être guidé aussi dans l'orientation, de ce qui correspond à nos compétences. Moi, j'ai participé à tous les ateliers, parce que moi tout ce qui est création de CV, lettre de motivation et préparation d'entretien d'embauche, moi c'est des chose par lesquelles, je ne suis jamais passé donc ça c'était une appréhension , c'est encore une appréhension. D'ailleurs quand on a un entretien. Mais ça m'a permis de me découvrir, repasser par là, de nous préparer à des éventuels entretiens, beaucoup de chose comme celles-ci. » L28 à 34 P 4)et« Et puis aussi savoir se décrire en quelques mots, ça parait peu mais c'est beaucoup parce que le jour où je suis arrivée et qu'on m'a posé la question et je vous avouerais que j'ai eu un moment de doutes. Je ne savais pas quoi répondre. Et ben le fait de participer à tous ces ateliers m'a permis de prendre un pu plus confiance en moi aussi, de savoir plus m'exprimer par rapport aux éventuels entretiens sur beaucoup de choses. Moi, j'ai bien aimé c'est l'accompagnement et l'aide qu'on a eu pour la création de Cv et tout ça et aussi la préparation aux entretiens qui m'ont été très bénéfiques aussi «  (L1 à 7 P5)

« Ca m'a permis de me redécouvrir un petit peu, de bien m'orienter. Là, actuellement je sais que j'ai pris la bonne décision, enfin j'ai pris la décision par rapport à des conseils de la cellule d'accompagnement et, là à l'heure actuelle, je suis arrivé à la moitié de ma session, je n'ai aucun doute, je me suis bien orienté. » L1 à 4 P6

Une formation pour un départ en retraite serein

Ludovic, âgé de 59 ans et demi, il vit seul. Il a commencé à travailler à l'âge de 16 ans. Cariste en fin de carrière, il pensait terminer sa carrière dans l'entreprise qui l'a licencié. Malgré le choc du licenciement et le fait de devoir quitter un métier qu'il appréciait, il se résigne en attendant la retraite « maintenant, je laisse venir. Je n'ai pas à me plaindre... Oui mieux que certains qui ont encore quelques années à faire. Moi, je suis déjà plus serein. » (L26 et 28 P3). Sa conseillère s'apercevant de la peurde Ludovic pour l'informatique, lui propose de l'inscrire à une formation. Un peu réticent au départ, il finit par accepter. Il le confirme : « Je lui ai parlé un petit d'informatique et du coup, elle m'a orienté sur ça. Au début cela a été une petite galère, mais après ça s'est avéré satisfaisant. » (L15/17 P4). Et insiste ensuite sur son soulagement à avoir accepté cette formation : « J'ai plus peur de l'ordinateur, avant c'était mon cauchemar et maintenant au contraire je cherche à aller plus loin. » (L23/24 P4). Il s'en sert même pour ses loisirs, heureux présage pour sa future retraite : « Surtout oui, je fais de l'aquariophilie, les oiseaux, je fais de la reproduction d'oiseaux donc ça m'est utile pour les accouplements, les pontes, les éclosions. Donc maintenant, ce n'est plus sur un calendrier comme avant, c'est sur internet, je sors des imprimés, je sors des fiches. » (L27 à 29 P4)

.

De ces cinq situations singulières, j'en déduis donc les personnes ont une manière très différentes de s'approprier le CSP. Le contrat est le même pour tous, son apport sera différent selon les personnes.

Au cours de ces entretiens, j'ai pu constater que le CSP apportait une aide psychologique à ces personnes. Les personnes apprécient le suivi personnalisé et l'écoute dont elles font l'objet et le fait de rencontrer toujours la même personne.

Je retire de tous ces entretiens que l'accompagnement au cours du CSP leur apporte une aide certaine sur le plan identitaire et un soutien indéniable dans cette transition.

3 Discussion et perspectives

Au regard des résultats obtenus lors des entretiens, je constate que le contrat de sécurisation professionnelle est une aide pour ces personnes contraintes à quitter leur métier. L'aide se ressent notamment au niveau d'un étayage spécifique comme appui (entretien individuel, appui social et psychologique...). Ce dispositif structure l'année de transition de ces personnes par ses rendez vous réguliers. (Environ tous les 10 jours). C'est un soutien aussi pour toutes les démarches administratives et un « confort » financier.

C'est ce climat de confiance établi entre la personne suivie et le conseiller qui va permettre la reconstruction identitaire qui permettra à son tour de progresser. Cette écoute et cette démarche compréhensive 58(*) sont, au regard des entretiens effectués, une partie essentielle de l'accompagnement dans le cadre du CSP.

Il existe aussi un dispositif plus approfondi mis en place spécialement pour les adhérents du CSP. C'est un appui social et psychologique. Une des personnes que j'ai interrogées en a bénéficié. Si la conseillère ressent un quelconque signe de détresse de la part du bénéficiaire, elle peut la diriger vers un autre service où interviennent des psychologues.

Toutes les personnes que j'ai interrogées ont suivi au moins une formation : passage de CACES59(*), informatique, titre professionnel... Une formation a été reportée à cause d'évènements extérieurs, ici il s'agit d'un refusde financement des banques pour la création d'une entreprise qui concerne Francine.

Ce dispositif favorise donc le suivi de formation.

En revanche, j'ai constaté qu'une seule personne sur les 5 inscrites depuis six mois a retrouvé un emploi. A ce stade et au terme de 6 mois de suivi, je constate que le nombre de personnes étant en reconversion effective ou en emploi n'est pas élevé. Mais il convient de rester prudent car ses résultats sont au regard d'un échantillon peu important et à mi-parcours. Il est à noter que le climat économique du Boulonnais se dégrade, cela peut poser question au niveau local. Ce dispositif les aide à ne pas se décourager pendant cette étape qui se veut transitoire. A ce stade sur les 5 personnes, aucune n'est en emploi dans un autre domaine que précédemment.Je me suis projetée en termes de réflexionaussi après la fin du dispositif. Qu'adviendra t'il des personnes n'ayant pas retrouvé de travail ? Ces personnes ont été accompagnées régulièrement pendant une année, les conseillers les ont accompagnées, guidées. Certaines ont suivi une formation, et donc avec l'espoir de retrouver du travail dans un nouveau domaine. Si ce n'est pas le cas à la fin de cette année, après tant d'espérance, le retour à la réalité n'est-il pas encore plus difficile ? Elles vont se retrouver à nouveau seules, sans suivi personnalisé, face à leur situation.

Cependant,je note néanmoins la force du dispositif dans sa capacité à prendre en considération la personne dans sa singularité, dans un étayage qui joue une fonction rassurante dont les effets peuvent être réinvestis. Il s'agit également d'un espace de parole, d'échanges privilégiésqui peuvent entrainer des effets positifs pour la suitesans ignorer la complexité de l'issue. Ainsi, une recherche à un an, voire plus, de la sortie du CSP pourrait donner d'autres enseignements et ouvrir une autre lecture de l'usage du CSP dans la trajectoire des personnes qui ont été contraintes à un licenciement.

Conclusion

Tout d'abord, il convient de revenir à l'origine de mon questionnement. En stage chez ID Formation, j'ai eu l'opportunité de suivre des personnes adhérentes au contrat de sécurisation professionnelle. Ces personnes licenciées économiquement étaient susceptibles de se reconvertir. Ce sujet m'intéressait particulièrement car il faisait écho à ma propre expérience. Suite à une période d'observation et de réflexion, je décidais de focaliser ma recherche, dans le cadre mon mémoire, sur ces personnes inscrites en CSP.

Je m'intéressais aux tensions identitaires les traversant lors de cette période de transition. Je souhaitais comprendre comment ce dispositif les accompagnait vers une reconversion.

A travers la lecture de l'ouvrage de Sophie Denave60(*) intitulé, `Reconstruire sa vie professionnelle », j'ai pu approfondir les divers aspects théoriques de la reconversion ou de la bifurcation. J'ai découvert ce que signifiait la notion de « biographisation » grâce à Christine Delory-Monberger61(*). En effet, ce terme m'interpellait particulièrement. J'ai pu donc saisir la place de l'énonciation du parcours de vie, que ce soit oral ou écrit, dans la progression des personnes. Ces mises en mots les amènent à la réflexivité nécessaire pour la construction de leur futur.

Suite à l'étude des concepts, je suis allée confronter mes hypothèses au terrain, en interrogeant un échantillon de cinq personnes adhérentes au CSP depuis environ 6 mois.

Je voulais comprendre en quoi le CSP les aidait à se reconvertir.

Chaque personne interviewée a ressenti un soutien moral qui leur a permis de « s'accrocher » malgré le choc du licenciement économique. L'accompagnement s'avère primordial dans ces moments de doute, de reconstruction identitaire et professionnelle. Je rejoins Kaddouri62(*) lorsqu'il parle de « dynamique identitaire » : identité en mouvement perpétuel. La tension ressentie entre l'identité passée et future met en route des « stratégies identitaires », «  stratégies identitaires » qui permettront de réguler cette tension.

Le parcours de ces personnes a une résonnance particulière avec mon expérience personnelle. Au cours de la période de transition, j'ai ressenti comme eux ces tensions, ce questionnement incessant sur ma capacité à avancer, à réussir ma reconversion. L'accompagnement bienveillant et compréhensif, en stage et à l'université, de mes tutrices, la mise en mots pour la réalisation de mon mémoire m'ont permis d'avancer pas à pas. J'ai aussi énormément apprécié les temps de lecture. J'ai enfin posé des mots, des notions sur ce que j'étais entrain de vivre. Cette année de professionnalisation m'a permis d'apprendre un nouveau métier lors de mon stage mais aussi, lors de mes cours à l'université, de nouvelles attitudes à adopter. La distanciation aux idées reçues, aux jugements me parait maintenant une évidence.

Ce que je retiens de mon expérience au coeur du CSP, c'est la dimension humaine que les conseillers conservent précieusement. Pendant cette année, le mot « accompagnement » a pris tout son sens.

Bibliographie

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Denave, S. (2016). Université Lumière Lyon 2, équipe MEPS du Centre Max Weber dans le cadre d'une journée organisée par le pôle DIRF du laboratoire Trigone Cirel.Durée : 1 :19 :31

Guéranger, D. (2006). A propos de trois problèmes pratiques de l'écriture sociologique. : La retranscription d'un entretien par Pierre Bourdieu. In : Enjeux (et) pratiques de l'écriture en sciences sociales,Journée d'étude de l'école doctorale de Paris I, Paris.

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Jaillet, « De le généralisation de l'injonction au projet », art. cité.

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Livret d'accueil d'Id Formation

Negura,L.(2006). L'analyse du contenu d'une représentation sociale. In : L'analyse de contenu dans une étude des représentations sociales, Revue Sociologie. Paris : Presses Universitaire de France.

Mazade,O, Hinault, AC.(2014).Les identités professionnelles à l'épreuve des transitions. Sociologies pratiques 2014/1 (n°28). Paris : Presses de Science Po. 158 p.

Paul, M. (2004).L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique. Paris : L'Harmattan. 352 p.

Paul, M. (2002). L'accompagnement: une nébuleuse. Éducation permanente,153(4), 43-56.

Sitographie

Site diagnostic du territoire 2015 de l'agglomération du Boulonnais

Sites : www.gouv.fr

Table des annexes

Annexe 1 : Organigramme ID Formation Boulogne sur mer ................................. 57

Annexe 2 : Chartre d'engagement à l'accompagnement CSP................................. 58

Annexe 3 : Guide d'entretien ..................................................................... 59

Annexe 4 : Grille d'entretien ..................................................................... 64

Annexe 5 : Entretien avec Mathieu .............................................................. 65

Annexe 6 : Entretien avec Francine............................................................... 69

Annexe 7 : Entretien avec Claude ................................................................ 75

Annexe 8 : Entretien avec Béatrice ............................................................... 81

Annexe 9 : Entretien avec Ludovic ............................................................... 85

Table des matières

Remerciements

Vers une reconversion professionnelle ......................................................... 1

Une négociation identitaire souhaitée ........................................................... 2

La cellule d'appui à la Sécurisation Professionnelle : un outil pour les reconversions professionnelles « contraintes » .................................................................. 3

Première partie

1. Un contexte socio-économique particulier........................ 4

2. Id Formation............................................................... 5

2.1 Historique ...................................................................... 6

2.2 Type de structure et son fonctionnement ................................ 6

2.3 Philosophie, atouts et contraintes ......................................... 8

2.4 Organisation interne locale ................................................. 9

2.5 Les activités et partenaires.................................................. 9

2.5.1 Les activités ................................................................................. 9

2.5.2 Les partenaires ............................................................................. 10

3. Ma mission dans le cadre du Contrat de sécurisation professionnelle.................................................................................10

3.1 Négociation de ma mission ................................................... 10

3.2 Le contrat de sécurisation professionnelle ................................ 12

4.Observations, constats et questionnements ................................. 14

4.1 En observation ..................................................................14

4.2Constats ........................................................................... 16

4.3 L'élaboration d'un questionnement ........................................ 16

Deuxième partie

1. Au coeur du métier de Conseiller en Insertion

Professionnelle...................................................................... 18

1.1Vers un accompagnement ................................................... 18

1.2 Vers une démarche compréhensive ....................................... 18

1.3 L'écoute au service de l'accompagnement ............................... 19

1.4 L'orientation comme perspective..........................................20

2.Au plus près des accompagnés........................................... 21

2.1 Des situations singulières face au risque de reconversion ............... 22

2.2 Le CSP : une usine à projets ? ............................................... 23

2.3 Reconversion ou bifurcation ................................................ 24

2.4 Dynamiques identitaires et transitionprofessionnelles ............... 25

2.4.1 Dynamiques identitaires variées ......................................................... 26

2.4.2 Transition professionnelles ................................................................. 28

2.5 La biographisation au service de l'accompagnement.................. 29

Troisième partie

1. Dispositif méthodologique.............................................. 32

1.1 Définition et explicitation du choix de l'outil : L'entretien semi-directif......................................................................... ....... 32

1.2 Construction de l'échantillon ............................................... 33

1.3 L'expérience de l'entretien exploratoire ................................. 34

1.4 La conduite de l'entretien semi-directif .................................. 35

1.4.1 Le lieu ..........................................................................................36

1.4.2 Le travail de retranscription ..............................................................36

2. Analyse des données et interprétation............................. 37

2.1 Raisons du choix du CSP ................................................... 37

2.1.1 Accompagnement ........................................................................... 37

2.1.2 Avantages financiers ....................................................................... 39

2.2 Une transition difficile ...................................................... 39

2.3 L'existence de tensions identitaires ....................................... 41

2.4 Le CSP, une aide à la reconstruction ? ................................... 43

2.5 Différentes attitudes faces à leur avenir professionnel ................ 45

3. Discussion et perspectives.............................................. 50

Conclusion ............................................................................................52

Bibliographie......................................................................................... 54

Tables des annexes ................................................................................. 56

Annexes ............................................................................................... 57

Tables des matières ................................................................................ 91

Dynamiques identitaires et enjeux de bifurcation suite à un licenciement économique : Le cas de personnes accompagnées dans le cadre d'un Contrat de Sécurisation Professionnelle. 

......................

Le licenciement économique est un évènement se multipliant malheureusement de plus en plus fréquemment en France ces dernières années. Le Boulonnais a été particulièrement impacté cette année.

ID Formation, organisme de formations, a été chargée par le Pôle emploi de suivre certaines personnes licenciées économiquement. Lors du licenciement, ces personnes acceptent ou non d'adhérer à un dispositif mis en place spécifiquement pour ce cas de figure. Il s'agit du contrat de sécurisation professionnelle.

Dans le cadre de mon stage de Licence Professionnelle de Gestion et Accompagnement des Parcours Professionnels et Personnels (GA3P), j'ai suivi des personnes inscrites dans ce dispositif.

J'ai choisi de focaliser mon étude de recherche pour l'élaboration de mon mémoiredans le cadre du CSP.

Ma question de recherche est la suivante :

En quoi le contrat de sécurisation professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes à quitter leur métier ?

C'est en confrontant mes hypothèses à la théorie de certains auteurs et à mes investigations de terrain lors d'entretiens que j'y répondrai.

Mots Clés

Dynamiques identitaires, contrat de sécurisation professionnelle, bifurcation, transition et biographisation.

* 1Source :http://www.agglo-boulonnais.fr/uploads/tx_abdownloads/files/Diagnostic-Territorial-2015.pdf

* 2 Annexe 1 : organigramme Id formation Boulogne sur mer

* 3 Données du site www.gouv.fr

* 4 Annexe 2: Chartre d'engagement à l'accompagnement CSP

* 5Deslauriers, Mayer. (2000). L'observation directe .In : « Méthodes de recherche en intervention sociale » (pp.136). Montréal-Paris : Gaétan Morin Editeur. 2000. Chap. 6.

* 6 Paul, M. L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique .Paris : L'Harmattan.2004. Chap1.

* 7Ibid : 51

* 8 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles. Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28), p.18

* 9Lhotellier, A. (2001).  Accompagner et tenir conseil : démarche fondamentale ou anesthésie sociale. In :Tenir Conseil : délibérer pour agir (pp. 114), Chap 1. Paris : SéliArslan,

* 10Ibid, p 114

* 11Aubret,J. (2011). L'orientation professionnelle des adultes.  In : Carre,Caspar, Traité des sciences et techniques de la formation  (pp. 527), Chap 25. Paris : Psycho Sup, Dunod. . 3ème édition.

* 12Denave,S.(2016).Maître de Conférences, Université Lumière Lyon 2, équipe MEPS du Centre Max Weber dans le cadre d'une journée organisée par le pôle DIRF du laboratoire Trigone Cirel. Durée : 1 :19 :31

* 13 Cours de Thomas Dumet (Licence GA3P 2017)

* 14Denave, S.(2015). Le processus des ruptures professionnelles. Première partie. In : Reconstruire sa vie professionnelle. (pp.29). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France.

* 15Boltanski,L, Chiapello,E. (1999). Le Nouvel Esprit du capitalisme. Paris : Gallimard, note de bas de page N°2, p.681.

* 16 Voir Jaillet, « De le généralisation de l'injonction au projet », art. cité.

* 17Boutinet, JP. (1993). Anthropologie de projet. Paris : Puf.

* 18 « Les notions de projets, de motivation, de communication sont aujourd'hui des normes, en bas de la hiérarchie sociale, nous avons appris à nous adapter plus ou moins bien. » (A. Ehrenberg, La Fatigue d'être soi, paris, Odile Jacob,1998, p14)

* 19 Annexe 2 : chartre d'engagement

* 20Coquelles,C. (1994). Le modèle du projet. In : Attention projet (pp.25). Edition : Formation Emploi n°45.

* 21Denave, S. (2015). Introduction générale. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp.8).Edition Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France.

* 22Ibid : 3/4

* 23Ibid : 4

* 24Ibid : 5

* 25 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles. Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28), p.16

* 26Ibid : 16

* 27Kaddouri M. (2006).Dynamiques identitaires et rapport à la formation. In : Barbier,Bourgeois, de villers, Kaddouri. Constructions identitaires et mobilisation des sujets en formation.(pp.131). Editions : Lharmattan.

* 28Ibid : 131

* 29 Mazade,O,Hinault, AC.(2014). Avant-propos, Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), p5.

* 30Terme emprunté à O.Mazade

* 31Crunel, B, Frau, C. (2014). Devenir chômeur. (pp.78). In : Des parcours pluriel entre transition et état. Sociologies pratiques 2014/1 (n°28).

* 32Denave, S. (2015). Conclusion générale. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp.285). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France.

* 33Delory-Monberger, C. (2014). Filiations.In : De la recherche biographique en éducation (pp.16). Paris : Téraèdre. 1ère partie.

* 34Aubret, J. (2011). L'orientation professionnelle des adultes. In : Traité des sciences et techniques de la formation (pp. 536).Chap 25.

* 35Aubret, J. (2011). L'orientation professionnelle des adultes. In : Traité des sciences et techniques de la formation. (pp.535).

* 36 Graille, C. (2014). Enjeux identitaires dans une entreprise en transition. In : Les identités professionnelles à l'épreuves des transitions. (pp87 à 97). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), Presses de Science Po.

* 37 Dubois, F, Terral, P.(2014). La création d'entreprise dans le secteur du tourisme sportif. In : Les identités professionnelles à l'épreuve des transitions (pp53 à 62). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), Presses de Science Po.

* 38.Mazade, O, Hinault, AC. (2014). «Avant-propos» (pp. 5). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28).

* 39Combessie JC. Première partie Découverte et collecte des données. In :Méthode sociologique. Editions La Découverte. Paris. 2007. P 24.

* 40 Annexe 3 : Guide d'entretien

* 41Ibid : P 24.

* 42 Annexe 4 : Grille d'entretien

* 43Combessie JC. Première partie Découverte et collecte des données. In :Méthode sociologique. Editions La Découverte. Paris. 2007. P 24.

* 44 Cours de recueil et analyse de données. Dominique DELACHE-CUEEP/USTL

* 45Guéranger, D. (2006). A propos de trois problèmes pratiques de l'écriture sociologique. : La retranscription d'un entretien par Pierre Bourdieu.In : Enjeux (et) pratiques de l'écriture en sciences sociales,Paris, France.

* 46Ibid : p7

* 47 Annexe 5 à 9 : Entretiens

* 48Negura,L. (2206). L'analyse du contenu d'une représentation sociale. In : L'analyse de contenu dans une étude des représentations sociales, Revue Sociologie. Paris : PUF.

* 49Paul,M. (2004). L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique .(Chap 1). Paris : L'Harmattan.

* 50Paul, M. (2002). L'accompagnement: une nébuleuse. Éducation permanente,153(4), 43-56.

* 51Denave, S. (2015). Conclusion générale. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp. 286/287). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France.

* 52Mazade,O, Hinault,AC.(2014). «Avant-propos» (pp.7). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28).

* 53 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles(pp.17). Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28).

* 54Kaddouri,M. (2006). Dynamiques identitaires et rapport à la formation. In : Barbier, Bourgeois, de Villers, Kaddouri. Constructions identitaires et mobilisation des sujets en formation. (pp.131). Editions : Lharmattan. Paris.

* 55 Certificat d'aptitude à la conduite : pour différents type de chariots

* 56Denave, S. (2015).Des trajectoires et des transformations plurielles. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp. 262)Edition Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France.

* 57Ibid : 33

* 58 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles. (pp.18).Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28).

* 59 Certificat d'aptitude à la conduite : pour différents type de chariots

* 60Denave S. Des trajectoires et des transformations plurielles. In : Reconstruire sa vie professionnelle. Edition Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France, Paris 2015.

* 61Delory-Monberger, C. (2014). Filiations.In : De la recherche biographique en éducation (pp.16). Paris : Téraèdre. 1ère partie.

* 62Kaddouri,M. (2006). Dynamiques identitaires et rapport à la formation. In : Barbier, Bourgeois, de Villers, Kaddouri. Constructions identitaires et mobilisation des sujets en formation.(pp.131). Editions : Lharmattan. Paris.






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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius