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Connaissances locales et modes d'utilisation des plantes médicinales dans le traitement du paludisme et de la fièvre jaune dans la région des cascades. Cas du village de Diarrabakoko.

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par Saliou SANOGO
Université de Ouagadougou - Mîtrise 2014
  

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2- LA PROBLEMATIQUE DE RECHERCHE

Un examen sociologique de la maladie (en tant que déviance d'une norme "positive" et "active" qu'est la santé optimale) et de son traitement requiert une analyse profonde de ses représentations sociales tout comme des stratégies thérapeutiques des populations d'étude. En effet, le diagnostic et le traitement ne sont pas des actes biologiques communs, mais des actes sociaux particuliers aux Hommes suivant que la maladie relève d'une cause sociale ou individuelle, "naturelle" ou "surnaturelle". De ce fait, les malades auront d'une manière générale, en vertu d'un principe fondamental de la législation sanitaire, le libre choix de leur thérapie, de leurs praticiens et de leurs systèmes médicaux. Cette question qui a longtemps suscitée une certaine concurrence entre les pratiques traditionnelles "empiristes" et "symbolistes" de soins d'une part, et d'autre part, les pratiques traditionnelles et pratiques biomédicales demeurent toujours une réalité dans la société. Au-delà de cet antagonisme, l'intérêt de cette étude est de comprendre et d'expliquer les connaissances locales, les modes d'utilisation et les conditions d'accès liés aux plantes médicinales dans le traitement du paludisme et de la fièvre jaune dans la région des cascades.

Cette interrogation, pour être féconde, doit tenir compte de la manière dont les catégories cognitives qui caractérisent le savoir émanant des « univers consensuels » (Schurmans, 1990) prennent sens pour l'action. Les connaissances locales et les modes d'utilisation des différentes catégories de plantes médicinales entrant dans la thérapie de ces pathologies sont définies suivant la nature des plantes, les caractéristiques socioculturelles des usagers et un système de représentation touchant en particulier ces maladies et leurs symptômes dans la mesure où ils ne sont pas des faits "objectifs" car, toujours commandés par des jugements de valeurs et un système de croyances dans lequel l'individu est impliqué.

Cependant, les difficultés objectives à prendre en compte toutes les différentes plantes médicinales dans le traitement des maladies nous paraissent évidentes. Pour ce faire, la présente recherche se bornera à investiguer les connaissances locales et les modes d'utilisation des plantes entrant dans le traitement du paludisme et de la fièvre jaune. Nous savons pourtant que ces connaissances et processus d'utilisation ne peuvent s'élaborer en dehors de la structure sociale et du schéma de pensée sur la maladie étant donné qu'ils sont produits et marqueurs de nos systèmes sociaux de classement. C'est dans cette même configuration que Durkheim et Mauss analysent :

« La classification comme étant un ensemble d'habitudes mentales en vertu desquelles nous nous représentons les êtres, les faits sous la forme de groupes coordonnés et subordonnés des uns aux autres ; même des idées aussi abstraites que celles de temps ou de l'espace sont à chaque moment de leur histoire, en rapport avec l'organisation sociale correspondante (1903 : 229) ».

Ce qui démontre que la réalité sociale telle que l'action thérapeutique n'est pas une réalité physique ou mathématique comme le souligne Genest en ces termes : « Le système de croyances est un tout qui a sa logique propre selon chaque société et qu'il conditionne l'ensemble des comportements en matière médicale comme ailleurs (1978 : 12)».

Ainsi, la démythification de la médecine traditionnelle, occasionnée par la découverte scientifique et les progrès sanitaires qui accompagnent la mise en oeuvre d'un système médical moderne pour le traitement des maladies, entraine une utilisation corrélative des institutions de santé suivant "une interprétation socioculturelle de l'épisode pathologique". C'est en ce sens que Freidson constate que « naturellement, les individus diffèrent entre eux par leurs réponses à la douleur, les réponses à la douleur sont prévisibles à partir de l'appartenance à un groupe et les significations sociales attribuées à la douleur sont communes aux membres d'un même groupe (1984 : 279)». Ces différentes constructions sociales de la maladie et des stratégies thérapeutiques découlent essentiellement d'un niveau de connaissances et d'expériences socioculturelles et environnementales de la population locale. Et comme nous pouvons le soutenir, ces "liens de signification" ont simplement enseigné « la connaissance des maladies - pathologie externe, pathologie interne - et celle des espèces végétaux propre à assurer la guérison » (Kerharo et Bouquet : 1950 : 94).

Dans cette société médicale au model "holistique" où tout devient thérapie, le corps devient "corps social" et la médecine "médecine de la société", les connaissances et les expériences produisent ce que Freidson (1984) appelle "une culture ou une "sous culture" qui a plus de chance de donner des conceptions sur la maladie". C'est ainsi que la population locale manifeste un intérêt particulier aux plantes médicinales, plus proches et faisant partie de leur environnement immédiat. A ce titre, une place de choix leur est accordée et l'on pourrait ainsi dire que l'ensemble de la communauté est investie de la mission curative même si certains en sont des spécialistes.

La juxtaposition de la nouvelle forme "technocratique" de soins de santé primaire, se révèle sélective d'autant qu'elle s'article non pas à une approche "emic" mais à une approche"etic" de la maladie, non pas au geste symbolique, mais au pouvoir d'achat, non pas à la satisfaction morale, mais à l'efficacité. Ce dispositif fonctionnel et hiérarchique pour être admis, établit une collaboration opératoire entre les médecines à travers une "une causalité en chaine" conceptualisée des états de santé.

Cependant, les "chances" d'accès et d'utilisation de cette institution médicale dépendent des ressources monétaires immédiatement mobilisables des ménages. Autrement dit, le recours à la biomédecine est déterminé par les conditions socio-économiques de la population locale. D'où "le modelage de la santé par la position sociale".

Cette survivance des inégalités d'accès aux soins pourrait entrainer une désaffection relative du système sanitaire moderne et générer du même coup une forme d'altérité médicale dans un contexte de pluralisme thérapeutique. L'explication sociologique de cette réalité sociale (exemple de la sous-utilisation des services de santé, ou l'acte empiriste et symboliste de soin) nous invite ainsi à revisiter la "sémiologie" du paludisme, de la fièvre jaune et leurs correspondances avec le diagnostic médical tout comme les catégories sociales des utilisateurs et leurs représentations sociales de la biomédecine. En outre, il s'agira d'examiner les modes de tarification réels et les inégalités des services médicaux ainsi que la qualité des soins et des équipements qui informent la trame relationnelle entre soignants/soignés.

En somme, nous analysons les connaissances et les modes d'utilisation des plantes médicinales en tant qu'objet de production sociale dans les configurations sociales de Diarrabakôkô.

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