Conclusion générale
Ecrire sur l'Afrique indépendante démocratique
à partir de celle du Benin, impose une compréhension de ce
concept et une bonne connaissance de ce pays. Depuis la conférence des
forces vives de la nation le 28 février 1990, jusqu'à
l'arrivée de BONI Yayi au pouvoir en 2006, le pays s'est montré
bon élève des principes qui fondent un Etat de Droit. D'où
le besoin de comprendre cette métamorphose. Le renouveau
démocratique au Benin tire ses origines dans la vie politique,
économique et sociale mondiale et africaine au lendemain de la chute du
mur de Berlin. Plusieurs pays à l'instar des Etats d'Europe centrale et
orientale ont mis fin au régime communiste. C'est le cas de la Hongrie,
la Pologne et de la Roumanie. Ces changements ont été sanglant
pour la plus part comme il est remarqué avec l'assassinat de Thomas
Sankara. Alors que dans le reste des pays africains, les dictatures
démantelées offraient le multipartisme comme le Gabon. Cette fin
du parti unique suscite de profond changement.
Au Benin, toutes ces situations environnantes s'ajoutent
à un contexte explosif qui est la banqueroute étatique. Celle-ci
conduit à plusieurs réformes sans grand changement chez les
populations. L'appui international ne suffit pas à calmer les
mobilisations sociales grandissantes notamment chez les étudiants et
dans l'Eglise.
C'est dans ce contexte que du 19 au 28 février 1990,
les forces vives de la nation sont convoquées, pour trouver une solution
à la situation délétère du pays. L'initiative de
Kérékou rassemble 500 délégués sous le
regard africain et l'approbation internationale. Elle est organisée en
commission de réflexion. Les béninois décident de la fin
de la révolution à l'issu de cette conférence nationale.
Cela se traduit par la dissolution du PRPB et la souveraineté de l'Etat
à travers celle de la conférence.
La mise en place de la transition politique est fait en vue de
réorganiser le pays. Le chef de l'Etat est maintenu au pouvoir. Sous son
autorité, un gouvernement est installé, ayant à sa
tête un premier ministre du nom de Nicéphore Soglo.133
Pour réguler les opérations nationales qui s'imposeront, il est
institué un Haut Conseil de la République, dont le mandat est de
contrôler le suivi des décisions de la Conférence Nationale
; exercer la fonction législative notamment en matière
budgétaire et contrôler l'exécutif. L'éducation est
renforcée à travers la gratuité de l'école et
l'encouragement à la recherche scientifique. Les décisions vont
à l'endroit d'un renforcement de l'Etat de Droit. C'est dans cette
optique que l'armée révolutionnaire se transforme en «
armée républicaine ».
133 Rapport général de la conférence idem
92
En outre, le peuple adopte le multipartisme. Le pluralisme
politique existait avant l'arrivée des militaires. Seul le PRPB est
autorisé avant la conférence nationale. Les béninois
pendant longtemps réduits au silence et adhèrent à la
divergence d'opinion. Plusieurs partis font surface à la faveur de la
loi du 11 décembre 1990. Pour freiner la prolifération des
organisations politiques, l'Etat règlemente leur création en
février 2003. Pour ce faire, il s'appuie sur l'action informelle des
élites traditionnelles et religieuses pour encadrer les
différences. Enfin, plusieurs institutions sont mises en place pour
construire un Etat démocratique. Il s'agit des institutions de
contre-pouvoir à savoir l'assemblée nationale en remplacement du
HCR, de la cour constitutionnelle et de l'installation du pouvoir judiciaire.
Tous ces organes en vue de réaliser une vraie séparation de
pouvoir entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire
conformément aux règles de la démocratie.
« La Conférence Nationale des Forces Vives du
Bénin de Février 1990 est comme la prise de la Bastille par le
peuple de France le 14 Juillet 1789. Et elle est bien plus que cette
Révolution Française. Car dans le cas béninois,
géniteurs, gardiens et bénéficiaires de la Bastille ont
uni leurs efforts à ceux des victimes de cette bastille et tous, dans un
sursaut patriotique et national soutenu par les prières d'un
prélat, ont détruit la bastille et posé les fondements
d'une nouvelle société de démocratie, de libertés
et d'État de Droit : pas de goulag, pas d'échafaud, pas d'exil.
»134
Cet élan béninois conduit à la
régularité des élections et de l'alternance politique. De
1991 à 2006, les présidents béninois se sont
succédés au palais avec une poignée de main chaude comme
symbole de passation de service. Les populations et hommes politiques ont
toujours placé leur confiance en la CENA. Cet organe
spécialisé dans l'organisation des élections garde le nom
des membres inconnu jusqu'à la veille des élections. Ce qui
réduit le risque de corruption. Et les contentieux sont sagement
résolus avec un caractère responsable.
Les conditions d'une alternance pacifique sont réunies.
En effet la presse est démocratiquement régulée et les
bases ont été mise à la conférence avec la
naissance de la HAAC. L'objectif est de permettre une libre expression dans le
principe démocratique. Un tribunal d'honneur des journalistes est
installé pour rendre professionnel les journalistes. En 1996 l'ODEM se
différencie de la régulation étatique tout en la
complétant pour l'effectivité de la démocratie.
134 Robert Dossou, Idem
93
L'étude comporte beaucoup des limites comme toute
oeuvre humaine. La question du processus démocratique du Benin est
au-delà des bornes chronologiques fixées par ce travail.
Jusqu'à nos jours le pays considère être dans la marche de
la démocratie. Ce qui explique les violences enregistrées aux
élections d'après. Puis le modèle béninois connait
quelques ombres. Il s'agit par exemple des problèmes de corruption que
vit le pays. Elle a été, de tout temps, une préoccupation
tant des gouvernants que des gouvernés. Le mal qu'est la corruption,
loin de s'étioler, de s'estomper, s'est développé avec une
ampleur effroyable. La corruption a pris des proportions endémiques
effarantes. Aussi les fréquentes manifestations de rues aboutissant
à des actes de vandalismes présentent le limites de la
démocratie au Benin. Ces aspects loin d'être
négligés sont inéluctablement minime face à
croissance démocratique de l'ex Dahomey. Enfin, l'implication des chefs
traditionnels et des rois béninois dans la stabilité et la
paisible alternance est su de tous les résidents du pays. Celle-ci
était informel d'où la difficulté à percevoir leur
noble rôle de neutre au sein de la classe dirigeante, des acteurs
politiques et des populations. Cette neutralité des têtes
couronnées donne l'allure d'une instrumentalisation. En 1991, les rois
ont, en majorité, apporté leur soutien au président
Nicéphore Soglo. Entre 1996 et 2006, ils ont retourné leur pagne
au profit du général Kérékou, qui les avait
pourtant combattus pendant la période révolutionnaire. Depuis
2006, ils font la politique du chef de l'État actuel, Boni Yayi.
L'étude de la démocratie en Afrique en
générale et dans la sous-région ouest africaine en
particulier nécessite un accompagnement de l'Etat au niveau de
l'accès à l'information. Il s'agit pour nos autorités de
conserver en ligne toutes les documentations. Cette démarche demande que
les services africains soient équipés d'outils informatique.
Aussi s'offrir un réseau de communication pouvant rapprocher les
capitales les unes des autres. Dans la dynamique de mondialisation les
populations sont connectés mais reste toujours distancées par les
voies de communication.
En Afrique de l'ouest peu de pays pratique la
démocratie. Le Sénégal, le Ghana et le Benin135
font office de pays démocratique dans cette partie du monde. La
particularité de celle des béninois est le résultat de
plusieurs expériences. Les hommes ont écarté leur ego pour
se donner des lois et institutions qu'ils respectent sans pressions externes.
Ceci justifie la pensée du président américain Barack
Obama sur l'Afrique. Pour lui « l'Afrique n'a pas besoin d'hommes forts
mais d'institutions fortes ». Et les structures dont se dotent un pays ne
valent que par le respect qui leurs sont accordées. Ce respect commence
avec les hommes qui les
135 La région compte seize pays.
mettent en place. Et lorsque ceux-ci se soumettent aux
décisions prononcées par elles, ils donnent une leçon aux
jeunes générations. Ils deviennent des ainés qui rentrent
dans l'histoire en tant que « hommes forts ». C'est le lieu de
mentionner que, pour des peuples qui ont passés des siècles voir
toutes leurs vies à obéir à l'ainé et copier son
exemple, la démocratie doit être adapter à leurs
réalités. Il faut pour des institutions fortes et des hommes
forts qui lui obéissent. N'est-ce pas tout le sens de la
célèbre phrase nul n'est au-dessus de la loi. Au
Sénégal Léopold Senghor136 père de
l'indépendance à su transmettre les valeurs de l'alternance et du
respect des institutions aux générations futurs. Tout comme
Kérékou, il a été un recours pour les aspirants au
pouvoir. Alors la démocratie en Afrique n'existe que par des
élections. Ce que fait le Benin n'est donc pas extraordinaire. Il
convient aux dirigeants de savoir partir pour mieux revenir comme
Kérékou l'a réussi. La paix du pays en dépend.
En perspectives, nous pouvons évoqués les
difficultés de la CENA à organiser une élection de
qualité. Si le long du processus, les acteurs adhèrent de
façon consensuelle, les observateurs notent des
irrégularités aux élections 1991, 1996, 2001 et 2006.
Aussi le repli identitaire connait beaucoup d'enthousiasme au Benin. Et
l'écart se creuse par l'inégale aménagement du territoire
entre les régions Nord et Sud. Ajoutons que les demandes
adressées n'ont pas toutes connues avis favorable. Cette situation a
pour conséquence le silence de certains partis politiques. Ce fut le cas
avec Renaissance du Benin. La peur de discuter politique avec autrui pour
certains béninois aussi bien à Abidjan qu'au Benin a rendu
difficile voire impossible la rencontre avec plus de témoin. Il aurait
été possible d'évoquer le caractère ordinaire ou
extraordinaire de la marche vers la démocratie du Benin.
94
136Élu le 5 septembre 1960, Léopold
Sédar Senghor préside la toute nouvelle République du
Sénégal. Il est l'auteur de l'hymne national
sénégalais, le Lion rouge. Il démissionne de la
présidence, avant le terme de son cinquième mandat, en
décembre 1980. Abdou Diouf, Premier ministre, le remplace à la
tête du pouvoir, en vertu de l'article 35 de la Constitution. Sous la
présidence de Léopold Sédar Senghor, le
Sénégal a instauré le multipartisme ainsi qu'un
système éducatif performant.
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