III- Stratégies de
conservation des plantes médicinales
La conservation des plantes médicinales entrant dans la
pharmacopée traditionnelle en générale constitue une
préoccupation majeure pour cette population rurale de
Diarrabakôkô, vu la synergie de ces qualités curatives,
magiques et alimentaires. En effet, compte tenu de son importance, la
préservation des drogues végétales entrant dans la cure du
paludisme et de la fièvre jaune est une nécessité vitale
non seulement pour les générations à venir mais aussi pour
supporter le coût direct du paludisme que subissent les ménages.
Ainsi, les données empiriques ont permis de relever certaines actions
menées par les enquêtés allant dans le sens de la
préservation des plantes médicinales, voire de la nature. Elles
varient en fonction des individus et de la nature des plantes devant lesquelles
l'homme a développé une économie du surnaturel. Parmi ces
actions, il y a l'abandon des pratiques anthropiques (coupe abusive du bois et
des organes, pratique des feux de brousses) évoqués à
62,38%. A cela s'ajoute d'autres actions comme le reboisement, la
régénération naturelle assistée à 24,75%
comme le souligne cet enquêté : « Si tu as acheté un
champ où "i macogna yrii bar a" (tu retrouves des plantesdont tu as
besoin) tu les entretiens. Couper les arbres et mettre les feux dans la brousse
on lutte contre ça aussi ». (Entretien avec B.Z, le 10/04/2012,
Diarrabakôkô)
De plus, certain enquêtés parlent de savoir
prélever à 12,87% les organes. A ce niveau, il faut dire que la
manière de prélever est assortis d'une stratégie
traditionnelle de préservation des plantes que nous pouvons observer
à travers ces propos d'un thérapeute :
Si tu coupes une racine, il faut mouiller la terre,
mélangé à du sel avant de mettre sur la partie
coupée. Ce qui permet à la racine de repousser. C'est la
même chose il faut faire si tu enlèves les écorces. Il faut
respecter l'arbre. Si tu enlèves les racines, il faut arranger le sol
parce que c'est ton "macogna yrii lo" s'il y-a quatre racines, j'enlève
deux et je laisse deux (entretien avec S.M., le 09/04/2012,
Diarrabakôkô).
Du reste, ces actions sont suivies par les agents de
l'environnement qui interdisent souvent le prélèvement abusif des
produits médicaux à juste raison car ils sont
commercialisés dans les centres urbains et cela peut entrainer une
exploitation anarchique des ressources forestières, même si
l'impact est limité. A ce sujet une herboriste de la ville de Banfora
s'exprime :
En tout cas les plantes sont bénéfiques.
Notre maison a été construite avec l'argent des plantes. Le
marché ça va, on ne vit que de ça. Avant avec ma
belle-mère nous pouvions gagner un dimanche (jour de marché)
souvent 15000 Francs CFA. Maintenant il y a beaucoup de gens qui vendent les
plantes alors qu'ils n'en connaissent pas... Il n'y a pas trop de
difficultés. La seule difficulté est que les eaux et forêts
nous interdisent souvent de couper les feuilles et même les
écorces, ils sortent souvent parler (entretien avec C.A., le 22/04/2012,
Banfora).
De ce qui précède, il reste que la
préservation des plantes ressort des stratégies éducatives
et par la sensibilisation de la pensée magique et de la croyance
populaire qui s'inscrivent dans une vision de conservation même de la
nature. Ce qui permet d'appréhender le rapport de l'homme à la
nature ou mieux au milieu physique comme un espace de pratique sociale. En ce
sens, nous pouvons conclure que non organisée dans l'avenir, le
prélèvement massif des matériaux botaniques (racines,
écorces, feuilles, tiges...) pour la commercialisation peut contribuer
à tuer les plantes. Mais, si les prélèvements
étaient limités aux seuls soins familiaux, leur exploitation
n'aurait pas d'impact sur les ressources forestières.
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