Chapitre 3
Bilan de la gestion de la communication de crise par le
gouvernement Marocain
|
« Ce serait terriblement triste s'il ne sort pas de
cette mega-crise (Coronavirus) une pensée politique indiquant la
nouvelle Voie »Edgar Morin
La pandémie du Covid-19 s'est
présentée comme une occasion grandeur nature pour le gouvernement
marocain d'exposer toutes ses compétences. Or, le flou total de
communication de ces derniers jours concernant certaines situations
liées à la gestion de la crise sanitaire a réussi à
le décrédibiliser aux yeux de l'opposition, des médias et
de l'opinion publique.
En période de crise l'information est capitale et la
communication est le meilleur moyen de gestion d'une crise.
Si le gouvernement a réussi tant bien que mal à
gérer la première phase de la crise, son pilotage de la
deuxième phase suscite énormément d'interrogations. On est
loin du Maroc, cas d'école.
Entre un déconfinement improvisé et des
décisions «nocturnes» prises à la
dernière minute le gouvernement est appelé à sortir de son
mutisme et à communiquer son nouveau plan de lutte contre la
pandémie.
Outre les mauvaises décisions et les décisions non
argumentées, l'Etat semble avoir perdu les commandes de pilotage de la
crise sanitaire qu'il maîtrisait au début de la
pandémie.
- Célébrer la fête d'Aïd Al Adha (la
fête du mouton) n'était pas une sage décision quand on sait
que c'est l'occasion rêvée pour les familles de se retrouver,
surtout après un interminable confinement qui a duré plusieurs
mois.
- Les décisions prises à la légère et
à la dernière minute telle l'annonce surprise de l'interdiction
d'entrer et de sortir de huit villes, à la veille de la fête, a
provoqué un mouvement de panique générale.
- Les études suspendues quand les cas se comptaient par
dizaine sont repris en présentiel alors que le pays est au pic de
l'épidémie.
- L'enseignement à distance fut un échec :
Imposé par le confinement, le e-learning n'a pas été
à la hauteur des attentes des Marocains en raison des
inégalités des élèves à l'accès
à internet.
Selon une étude du HCP, seulement 17,3% des
élèves ou étudiants qui suivaient les cours à
distance pendant la période du confinement, considèrent que ces
cours ont couvert entièrement le programme pédagogique annuel.
Pour 68,3% des élèves, ces cours ne couvrent pas totalement le
programme et 14,4% sont indécis.
Une étude du Policy Center for the New South, montre que
la moitié des élèves ne disposent pas d'ordinateur
portable, de tablette ou de connexion internet.
La récente étude PISA de l'OCDE
révèle les limites du canal digital dans l'éducation
marocaine : seulement 25,8 % des élèves sondés disposent
d'une connexion à l'école avec un débit suffisant, tandis
que 27,8 % disposent d'une plateforme d'apprentissage en ligne effective.
En somme, la qualité de l'enseignement à distance
a été jugée insuffisante chez près de ¾ des
familles ayant leurs enfants à l'école.
La rentrée scolaire 2020-2021, prévue le 2
septembre et tant attendue par des milliers d'élèves,
désireux de retrouver le chemin de l'école et leurs camarades,
est marquée par une annulation de dernière minute : la veille,
c'est-dire dimanche soir.
Visiblement dépassé par l'évolution de la
pandémie, le gouvernement, dans un geste désespéré,
invite les parents d'élèves à choisir entre le
présentiel ou le distantiel comme s'il voulait « s'en laver les
mains.»
Il aurait dû prendre des décisions précises,
claires et surtout responsables à l'instar de celles prises lors de la
gestion de la première phase de la pandémie.
Autre volet de cette mauvaise gestion, et non des moindres, est
celui de l'absence d'accompagnement psychologique lors de la pandémie et
de la période de confinement.
La situation de confinement a aussi des conséquences
psychologiques auxquelles il convient de répondre. Le stress,
l'angoisse, la peur, l'inquiétude et même dans certains cas les
violences conjugales et la maltraitance des enfants sont monnaie courante.
Le HCP a réalisé, du 14 au 23 avril 2020, une
enquête auprès des ménages pour suivre l'adaptation de leur
mode de vie sous la contrainte du confinement. Cette enquête a
ciblé un échantillon de 2 350 ménages représentatif
des différentes couches socioéconomiques de la population
marocaine selon le milieu de résidence, urbain et rural.
Pour 49%, l'anxiété est le principal impact
psychologique du confinement. Cette proportion atteint 54% parmi les
ménages résidant dans les bidonvilles.
Selon toujours cette enquête, la peur est ressentie par 41%
des ménages marocains, principalement parmi les ménages
dirigés par une femme (47%), contre 40% dirigés par un homme, et
parmi les ménages pauvres (43%), contre 33% parmi les familles
aisées. 30% des ménages expriment un sentiment de claustrophobie,
32% en milieu urbain et 24% en milieu rural.
Ce traumatisme concerne 30% des ménages composés
de 5 personnes et plus, contre 25% pour les ménages de taille
réduite de 2 personnes. 25% évoquent une multiplication des
phobies. Cette proportion est plus élevée en milieu urbain (29%)
qu'en milieu rural (18%) et parmi les ménages dont le chef a le niveau
d'enseignement supérieur (28%) que parmi ceux
dirigés par une personne n'ayant aucun niveau
d'éducation (23%). 24% des ménages souffrent de troubles de
sommeil, les citadins (28%) sont deux fois plus touchés que les ruraux
(14%). 8% des ménages présentent d'autres troubles psychologiques
tels quel'hypersensibilité et la nervosité ou la lassitude. 24%
des ménages sont très inquiets des menaces du Covid19, et 46%
sont plutôt inquiets. Ces inquiétudes sont dues principalement
à la crainte d'être contaminé par le virus (48%), de perdre
son emploi (21%), du décès (10%), à ne pas pouvoir
subvenir aux besoins alimentaires du ménage (10%) et par rapport
à l'avenir scolaire des enfants (5%).
L'Etat a aussi failli à son devoir, celui du rapatriement
des Marocains restés bloqués à l'étranger
après la suspension du trafic aérien et la fermeture des
frontières. Une situation qui a plongé plusieurs familles dans
l'incertitude et le chaos.
Plus de 32 000 Marocains sont bloqués à
l'étranger et multiplient les appels à l'aide sans espoir de
retour alors que leurs ressources se sont épuisées.
Bloqués dans 17 pays étrangers, ils sont partis
pour des raisons touristiques, administratives, familiales ou médicales.
La réponse, sans équivoque, du ministre des
Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des
MRE ne se fait pas attendre devant les députés :
«Le Maroc ne peut pas continuer à supporter les
coûts du rapatriement des personnes. Nous avons ciblé des
opérations humanitaires relatives à des personnes sans
moyens»
Suite au projet de décret visant à prolonger
la validité de la période de l'état d'urgence sanitaire
sur l'ensemble du territoire national, les citoyens ont eu droit à une
série de vidéos de propagande, diffusées sur la toile,
mettant en avant le rôle des caïds (agents d'autorité)
à préserver l'ordre public. Force est de reconnaître que
ces représentants du Ministère de l'Intérieur ont
joué un rôle considérable pour ce qui est du respect du
confinement.
Cependant certains d'entre-deux ont abusé de leurs
pouvoirs. Sur une vidéo devenue virale, on pouvait ainsi apercevoir une
caïd femme, en treillis militaire, sillonnant les rues d'un quartier
populaire casablancais et ordonnant aux populations, sur un ton
désobligeant et irrespectueux, de se conformer à l'état
d'urgence sanitaire. Des scènes à peine croyables qui nous
rappellent malencontreusement les « années de plomb » que l'on
croyait révolues.
Le Ministère de l'Intérieur a récemment
adressé des demandes d'explication à des caïds
accusés d'abus de pouvoir et ayant fait l'objet de plaintes
auprès de la justice après avoir agressé verbalement ou
physiquement des citoyens.
Le Royaume était, il y a à peine quelques
mois, salué et érigé comme un modèle de gestion de
crise par plusieurs institutions internationales. Le chef du gouvernement,
parlait même de «success-story».Actuellement, face au manque
d'information et de transparence, face aux décisions prises à la
dernière minute, on se demande à quoi est réellement
dû le revirement de la situation et ce relâchement.
Le gouvernement gère la crise depuis le début sans
l'implication des acteurs de la société. Il est temps de plaider
pour une gestion participative de la deuxième phase de la crise
sanitaire.
Il est recommandé d'accorder une priorité accrue
à la communication et à la transparence.
Le plus important à ce stade est de conserver la confiance
du citoyen marocain et de continuer d'informer en toute transparence en
préparant une sortie de crise.
Au final, les enseignements que l'on peut tirer, dores et
déjà, pour l'avenir :
- La réforme de l'enseignement est plus que jamais
prioritaire, notamment la recherche scientifique et le développement du
numérique.
- L'école publique aujourd'hui « ghetto des pauvres
» devrait gagner ses lettres de noblesse d'antan afin de réaliser
l'égalité des chances. (Lors du confinement, force est de
constater que les élèves du privé étaient beaucoup
plus privilégiés que leurs camarades du secteur public)
Le rapport du Conseil Supérieur de l'Enseignement, de la
Formation et de la Recherche Scientifique, dresse d'emblée un constat
sans concession: « l'école Marocaine est l'épicentre
des inégalités et disparités sociales. Pis, elle les
aggrave »
Les disparités sociales déterminent la
réussite scolaire « Si l'école publique reste la plus
prisée (84% pour le primaire et 91% pour le collège et le
lycée), l'école privée reste le moyen d'assurer une
éducation de qualité » souligne Omar Azziman, le
président du CSEFRS.
- La santé des citoyens prime. Aussi le gouvernement est
invité à redorer le blason de ce secteur qui souffre de nombreux
dysfonctionnements, que ce soit au niveau des services de santé, des
conditions de travail des médecins, de l'insuffisance de la
capacité d'accueil des centres hospitaliers, du manque de personnel
qualifié et de matériel médical.
- Le volet social, longtemps négligé par tous les
gouvernements qui se sont succédés devrait être la
préoccupation majeure des politiques et un nouveau modèle de
développement doit voir le jour en vue de faire éclater les
disparités sociales.
Le Maroc a globalement bien géré la communication
de crise liée à la Covid-19 lors de la première phase de
la pandémie.
Son plan d'action, sa communication de crise et ses messages
étaient efficaces malgré quelques failles et bavures liées
essentiellement à un manque de communication et de transparence.
Certaines décisions prises à la dernière minute ont
décrédibilisé sa capacité à gérer une
crise sanitaire d'une grande envergure.
Le Maroc s'est érigé un véritable cas
d'école en matière de gestion de crise sanitaire liée au
Covid-19. En parfait stratège de la gestion de la communication de
crise, il a su tirer les enseignements de ce qui s'est passé en Chine et
en Europe. Un mimétisme institutionnel qui l'a poussé à
anticiper la crise et à mettre en place un dispositif impressionnant
afin d'empêcher la propagation du virus.
Ciel aérien fermé, frontières
terrestres et maritimes verrouillées, confinement et état
d'urgence décrétés, le Royaume a pris toutes les mesures
préventives drastiques au détriment de son économie qui a
été considérablement touchée par la pandémie
et qui devrait connaître probablement une récession sur l'ensemble
de l'année 2020.
Le fonds social Covid-19 a pu soutenir les TPE et PME en
difficultés et venir en aide aux familles touchées par la crise
liée à la pandémie.
Mais la précarité, la pauvreté et le
chômage sont un autre défi pour l'Etat. Beaucoup de
salariés en perte d'emploi et non affiliés à la CNSS se
sont retrouvés dans une situation financière peu confortable. La
pandémie s'ajoutant à la sécheresse, près de 10
millions de Marocains pourraient se retrouver dans une situation
économique très difficile, selon la Banque Mondiale.
Certains domaines clés pour le développement
du pays demeurent, à ce jour, des chantiers souffrant de
négligence et de nombreux dysfonctionnements, rappelant ainsi le
gouvernement à l'ordre.
Pour ce qui est du secteur de la santé le constat est
sans appel. Sous les feux de la rampe, dès le début de la crise
sanitaire, il est incapable de répondre aux besoins de la population. En
effet, les structures d'accueil sont insuffisantes, le personnel de la
santé, toutes catégories confondues, compte seulement 50.000
personnes pour 35 millions d'habitants, soit 6 médecins pour 10 000
habitants selon un rapport de l'OMS.
L'enseignement, notamment public, fait face à de
multiples défis et reste en deçà des aspirations des
citoyens et pour cause les retards enregistrés à tous les
niveaux. La cour des comptes relève encore une fois plusieurs
insuffisances dans le secteur de l'enseignement. Et la Banque Mondiale a
souligné, dans son dernier mémorandum, que le Maroc avait besoin
d'un «miracle éducatif». En effet, le Royaume est
classé à la 75 ième position sur 79 pays et arrive en
queue du classement de l'enquête PISA 2018 de l'OCDE.
Une réforme de l'Education doit être une
priorité absolue de l'Etat.
La pandémie à laquelle fait face aujourd'hui le
pays malgré les problèmes et les défaillances que l'on
vient d'évoquer ne sera certainement pas la dernière. Les crises
surviendront encore et toujours et au moment où l'on s'y attend le
moins.
Le Maroc doit être prêt pour relever les
défis à venir. Les chantiers fragiles ne devraient plus
être un handicap face à la gestion de nouvelles crises.
Selon les spécialistes de la communication de crise, les
prochaines seront pires, « inconnues et chaotiques » pour reprendre
les mots de Patrick LAGADEC.
La communication est l'élément déterminant
qui permet de surmonter toute crise. Refuser de communiquer s'avère
souvent contre-productif dans un contexte de crise.
La crise sanitaire liée au Covid-19 va certainement
transformer en profondeur notre mode de vie, l'économie mondiale et nos
sociétés. Il est impératif d'en tirer les enseignements et
de se projeter dans l'après crise.
Nous devons nous préparer dès maintenant pour les
changements et les crises à venir et surtout saisir les
opportunités qu'elles nous offrent.
Organisations et entreprises sont contraintes de
développer une capacité à évoluer dans un monde
instable et en perpétuel changement. Seules les institutions qui ont une
vision futuriste, prêtes à réadapter leur industrie
survivront, les autres risquent de disparaître.
La mue de la Société se fera à travers la
communication de crise et le digital qui a désormais le vent en poupe et
de beaux jours devant lui. En effet, durant la pandémie et le
confinement, l'enseignement à distance s'est imposé comme seule
alternative et les achats en ligne ont explosé. Seul le digital a permis
au monde de continuer à tourner.
L'avis des spécialistes
Entretien avec Saâd BENMANSOUR, consultant expert
en médias politiques
|
(Interview réalisée le 14 septembre 2020)
Saâd BENMANSOUR estprésident du directoire,
directeur de la rédaction et de la publication de La Vie Eco et
d'Aujourd'hui le Maroc, il est également consultant expert en
médias politiques.
Grille pour l'entretien avec M Saâd
BENMANSOUR (entretien directif)
Axes de discussion :
- La gestion de la crise sanitaire mondiale par le gouvernement
marocain
- Les stratégies mise en place par le MEN pour faire face
à la pandémie
- La post crise et ses opportunités
Axe I : La crise sanitaire a bouleversé l'ordre mondial et
notamment l'économie mondiale.
Question n° 1 : Quel décryptage ou quelle lecture
faites-vous de la gestion de la pandémie par le gouvernement marocain ?
« Le Maroc érigé comme modèle de
gestion de l'épidémie » par l'Institut Montaigne, ou encore
« Le Maroc est un cas d'école intéressant »
Question n° 2 : Aujourd'hui, on assiste à une
recrudescence des cas, pensez-vous que le Gouvernement est en train de perdre
la bataille qu'il pensait gagner ? Est-il en train de perdre le contrôle
de la situation ?
Question n° 3: Sur le plan socio-économique, force
est de constater les répercussions négatives de la
pandémie : des entreprises qui arrêtent définitivement ou
temporairement leur activité, d'autres qui mettent la clé sous la
porte, des employés qui se retrouvent sans travail ou qui sont tout
simplement remerciés, le taux de chômage qui n'arrête pas de
s'élever de jour en jour, des aéroports et des ports
fermés ...etc. Quel regard portez-vous sur cette situation chaotique ?
Question n° 4 : Des bavures ont été commises
à la veille de l'Aïd pour sauver soi-disant l'économie
marocaine mais à quel prix ? (Au détriment de la vie des
citoyens)
Est-ce qu'on a le droit de jouer ainsi avec la vie des citoyens
?
Question 5 : On a tous vu cette bonne campagne publicitaire sur
le tourisme local, bouée de sauvetage pour ce secteur qui a
été le plus touché par la pandémie mais face
à des villes fermées et des autorisations et des barrages
à l'entrée de toutes les villes beaucoup de marocains ont choisi
de rester chez eux. On se demande vraiment s'il y a derrière une
stratégie ou plutôt un gaspillage d'argent.
Axe II Le MEN est un des ministères qui a
été dès le départ celui qui est le plus sous les
feux de la rampe.
Question n° 6 : Quelle est votre évaluation des
mesures et des stratégies mises en oeuvre dans le cadre du programme
d'urgence pour l'éducation?
Question n°7 : Les mesures prises par le MEN lors de la
confirmation des premiers cas de Covid-19 ont été saluées
par l'ensemble des marocains. Cependant les toutes dernières
improvisées à la veille de la rentrée scolaire semblent
décevoir tous les parents d'élèves surtout quand on pense
qu'on leur a jeté la balle dans leur camp pour ce qui est du choix de
l'enseignement en présentiel ou à distance. Qu'en pensez-vous
?
Question n° 8 : Nombreux sont les citoyens qui reprochent au
Ministère de M AMZAZI d'être au service du patronat et que le
scénario de l'école à distance était
déjà prévu mais on a laissé le lobby des librairies
écouler sa marchandise avant de de déclarer la veille de la
rentrée scolaire, et à la dernière minute, que les
écoles seront fermées. Partagez-vous cet avis ?
Question n°9 : Le MEN se targue de ses mesures
préventives mais il semble oublier l'égalité des chances :
Ce ne sont pas toutes les familles marocaines qui possèdent un
ordinateur et une connexion Wifi. Ne voyez-vous pas que le fait d'opter pour
l'enseignement à distance a réussi à creuser
l'écart entre les différentes couches sociales ? (Je pense
surtout aux enfants qui vivent dans le milieu rural)
Résumé de l'entretien avec Saâd
BENMANSOUR
|
Le Maroc a apporté une bonne réponse
institutionnelle à la gestion de la crise sanitaire liée au
Civid-19. Il est vrai qu'il a été pris de court comme plusieurs
pays d'ailleurs et a réagi avec un temps de latence mais cela est
normal. Face à une crise de telle ampleur, il faut du temps pour faire
le diagnostic. Le dispositif et les mesures de prévention sont une
réponse extrême. Cependant la gestion de la communication de crise
lors des phases de déconfinement a connu un certain relâchement.
Cela n'a pas été conduit de la même vigueur et cela est
expliqué par l'impératif économique. Les citoyens,
euxaussi se sont laissés aller.
Par ailleurs les retombées de la crise sanitaire sur
l'économie sont considérables. Il y aura forcément des
« cadavres » et le secteur le plus touché
aujourd'hui c'est celui du tourisme et par conséquent tout ce qui tourne
autour.
Pour ce qui est du MEN, la décision de fermer les
écoles suite aux premiers cas de contamination par le nouveau
coronavirus, était sage et justifiée. Face à une crise
notamment sanitaire, l'on protège d'abord les citoyens.
Pour ce qui est de la mise en place de l'enseignement à
distance, le MEN nous a agréablement surpris. Le Maroc est parti d'une
page blanche et le lendemain de la pandémie il fallait enseigner
à quelques millions d'élèves...C'est un exploit !
Maintenant il faut se concentrer sur la post crise. On doit
être prêt à prendre la vague, on doit être parmi le
premier peloton. L'après Covid-19 sera certainement difficile mais il y
aura beaucoup d'opportunités à saisir. Le marché
européen et américain va bientôt exploser, la consommation
va reprendre et la machine de l'économie va démarrer....On doit
être prêt pour ce grand challenge.
Entretien avec Patrick LAGADEC
|
(Interview réalisée le 22 septembre 2020)
Patrick Lagadec est un chercheur spécialiste de la gestion
du risque et de la gestion de crise. Il est directeur de recherche honoraire de
l'École polytechnique et désormais consultant et
conférencier sur le pilotage des situations complexes et chaotiques.
Grille pour l'entretien avec Patrick LAGADEC
(entretien semi- directif)
Axes de discussion :
- La gestion de la pandémie par le Gouvernement
Marocain
- La stratégie du MEN
- La post-crise
Le questionnaire
Question 1 : Vous qui êtes un éminent
spécialiste de la communication de crise, est-ce que vous avez vu venir
cette crise sanitaire mondiale liée au Covid-19 ?
Question 2 : Que pensez-vous de la gestion de cette crise
sanitaire par certains pays Européens ? (et les Etats-Unis ?)
Question 3 : Qu'en est-il de celle du Maroc ? 16 Mars :
fermeture des écoles, ensuite fermeture de l'espace aérien
(Surtout durant la première phase de la crise)
Question 4 : Les mesures préventives
décrétées par certains pays paraissent un peu
surannées, datant des siècles derniers, je fais allusion au
confinement. Pour l'expert que vous êtes, était-ce vraiment
nécessaire ? (Surtout quand on sait qu'un pays comme la Suède
n'impose pas le port du masque, pas de confinement)
Question 5 : Quel scénario peut-on prévoir à
cette crise ?
Question 6 : Vous parlez souvent de crises
imprévisibles, chaotiques ....C'est à ça qu'elles
ressemblent celles à venir ?
Question 7 : Quels conseils donnerez-vous à ceux qui
sont aux postes de commandement ?
Résumé de l'entretien avec Patrick
LAGADEC
|
Les problèmes d'aujourd'huisont d'abord, des
problèmes d'insuffisance de pilotage qui se traduisent par un
problème de communication.
Si l'on fait de la bonne communication de crise, il faut encore
avoir une bonne compétence pour pouvoir la piloter.
Et si on ne sait pas piloter, j'ai très peur qu'on se fixe
uniquement sur la communication.
Il faut surtout faire très attention à des prises
de décision à la hâte. C'est un terrain très
compliqué.
Pour ce qui est de l'après crise, il y aura beaucoup de
surprises. On va être dans des Univers beaucoup plus instables,
chaotiques avec beaucoup de crises qui vont interférer les unes sur les
autres et des pilotes qui ne sont pas préparés à
gérer ce genre de choses.
LAGADEC Patrick, La Civilisation du risque, Seuil, 1986.
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4ème édition 2015
LIBAERT Thierry , Le plan de communication - 5e édition.
Définir et organiser votre stratégie de communication Paris,
Dunod, Collection « Marketing/Communication »,
2017??????????????????????????????????????????????
LAGADEC Patrick, La gestion des crises, Paris, Me Graw Hill, 1991
(a), 323 p.
LAGADEC Patrick, « Pourquoi et comment bâtir un plan
de communication préventive » in
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- Amiso M George & Cornelius B Pratt (sous la direction de) :
Case studies in crisis communication. International perspectives on hits and
misses. Routledge. 2012
Coronavirus. L'évolution de
l'épidémie au Maroc
Le bilan du mercredi 7 octobre 2020 à 18h00
CAS ACTIFS ACTUELS
|
19443 -41
|
CAS CONFIRMÉS
|
140024 +2776
|
CAS EXCLUS SUITE À UN RÉSULTAT NÉGATIF
|
2638341
|
GUÉRIS
|
118142 +2788
|
DÉCÈS
|
2439 +29
|
TOTAL NOMBRE DE DÉPISTAGES
|
2778365
|
|