SECTION 3. LE STATUT DE L'ANCIEN CHEF D'ETAT EN RDC
§1. DEFINITION
Comme nous l'avons dit ci-dessus, un ancien Chef d'Etat est
une personne qui, démocratiquement, accède aux fonctions du
Président de la République et les exerce conformément
à la constitution.
Il sied de signaler que la constitution congolaise ne
définit pas un ancien Chef d'Etat par contre la loi portant statut des
anciens Chefs d'Etat stipule dans son article 2 qu'un Ancien
140 Arrêt, R. Const. 262, sous chiffre 2,
Paragraphe 3.
141 Idem
52
Président de la République élu, est, tout
citoyen congolais qui a accédé par élection aux fonctions
de Président de la République, les a exercées et les a
acquittées conformément à la Constitution.
Bien que cette constitution ne définit pas un ancien
Chef d'Etat mais elle explique quand même à l'article 104
alinéa 7 que « les anciens présidents de la
République élus sont de droit sénateurs à vie
». Par conséquent un sénateur à vie est un
statut honorifique.
§2. HISTORIQUE ET EVOLUTION (De 1885 à
2019)
Avant la conférence de Berlin, de nombreux
traités de cession des territoires africains, environs 500, avaient
été signés au nom de l'AIC (Association Internationale du
Congo). Cependant Léopold II mit en jeu toutes les ressources de sa
diplomatie pour faire reconnaître la valeur internationale du drapeau
bleu étoilé d'or. Le colonel Strauch et Sanford, ministre des
Etats-Unis à Bruxelles jouèrent un rôle de premier plan
dans cette reconnaissance.142
1. Etat Indépendant du Congo, de 1885
à 1908
C'est à partir de l'acte général de la
conférence du 26 février 1885 qu'ont été
jeté les bases de la naissance du Congo comme Etat. Il faut certes
reconnaitre que bien avant cette date, cet Etat était déjà
connu sous l'appellation de l'Association Internationale du Congo, AIC en
sigle. Mais c'est à partir de l'acte de Berlin que le roi des belges,
Léopold II, se proclama souverain et Chef de l'Etat Indépendant
du Congo, sa propriété exclusive143 (1885-1908).
En vue de se conformer aux dispositions de l'article 62 de la
constitution belge du 7 février 1831, les chambres législatives
belges prirent des résolutions les 28 et 30 avril 1885 pour autoriser
Léopold II à être officiellement Chef de l'Etat. Comme
Etat, l'EIC semble connu une organisation politique à la tête de
laquelle trônait, dans le cadre de l'union personnelle entre le royaume
de Belgique et celle-ci, le roi Léopold II comme chef de l'Etat.
Cependant, la nouvelle entité étatique n'était pas
dotée d'un texte constitutionnel propre pour le distinguer de
l'organisation étatique belge, mais le roi gouvernait par
décret.144
2. Congo-belge, de 1908 à
1960
Congo belge (en néerlandais : Belgisch-Kongo) est
l'ancien nom porté par le territoire de
l'actuelle république démocratique du Congo (RDC) entre
le 15 novembre 1908, fin de l'État indépendant du Congo,
possession personnelle pendant 23 ans du roi des Belges Léopold II.
En 1908, la Chambre des députés accepta le
testament de Léopold II qui faisait don à la Belgique de
l'État indépendant du Congo et vota son annexion un an avant la
mort du roi. Dès lors, c'est officiellement au nom de la Belgique,
État souverain, que les troupes de la Force publique stationnées
au Congo belge purent garantir l'intégrité de la conquête.
Lors de la reprise par la Belgique, l'article 2 de la Charte Coloniale du 18
octobre 1908, votée par le Parlement belge, prescrivait que : « Nul
ne peut être contraint de travailler pour le compte et au profit de
sociétés ou de particuliers ». Pour effacer l'image du
caoutchouc et du scandale des mains coupées, on développa la
culture du coton et du palmier à huile, notamment.
142 KALUBI M'KOLA Louis, Politique étrangère de
la RDC, éd., Betras, Kinshasa, 2016, p. 25.
143 KAMUKUNY MUKINAY A., Droit constitutionnel..., Op.
Cit., p. 51.
144 Idem
53
Ces rois sont considérés comme les anciens chefs
d'Etat congolais, parce qu'ils ont dirigés le pays, l'actuelle RDC,
dès la naissance dudit Etat en 1885 jusqu'à l'accession à
l'indépendance en 1960,
3. République du Congo, de 1960 à
1965
Le 30 juin 1960 l'indépendance du Congo belge est
proclamée en tant que « République du Congo », Joseph
KASA-VUBU devient Chef d'Etat et premier Président de la
République, en même temps, l'ancienne colonie française
voisine du Moyen-Congo adoptait également le titre de «
république du Congo » à son indépendance, le 15
août 1960. Les deux pays se différenciaient en accolant le nom de
leur capitale au nom du pays (Congo-Léopoldville, Congo-Brazzaville).
De 1960 à 1965 le pays est aussi connu sous le nom de
Congo-Léopoldville. Le 1er août 1964, son nom officiel
devient République Démocratique du Congo.
Du 5 au 14 septembre 1960, une lutte éclate entre J.
KASA-VUBU et P. E. LUMUMBA. Les soldats balubas et bangalas n'étant pas
représentés dans le gouvernement, ils commettent alors un coup
d'État, et renversent le Premier ministre.
Au sein de l'armée, devenue complètement
africaine, le général Mobutu prend les rênes et installe un
gouvernement de commissaires. Mobutu est bientôt soutenu par les
États-Unis, qui voient d'un mauvais oeil le socialisme de Lumumba. Les
médias occidentaux montrent en effet Lumumba du doigt et saluent la
sécession katangaise comme seul rempart de la liberté
individuelle contre l'étatisme.
Le 17 janvier 1961, Lumumba est assassiné, il avait
été déporté au Katanga par Mobutu. En 1962, le
gouvernement central s'attèle à reconquérir les provinces
sécessionnistes. Une fois Lumumba éliminé, la reprise du
Katanga (renommé en 1971 Province du Shaba) et du Sud-Kasaï
marqueront le début de l'ascension du général Mobutu SESE
SEKO. Les troupes de l'ONU, au départ immobiles, passeront soudainement
à l'offensive avec les troupes de Mobutu pour reconquérir les
deux provinces rebelles. En janvier 1963 prend fin la sécession
katangaise.
4. République Démocratique du Congo
sous Mobutu, de 1965 à 1997 ? Premières années
(1965-1971)
Le pays baptisé « République
Démocratique du Congo », un nouveau drapeau et une nouvelle devise
sont adoptés le 1er août 1964 lors de la proclamation de la
nouvelle constitution, dite constitution de Luluabourg, adoptée par
référendum. Mais entre 24 et 25 novembre 1965 le
général Mobutu renverse le Président KASA-VUBU et s'empare
définitivement du pouvoir.
Après les décrets de 1966, 1967 et 1969, les
mines et les plantations sont nationalisées. La capitale
Léopoldville est renommée Kinshasa en juin 1966 et le pays est
alors appelé Congo-Kinshasa jusqu'en 1971, puis Zaïre de 1971
à 1997, date à laquelle il redevient république
démocratique du Congo
? République du Zaïre sous Mobutu
(1971-1977)
Dans les années qui suivent la prise du pouvoir par le
général Mobutu Sese Seko, ce dernier entame à partir de
1972 une campagne d'« authenticité » afin de maintenir sa
popularité. Le pays est renommé République du Zaïre
le 27 octobre 1971 d'après un mot local pour rivière, et
54
portera ce nom jusqu'en 1997. De même, le fleuve Congo
est rebaptisé Zaïre et une nouvelle monnaie, le zaïre,
divisé en 100 Makuta (singulier Likuta), remplace le franc.
Les noms des personnes sont africanisés. Le
général Mobutu prend le nom de Mobutu Sese Seko et oblige tous
ses concitoyens à supprimer les prénoms à connotation
occidentale et à rajouter un « post nom ». L'abacost est
promulgué, interdisant le port de costumes occidentaux, et de nombreuses
villes sont rebaptisées.
? Affaiblissement du régime zaïrois
(1977-1996)
De 1977 à 1979 le régime Mobutu a connu deux
guerres dites guerre de Shaba. En 1979, une répression de l'armée
zaïroise provoque la mort de plus de 300 creuseurs de diamant
indépendants au Kasaï, au mois de juillet il y a eu la protestation
des parlementaires, dont le kasaïen Etienne TSHISEKEDI, en se regroupant
à 13 parlementaires, ils créent en 1982 un parti politique
appelé l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social
(UDPS) en sigle, et ils seront condamnés à 15 ans de prison.
En 1990, Mobutu Sese Seko annonce la fin du parti unique (24
avril). Le multipartisme ne sera autorisé que le 18 décembre. Un
massacre d'étudiants à l'Université de Lubumbashi par des
membres de la garde présidentielle fait un nombre
indéterminé des victimes. La coopération belge est
suspendue. Création du front de l'opposition, qui réclame une
conférence nationale (août). En 1991, début de la
conférence nationale (août) sous la direction du premier ministre
MULUNDA LUKOJI. Le 23 septembre les militaires impayés se livrent
à de graves pillages à Kinshasa ainsi que dans plusieurs autres
villes du pays. Mobutu affaibli acceptera de négocier avec l'opposition
politique pour aboutir aux accords du Palais de Marbre qui conduiront à
la nomination de l'opposant Etienne TSHISEKEDI de l'UDPS comme Premier
ministre. Il le reste du 1er au 21 octobre, date à laquelle
il fut limogé par le Président Mobutu SESE SEKO pour être
remplacé par MUNGULU DIAKA et ensuite NGUZ Karl-i-Bond.
? Première guerre du Congo (1996-1997) et
effondrement du régime
En 1996, les tensions provenant de la guerre civile et du
génocide des Tutsi au Rwanda se propagent au Zaïre. La milice Hutu
rwandaise Interahamwe, ayant fui le Rwanda à la suite de l'installation
d'un gouvernement Tutsi, s'est mise à utiliser les camps de
réfugiés Hutus dans l'Est du Zaïre comme bases pour des
raids contre le Rwanda. Une manifestation anti-Banyamulenge (Tutsis congolais
du Sud-Kivu) marque le début de la rébellion contre Mobutu, avec
l'appui des pays voisins.
Le Rwanda disperse, par la force, les camps des
réfugiés Hutus à la frontière et appelle à
rentrer au pays. La majorité s'exécute, mais une partie, surtout
les hommes en armes prennent la direction de l'ouest et la plupart d'entre eux
disparaîtront dans la forêt, et une partie, tuée par
l'armée rwandaise qui la poursuivait. Mobutu SESE SEKO se fait soigner
en Suisse, pendant que l'armée zaïroise brille par son absence dans
la guerre contre la coalition anti-Mobutu pour la conquête du
Zaïre.
Ces milices Hutu se sont vite associées avec les forces
armées du Zaïre (FAZ) pour lancer une campagne contre les Tutsis
congolais vivant dans l'Est du Zaïre. Par la suite, une coalition des
armées rwandaise et ougandaise, sous le couvert d'une petite milice
Tutsi, a envahi le Zaïre afin de combattre la milice Hutu, de renverser le
gouvernement de Mobutu et finalement, de prendre le contrôle des
ressources minières du Zaïre. Ils ont été très
vite rejoints par différents hommes politiques du Zaïre, qui
s'étaient opposés pendant nombre d'années sans
succès à la
Ces deux mouvements, soutenus par les troupes rwandaises et
ougandaises, déclenchent la deuxième guerre du Congo en
attaquant, le 2 août 1998, l'armée encore fragile de la RDC. Le
55
dictature de Mobutu et qui voyaient une opportunité
pour eux dans l'invasion de leur pays par deux des plus fortes armées de
la région.
Cette coalition de quatre rébellions agrandie de deux
armées étrangères et des figures d'opposition de longue
date, menée par Laurent-Désiré Kabila, prend le 25 octobre
le nom d'Alliance des forces démocratiques pour la libération du
Congo (AFDL). Leur objectif, de manière plus large, était de
chasser Mobutu et de prendre le contrôle des richesses du pays.
Le 2 janvier 1997, Kinshasa annonce une réplique «
foudroyante » contre les rebelles. Chute de Kisangani, troisième
ville du pays le 15 mars. Le lendemain, Bruxelles estime que «
l'époque Mobutu est révolue. » Le 4 avril 1997, chute de
MBUJI-MAYI, capitale du diamant, et dans les jours qui suivent, chutes de
Kananga, Kolwezi, Kikwit, Lisala.
Le 4 mai 1997, se tient un face-à-face entre Mobutu
SESE SEKO et Laurent-Désiré Kabila sur un bateau sud-africain,
l'Outeniqa, au large de Pointe-Noire en République du Congo.
5. Seconde République Démocratique du
Congo, de 1997 à nos jours ? Présidence de
Laurent-Désiré Kabila (1997-2001)
Le 17 mai 1997, les troupes de Laurent-Désiré
Kabila entrent dans la ville de Kinshasa sans rencontrer de résistance.
Kabila, depuis Lubumbashi, se déclare Président du pays, qu'il
rebaptise République Démocratique du Congo. Mobutu, malade,
trouve refuge à Gbadolite pour s'exiler ensuite au Maroc, où il
décède en septembre à Rabat. Quelques mois plus tard, le
Président Laurent-Désiré Kabila remercie toutes les forces
armées étrangères qui l'ont aidé à renverser
Mobutu, et leur demande de retourner dans leurs pays. Il avait peur que les
officiers militaires rwandais qui commandaient son armée ne complotent
un coup d'Etat contre lui dans le but de placer au pouvoir un Tutsi qui
répondrait directement au Président du Rwanda, Paul Kagame. Cette
annonce n'a pas été bien accueillie par les gouvernements
rwandais et ougandais, qui comptaient prendre le contrôle de leur grand
voisin.
En février 1998, le feu Etienne TSHISEKEDI est
relégué au Kassaï, il sera libéré en juillet.
L. D. Kabila nomme un chef d'état-major katangais à la place du
rwandais qui occupait ce poste, avant de remercier les soldats étrangers
(juillet). Kinshasa rompt avec ses alliés rwandais et ougandais, et
commence une rébellion contre Kabila, soutenue par Kigali, Kampala et
Bujumbura. Le Zimbabwe, l'Angola, le Tchad et la Namibie interviennent
militairement aux côtés de Kinshasa.
? Deuxième guerre du Congo (1998-2002)
Deux mouvements rebelles apparaissent :
? Les troupes rwandaises se sont alors retirées
jusqu'à Goma, d'où elles ont lancé une nouvelle milice, ou
mouvement rebelle, baptisé Rassemblement congolais pour la
démocratie (RCD), mené par les Tutsis pour combattre leur ancien
allié, le président Kabila ;
? Pour contrebalancer le pouvoir et l'influence du Rwanda en
RDC, les troupes ougandaises créent un autre mouvement rebelle,
appelé Mouvement pour la Libération du Congo (MLC), mené
par le chef de guerre congolais Jean-Pierre Bemba, fils du milliardaire
congolais Jeannot Bemba Saolona.
56
conflit durera jusqu'en 2002. Le 10 août 1998, le
président Laurent-Désiré Kabila et quasiment l'ensemble de
son gouvernement se retirent à Lubumbashi, où s'organise la
résistance militaire.
Resté à Kinshasa en ministre de la guerre,
Didier MUMENGI, ministre de l'Information et porte-parole du gouvernement,
lance le mot d'ordre de résistance populaire. Il invente le slogan
« la Paix se gagne » et organise des Forces d'auto-défense
populaire (FAP). Les mouvements rebelles et leurs alliés rwandais et
ougandais échouent à Kinshasa. L'Angola, le Zimbabwe et la
Namibie s'impliquent militairement du côté du gouvernement de
Laurent-Désiré Kabila, pour défendre
l'intégrité territoriale de la RDC, pays membre comme eux de la
SADC (Communauté de développement d'Afrique australe). La guerre
s'enlise à l'Est du pays.
Pour tenter de rétablir la paix et
l'intégrité du pays, l'ONU décide en 1999 l'envoi d'une
mission internationale intérimaire de surveillance et de maintien de la
paix, la MONUC, en attendant la présence d'appuis militaires de
différents pays. En mai 1999 intervient la première scission de
la rébellion, qui sera suivi de plusieurs autres. En juillet-août,
un accord de paix est signé à Lusaka, qui prévoit un
Dialogue inter-congolais pour jeter les bases d'un nouveau départ. Un
premier combat rwando-ougandais a lieu sur le territoire congolais, à
Kisangani. Kabila crée en novembre des unités
d'auto-défense. En mai-juin 2000 de nouveaux combats rwando-ougandais
ont lieu à Kisangani.
Le 16 janvier 2001, Laurent-Désiré Kabila est
assassiné par un de ses gardes du corps. Son fils Joseph Kabila est
désigné par le gouvernement pour assurer l'intérim (en
attendant « le rétablissement du blessé », que tous
savent pourtant déjà décédé). Kinshasa
reconnaît enfin le décès de Laurent-Désiré
Kabila le 18 janvier.
? Gouvernement intérimaire de Joseph Kabila (2001
à 2003)
Joseph Kabila, proclamé Chef d'Etat, prête
serment le 26 janvier et appelle à des négociations pour la paix.
A Gaborone, s'ouvre une réunion préparatoire au dialogue
inter-congolais : celui-ci ne s'ouvrira officiellement à Addis-Abeba que
le 15 octobre, et les négociations continuent sans mettre
réellement fin au désordre. En février 2001, un accord de
paix est signé entre Kabila, le Rwanda et l'Ouganda, suivi de l'apparent
retrait des troupes étrangères. Les troupes de maintien de la
paix de l'ONU, la MONUC, arrivent en avril, afin de soutenir les difficiles
efforts de paix ou au moins soutenir le cessez-le-feu, protéger les
populations et les organisations humanitaires prêtant assistance aux
nombreux réfugiés et déplacés.
Le 15 février 2002 s'ouvre réellement en Afrique
du Sud le Dialogue inter-congolais : l'accord de paix est signé à
Pretoria en décembre; le Dialogue sera clôturé en avril
2003.
? Gouvernement de transition (2003 à
2006)
Le conflit éclate à nouveau en janvier 2002
à la suite d'affrontements entre des groupes ethniques dans le Nord-est
; l'Ouganda et le Rwanda mettent alors fin au retrait de leurs troupes et en
envoient de nouvelles. Des négociations entre Kabila et les chefs
rebelles aboutissent à la signature d'un accord de paix par lequel
Kabila devra désormais partager le pouvoir avec les anciens rebelles.
Le 4 avril 2003, la Cour d'ordre militaire (COM), condamne,
sans convaincre, 30 personnes à mort pour l'assassinat de
Laurent-Désiré KABILA. La même année se met en place
un gouvernement de transition « 1+4 » (un Président et quatre
Vice-présidents) : Joseph KABILA (PPRD), Jean-Pierre Bemba (MLC),
Abdoulaye YERODIA NDOMBASI (PPRD), Azarias RUBERWA (RCD), ainsi que Arthur
Z'AHIDI NGOMA (société civile).
Depuis novembre 2010, l'ancienne mission de maintien de la
paix de l'ONU, la MONUC qui n'était pas parvenue à
désarmer les milices rwandaises, est renforcée militairement
57
En juin 2003, l'armée rwandaise est la seule de toutes
les armées étrangères à ne pas s'être
retirée du Congo. L'essentiel du conflit était centré sur
la prise de contrôle des importantes ressources naturelles du pays, qui
incluent les diamants, le cuivre, le zinc et le coltan.
En mars 2004 échoue une tentative de coup d'Etat
attribuée aux anciens mobutistes. Au mois de mai de la même
année, des militaires banyamulenge déclenchent une mutinerie
à Bukavu, sous les ordres du général tutsi congolais
Laurent NKUNDA, et prennent Bukavu le 2 juin. Ces mutins abandonnent la ville
le 9 juin sous la pression internationale. Le 11 juin, des membres de la garde
présidentielle tentent un coup d'Etat.
En janvier 2005 des émeutes se déclenchent
à Kinshasa lorsque la Commission électorale envisage publiquement
un report de la date des élections, comme le lui permettent les textes.
La MONUC déclenche une offensive militaire, médiatique et
diplomatique contre les milices lendues et hemas, après la mort de neuf
casques bleus banglashis, tués en Ituri par ces dernières. La
Cour pénale internationale annonce ses premiers mandats d'arrêts
pour 2005 dont un accusé en Ituri.
En mai, l'avant-projet de constitution est approuvé par
le parlement. Fin juin, celui-ci décide de prolonger la transition de 6
mois. Un gouvernement de transition est établi jusqu'aux
résultats de l'élection. Une constitution est approuvée
par les électeurs, et le 30 juillet 2006, les premières
élections multipartites du Congo depuis son indépendance (en
1960) se tiennent :
V' Joseph Kabila obtient 45 % des voix,
V' Son opposant, Jean-Pierre Bemba, 20 %.
Les résultats de l'élection sont
contestés et cela se transforme en une lutte frontale, entre les
partisans des deux partis, dans les rues de la capitale, Kinshasa, du 20 au 22
août 2006. Seize personnes sont tuées avant que la police et les
troupes MONUC de l'ONU ne reprennent le contrôle de la ville. Une
nouvelle élection a lieu le 29 octobre 2006, et Kabila remporte 58 % des
voix. Bien que tous les observateurs neutres se félicitent de ces
élections, Bemba fait plusieurs déclarations publiques
dénonçant des irrégularités dans les
élections.
? Présidence de Joseph Kabila
(2006-2019)
Le 6 décembre 2006, Joseph Kabila prête serment
comme Président de la République élu et le gouvernement de
transition prend fin. La fragilité du nouveau gouvernement a permis
l'installation d'affrontements répétés et de violations
des droits de l'homme.
Dans l'affrontement se déroulant dans la région
du Kivu, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR)
continuent de menacer la frontière rwandaise et les Banyarwandas ; le
Rwanda soutient les rebelles du RCD-Goma (Rassemblement congolais pour la
démocratie) contre Kinshasa, et une offensive rebelle ayant eu lieu fin
octobre 2008 a causé une crise de réfugiés à Ituri,
où les forces de MONUC se sont révélées incapables
de maîtriser les nombreuses milices et groupes à l'origine du
conflit d'Ituri.
Dans le Nord du Katanga, les Maï-Maï (anciennes
milices créées par Laurent-Désiré Kabila pour
lutter contre les milices rwandaises et ougandaises dans le Kivu, mais
oubliées dans l'accord de Lusaka en 1999) ont échappé au
contrôle de Kinshasa.
58
pour intervenir dans l'est du pays et devient la MONUSCO, mais
plusieurs dissidences et révoltes persistent et de nombreuses violences
continuent.
En 2015, des tensions apparaissent dans la perspective de
l'élection présidentielle de 2016 et d'un éventuel
prolongement de mandat de Joseph Kabila. L'article 70 de la Constitution du
pays, datée de 2006, dispose que le président de la
République est élu pour un mandat de cinq ans renouvelable une
seule fois. Prétextant un délai supplémentaire de seize
mois et un jour pour finaliser l'enregistrement des 30 millions
d'électeurs, la commission électorale a annoncé le 20
août 2016, que l'élection présidentielle ne pouvait pas se
dérouler avant juillet 2017. Le 19 septembre 2016, lors d'un
rassemblement à Kinshasa contre le maintien au pouvoir de Joseph Kabila,
au moins dix-sept personnes sont mortes (3 policiers et 14 civils) durant la
manifestation. Après la crise de confiance dans les institutions
résultant de cette décision, des mouvements insurrectionnels sont
signalés dans différentes provinces : milice Kamwina Nsapu dans
le Kasaï central, Bundu dia Kongo dans le Kongo central, Pygmées
contre Bantous dans le Tanganyika, réactivation du M23.
L'économie pâtit de la situation, et le phénomène
des enfants-soldats est en recrudescence.
Le 11 octobre 2017, le président de la Commission
électorale nationale indépendante (CENI), Corneille NANGAA,
annonce que le scrutin pour remplacer Joseph Kabila ne pourra pas avoir lieu
avant 504 jours, en raison du recensement encore en cours dans les
régions du Kasaï, jusqu'en décembre 2017, puis de l'audit du
fichier électoral par les experts, de l'élaboration de la loi
portant répartition des sièges au parlement et de plusieurs
autres opérations techniques et logistiques nécessaires avant la
tenue des élections, prévue au premier semestre 2019. Ce nouveau
report des élections suscite l'indignation de l'opposition, ainsi que
nombre d'ONG.
Le 30 décembre 2018, les élections ont lieu et
le 10 janvier 2019, le président de la CENI, Corneille NANGAA proclame
provisoirement Félix TSHISEKEDI comme Président de la
République Démocratique du Congo, Chef d'Etat.
Le 15 janvier, la Cour constitutionnelle débute les
audiences concernant les recours déposés par Martin FAYULU et
Théodore NGOY, tandis qu'un important dispositif de soldats, de
policiers et de militaires de la garde républicaine entourent le
bâtiment.145 Le dirigeant de parti de la Dynamique de
l'Opposition et ses avocats demandent un recompte des votes en s'appuyant sur
plusieurs points, dont l'annonce effectuée par la CENI avant la fin de
la compilation des résultats, ainsi que la modification de la
circonscription nationale. Selon eux, l'exclusion des villes de Beni, Butembo
et Yumbi aurait eu lieu en violation de l'article 100 de la loi
électorale, et l'annonce des résultats ne saurait être
légale tant que le scrutin n'y a pas également eu lieu. Enfin,
ils demandent à la Cour d'entendre les observateurs de l'Église
catholique, de l'Église protestante et de la Mission d'Observation
Electorale de la Synergie des missions d'observation citoyenne des
élections (SYMOCEL).146
Le 18 janvier, à la suite d'une réunion d'une
dizaine de chefs d'État à Addis-Abeba, l'Union africaine
décide de l'envoi pour le 21 janvier d'une délégation dans
le pays, et appelle à une suspension de la proclamation des
résultats, mettant publiquement en doute leur fiabilité et les
qualifiant d'entachés de « doutes sérieux ».
Dans la nuit du 19 au 20 janvier 2019, la Cour
constitutionnelle annonce sans surprise le rejet des recours, qu'elle qualifie
de non fondés, estimant que les candidats n'ont « pas
apporté la
145 Contentieux électoraux : la cour constitutionnelle
statue sur les recours de Martin FAYULU et Théodore NGOY
146 Pour les avocats de FAYULU, la CENI a illégalement
modifié la circonscription électorale pour la
présidentielle de 2018
59
preuve » que les résultats provisoires
n'étaient pas conformes à la réalité. Peu avant
dans la soirée, le réseau internet est rétabli
après vingt jours de coupure.
La cour proclame par conséquent Félix TSHISEKEDI
élu Président de la République. Celui-ci devient le
cinquième Président de la RDC depuis l'indépendance du
pays le 30 juin 1960, et le premier à arriver au pouvoir par le biais
d'une alternance par les urnes. Le Président TSHISEKEDI prête
serment le 24 janvier 2019 au Palais de la Nation, résidence officielle
des Présidents congolais.
Ainsi, dès la naissance de l'Etat de 1885 à nos
jours, la République Démocratique du Congo a connue huit (8)
anciens Chefs d'Etat et l'actuel Président de la République
Félix Antoine TSHISEKEDI TSHILOMBO en est le neuvième (9). Ces
anciens Chefs d'Etat sont :
N°
|
NOMS DE CHEFS D'ETAT
|
PERIODES
|
APPELATIONS DE L'ETAT
|
DUREES
|
01
|
Léopold II
|
1885 - 1909
|
Etat Indépendant du Congo, Congo Belge
|
24 ans
|
02
|
Albert Ier
|
1909 - 1934
|
Congo Belge
|
25 ans
|
03
|
Léopold III
|
1934 - 1951
|
Congo Belge
|
17 ans
|
04
|
Baudouin
|
1951 - 1960
|
Congo Belge
|
9 ans
|
05
|
Joseph KASA-VUBU
|
1960 - 1965
|
République du Congo, République
Démocratique du Congo
|
5 ans
|
06
|
Joseph MOBUTU
|
1965 - 1997
|
République Démocratique Du Congo,
Zaïre
|
32 ans
|
07
|
Laurent Désiré KABILA
|
1997 - 2001
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Zaïre,
République Démocratique du Congo
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4 ans
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08
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Joseph KABILA
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2001 - 2019
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République Démocratique du Congo
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18 ans
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§3. IMPORTANCE
Au regard des perspectives viagères auxquelles les
Chefs d'Etat s'inscrivaient au détriment de l'alternance
démocratique, l'octroi du statut aux anciens Chefs d'Etat n'avait pas
d'écho favorable chez les constituants et législateurs africains,
c'est ce qui renvoyait à leurs humiliations et souffrances post
mortem.
Néanmoins, soucieux de préserver la
dignité et l'honorabilité des anciens Présidents de la
République élus, il était alors opportun, voire
nécessaire d'instituer un statut particulier à ces derniers pour
prévenir des intentions de conservation du pouvoir par des moyens
antidémocratiques, car ce statut entend consolider la démocratie,
en l'occurrence par le mécanisme de l'alternance démocratique.
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