La responsabilité de protéger.( Télécharger le fichier original )par Cheikh Gaye Sahel - Master en Relations Internationales 2014 |
PARAGRAPHE 2 : LES MOYENS COERCITIVESSi, en dépit d'un ensemble d'efforts et de mesures de la communauté internationale tendant à faire entendre raison à l'Etat, celui-ci persiste dans une politique criminelle, la communauté est autorisée à prendre des mesures plus coercitives pouvant prendre la forme d'une intervention armée. Il convient de préciser que si les « mesures de prévention agissant au niveau des causes profondes ou directes n'aient pas réussi à écarter ou à limiter une crise humanitaire ou un conflit, cela ne signifie pas nécessairement qu'une action militaire s'impose. Chaque fois que cela est possible, il faut examiner les mesures coercitives qui ne vont pas jusqu'à l'intervention militaire, en particulier les divers types de sanctions d'ordre politique, économique et militaire »86(*). Cependant il faut aussi noter que, « (...) la réaction n'appelle pas l'exécution d'une stratégie dont il faudrait suivre à la lettre les différentes étapes ni ne nécessite la survenance «d'événements déclenchant» qui feraient l'objet d'une définition rigoureuse »87(*). A ce stade, vouloir enserrer ces situations dans des critères déterminés et des procédures strictes, risquerait de paralyser l'action ou de la retarder de façon préjudiciable aux populations. Les mesures coercitives en cas de défaillance de l'Etat peuvent aussi être de nature judiciaire, c'est dans ce cadre que la responsabilité de protéger trouve à croiser la justice pénale internationale. Ce cadre judicaire pour la répression des crimes visé par la responsabilité de protéger est renforce par l'adoption par la plus part des Etats de la compétence universelle88(*) les permettant de juger tout auteur de ces crimes quelque sois le territoire sur lequel ils ont été commis. La charte des Nations Unies prévoit un ensemble de mesures coercitives non armée en son chapitre VII89(*). Parmi les actions, réactives envisageables, il y a la possibilité d'enquête du Conseil de sécurité, l'envoi de missions d'établissement des faits par le Conseil des droits de l'Homme, par exemple, lequel pourrait encore dépêcher un rapporteur spécial chargé de donner toutes informations utiles90(*). Ou encore consisté en un déploiement préventif91(*) : « en cas de crise sur le plan national, lorsque le gouvernement le demande ou lorsque toutes les parties y consentent, le déploiement préventif peut aider de diverses manières à soulager les souffrances et à limiter ou contenir la violence. Une assistance humanitaire consentie de façon impartiale peut revêtir la plus grande importance, un appui au maintien de la sécurité apporté par du personnel militaire, policier ou civil peut sauver des vies et contribuer à l'instauration d'un climat de sécurité propice à la tenue de négociations.»92(*) La création d'une commission d'enquête internationale, telles que celle qui a été mise sur pied en 2009 en Guinée et celle qui a été décidée en 2011 pour la Syrie, peut à la fois établir la réalité des faits et empêcher de nouveaux crimes93(*) Certes l'intervention humanitaire peut recouvrir des actions aussi variées que celles prévues par les chapitres VI et VII de la charte des Nations Unies ; mais elle peut aussi consister dans une guerre officiellement motivée par le secours d'une population touchée par la répression. Néanmoins, l'utilisation de moyens coercitifs armés consistant en une intervention armée sur le sol de l'Etat doit être utilisée en dernier recours. Or, il s'en suit pas que « nécessairement que chacune de ces démarches doit avoir été concrètement essayée et avoir échoué : souvent, le temps fait tout simplement défaut pour que ce processus puisse se dérouler normalement. Mais cela signifie que l'on doit avoir des motifs raisonnables de penser qu'en tout état de cause, si telle ou telle mesure avait été tentée, elle n'aurait pas donné le résultat escompté94(*). » En outre, ce moyen ne doit être utilisé que dans les « cas extrêmes et exceptionnels»95(*). Mais l'intervention à des fins de protection humaine, y compris l'intervention militaire dans des cas extrêmes, est admissible lorsque des civils sont en grand péril ou risquent de l'être et que l'État en question ne peut pas ou ne veut pas mettre fin à ce péril ou en est lui-même l'auteur. En effet le Conseil de sécurité s'est montré de plus en plus disposé, ces dernières années, à agir sur cette base. Ainsi en 1992, la résolution 794 du 3 décembre du Conseil de sécurité autorise les États membres à utiliser les moyens militaires nécessaires pour assurer la sécurité des opérations d'assistance humanitaire entreprises par les Nations Unies en Somalie ; elle est adoptée par le Conseil dans le cadre de ses pouvoirs de maintien de la paix, sur la base du chapitre VII, alors qu'aucune agression n'a eu lieu et que le conflit a un caractère exclusivement interne96(*). * 86 CIISE, Commission Internationale pour l intervention et la Souveraineté des États, Rapport, La responsabilité de Protéger Décembre 2001, Publie par le centre de recherche pour le développement international 95 pages : pp.33 * 87 O.N.U, A.G ; la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger, rapport du secrétaire General, doc. A/63/677,12 janvier 2009 * 88 La compétence universelle est, en droit, la compétence exercée par un État qui poursuit les auteurs de certains crimes, quel que soit le lieu où le crime a été commis, et sans égard à la nationalité des auteurs ou des victimes. * 89 Charte des Nation Unies, Chapitre VII, Article 41 : « le conseil de sécurité peut décider quelles mesures n'implique pas l'emploi de la force armée doivent être prises pour donner effet à ses décisions, et peut inviter les membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. Celle-ci peuvent comprendre l'interruption complète ou partielles des relations économiques et des communication ferroviaires, maritimes, aériennes, postale, télégraphique, radiographiques et des autres moyens de communications, ainsi que la rupture des relations diplomatiques.» * 90 Sandra Szerek, 2011, la Responsabilité de protéger : Mauvaises Querelles et Vraies Questions Annario Colombiano de Derocho international N : 4, Pages : 47-69 ACDI, Bogota-ISSN2027-1131, ISSNE : 2145-4493 * 91 O.N.U, A.G ; « Agenda pour la paix : diplomatie préventive, rétablissement de la paix, maintien de la paix » * 92 Boutros Boutros-Ghali rapport : « Agenda pour la paix : diplomatie préventive, rétablissement de la paix, maintien de la paix » * 93 Agnès Gautier, Audebert, «La Responsabilité de Protéger : Une Obligation Collective en quête d'application par la communauté internationale », Revue Ubuntou n : 1, 2013 Pages : 49-65 Site : www.ubuntou.org * 94 CIISE, Commission Internationale pour l intervention et la Souveraineté des États, Rapport, La responsabilité de Protéger Décembre 2001, Publie par le centre de recherche pour le développement international 95 pages : pp. 41 * 95 Ibidem, pages : pp. 35 * 96 Jean-Marie Crouzatier, faculté de Droit, université de Science Sociale, Toulouse-1; « le Principe de la responsabilité de protéger : Avancé de la solidarité internationale ou Ultime Avatar de l impérialisme Revue ASPECTS; N : 2- 2008 Pages : 13-32 |
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