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Logiques d'aménagement d'un marché urbain ou construction du risque environnemental. L'exemple du marché de Mont-Bouët de Libreville (Gabon).

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par REGIS ARNAUD MOUNDOUNGA NZIGOU
Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis - Master de Géographie Première Année 2009
  

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1

U.F.R 3 - Territoire Economie et Société

LOGIQUES D'AMENAGEMENT D'UN

MARCHE URBAIN OU CONSTRUCTION DU

RISQUE ENVIRONNEMENTAL.

L'exemple du Marché de Mont-Bouët de

Libreville (GABON)

Option : Aménagement et Environnement

Présenté par : Sous la direction de :

Régis Arnaud M. Alphonse

MOUNDOUNGA NZIGOU YAPI DIAHOU

Professeur de Géographie

Université Paris

Paris 8, juin 2009

SOMMAIRE

2

Dédicace 4

Remerciements 5

Avant propos 6

Introduction Générale 10

Chapitre I : Le marché de Mont-Bouët dans l'espace librevillois 18

I.1 Libreville en bref 18

I.2 Le Marché de Mont-Bouët 19

I.3 Le rôle du marché de Mont-Bouët dans l'approvisionnement et la

distribution et alimentaire à Libreville 27

I.4 Perception et vision locale du marché 29

Chapitre II : Le marché de Mont-Bouët dans le secteur commercial

librevillois 32

II.1 Le secteur de la grande distribution 32

II.2 Les animateurs du marché : grossistes, détaillants et clients 36

Chapitre III : Organisation et fonctionnement du marché de Mont-

Bouët 42

III.1 Organisation spatiale et occupation du sol 42

III.2 Les infrastructures, services et situation sanitaire 46

III.3 Les équipements et installations de ventes 49

III.4 La contribution de Mont-Bouët à la fiscalité locale 56

3

Chapitre IV : Mont-Bouët un espace à risque : contraintes de

fonctionnement 60

IV.1 Un espace exigu et enclavé 61

IV.2 Un espace désarticulé et malsain 63

Conclusion Générale 74

Sigles et Abréviations

Bibliographie 78

Annexes 81

Table des matières 94

4

* Dédicace

A ma mère, Aline MABICKA YTOUCKA, pour tout l'amour, le soutien et toute l'affection dont elle ne cesse de me porter, la confiance, l'amour et le goût du travail bien fait qu'elle a su faire germer en moi

A mon père, Pierre MONSARD, mes frères disparus Cédric MBOUMBA, Gencky « Salbu » MBACKY qui m'ont été si cruellement arraché et à tous les miens que plus jamais je ne reverrais.

5

* Remerciements

- A Monsieur Alphonse YAPI DIAHOU, qui a bien voulu malgré ses nombreuses occupations diriger et permettre la réalisation de ce travail ;

- Aux enseignants, au personnel et aux étudiants du Département de Géographie de Paris VIII Université ;

- Aux différents services de la Mairie de Libreville, au sein desquels j'ai effectué mon stage de recherche ;

- Mon père, Jean-François NZIGOU MOUNDOUGA ;

- Ma belle mère, Aline KASSA épouse NZIGOU MOUNDOUNGA ; - Mon beau père, Jean Thomas MIKALA BOUSSAMBA ;

- Mes frères : Ghislain ; Frysh-Gabin ; Arnaud-Willy ; Germain ; Pacôme ; Tupe et Brice Leonel ;

- Mes soeurs : Olga-Benoîte ; Bijou Annie-Flore ; Pauline ; Chris Georgette ; Hitu-Nicole ; Marie-Paule ; Ingrid-Karla et Vanessa ;

- Mes cousins, cousines, nièces et neveux : Brunella ; Yannick ; Marnix ; Eve-Marie ; Ludwine ; Evan ; Shaïna ; Yanis Mabicka ; Chérubin ;

- Mes amis : Mick-Brice ; Aymar-Landry ; Romuald ; André-Bernard ; Evrard-Endrien ; Cyril-Marcel ; Ghislain-Clinton, Judicaël ; Jean-Noël ; Wilfried-Mymen ; les frères Le Rhun ; Horffé ; Gaël ; Myk-Renaud ; Venance ; Raphaël ; Rodrigues (Mak) ;

- Mes amies : Kavida Prisk-Jalle ; Muriel-Jesmar ; Marie-France ; Ophélie ; Thatiana ; Davie-Mariam ; Leïla ; Lauriane ; Gelsie ; Prisca ; Monique-Pétula ; Rolande-Caticia ; Marlène-Kelly ; Danielle-Sandra ; Laure-Orphila.

- A toutes les personnes qui ont de quelque manière que se soit, contribué à la réalisation de ce travail veuillez trouver ici, l'accomplissement de vos efforts.

Diboty di neny

6

7

La crise managériale des villes du Sud telle que observée aujourd'hui, n'est que l'aboutissement d'un long processus qui tire ses origines dans leurs conditions de création. Ces anciens comptoirs coloniaux transformés en centres urbains pour la plupart des cas, se développent de manière anarchique conformément à la logique selon laquelle l'occupation du sol précède la planification urbaine. Les gestionnaires des villes sont rarement des urbanistes de formation. La prise de décision généralement unilatérale, tend à satisfaire le politique et les aspirations égocentriques. La prolifération des aménagements spontanés et insalubres se présente comme un indicateur pertinent de la marginalisation des impératifs de protection de l'environnement. Le choix des sites, les études de faisabilité et d'impact environnemental, les perspectives de croissance urbaine, etc., sont autant de priorités qui, très souvent, ne sont pas prises en compte. Au lieu de réaliser des infrastructures durables et écologiquement viables, il est plutôt observé un mécanisme de construction des risques sociétaux et environnementaux en milieu urbain. L'aménagement des centres commerciaux par exemple en est une illustration concrète pouvant faire l'objet d'une étude, comme c'est le cas avec le marché de Mont-Bouët de Libreville, capitale politique du Gabon.

Unique en son genre à l'échelle nationale, le marché de Mont-Bouët spécialisé dans la vente en gros et en détail est le principal point d'acheminement, d'approvisionnement et de distribution en biens et services de la ville, du pays et dans une moindre mesure de toute la région Afrique centrale. Seulement, n'obéissant à aucun plan d'urbanisme préétabli, cet aménagement se présente aujourd'hui comme une véritable bavure d'urbanisation et un réel danger tant pour les personnes et les biens qui s'y trouvent que pour l'économie locale. En effet, édifié sur un ancien marécage, ce marché spontané édifié dans le début des années 1970 est victime des inondations dans la deuxième moitié de l'année. Cette situation est liée à la proximité de la nappe phréatique, le fort drainage de la zone, l'absence d'un système moderne d'assainissement des eaux, la réduction de la surface perméable, la situation en fond de vallée... L'inadéquation entre l'espace disponible et la croissance du marché est à l'origine d'une pression spatiale remarquable. De la précarité des installations électriques émerge un risque majeur d'électrocution et d'incendie (3 incendies ont été enregistrés depuis 2000).

L'urbanisation rapide, la crise économique, les politiques d'ajustement structurel ont contribué à modifier la problématique de l'approvisionnement alimentaire dans une ville comme Libreville. Les besoins alimentaires quotidiens de cette métropole sont élevés. Ils portent sur des produits aussi variés que les céréales, les tubercules, la banane plantain, les fruits, les légumes et les cultures maraîchères. De plus, la dépendance croissante à l'égard des importations pour certaines denrées alimentaires de base constitue un véritable problème.

Le quartier Mont-Bouët1 qui abrite le marché n'est pas uniquement un quartier résidentiel, son existence résulte d'une complexité de causes enchevêtrées, et au sein

duquel, les initiatives extérieures et la réaction des populations locales ont joué un rôle

1 Mont-Bouët est aussi bien ; le nom de l'espace étudié que celui d'un quartier de Libreville, il sera

employé ici pour désigner uniquement le marché. Son usage relatif à une entité du périmètre urbain fera l'objet d'une précision préalable.

déterminant dans sa mise en valeur. Issu au départ d'un village Mpongwé2, grossi par des apports Fang, Omyéné3 et des populations venues à la fois de l'intérieur du pays et de l'étranger, le quartier est devenu un acteur dans le développement économique, social et politique de la ville de Libreville et de ses environs voir de la sous région Afrique Centrale.

Point de convergence des circuits, des filières de commercialisation et des réseaux marchands, ce marché de gros et de détail se trouvent au coeur de l'approvisionnement et de la distribution alimentaires de Libreville. Pour s'adapter au nouveau contexte sociopolitique, les commerçants ont modifié leurs stratégies de financement, leurs comportements aussi bien à l'achat qu'à la vente et leurs rapports avec les autres protagonistes.

La situation économique dans le courant des années 1980-1990, le renforcement de ce qu'il est convenu d'appeler la crise urbaine ont provoqué la brusque aggravation d'une situation largement non maitrisée. L'échec des premiers plans structurels a par la suite gonflé les effectifs du secteur informel et plus singulièrement les effectifs des vendeurs et artisans sur le marché. La défaillance des entités de gestion de ce dernier avec en tête desquelles la Mairie de Libreville n'en est devenue que plus patente, dans la mesure où, les activités informelles sont devenues progressivement une part essentielle de l'économie de la cité librevilloise. La structure marchande à absorber ces flux aux prix de mutations brutales et violentes. Sur le terrain, cette croissance s'est traduite par une augmentation continue du nombre des dysfonctionnements au sein du marché et ont contribué dans une moindre mesure à faire du marché de Mont-Bouët : un espace à risque.

8

2 Groupe ethnique gabonais.

3 Idem.

Carte n°1 : Le Gabon carte politique et administrative

9

Source : Institut National de Cartographie 2007

10

11

Les villes africaines en général et celle de Libreville en particulier, ont toujours présenté des paysages particuliers dont les marchés d'approvisionnement et de distribution de plein air font partie intégrante. Ces derniers sont de grands centres attractifs dont la naissance et la localisation dans la ville n'est pas le fait du hasard.

Comme un peu partout en Afrique, la colonisation s'est présentée comme l'élément précurseur du développement urbain au Gabon. Il en est ainsi de la création de la ville de Libreville (1849)4, capitale politique du Gabon et chef lieu de la province de l'Estuaire. Sa population très cosmopolite est estimée à environ 460.000 d'habitants (RGPH 2005)5 sur un total national estimé à environ 1,5 million d'habitants, alors qu'elle n'en comptait pas plus de 18.500 à l'orée 1960.

Aujourd'hui, Libreville compte six marchés de référence et une multitude de petits marchés disséminés dans les quartiers. L'absence d'une planification urbaine actualisée favorise non seulement l'émergence de l'habitat anarchique, mais aussi la création des marchés spontanés et insalubres, présentant un enjeu environnemental. Il en est ainsi du marché de Mont-Bouët, qui fait l'objet de la présente étude.

Cet espace très animé, connu de tous pour son ambiance et ses couleurs, est un lieu vivant. Les discussions, les marchandages, le vacarme des déballages, les conseils et les palabres créent une atmosphère sonore bien particulière. Les couleurs inondent le marché, si bien qu'en quelques secondes nos yeux plongent du rouge vif des tomates, à la chemise en pagne du vendeur, avant de se noyer dans l'arc-en-ciel d'un étal de tissu. Le marché est également un endroit où l'on peut toucher ce que l'on achète et c'est un réel plaisir de caresser les étoffes ou de manipuler un vieil auto radio. Enfin, le marché est un ensemble d'odeurs : envoûtantes lorsque l'encens se faufile d'étal en étal, relevées quand les épices se mélangent au doux parfum des fleurs, acres comme l'odeur du poisson séché combiné à la fétidité d'un égout mal bouché...

Carrefour des mobilités, le quartier Mont-Bouët se trouve depuis sa création au coeur d'un ensemble de dispositifs économiques nationaux et mondiaux, en perpétuel remaniement, avec tous les attributs de la modernité mais ayant toutefois gardé certaines de ses fonctions d'antan ; à savoir un lieu d'échange, un lieu où l'activité économique est importante du fait de l'ajustement permanent entre l'offre et la demande et surtout du nombre considérable de transactions qui s'y opèrent. Mais si le marché est bien connu pour ses fonctions économiques, il joue également un rôle social politique et culturel essentiel du fait des liens et des relations qui se tissent entre les différents acteurs. C'est un lieu d'animation que certain, considère comme un haut lieu de sociabilité.

4 Date de la création de Libreville qui résulte de la libération des esclaves captifs de l'Elizia, navire

négrier arraisonné au large des côtes gabonaises par la flotte française qui avait à sa tête le Capitaine de vaisseau BOUËT WILLAUMEZ en 1839.

5 Recensement Général de la Population et de l'Habitat, 2005.

12

Il n'est point question dans la présente étude de ne faire uniquement l'histoire du marché de Mont-Bouët, ou de ne présenter que les aspects de son site ou encore de sa situation. Il importe ici d'analyser son évolution spatiale et de montrer que cet édifice, bien qu'ayant une emprise considérable sur l'espace grâce à ses aménagements, ses équipements, à son organisation, son fonctionnement est devenu pour les populations qui le pratiquent, avec le temps un espace à risque.

Le choix de ce sujet part d'un constat lié aux profondes mutations que connait Libreville. Ville morcelée et fragilisée d'un point de vue économique, social, urbain et souffre d'une perte de vitalité. Elle traverse également une crise politique, doublée de graves difficultés économiques. La ville connait une double explosion démographique et spatiale important et des problèmes d'aménagement. C'est pourquoi, l'organisation d'espaces dédiés au commerce s'avère d'un grand intérêt pour le pays dans la mesure où, les recettes issues des taxes et autres prélèvements fiscaux peuvent contribuer non seulement à la confection du budget municipal mais également à celui de l'Etat en tant que ressources propres et ainsi concourir à son développement.

L'étude des marchés interpelle aussi la géographie à en croire J-L Chaleard & R. Pourtier :

Il n'est guère de géographie qui ne se préoccupe aujourd'hui de la dimension politique, dès lors que les rapports entre société, espace et territoire sont placés au coeur de la discipline. Les dynamiques spatiales, tout comme leur traduction dans le paysage, ne peuvent se concevoir indépendamment des acteurs sociaux, de la volonté qui les anime, des stratégies qu'ils mettent en oeuvre et des contradictions qui les déchirent. C'est la rencontre des systèmes de pouvoir et des pulsions profondes des sociétés mêlant confusément la passion et la raison, que se noue la relation complexe entre espace et politique. Aucun paysage n'est innocent et toutes organisations de l'espace résultent d'un jeu de force s'exerçant à chacune des échelles de l'action humaine que cela soit au niveau du local ou mondial6.

Ayant pour finalité l'approvisionnement des populations qui vivent au sein et en dehors de son aire géographique d'influence, le marché de Mont-Bouët constitue le point sensible de la vie sociale et économique face à l'accroissement de cette même population. Toutefois, cette croissance pose de nombreux problèmes aussi bien d'ordres matériels que techniques et dont celui principalement de la consommation en biens et services.

Le marché de Mont-Bouët est situé dans la vallée de la Loubila7. Cet espace se particularise par sa structuration et son organisation spatiale, par son fonctionnement

6 J-L. Chaleard & R. Pourtier « Politiques et dynamiques territoriales dans les pays du sud », Publications

la Sorbonne, Paris, 2000.

7 Nom du cours d'eau qui traverse le marché de Mont-Bouët.

13

participatif et son caractère cosmopolite. Unique en son genre, ce marché principal lieu de ravitaillement de la ville, fait l'objet d'une pression environnementale conséquence de la hantise des catastrophes environnementales et sociétales à l'exemple des inondations, de la pollution et des incendies. La pertinence du problème d'aménagement posé par cette étude est surtout liée à son extrême exposition au quotidien aux risques. Et ce, sous le regard résigné des décideurs coincés entre des enjeux économiques et politiques. Si au Sud du Sahara, le marché de plein air joue un rôle clé dans les divers processus et stratégies de structuration et de socialisation de l'espace urbain, quel rôle joue celui de Mont-Bouët dans la ville de Libreville ? Quels sont les différents aléas environnementaux et sociétaux auxquels ce marché est exposé ? Quel est sa structuration, son articulation et ses mécanismes de fonctionnement ? Avec l'accroissement du nombre d'habitants et des besoins, le marché de Mont-Bouët répond t-il favorablement aux nombreuses attentes des populations qui y vivent ?

Au regard des questions qui précède nous formulons la série d'interrogation suivante :

- Quelle est l'emprise spatiale à travers les espaces bâtis, espaces non bâtis, les

équipements et les services ?

- Quelles forme, quel visage revêt aujourd'hui le marché ?

- Comment contribue t-il à façonner la ville ?

- Quelle est sa caractéristique et quelle est la place du marché de Mont-Bouët

dans le secteur commercial urbain librevillois ?

- Quels sont les critères qui ont présidé à la localisation des activités ?

- Comment se présentent les activités au sein du marché ?

- Quelles sont les spécificités de ce marché ?

- Quelles est l'état de fonctionnement des équipements sur le marché ?

- Les aménagements réalisés actuellement permettent-ils au marché de tenir sa

place ?

- Comment aujourd'hui mettre en valeur cette espace ?

- Le marché de Mont-Bouët est-il devenu pour les populations un espace à risque

sur le plan sanitaire et environnemental ?

C'est à la lumière de ces interrogations que nous entendons construire le contenu de nos investigations.

Afin d'attester des exigences d'un travail scientifique, il importe de soumettre l'élaboration de notre étude à des méthodes d'analyse. Dans notre cas, une analyse systémique est envisagée car, nous considérons le marché de Mont-Bouët comme un ensemble de systèmes dont il est pertinent d'étudier les éléments qui le constitue.

14

Ainsi, en conformité aux normes méthodologique notre travail s'est appuyé sur :

- De la recherche de documents et d'informations ; - Des enquêtes par observation sur le terrain.

La recherche de documents et d'informations nous a conduit à visité les centres documentaires ; des Universités Paris VIII et de l'UOB8, du Centre Culturel Français et des archives municipales de la ville de Libreville. Ainsi qu'auprès de la municipalité de Libreville (Services Techniques, Finances et Recouvrement, Affaires Administratives et Juridiques), de la Direction Générale de la Statistique et de la Direction des Enquêtes Economiques. Les observations sur le terrain nous ont à recueillir des informations et des impressions auprès des différents commerçants, responsables et acteurs exerçant sur le marché de Mont-Bouët.

Toutefois, la diversité de nos sources d'information n'a pas totalement répondu à nos attentes. Dans la mesure où, nous nous sommes très souvent heurté à la réticence des populations peu habituées à ce genre d'investigations et des pouvoirs publics pour qui certaines informations ont un caractère confidentiel. En plus, la vieillesse et/ou l'absence de certains documents existant ou leur caractère incomplet n'autorise pas une exploitation qui se veut rigoureuse.

Cependant, la méthode d'enquête par observation directe, la fréquentation régulière du marché, nous a facilité la compréhension de certains mécanismes et pratiques propres à l'informel, nulle part consigné dans des documents de gestion des activités commerciales. Ces expériences vécues, couplées à nos diverses sources nous ont permis d'entrer de plein pied dans notre sujet.

Aujourd'hui encore, la représentation théorique du marché et la recherche des formes les plus efficaces reste un des champs les plus actifs de la recherche en économie et en sciences sociales. Les travaux réalisés sur le marché de Mont-Bouët tentent une mise en perspective des différents modèles, méthodes, théories disponibles et des outils d'aide à la décision et proposent des formes plus efficaces de fonctionnement du marché en Afrique et plus spécialement à Libreville. Il s'agit notamment de celles menées par Bissiélou Gnélé, explorant la problématique de ce marché comme un pôle en constante évolution9 et de M. Allogo Edou, toujours sur le marché de Mont-Bouët10. Et dont les raisonnements proposés étaient les suivants :

- Prendre la dimension historique des transformations ; - Identifier l'ensemble des enjeux relatif au marché ;

8 UOB : Université Omar Bongo de Libreville.

9 Bissiélou Ngélé ; « Un pôle économique en évolution : le marché de Mont-Bouët », Mémoire de fin de

cycle, CAPES/ENS, Libreville, 1988.

10 M. Allogo Edou ; « Mont-Bouët, un espace commercial dans une économie urbaine », Mémoire de
Maîtrise en géographie, FLSH-UOB, Libreville, 2002.

- Enumérer les théories disponibles et préciser leur utilité en termes de représentation de diversité, de capacité à prendre en compte les évolutions, et des opérationnalités dans l'aide à la décision en vue de rendre le marché plus efficace et constituer des réponses aux enjeux précédemment identifiés ;

En effet, ces essais ne se limitent pas uniquement à une description des faits sans jamais les rattacher à un corpus explicatif, sur leurs origines et les facteurs de leur localisation. Ainsi, l'examen des travaux antérieurs nous amène à dégager cette hypothèse : le marché de Mont-Bouët n'offre plus aujourd'hui aux acteurs économiques de Libreville et de sa région, un espace propice au bon fonctionnement de leurs activités. Celui-ci étant devenu exigu, ne permet ni aux agents économiques, ni aux pouvoirs publics de le faire participer efficacement à la formation du PLB11 de la commune librevilloise.

En somme, notre analyse s'articulera autour de cette principale interrogation : plus de trente ans après sa mise en service, le marché de Mont-Bouët ainsi que les nombreux équipements réalisés en son sein, répondent-ils aux normes d'aménagement d'un marché urbain, ou ce dernier constitue un risque sanitaire et environnemental pour la population qui le pratique.

Nous avons organisé notre travail en quatre chapitres :

Le premier traite de la présentation de l'espace Mont-Bouët à travers sa structuration, son rôle et sa perception sur le plan local. Le second traite quand à lui de sa place dans le secteur commercial urbain. Le troisième présente l'organisation physique et le fonctionnement du marché à travers, son emprise au sol, la typologie des produits et des services. Enfin le quatrième et dernier chapitre présente les contraintes de fonctionnement qui font du marché de Mont-Bouët un espace à risque.

15

11 Produit Local Brut

Carte n°2 : La Ville de Libreville

16

Source : Carte de Libreville - Institut National de Cartographie 2007.

17

Carte n°3 : Localisation du marché de Mont-Bouët dans la ville

de Libreville

Source : Institut National de Cartographie - Libreville 1/200.000

18

Chapitre I

Le Marché de Mont-Bouët dans

l'espace Librevillois

I.1 - Libreville en bref :

Située sur l'estuaire du Komo, "la ville des libérés" qui deviendra par la suite Libreville naît en septembre 184912, suite au premiers traités signés entre l'administration locale française et les chefs coutumiers locaux désireux de donner une terre aux esclaves libérés de l'Elizia13. Cet acte marque également le point de départ à la colonisation française au Gabon, à partir du Fort d'Aumale ; et Libreville devient la capitale du Congo Français en 1888, avant de perdre ce statut au profit de Brazzaville en 1904.

Après l'accession du pays à l'indépendance en 1960, Libreville devient la capitale administrative et politique du Gabon et par la même occasion le chef-lieu de la province de l'Estuaire. Officiellement, sa population est de 578.156 habitants (2005)14. Elle est la ville la plus peuplée du pays, la capitale gabonaise regroupe plus du tiers de la population nationale sur un total estimé à environ 1.383.000 habitants (2005)15.

Avec une croissance démographique rapide et un développement assez anarchique, les infrastructures urbaines ne suivent pas souvent le rythme des constructions nouvelles. Libreville est une cité cosmopolite où se côtoient toutes les ethnies du Gabon et les populations venues de l'étranger. La ville fut administrativement divisée dans un premier temps en cinq arrondissements, puis en six depuis 1990, pour plus de cent vingt quartiers. L'ensemble forme le Grand Libreville avec, la ville nouvelle d'Owendo au sud et les nouveaux quartiers (Agondjé, Okala, Cité des Ailles ...) au nord.

Le quartier Mont-Bouët dans lequel c'est construit le marché est l'un des plus anciens de la capitale gabonaise, dont l'existence résulte d'une complexité de causes enchevêtrées.

12 Ratanga-Atoz A., Histoire du Gabon « Des Migrations Historiques à la République XVI / XX siècle »,

Nouvelles éditions Anges Ratanga-Atoz,

13 Nom du navire négrier arraisonné au large du Golf de Guinée par la marine française qui avait à sa tête

le Lieutenant de Vaisseau BOUËT WILLAUMEZ.

14 Recensement général de la population et de l'Habitat, 2005

15 Idem

19

La plus importante place commerciale de Libreville et du pays est sans nul doute le marché de Mont-Bouët dans le troisième arrondissement. Mis en service au début des années 1970, Le marché a été implanté la périphérie de ce qui était à l'époque coloniale le vieux Libreville et qui devait à l'origine être un cimetière. Il regroupe les trois symboles majeurs de la cité. La halle qui abrite le commerce des produits vivriers frais, la boucherie, la vente de poisson et l'artisanat local. Le commerce de produits agricoles locaux se fait à l'extérieur du marché, dans les cours des grands commerçants traditionnels, tandis que le commerce des articles manufacturés se fait dans les comptoirs des maisons et compagnies de négoce ceinturant le marché. Fonctionnant à la fois comme marchés de gros et de détail, il se trouve au coeur des réseaux de distribution et redistribution ou d'approvisionnement alimentaire, des biens et services pour les populations de Libreville et de ses alentours. Le marché de Mont-Bouët est devenu avec les années le véritable point de convergence et/ou de divergence des circuits et des filières de commercialisation et des réseaux marchands.

I.2 - Le marché de Mont-Bouët

La présentation du marché de Mont-Bouët nous amènera à explorer sa structuration, au sein de laquelle on se doit d'étudier en premier lieu le site puis la situation du marché. Nous examinerons par la suite les différentes infrastructures commerciales.

- Le Site

Le relief du quartier Mont-Bouët est très accidenté, les dénivellations sont très marquées. Il se compose essentiellement d'éperons qui dominent la vallée marécageuse du bassin supérieur de la Liboula16 ; la végétation y est surtout composée d'arbres fruitiers (manguiers, avocatiers, cocotiers, etc.), dans les fonds alluviaux poussent des plantes ligneuses.

Le marché qui couvre une superficie d'environ 4 ha, est construit dans la partie la plus encaissée et la moins large de la vallée marécageuse de la Liboula. Il est limité à l'Est par la petite voie d'"un peu de tout" qui borde le parc de loisir les "Jardins de La Peyrie". Cette voie rejoint le Boulevard des Frères de Bruchard qui constitue sa limite Nord ; à l'Ouest et au Sud le marché est bordé par la rue du Sergent Bivouli et celle de l'Évêque Ndong (carte n°4).

- La Situation

Comme tout marché en Afrique, celui de Mont-Bouët a pour vocation la distribution des biens et des services pour le citadin librevillois.

16 Nom de la rivière qui traverse le marché

20

Le marché est le lieu le plus fréquenté de la capitale. Il est entouré de quartiers fortement réputés tels que la Sorbonne au Nord, Petit Paris à l'Ouest et au Sud-est. Au Nord-est se dresse le quartier Mont-Bouët, qui lui vaut son nom, et dans lequel il s'est implanté.

Le marché de Mont-Bouët occupe une position relativement nodale : il est pour ainsi dire, à la rencontre des principales voies de communications de la ville, ainsi que de la Route Nationale reliant à partir de la Gare Routière, la capitale au reste du pays. Sur le plan administratif, le marché de Mont-Bouët est situé dans le troisième arrondissement de Libreville et correspond au lotissement K.B du plan cadastral. Il occupe une position centrale dans la ville, situé à mi-parcours des quartiers d'affaires, administratifs, résidentiels et populaires. Le marché de Mont-Bouët a aujourd'hui débordé de ses limites et de son site originel, il s'étend jusqu'aux abords immédiats des Jardins de La Peyrie, de la Gare routière et au-delà des carrefours Léon MBA et Petit Paris (Image n°1, carte n°2 & 3).

Le plus grand marché de Libreville est localisé dans un quartier anciennement urbanisé dénommé comme le marché central, même s'il n'est pas plus situé au centre géographique de la ville actuelle, il réuni en son sein le nombre le plus important de commerçants, ceux dont les gammes de produits et les services sont les plus étendues. Le rayonnement de ce dernier dépasse de loin la seule clientèle locale, il atteint la région ; le pays tout entier voir la sous région Afrique centrale.

Carte n°4 : Le marché de Mont-Bouët et ses limites

21

Source : Carte de Libreville - Institut National de Cartographie 2007 Réalisé par : Régis Arnaud Moundounga

22

Image n°1 : Le Marché de Mont-Bouët

Source : Image Satellite du marché de Mont-Bouët Google Earth : le 25 novembre 2007

23

I.2.1 - Les constructions

Plusieurs raisons peuvent justifier la localisation des infrastructures au sein du marché. Toutefois, la raison fondamentale reste celle liée à la volonté des nouveaux commerçants d'exercer leurs activités dans un cadre nouveau pour l'époque et proche du centre de décision.

Rappelons que le marché de Mont-Bouët à son inauguration en 1973 était composé d'un seul bâtiment. Aujourd'hui il en comprend plusieurs. Le bâtiment central (image n°2) autour duquel s'est organisé le marché, s'élève sur deux niveaux et couvre une superficie totale de plus de 7.000m2. Cet ensemble s'est révélé très vite exigu par la demande toujours croissante en place, la Mairie de Libreville et celle du troisième arrondissement firent construire de nouveaux hangars, pour une capacité de 400 places. Toujours devant la pression, il a été décidé en 1985 de la construction de 13 auvents, destinés à accueillir les commerçants n'ayant pas obtenu de places sous les hangars. A cette même époque furent construites également 205 boutiques pré financés par les commerçants eux-mêmes.

La municipalité s'est efforcée dans un souci de désengorgement, d'aménager des espaces à l'extérieur du marché destiné à la vente de produits à bord de camions ou réservés à la circulation. Ces espaces sont aujourd'hui envahis par les commerçants dont la plupart sont des ambulants. L'effort d'équipement n'est pas le fait seulement de la municipalité, des partenariats et des conventions ont été signés entre la Mairie de Libreville et certains prestataires de service privés dans l'optique de construire de nouveaux bâtiments au sein du marché sous la forme de « bail de location » sur une période déterminé à l'avance. C'est le cas des grandes enseignes de poissonnerie, de boucherie, de grossistes et d'unité de stockage qui ont établi leurs magasins en dehors du bâtiment principal. Ce sont de grands magasins avec des équipements modernes (chambres frigorifiques, espaces de stockage, etc.) tel : SODUCO, Pêcherie Nouvelle, SAGAPEA, SOFRIGAB, etc.

Hors des murs d'enceinte du marché, les principaux commerces sont aménagés dans des locaux "en dur". Ces bâtiments appartiennent à des particuliers qui les louent à des commerçants.

I.2.2 -

Le souci des commerçants de rester près de leur activité fera naître à Mont-Bouët le phénomène d'habitat jointif accentué par la poussée de l'activité commerciale. Nous avons constaté au cours de nos enquêtes sur le terrain la présence d'un grand nombre de constructions dans le quartier appartenant à des commerçants d'origine étrangère, qui

24

tendent à investir sur l'ensemble des bâtiments autour du marché. Les pièces donnant sur les rues servent de magasins et l'arrière boutique de résidence.

Image n°2 : Vue extérieur du bâtiment central

Rond point du marché de Mont-Bouët novembre 2007 Cliché réalisé par : Régis Arnaud Moundounga

25

I.2.3 - Les critères économiques

En dehors de la loi Minko17 qui avait pour but de procurer des avantages non négligeables à certains commerçants par leur implantation qui se traduisait par de nombreux magasins d'import-export. On peut encore citer comme raison fondamentale à la localisation des infrastructures commerciales de Mont-Bouët, la centralité du site se caractérisant par sa fonction de carrefour. En effet, le marché, est situé à la jonction des grands quartiers populaires et du centre administratif de la commune de Libreville. Le quartier exerce ainsi, une énorme attraction sur l'ensemble des opérateurs économiques de Libreville, de ses environs voire même au-delà.

Les commerçants sont en plus attirés par les "énormes" retombées financières que le marché leur permet de réaliser. Cette situation a entraîné une croissance du nombre de demande pour des places sur le marché, la multiplication et la prolifération des stands autour du hall central et/ou de ses annexes.

À Libreville, depuis 1990, les pouvoirs municipaux se sont peu à peu retirés de la production urbaine. La Mairie a signé un ensemble de convention et a confié une partie de la gestion des marchés à des sociétés et des prestataires privés contre 45 à 60% du versement de leurs recettes (exemple : MU.CO.GAB18, E.N.S.G19 (nettoyage et gardiennage), Garden Market Service (gardiennage)). C'est désormais le secteur privé qui prend en charge certains travaux d'aménagement dans le quartier Mont-Bouët, notamment ceux des infrastructures commerciales. Aujourd'hui, les concessions au secteur privé de la réalisation et de la gestion des projets sur le marché se généralisent et se déclinent de différentes façons : les entrepreneurs privés construisent ou réaménagent des bâtiments sur le périmètre du marché et s'occupent de la gestion de façon personnelle et autonome. Des chefs de secteurs sont désignés, ces derniers gèrent les secteurs du marché qui leurs sont octroyés (Image n°3) en étroite collaboration avec les différentes associations de commerçants, comme par exemple les coopératives des femmes qui sont autant d'acteurs privés qui interviennent dans les modes de gestions du marché.

Cependant, l'association privé/public est de plus en plus revisitée au profit de nouveaux partenariats plus complexes. La tendance actuelle est à la gestion semi-privée, où collectivité locale et partenaires privés s'entendent sur le financement, la construction et la gestion du marché. L'entrepreneur désigné s'occupe d'engager les frais nécessaires à la construction et qui deviendra la propriété de la collectivité en fin de bail. Le bail emphytéotique avec convention d'exploitation arrête les modalités de la réalisation et de la gestion qui prennent des formes variées et un degré d'autonomie variable d'une convention à l'autre20.

17 Loi n°77/80 du 26 novembre 1980 instituant le bail de construction dite « Loi Minko » (cf. Annexe)

18 Mutuelle des Commerçants au Gabon.

19 Enseigne de Nettoyage de Surveillance et de Gardiennage.

20 Loi Minko

26

Cependant, certains de ses prestataires détourne à leur profit les allées du marché pour soit disant répondre aux exigences de la municipalité.

Image n° 3 : Les activités à Mont-Bouët.

Image satellite du marché de Mont-Bouët novembre 2007 Google Earth : le 25 novembre 2007

Légende :

A : Grand Hall

B : Hangar

C : Ciel Ouvert

D : Marché aux
bestiaux

E : Magasins et
enseignes
d'import-export

Boucherie

Vêtements

Légumes

Volailles et
autres animaux
de basse cours

 

Poissonnerie

Autres

(outillage, bazar, etc.)

marché
artisanal

Cages

 

Autres produits
et denrées
alimentaire

 

vente au détail

 
 

Source : AUVIL 2007

27

I.3 - Le rôle du marché de Mont-Bouët dans
l'approvisionnement et la distribution et alimentaire à

Libreville

Le rôle que joue le marché de Mont-Bouët dans ces circuits et la hiérarchisation ou la spécialisation des places et des secteurs se dessinent dans l'armature commerciale et varient selon les produits considérés : vivriers ou manufacturés.

Suivant les fonctions qu'il remplit dans les différents circuits d'approvisionnement et de distribution en produits, on distingue à Mont-Bouët deux types de marché urbain :

I.3.1 - Un marché d'approvisionnement et distribution

C'est celui où opèrent les grossistes. Ainsi, le marché d'approvisionnement et de distribution fonctionne comme un tout : à la fois "marchés de gros" et "marchés de détail". Il représente le lieu d'articulation par excellence entre les circuits locaux, nationaux et internationaux. Pour son approvisionnement, il draine les productions et les marchandises bien au-delà des frontières nationales, sa clientèle se composant aussi bien des revendeurs détaillants, locaux et étrangers, que de l'ensemble des consommateurs urbains. Il assure souvent une fonction de réexpédition pour des villes ou des marchés éloignés.

Quatre facteurs le caractérisent comme place de gros prééminente :

- le nombre élevé de commerçants ;

- la gamme étendue de produits sur laquelle ils interviennent ; - des tonnages commercialisés importants ;

- la permanence des flux de ces produits sur toute l'année.

I.3.2 - Un marché de consommation

Sous le nom de marché de consommation sont regroupés les secteurs du marché, officiel et spontané, il s'agit toujours des marchés de détail.

Le marché d'approvisionnement et de distribution structure l'espace urbain sur un réseau de centres de décision commerciale qui présente les caractéristiques suivantes :

- un réseau qui n'est pas figé dans le temps et qui selon les saisons, le type de produit exposé et leur origine géographique se modifient. Le nombre de détaillant qui y exerce augmente ou au contraire diminue ;

28

- une forte "volatilité" des places de marchés où opèrent les détaillants. Ceci concerne surtout les marchands qui exercent à l'extérieur du marché, dans des conditions très précaires, en particulier sur la chaussée ;

- une hiérarchie des secteurs très différents selon les filières de produits.

I.4 - Perception et vision locale du marché21

En Afrique en général et au Gabon en particulier, la vie communautaire a longtemps été construite sur des échanges. Dans la mesure où l'individu a des besoins qu'il ne peut, à lui seul satisfaire. C'est pourquoi, bien qu'étant de prime abord et par définition un espace dédié au commerce et aux échanges, le marché de Mont-Bouët est aussi perçu par la population librevilloise comme :

I.4.1 - Un espace de socialisation et un cadre de convivialité

Le marché de Mont-Bouët est par excellence le plus grand lieu de rassemblement pour les populations librevilloise. C'est un lieu ouvert à tous, il vise à briser la solitude, signe d'une asociabilité, et donne à chaque individu la possibilité de nouer des contacts les plus divers avec les autres membres de la communauté. Il est un espace de communication intense où chacun peut assumer, au contact des autres, la plénitude de son humanité. Nous pouvons donc conclure que le marché, c'est le monde, dans la mesure où ce dernier est vivant.

C'est le lieu où l'on vient parce que tout le monde voit tout le monde. De par son organisation spatiale, le marché prend en compte la représentativité de toutes les cultures parce qu'il est un bien commun et nous attestons par notre présence au marché notre existence. On peut aller au marché sans avoir quoique ce soit à acheter ou à vendre. On y va pour parler aux autres, pour échanger. Une des premières denrées ou marchandise du marché est la parole. Cette parole qui crée, conforte dans sa situation sociale, crée la de chaleur humaine et donne envie d'être avec les autres, donne envie de vivre. A travers le marché on teste son existence sociale.

La présence physique, massive, constitue le premier point de la socialisation parce qu'il est évident qu'en tant qu'êtres humains, ces personnes ne peuvent se retrouver sans communiquer. C'est le lieu pour tous et il n'y a pas d'exclusion.

29

21 J-P. Guingane : Conférence débat « Le marché africain comme espace de communication », Place et

fonction socioculturelle du marché africain, Montpellier, mai 2001

30

I.4.2 - le marché est symbole de puissance et de prospérité

du pays.

La capacité de mobilisation du marché traduit la puissance des autorités locales et la prospérité de la région voire même du pays. Le marché n'attire que s'il est "bien géré" et si les gens y trouvent la sécurité pour eux-mêmes et leurs biens. Cela signifie que derrière chaque marché il y a une autorité dont la puissance est proportionnelle souvent à la taille du marché. Souvent, cependant, la notoriété du marché peut dépasser celle du pouvoir local et même favoriser celui-ci.

Le marché est aussi symbole de prospérité puisqu'il est l'indice économique local le plus visible. Le nombre et la qualité du public qui le fréquente traduisent la variété et la qualité des produits mis en vente, mais signifie aussi le plaisir qu'on y prend.

Le marché est une des plus vieilles institutions de la société africaine et la fonction économique est la première et bien sûr la plus visible, dans la mesure où on va au marché se procurer les choses dont on a besoin. C'est le lieu par excellence de la circulation et de la consommation des produits. Toutefois, dans la société traditionnelle, cette consommation est souvent réglementée par la morale sociale. Pour les populations qui s'y rendent le marché n'est rien d'autre que la mise en pratique des valeurs sociales, culturelles et traditionnelles de ceux qui l'organisent et des populations qui le pratique.

I.4.3 - La fonction socioculturelle du marché

En raison du besoin très enraciné chez l'homme de communiquer et d'échanger, le marché est une des plus vieilles institutions de la société africaine. C'est au marché que les populations allaient donner et se tenir informer des nouvelles du pays, des amis, des parents. En somme, vivre c'est donc aller au marché. Et si on cesse d'aller au marché c'est qu'on est mort. Le rapport de l'homme au temps constitue un des facteurs les plus importants de la spécificité culturelle. Le rythme de la vie et la manière d'organiser son existence sont fonction de la conception que l'on se fait de la mort qui peut être perçue comme une fin ou comme une transition vers un autre monde

I.4.4 - La fonction esthétique et artistique

31

Le marché est le lieu où se déroule la plus grande exposition de produits agricoles et artisanaux ; il est aussi celui de la plus grande exposition de l'art vestimentaire, et d'art culinaire. Il est un par excellence un phénomène social d'importance. C'est pour cela que nous considérons que le marché est certainement une des meilleures expressions, sinon la plus vivante de la culture et des traditions africaines en générale et gabonaises en particulier. C'est un haut lieu de l'existence humaine qui mérite une attention particulière de la part de tous ceux qui ont la responsabilité de la gestion de la politique culturelle, mais aussi des chercheurs que nous sommes.

32

Chapitre II

Le marché de Mont-Bouët dans le

secteur commercial librevillois

Le marché de Mont-Bouët reste à ce jour, le lieu où s'approvisionne la grande majorité de la population librevilloise que ce soit en bien et services, en produits manufacturés ou vivriers.

II.1 - Le secteur de la grande distribution

Le secteur de la grande distribution fournit à la population librevilloise la plus grande partie de son approvisionnement en produits alimentaires, en produits manufacturés. Il se compose essentiellement des filiales de sociétés d'import-export tel : (SODUCO, Pêcherie Nouvelle, SAGAPEA, SOFRIGAB, etc.)22, et qui interviennent principalement dans deux directions :

- l'importation et la distribution de biens d'équipement, outils agricoles, pièces détachées, matériaux de construction, etc. ;

- la distribution de produits de consommation courante grâce à l'ouverture, dans le périmètre du marché de supérettes très fréquentées.

Ce secteur est issu des anciens circuits marchands qui ont façonné l'organisation des échanges en Afrique depuis la période précoloniale. Organisant à l'origine les échanges entre des aires de production complémentaires (produits de la forêt comme la cola, contre d'autres produits de la zone soudano-sahélienne comme le natron23, le poisson séché, le bétail, etc.), ces échanges se sont ensuite accrus pendant la période coloniale et plus encore durant les décennies suivantes, afin de répondre aux exigences de ravitaillement des "troupes" et de la ville naissante en céréales, viande, oléagineux principalement. Progressivement, les marchands africains ont saisi les nouvelles opportunités commerciales de la collecte des « produits du cru » (karité, arachide, huile de

22 Grandes enseignes et magasins d'import-export.

23 Carbonate de sodium naturel hydraté, se présentant sous forme de cristaux blancs et servant à fabriquer

du papier, du savon et divers médicaments (sel).

33

palme, etc.), d'abord comme sous-traitants des grands comptoirs libano-syriens, ensuite pour leur propre compte, comme exportateurs.

Après lecture d'enquêtes antérieures sur les marchés librevillois, nous avons constaté que beaucoup de commerçants exerçant à Mont-Bouët sont pour certains les descendants de ces anciennes lignées marchandes. Ils se sont organisés en réseaux solidement structurés, reposant à la fois sur des rapports de parenté et de clientèle. Le "capital relationnel", en d'autres termes, le nombre de dépendants, qui peut être mobilisé à leur profit par ces "patrons de commerce" est une condition-clé de leurs stratégies commerciales et donc de leur réussite.

La diversification des risques entre plusieurs activités (commerce des produits agricoles, transport, importations de marchandises générales, etc.) est l'une des principales caractéristiques de la pratique entrepreneuriale de ces commerçants. Ces réseaux marchands ont des champs géographiques d'intervention multiples. Ils opèrent aussi bien à l'échelle locale, régionale que nationale (Grégoire et Labazée, 1993)24. Ils mettent en oeuvre simultanément des circuits officiels et des circuits parallèles à cheval sur plusieurs pays, « jouant des différences de politiques économiques suivies par les États, de leur appartenance à des zones monétaires distinctes, du prix et de la disponibilité de ces marchandises de part et d'autre de ces frontières » (Egg et al. 1988).

Ces grandes enseignes sont les principaux fournisseurs des revendeurs au sein du marché en produits manufacturés et en denrées alimentaires (riz importé, farine, sucre, poison, viande, etc.). Ces grandes enseignes ont aussi maintenu un rôle déterminant dans les circuits de commercialisation des céréales locales et, à ce titre, elles sont les fournisseurs privilégiés, à certaines périodes de l'année, des grossistes des marchés, non seulement celui de Mont-Bouët mais aussi des autres marchés de la ville.

II.1.1 - La petite distribution

Il s'agit de l'ensemble des petites entreprises commerciales de la ville répertoriées ou non par la Chambre de commerce : boulangeries, quincailleries, librairies-papeteries, commerces alimentaires, etc. Ces entreprises ont peu de rapports économiques avec les commerçants des marchés. L'essentiel de leur clientèle se recrute parmi les ménages salariés du secteur public et privé.

24 E. GREGOIRE & P. LABAZÉE (1993) : « Grands commerçants de l'Afrique de l'Ouest : Logiques

et pratiques d'un groupe d'hommes d'affaires contemporains », Paris, éd. (Karthala/Orstom), 265 p.

34

II.1.2 - Le dynamisme du commerce informel

Mont-Bouët est devenu pour Libreville, le centre privilégié de groupage et d'éclatement de produits manufacturés acheminés par les multiples circuits animés tant par les réseaux fortement structurés des grandes enseignes de commerçants que par les "petites entreprises contrebandières" (Grégoire et Labazée, 1993)25 (détaillants des marchés, petits trafiquants et "aventuriers" des villes). C'est essentiellement pour ces produits que se pressent autour des boutiques et des étals les consommateurs urbains, les producteurs des régions voisines, les commerçants et les colporteurs étrangers venus chercher auprès de leurs logeurs des lots de pagnes, de tissus, de friperie, de pièces détachées, etc.

Aussi distingue-t-on nettement deux sous-secteurs dans l'activité des marchés :

- celui des commerces de produits manufacturés dont le développement économique est le plus dynamique. Il réalise les chiffres d'affaires les plus élevés et occupe la plupart des constructions récentes, en dur et de bonne qualité, que l'on observe sur le marché. En moins d'une dizaine d'années, il a envahi la majeure partie de l'espace public. Ce faisant, il a "repoussé" à l'extérieur du marché une grande partie du vivrier. A ce sous-secteur, il faut rattacher, du point de vue du dynamisme commercial, les commerçants des grandes enseignes de denrées alimentaires importées ;

- celui des commerces de produits vivriers, dans lesquels la micro-activité est la forme commerciale généralisée avec des revenus souvent faibles. Le commerce du vivrier de détail, en effet, appartient presque tout entier à ce vaste secteur informel qui permet, en fournissant aux femmes ressources et emplois, à la très grande majorité des ménages urbains de survivre.

Les commerçantes de produits vivriers occupent les secteurs souvent les plus dégradés du marché, ceux qui cristallisent tous les dysfonctionnements : surconcentration, enclavement, manque d'hygiène, bâti vétuste à la limite du dangereux. Quant à la rue, elle accueille aujourd'hui non seulement les petits détaillants progressivement refoulées hors du marché par les vendeurs de produits manufacturés, mais aussi, en nombre toujours plus grand, des grossistes de produits vivriers.

Le secteur informel, hormis ses performances, constitue un des piliers de la stabilité sociale. En raison non seulement des revenus qu'il génère mais aussi, des emplois qu'il crée et des besoins sociaux des populations urbaines aux revenus modestes qu'il

25 E. GREGOIRE & P. LABAZÉE (1993) : « Grands commerçants de l'Afrique de l'Ouest : Logiques

et pratiques d'un groupe d'hommes d'affaires contemporains », Paris, éd. (Karthala/Orstom), 265 p.

satisfait à travers l'accessibilité aux prestations et surtout la prise en compte des réalités socioculturelles de toutes les composantes de la société.

Les comptages effectués sur le terrain durant les mois d'octobre et novembre 2007 ont permis de répertorier de nombreuses d'activités liées au secteur informel sur le marché de Mont-Bouët que cela soit dans le commerce, les transport, les services, ... : bijouterie, filage, menuiserie, poterie, vannerie, tissage, travail des métaux, briqueterie, fabrication de chaussures, électricité, maçonnerie, plomberie, peinture, puisatier, tâcheron, transport motorisé de personnes et ou de marchandises, boutiques, "commerces spécialisés", restaurants, tissus, produits alimentaires, médicaments, pharmacie artisanale, matériaux de construction, électroménager, papeterie, blanchisseurs, cireurs, coiffeurs, cordonniers, domestiques, hôtellerie, restauration, marabouts et féticheurs, photographes, soins esthétiques, location de voitures, tailleurs, agences immobilières, débiterie, centres dactylo, secrétariat public, teinturerie, vendeurs de thé, café et eau, réparation automobile, montres, radio, télévision, téléphonie, etc.26

35

26 Cette liste n'étant pas exhaustive, la catégorie se termine par etc., afin de le montrer.

36

II.2 - Les animateurs du marché : grossistes, détaillants et

clients

La classification des marchands, des commerçants et la distinction entre grossistes, demi-grossistes et détaillants n'est pas évidente. La typologie est encore plus complexe pour le commerce des produits vivriers, dans une ville où il est très difficile de savoir quelle proportion de la population pratique cette activité.

Il y a à Mont-Bouët deux types de marché ; le marché du "dedans" qui possède une structure, des équipements, une gestion pour accueillir les commerçants "légaux" c'est-à-dire ceux qui ont payé leur emplacement, et le marché du "dehors" qui s'étend dans les rues avoisinantes et qui rassemble des vendeurs qui n'y sont pas autorisés. Nous avons pu y dénombrer tout un panel d'activités de "débrouille".

L'occupation "illégale" et anarchique est beaucoup plus importante dans la ville africaine en générale, le marché s'étale de façon tentaculaire dans toutes les rues adjacentes. Ainsi, dans la commune de Libreville, le marché est cerné par une zone de boutiques, de baraques, de tables, d'étals, d'échoppes et autres cantines si bien que le quartier tout entier voire une importante partie de l'arrondissement est devenue le marché. La congestion des marchés par des vendeurs ambulants "illégaux", et selon Thierry Paulais et Laurence Wilhelm « les vendeurs ambulants ont toujours fait partie du « paysage » des marchés »27. Le secteur informel est devenu le premier secteur générateur d'emploi et le nombre d'emplois ne cesse d'augmenter. Jeunes déscolarisés, fonctionnaires reclassés, retraités, nouveaux migrants des campagnes et des pays alentours viennent grossir les effectifs de ce secteur. Cependant, l'ensemble des commerçants situés à l'extérieur du marché sont tout de même taxés par la municipalité, puisqu'ils occupent l'espace public. La limite entre le marché et l'espace public est difficile à distinguer, autant que celle entre le formel et l'informel.

L'importance du marché, du point de vue du nombre de commerçants, est donc à géométrie variable du fait de la présence des vendeurs à la "sauvette", mais aussi du point de vue de l'organisation spatiale. En effet, certains jours de la semaine, le marché peut agrandir l'espace de vente initial.

À Libreville comme cela est le cas ailleurs, le marché de Mont-Bouët constitue une "microsociété" et les commerçants y sont très nombreux et très différents. Tout d'abord on distingue les grossistes, les demi-grossistes et les détaillants ou encore les "journaliers", présents tous les jours et à la même place. Sur le marché de Mont-Bouët, la grande majorité des commerçants sont des journaliers qui au soir tomber stockent leurs marchandises sur place à l'exemple des vendeuses de tissus qui possèdent de grandes cantines en fer ou dans des entrepôts.

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37

38

Les forains ou vendeurs à la "sauvette", sont des personnes qui exercent sur le marché avec ou sans autorisation et qui ne paient pour la plupart ni taxes, ni patentes c'est-à-dire des commerçants sédentaires ou non, qui vont de place en place et de secteur en secteur à l'intérieur ou en dehors du marché. Certains sont plus ou moins assidus et c'est justement cette rigueur qui permet d'obtenir un emplacement "fixe" sur tel ou tel secteur.

Que l'on soit journalier ou forain, les places sont attribuées en fonction de différents critères (par exemple l'ancienneté d'inscription au registre du commerce), toutefois, la « préférence étrangère » est aussi un critère d'attribution. Bien qu'à Mont-Bouët, la priorité soit officieusement donnée aux ressortissants gabonais.

Le secteur informel alimentaire présente de nombreux atouts et vise à atténuer une situation de déséquilibre grâce à la participation communautaire au processus de production. Par ailleurs, ce secteur est un domaine dans lequel les femmes exercent une fonction de quasi-monopole. Ceci n'est pas le fruit du hasard mais celui de l'inégalité et de la discrimination en matière d'accès à la formation technique, professionnelle et à l'emploi. Ainsi, sur le marché de Mont-Bouët, les femmes représentent 67,4% du nombre total des commerçants (formel et informel), contre 32,6% pour les hommes. Elles jouent donc un rôle considérable dans les circuits de production et d'approvisionnement. Facteur d'adaptation aux revenus et contraintes alimentaires du milieu urbain, le marché dans son évolution reste étroitement lié à la croissance urbaine. Permettant une consommation à coût modéré, il n'aboutit pas pour autant à une situation d'indépendance alimentaire28.

II.2.1 - Les grossistes et demi-grossistes

Sur le marché de Mont-Bouët, les grossistes sont pour la plupart des collecteurs traitant des quantités illimitées de produits. Dans le commerce de céréales, en particulier pour les produits secs et les tubercules, d'après nos recherches et enquêtes sur le terrain, la majorité des grossistes commercialise en moyenne entre (60-90 tonnes/an). Une minorité peut intervenir sur plus d'une centaine de tonnes par an.

A Mont-Bouët, sur le marché au manioc, tubercule, taro et autre féculent les ordres de grandeur sont sensiblement les mêmes : sur 20 grossistes environ, quelques six d'entre eux commercialisent entre (100-300 tonnes/an), la plupart ne dépassant pas les 80 tonnes et cela en fonction des saisons.

L'enquête générale sur les grossisses à Mont-Bouët permet de se faire une idée sur le volume moyen d'activité de ces commerçants dans des villes assez différentes : par exemple, sur les marchés librevillois, les grossistes de produits secs et féculents traitent

28 L. Wilhelm, « Les circuits d'approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés

en Afrique et Madagascar », FAO 1997

moins d'une tonne par jour, en moyenne entre 0,4 et 0,7 tonne. Ce ratio moyen dans le commerce des produits secs, des tubercules et des fruits (produits majoritairement commercialisés par les grossistes hommes), nous donne une idée assez concrète du volume d'activité de la majorité des grossistes exerçant sur les marchés de distribution terminale des grands centres urbains.

La maîtrise des débouchés est le principal souci des grossistes car la rapidité de rotation des expéditions en dépend. Ils se déplacent peu, ne possèdent pour certains pas de véhicule, utilisent les services de collecteurs ou achètent aux paysans qui se rendent sur les marchés en convoyeurs de leurs récoltes. La collecte étant longue et coûteuse, ces derniers cherchent à limiter au maximum leurs dépenses et leur temps. Le coût du stockage, du transport, ainsi que les risques de pertes impliquent que l'écoulement soit d'autant plus rapide que la collecte a été longue

En ce qui concerne les produits périssables (produits maraîchers) et semi-périssables (manioc, féculents), les quantités traitées par les grossistes collecteurs sont beaucoup plus variables.

A l'étranger sur de très grands marchés comme celui de la ville de Dakar ou d'Abidjan par exemple, les grossistes collecteurs de produits maraîchers traitent également environ une tonne par jour voir plus. Mais, l'essentiel de ces opérateurs commercialise des volumes nettement plus limités, entre 600 et 800 kg par jour. Ces grossistes collecteurs sont en général en contact étroit avec les zones de production29.

Nous avons pu constater sur le terrain que de nombreuses femmes pratiquent cette activité dans le but de participer à leur manière à la conception du budget familiale. Elles assurent la recherche du produit (et souvent sa récolte), son groupage, son chargement, la recherche du véhicule et le convoyage des produits fragiles, ne disposant pas de réseau de commercialisation ni souvent de structures d'accueil, elles cherchent à assurer la sécurité de leurs débouchés par des réseaux courts, intégrant détaillantes, gros consommateurs et transformatrices.

II.2.2 - Les détaillants

L'activité des détaillantes est principalement conditionnée par l'extrême faiblesse de leur capital commercial. Les quantités pouvant être journellement commercialisées sont de ce fait toujours très limitées. En conséquence, le détaillant est fortement dépendant des possibilités de crédit accordées par le grossiste, ce qui l'empêche de jouer entre plusieurs fournisseurs selon les saisons ou l'état du marché, pour pouvoir obtenir le « meilleur prix ».

29 L. Wilhelm, « Les circuits d'approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés

en Afrique et Madagascar », FAO 1997

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Le transport urbain intermarché représente un coût particulièrement élevé dans l'ensemble des frais de redistribution, et ceci en dépit du développement dans la ville de moyens de transport (mécanisés et surtout non mécanisés : pousse-pousse, charrette, etc.) adaptés précisément aux faibles quantités commercialisées par les détaillantes de produits vivriers. Par conséquent, une bonne partie du transport se fait encore par portage (soit par la détaillante elle-même, soit par porteur), ce qui limite encore les quantités pouvant être commercialisées.

A la vente, l'activité du détaillant est soumise à une double contrainte: celle de la concurrence d'innombrables autres marchandes, en particulier de tous les vendeurs et revendeurs à la sauvette, et celle des possibilités financières réduites de sa clientèle.

II.2.3 - La municipalité

Que ce soit à Libreville comme c'est le cas dans de nombreux pays, le marché relève de la compétence municipale, aussi bien pour l'aménagement et l'entretien que pour le recouvrement des droits de place. L'intervention de la municipalité en matière d'organisation recouvre principalement quatre fonctions :

- l'attribution des places et le recouvrement des taxes sur le marché ;

- le règlement du marché ;

- les aménagements complémentaires (constructions) ;

- les services et l'entretien.

Les services administratifs impliqués :

- les services techniques généraux de la Mairie en application des délibérations du Conseil municipal (attribution des places par exemple) ;

- les services techniques qui ne s'occupent que de façon marginale de la gestion des équipements marchands ;

- le receveur municipal pour le recouvrement des taxes est ;

- d'autres services, comme les services d'hygiène et la Police municipale, sont aussi appelés à intervenir dans le fonctionnement des équipements marchands à Mont-Bouët.

Nous avons pu constater à Mont-Bouët qu'en matière d'aménagement et d'entretien, les interventions de la municipalité sont en général très limitées par le manque de moyens techniques et financiers et ce malgré les conventions signées avec des sociétés de nettoyage30 : un bâti très souvent vétuste en certains endroits, des équipements sanitaires déficients, voire absents et, de façon générale, l'assainissement du marché reste insuffisant.

30 Sovog : Société de Valorisation des Ordures Générales.

40

II.2.4 - La clientèle

Le comportement de la clientèle librevilloise reste dominé par des habitudes de consommations traditionnelles, c'est pourquoi la grande majorité de la population s'approvisionne au marché que cela soit à Mont-Bouët ou dans l'un des marchés que compte la capitale gabonaise. Même si on note dans la ville la présence de centres commerciaux modernes (image n°5).

Image n°4 : Vue d'ensemble des détaillantes à Mont-Bouët

Intérieur du marché de Mont-Bouët : annexe de la grande halle Cliché : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre 2007.

Image n°5 : Centre commercial à Libreville

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Centre commercial "Mbolo" Géant Casino de Libreville Cliché : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, septembre 2008.

42

Chapitre III

Organisation et fonctionnement du

marché de Mont-Bouët

Dans ce chapitre il sera question d'examiner, en premier lieu l'organisation du marché à partir du bâti et de son emprise au sol. Dans un second temps nous présenterons le fonctionnement du marché à travers les équipements, les infrastructures commerciales, la typologie des produits, les équipements et les services. La connaissance des modes de gestion spatiale est utile à la bonne appréhension des mécanismes du fonctionnement commercial à Mont-Bouët. L'analyse des modalités et des processus qui ont régi, croissance et occupation des espaces est fondamentale pour l'élaboration future des stratégies d'intervention.

Il va de soi qu'une telle analyse n'a de sens qu'après son application à un contexte urbain particulier. La nature des dynamiques spatiales à l'oeuvre sera d'autant plus aisée à mettre en évidence qu'on pourra reconstituer les grandes lignes et l'évolution des équipements ou des réseaux d'équipements étudiés. Au-delà de la monographie historique, il s'agit de recenser les évènements qui sont à l'origine des caractéristiques actuelles du réseau, de mettre en évidence les processus qui ont régi, la croissance et sont susceptibles perdurer ou de se développer.

III.1 - Organisation spatiale et occupation du sol

L'occupation du sol à Mont-Bouët couvre deux entités territoriales distinctes, selon que l'on considère l'équipement seul ou avec la zone commerciale sur laquelle il s'étend : le "grand marché" et dont ce dernier à susciter non seulement la création et l'épanouissement.

L'étude de l'organisation spatiale a été effectuée sur les emprises effectives du "grand marché", et pas seulement sur son périmètre officiel. Cette emprise effective a été d'ailleurs difficile à déterminer avec précision, dans la mesure où les divers processus d'extension se sont effectués de façon non maîtrisée et selon une dynamique qui demanderait d'être suivie mois après mois. Schématiquement, nous pouvons dire que pour le marché de Mont-Bouët, le processus d'extension est le résultat de deux phénomènes :

43

l'occupation du domaine public et la transformation du tissu urbain en propriété privée (carte n°5).

Carte n°5 : Plan du Marché de Mont-Bouët

44

- L'occupation du domaine public :

Il s'agit essentiellement de l'occupation des voies de communications et de toutes les rues limitrophes, par la vente ambulante ou sous abri. Le plus souvent cette occupation s'accompagne d'une transformation progressive du bâti riverain par ajout d'auvents ou la transformation de leur devanture en boutique.

- Transformation du tissu urbain en propriété privée :

Il s'agit de la substitution progressive de la fonction de résidence au profit de la fonction commerciale ; plus spécialement les commerces de gros et les activités de stockage. Il trouve sa source dans la pression foncière qui a découlé de l'installation du marché et des revenus locatifs qui en découle.

III.1.1 - l'occupation du sol et densité

Les densités trouvées sur le marché à Mont-Bouët sont évidement variables selon les secteurs et les types d'équipement. On présente ici pour comparaison les cinq secteurs du marché.

Sur le tableau 1 figure les effectifs du marché et le périmètre pris en compte :

- Le marché "officiel" à savoir : l'ensemble des points de vente à l'intérieur du

périmètre et dans lequel la municipalité perçoit légalement un droit de place ; - Le marché "réel" à savoir : les vendeurs du marché officiel, plus tous les

vendeurs à proximité immédiate du marché ;

- Le marché "élargi" ou hyper centre à savoir : l'ensemble des points de vente recensés dans les rues entourant le marché.

Tableau n°1 : Effectifs sur les principaux marchés de Libreville en 2005

Marchés

Louis

Nkembo

Mont-Bouët

Akébé

Oloumi

Officiel

567

702

5.859

1.235

529

Réel

625

-

6.587

1.875

590

Hypercentre

-

-

7.682

2.569

674

Source : Surveillance général des marchés

Le marché de Mont-Bouët occupe une superficie très variable qui va de 3,7 ha (marché officiel) à plus de 4 ha (marché réel + hypercentre).

On voit dans le tableau 2 que la densité est le résultat de deux situations types : d'une part, des secteurs denses avec 5 à 8 m2 par vendeur ; et d'autre part des secteurs moins denses avec plus de 13m2 par vendeur.

Tableau n°2 : Densité sur quatre marchés centraux en Afrique

Caractéristiques

Marchés

Bobo-Dioulasso
Burkina-Faso
Central

Cotonou
Bénin
Dantokpa

Libreville
Gabon

Mont-Bouët

Antananarivo
Madagascar
Analakely

Surface en ha

5,25

18,7

4,2

2,8

Nombre
d'installation

4.837

15.342

6.372

5.467

Nombre de
commerçant31

6.359

18.799

5.859

4.634

m2 par installation

10,9

12,2

7,2

5,1

m2 par vendeur

8,3

10

7,8

5,1

Installation par ha

921

820

1.517

1.953

Vendeurs par ha

1.211

1.005

1.395

1.655

Source :

45

31 Commerçants principaux et actifs auxiliaires

46

III.2 - Les infrastructures, services et situation sanitaire

Chacun des secteurs d'activités que compte le marché de Mont-Bouët présentent une situation particulière, du fait non seulement de la configuration du site, mais aussi des conditions locales, auxquelles s'ajoutent ses modes de gestion, les forces en présence et les moyens mis en place. Cependant, la situation qui prévaut actuellement à Mont-Bouët pose de sérieux problèmes sur le plan environnemental et sanitaire pour les populations qui le pratique et pour celles qui vivent dans ses alentours.

III.2.1 - Accès, circulation et drainage des eaux

Les principaux accès au marché de Mont-Bouët se font par des voies revêtues et carrossables, leurs emprises sont la plupart du temps occupées par de nombreux commerçants ou par des installations de vente plus ou moins densifiées (image n°). La circulation des personnes, des biens et les services est considérablement affectée, par la même occasion les opérations de drainage des eaux ainsi que les diverses opérations de nettoyage s'en trouvent le plus souvent perturber. Les équipements n'ayant pas été planifiés à la mise en service du marché pour répondre à une telle demande, ces derniers sont aujourd'hui insuffisants en nombre ou fonctionnent anormalement ou de manière occasionnelle, avec pour conséquence des inondations de certaines zones du marché en saison de pluie et les transformant en cloaque.

III.2.2 - Les services à Mont-Bouët

Le marché de Mont-Bouët (marché réel) à la différence des autres marchés de la capitale dispose de nombreux services parmi lesquels nous avons pu recenser lors de nos enquêtes : 2.854 étals, 2.653 magasins et boutiques, 21 boucheries, 16 poissonneries, 13 chambres froides, 16 entrepôts de stockage, 8 maquis, 3 boulangeries, 1 poste de police, 1e banque32, 1 infirmerie et 1e pharmacie, 4 locaux pour sanitaires, des restaurants et autres gargotes.

- La distribution en eau et la protection incendie

L'eau est une denrée nécessaire sur le marché, aussi bien pour les personnes qui le pratiquent que pour les nombreux commerçants qui y exercent. Pour le rafraichissement et

32 BICIG : Banque Internationale pour le Commerce et l'Industrie du Gabon.

47

le nettoyage des légumes, le nettoyage des étales de bouchers et autres vendeurs de poisson, les tenanciers de gargotes et restaurants, et enfin elle est plus que nécessaire dans la protection et la lutte incendie.

Du fait de son positionnement dans la ville, le marché de Mont-Bouët se trouve bien ceinturé par les réseaux de distribution en eau, toutefois nous avons constaté sur le terrain que bon nombre de zone reste mal ou pas du tout alimenté en eau à cause du manque de bornes ou du fait que ces dernières ne fonctionnent pas correctement. Afin de remédier à cet état de fait, de nombreux commerçants se font livrer de l'eau par raccordement à des branchements privés ou en piratant directement le réseau public.

Les gestionnaires du marchés sont de façon plus ou moins explicite opposés à l'amélioration de la desserte en eau sur le marché, d'une part pour éviter la production massive de déchets liquides pour lesquels rien n'est prévu. D'autre part, pour freiner l'utilisation des locaux commerciaux en habitation.

Le réseau de lutte contre les incendies présente un nombre insuffisant de bornes sur le marché, ce qui rend compte de la vulnérabilité de ce dernier face aux épisodes brûlant qui ont alimenté la vie du marché ces dernières années.

- L'entretien le nettoyage du marché et de ses abords

Le nettoyage de l'intérieur et de l'extérieur du marché est assuré par des prestataires privés (SOVOG et E.N.S.G), mais toujours de façon insuffisante. Les commerçants pallient, dans la mesure du possible ce manque en monnayant ce service ou en recourant à l'aide familiale. Si le nettoyage pose peu de problèmes pour les marchands de produits manufacturés, en revanche, les commerces produisant beaucoup plus de déchets (les produits vivriers, la boucherie et poissonnerie) ont beaucoup plus de mal à atteindre un niveau minimal d'hygiène.

Les nombreuses défaillances liées au dispositif de collecte et d'enlèvements des ordures et autres déchets sont probablement les caractéristiques les mieux partagées sur l'ensemble du marché. Ces lacunes ont pour explication le manque d'équipements et de matériels adaptés pour cette mission de service public. Plus généralement, elles sont aussi le fait d'une absence de soin, d'attention et de discipline de la part des usagers du marché. Et cela se traduit par la présence en certains endroits de décharges sauvages qui rendent le marché parfois impraticable.

Le même constat a pu être réalisé sur les quelques locaux à usage de sanitaire que nous avons pu dénombrer pour marché d'une telle ampleur.

Tableau n°3 : Inventaire des équipements existant sur le marché de Mont-Bouët

48

 

Nombre

Etat de fonctionnement

Equipements

 

Voies de circulation

 

Etat de délabrement
avancées et saturées

Caniveaux et égouts

 

Souvent bouchés et
saturés

Collecteurs d'eaux
usées, bacs et bennes à
ordure

 
 

Sécurité et confort

 

Electricité

 
 

Eau

 
 

Bornes incendies

 
 

Entrepôts et hangars

 
 

Boutiques et magasins

 
 

Postes de gardiennage

 
 

Poste de police

 
 

Sanitaires et toilettes
publiques

 
 

Services socio-économiques

 

Banque et bureau de
change

 
 

Antenne fiscale

 
 

Dispensaire

 
 

Pharmacie

 
 

Transports

 
 

Associations de
commerçants (tontines)

 
 

Motels/hôtels

 
 

Source : enquêtes et comptages sur le terrain.

49

III.3 - Les équipements et installations de ventes

La halle est le premier équipement et souvent le seul, ayant été construit sur la plupart des marchés centraux en Afrique et dont la grande majorité date de la période coloniale. A Libreville, la halle qui a donné suite au marché de Mont-Bouët est constitué un ensemble de galeries et à laquelle se sont ajoutées des annexes et des pavillons. Cette dernière traduit les projets d'urbanisme et politique affirmé par les dirigeants de l'époque.

Dans la ville, le marché est le lieu d'approvisionnement tant en produits vivriers qu'en produits issus de l'artisanat local, en bien et en services. Au marché de Mont-Bouët, la mesure et la qualité du parc bâti sur le marché est relativement homogène, selon que l'on se trouve sur un équipement planifié ou spontané.

- Le parc bâti de type « centre commercial » ou planifié

De type ancien et de taille réduite, il a été implanté avant les grandes extensions qu'a connues par la suite le marché. Il est structuré et plus ou moins bien "organisé", le manufacturé domine en nombre de commerçants, les activités de stockages, de gros et de demi-gros dans le vivrier y sont réduites. Densément bâti, les boutiques et hangars en dur y sont représentés. Aujourd'hui, le bâti d'origine tant à disparaître sous le nombre d'équipements et d'installations mobiles qui occupent les espaces de la voirie et tous les interstices disponibles.

- Le parc bâti de type « zone » ou spontané

Il s'est implanté sur des terrains vagues et dont les limites n'ont jamais été définies à l'origine. Il s'est développé par adjonction des hangars bricolés en matériaux de récupération et d'installations précaires. Très vite rattrapé par l'urbanisation il est au coeur des quartiers d'habitat très peuplés qui entourent le marché de Mont-Bouët (Akébé, Petit-Paris, Mont-Bouët, la Peyrie, la Sorbonne, etc.). De nombreuses activités commerciales ont investi le périmètre adjacent au marché et de nombreux bâtiments à usage d'habitation sont transformés en entrepôts et en magasins.

Cette dualité du bâti sur le marché de Mont-Bouët est le reflet de la division entre commerces « riches » (produits manufacturés) et commerces « pauvres » (alimentaire, vivrier, artisanat, friperie, etc.) qui commande à l'organisation spatiale sur le marché.

50

III.3.1 - Typologie des installations

L'hétérogénéité des installations de vente semble à première vue, caractériser les marchés urbains africains. Un examen plus attentif montre qu'en fait, on retrouve toujours les quatre mêmes grandes caractéristiques d'installation de vente, dont le degré d'équipement est directement fonction du niveau de revenu du commerce considéré. Cette typologie, classée par niveau d'équipement, on distingue : les bâtiments clos (boutiques ou magasins), les installations délimitées par quatre poteaux couvertes ou non (hangars), les tables et les étalages au sol33. Mont-Bouët n'y échappe pas.

- Installations fermées : boutiques ou magasins

Les boutiques et/ou les magasins sont des installations à usage commercial ou de service construites presque toujours en dur pour certains et pouvant être hermétiquement fermés, situés dans le bâtiment principal (la halle centrale et ses annexes) ou dans des bâtiments privés. C'est par excellence la boutique du grossiste ou du détaillant de produits manufacturés et de certaines catégories d'artisanat du secteur "moderne" (tailleurs, réparateurs divers, articles de bonneterie, articles de maison, bazar, chaussures, vêtements homme femme et enfant, etc.) qui ont à Mont-Bouët pignon sur rue. On trouve aussi dans les boutiques, des commerces de généralité alimentaire (riz, farine, sucre, etc.) ou d'équipements et d'ameublement ménager ou encore de la grande distribution.

Les surfaces de ces installations peuvent varier de 10 à plus de 40m2 et selon les époques de construction. Les magasins de grossistes de produits importés (télévision, hi-fi, électroménager, etc.) sont presque toujours construites en dur, tandis que celles des grossistes de produits vivriers locaux, des vendeurs de bois et charbon de bois sont bâtis en tôles et en bois ou en matériaux locaux.

A Mont-Bouët, les installations qui produisent le moins de déchets et dont l'aspect architectural est assez présentable ont été disposés à la périphérie du marché, parallèlement à ses principales voies de circulation (le Boulevard des Frères Bruchard et de la Rue Bivouli). Ces bâtiments occupent en bordure de ces artères, une étroite bande large de 20m.

Bien que la Rue Bivouli et le Boulevard des Frères Bruchard ne soient pas les seules limites du marché, (carte n° 2) ils concentrent néanmoins sur leurs bordures la majorité des bâtiments à usage commercial. Tout au long de la petite voie dénommée « un peu de tout » passant devant la pharmacie de La Peyrie.

33 L. Wilhelm, « Les Circuits d'Approvisionnement Alimentaire des Villes et le Fonctionnement des

Marchés en Afrique et Madagascar », FAO, 1997.

51

- Installations délimitée par 4 poteaux

Ce type d'installation peut-être éventuellement fermée sur certains côtés, mais n'est pas close et consiste essentiellement en une ouverture. Il s'agit du hangar soit individuel, soit construit en travées de plusieurs unités. D'une manière générale à Mont-Bouët, le hangar est le lieu d'installation des marchands d'articles vestimentaires et de l'artisanat local (vannerie, poterie, maroquinerie, etc.).

Le hangar est sur le marché l'installation la plus évolutive. Il représente la première étape dans la stratégie d'occupation du sol pour affirmer un droit trop menacé à un emplacement sur le marché ; on assiste alors à la transformation par des jeux de "revente" et/ou de "cession" d'emplacements, en hangars et delà en boutique. Il peut s'agir enfin d'une installation provisoire pour un commerçant le temps de trouver les fonds qui lui seront nécessaires pour la construction d'une future boutique.

- Table ou stand

C'est l'installation de tous les petits détaillants et, par excellence celle des vendeurs de produits vivriers frais (bouchers et poissonniers ambulants, vivrier local, etc.), installation sur laquelle sont exposées les diverses marchandises. Installations sommaires construites sur les accotements des rues adjacentes au marché.

Elle peut être fixe (étale maçonnée) ou non, couverte ou non, isolée ou disposée en rangées solidaires (étales couvertes). La table type est individuelle généralement faite de bois et très souvent couverte par un parasol, une natte ou quelques tôles pour les plus sédentaires.

L'emplacement moyen de la table (installation et vendeur compris) varie entre de 2 à 6 m2. Les étales couvertes sont souvent construites par ensemble de 2 ou 4 emplacements.

- Étalage au sol et invasion des trottoirs

La marchandise est présentée à même le sol ou dans divers contenants (cuvettes, brouettes, paniers, nattes, etc.). Le commerçant(e) et sa marchandise sont couverts ou non par un parasol ou tout autre objet pouvant servir de toiture, improvisée et fixée à des supports attenants. A Mont-Bouët comme dans la plupart des marchés en Afrique ce type d'installation est celle privilégié par les ambulants et les vendeurs à la sauvette installés sur les rues et les trottoirs jouxtant les alentours immédiats du marché.

L'étalage au sol est aussi le mode approprié d'exposition pour éventail de produits alimentaires ou non :

52

- Produits vivriers vendus ou revendus au détail sont en grande majorité issus du terroir africain : (igname, piment, poisson séché, pâte d'arachide, graine, huile rouge, attiéké, tubercule de manioc, de taro, feuille de manioc, de taro, banane plantain, atangas, oignons, gombos, tomates fraiches, citrons, condiments pour la cuisine (oignons, aubergine, riz, sel, oeuf, farine, etc.)) ;

- Produits de l'artisanat local (nattes, poteries, couteaux, machettes, daba, houes, etc.) ;

- Produits encombrants et salissant du type matériaux de construction, bois de chauffage, de construction, charbon de bois.

Sur le marché, il existe quatre zones de concentration autour du marché de Mont-Bouët : la Rue Sergent Bivouli à l'Ouest, avec plus de 242 vendeurs, Les Jardins de la Peyrie, avec plus de 357 commerçants, de la "Tour"34 aux abords du Carrefour Léon Mba on compte plus de 168, et de la "Tour" à la Gare Routière on en dénombre plus de 32835. C'est dire que se sont développées autour et même au-delà du marché des secteurs d'activités secondaires qui sont sous l'emprise direct de Mont-Bouët.

L'étalage au sol et l'invasion des trottoirs se rencontre en grand nombre et surtout le long des rues Sergent Bivouli, d'"un peu de tout", de l'Évêque Ndong, le Boulevard des frères Bruchard et les axes menant au Carrefour Léon Mba, à la Gare Routière, au Parc d'attraction de la Peyrie, à la Poste d'Akébé et au Stade Omnisports de Libreville.

Les tables individuelles et les étalages au sol ont dans presque tout le marché, envahi progressivement tous les espaces interstitiels. Leur prolifération sur les voies de circulation internes et externes au marché soulève de gros problèmes d'organisation, d'entretien et de nettoyage.

34 Local situé au carrefour du marché, exclusivement occupé par la police nationale et la police

municipale.

35 Inspection Générale des Marchés et Services de Recouvrement.

53

Image n°6 et n°7 : échantillon de produit commercialisé

Une vue partielle de certaines denrées alimentaires à dominantes de légumes et d'assaisonnements. Parmi les produits exposés, nous avons des légumes, des oignons, de la tomate, de l'aubergine, de l'ail, des compléments pour la cuisson, du poison fumé etc.

Rue Sergent Bivouli.

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre 2007.

III.3.2 - Typologie des produits

54

L'activité commerciale à Mont-Bouët offre une gamme de produits aussi divers que varié ; nous présenterons tour à tour les denrées alimentaires, et les autres types de produits que l'on peut trouver sur le marché de Mont-Bouët.

- les denrées alimentaires

La distribution alimentaire domine de façon remarquable ce secteur de vente. Malgré l'introduction massive des boîtes de conserve et autres produits d'importations dans nos habitudes alimentaires. Une large place est faite aux denrées traditionnelles nationales et sous régionales, en provenance de la proche banlieue librevilloise, de l'arrière pays ou encore de la sous région sud saharienne : banane plantain, tubercule de manioc, de taro, d'igname, patate douce, gombo, aubergine, farine de maïs ou de manioc, haricot, feuille de manioc, salade, choux, oseille, piment, bâton de manioc cuit, noix de palme, de cola, arachide, huile de palme, d'arachide, tomate fraiche, poisson frais ou fumé, gibier, etc.

- L'habillement et les textiles

Le secteur du vêtement marque de son empreinte l'intérieur même du marché, il peut être scindé en plusieurs branches : le prêt-à-porter, la friperie, les chaussures et le tissu, traduisant ainsi l'importance de ce secteur.

On retrouve à Mont-Bouët, une spécialisation dans la commercialisation de vêtements en tout genre, aussi bien pour les enfants en bas âge (nouveau né), que pour les plus grands et des nombreux accessoires qui leur sont associés (chaussettes, cravates, ceintures, etc.). On rencontre aussi des installations au sein du marché spécialisées dans la vente de tissus d'importation. De plus, le marché de Mont-Bouët constitue l'un des lieux d'approvisionnement en gros des couturiers et autres artisans des quartiers librevillois, tant la variété des produits est grande : tissu synthétique, de soie, de cotonnade, bazin, tergal, mower, lin, etc.

La friperie est l'autre composante du secteur vestimentaire et le marché de Mont-Bouët constitue le principal point de vente de Libreville. Elle y occupe l'arrière du marché dans des locaux précaires. La friperie offre une alternative salutaire par rapport aux grands magasins du centre-ville en ces temps de crise économique. Elle donne l'opportunité de se vêtir à moindre coût et à la mode, vu que toutes les gammes de vêtement y sont disponibles. Elle va de la chaussure au chapeau en passant par la ceinture. D'autre part, elle inclut les gants, les cravates, jouets, les rideaux, l'ensemble des articles de maison.

55

- Equipements et produits en tout genre

Le marché de Mont-Bouët est aussi le lieu de commercialisation d'autres genres de produits : ustensiles de cuisine et récipients de ménage, matériaux de construction de toute sorte, des objets traditionnels et insolites originaires de divers pays d'Afrique tels que : des grelots, torches indigènes à résine36, des peaux d'animaux sauvages, de l'encens, du savon indigène, parures et produits traditionnels, on retrouve aussi des objets rares ou à usage peu courant.

Dans la même zone se retrouve le commerce de charbon de bois, le parc à bestiaux et les vendeurs de volailles (poules, poulets, pintades, pigeons, etc.). Ils sont situés dans un réduit insalubre, toujours humide, le long de la rivière Loubila. Ils exposent leurs marchandises dans des cages de fortune faites de grillage qu'ils ont pour la plupart confectionné eux-mêmes. Ils exercent en quelque sorte à l'air libre, à la merci des intempéries.

Appareils électroménagers, hi-fi, literie, liqueur et aliments importés d'Europe sont également disponibles dans les magasins entourant le marché. Ces marchandises et autres produits sont l'apanage des ressortissants Syro libanais. Quelques établissements à capitaux partiellement gabonais tels (Gaboprix, Mbolo-frais, SODUCO, SUPERGAB), appartiennent à ce secteur et excellent dans l'alimentation et de la distribution générale.

Image n°8 : la revente au détail

Table de revente au détail

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre, 2007

36 Résine issue de la sève d'Okoumé.

56

III.4 - La contribution de Mont-Bouët à la fiscalité locale37

La municipalité librevilloise a au fil des années, vu sa situation financière se détériorer à cause des marchés et des nombreux besoins en équipement et en services que l'accroissement de la population urbaine a générés. Se sont ajouté des difficultés liées à la diminution des reversements de recettes par l'État et à l'unicité de caisse qui occasionne des problèmes de trésorerie à la municipalité.

Le marché de Mont-Bouët et les autres marchés librevillois constitue un gisement important en termes de ressources au travers des loyers, des droits de place, des patentes et autres taxes38. Dans la réalité, le marché c'est transformé en véritable gouffre financier.

Les raisons de cette faible contribution financière sont presque au fil des années toujours les mêmes :

- l'évaporation des sommes recouvrées par les collecteurs, (mise en circulation de faux tickets, entente entre les commerçants et les collecteurs pour s'acquitter partiellement des droits de place, etc.) ;

- le manque de moyens et les difficultés pratiques de recouvrement : les collecteurs, le plus souvent, ne disposent ni des plans du marché, ni des listes des commerçants ou de leurs emplacements. En l'absence d'une autorité reconnue et respectée, ils éprouvent généralement de grandes difficultés dans l'exercice de leurs fonctions, selon les secteurs ;

- l'absence de contrôle et de suivi régulier des recettes réalisées par chaque collecteur ;

Cependant, on n'explique pas le faible taux de recouvrement par le seul fait de collecteurs indélicats. Si l'on prend en exemple, l'état de recouvrement de l'exercice 2001/2004, nous avons constaté que le marché de Mont-Bouët au niveau de Libreville est celui qui a rapporté le plus à la trésorerie municipale avec 234.781.000 Frs CFA (environ 357.353,12 Euros). Dans le même exercice, avec plus 200.080.000 Frs CFA (environ 304.535,769 Euros39) qui reste à recouvrer, Mont-Bouët est aussi le marché qui doit le plus à Mairie de Libreville. Selon les registres municipaux, le recouvrement journalier sur le marché s'établi aux alentour de 2.000.000 Frs CFA (3.000 Euros environ), même si ce qui n'est pas le cas tous les jours40.

37 Taxes et impôts perçues par la collectivité locale pour faire face à ses dépenses.

38 Délibération n°002/2004/CL-CM : Réglementant la location des kiosques et stands dans les marchés

municipaux (voir annexes).

39 1 € = 657 Frs CFA.

40 Mairie de Libreville : Services des marchés, 2006.

III.4.1 - Avoir une place sur le marché

57

« Obtenir une place sur le marché est un obstacle bien plus grand que d'obtenir des marchandises ». Ce constat souligne la difficulté pour un commerçant d'avoir accès aux marchés centraux, qu'il s'agisse de Dakar, d'Abidjan, de Lomé, d'Accra, de Libreville, Yaoundé, etc. est plus que jamais d'actualité (Lewis et Robertson, 1976)41.

Pourtant, la congestion de ces marchés par des vendeurs ambulants "illégaux" donnant à penser que les Autorités ont souvent renoncé à en réguler l'accès sous l'effet de la pression des commerçants, en particulier, et de l'opinion publique, en général, peut sembler paradoxale. En réalité, obtenir une place régulière sur le marché central reste l'objectif premier de tous ces vendeurs "illégaux" très conscients de la précarité de leur situation.

Mais à ces comportements corporatistes, acceptés comme des règles du jeu inhérentes à la réalisation de certaines activités commerciales, sont venues s'ajouter des pratiques dues à la concurrence exacerbée que se livrent les marchands pour obtenir une place sur un marché déjà lourdement saturé.

Ceci explique l'opacité qui entoure encore, aujourd'hui, les conditions réelles d'attribution d'un emplacement sur les marchés centraux d'Afrique en général et de celui de Mont-Bouët en particulier et dont l'arbitraire est constamment dénoncé par les commerçants eux-mêmes : « Plus de démocratie et d'équité dans la distribution des places », tel est l'un des souhaits majeurs en matière de gestion des marchés.

Les règles d'attribution des places de marché42, sont partout transgressées et le marché de Mont-Bouët en est un exemple. Nous avons pu constater qu'entre le nombre d'installations sur le marché et le nombre de vendeurs, de même que la liste d'attributaires que l'on peut trouver auprès de la municipalité n'a qu'un lointain rapport avec la réalité.

41 B.S. Lewis & C. Robertson (1976) « Women in Africa : Studies in social and economical change »,

Hafkin and Bay, SUP.

42 Sous-location de locaux interdite, un seul attributaire par emplacement.

58

III.4.1.1 - La sous-location et la revente de pas porte43

Bien qu'étant prohibée par les règles d'attribution de place sur un marché, la sous-location et la revente de pas-de-porte sont des pratiques généralisées sur pratiquement tous les marchés.

Les installations les plus couramment sous-louées sont les boutiques et les hangars. A Mont-Bouët, on observe une situation assez exceptionnelle : celle de la sous-location généralisée des « stands » (étals maçonnés). La sous-location de ce type d'installation se pratique entre attributaires nationaux « propriétaires non commerçants absentéistes » et commerçants étrangers.

Deux éléments principaux sont à souligner à cet effet, dans presque tous les cas recensés sur le terrain (informations obtenues auprès du commerçant), le sous-locataire paye sa redevance au service du marché en plus du loyer qu'il reverse au propriétaire des lieux, les montants de la sous-location représentent toujours une charge beaucoup plus lourde que le paiement de la redevance mensuelle ou du droit de place. Les montants de la sous-location varient suivant le type d'installation, sa localisation dans le marché et les produits vendus par le sous-locataire.

- La cession

La cession d'installations est aussi une pratique courante. Elle aurait été particulièrement fréquente entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, dates qui marquent, sur le marché, l'essor important des vendeurs de produits manufacturés (produits "riches").

- La multipropriété

Il est très courant qu'un vendeur dispose de plusieurs installations de vente à travers des prête-noms. Nous avons pu constater que ces cas de multipropriété concernent exclusivement les commerçants de produits manufacturés à forte valeur ajoutée et les commerçants de produits alimentaires de première nécessité (riz, sucre, farine, sel, etc.).

- Le partage des installations

La pratique inverse de partage d'une installation par plusieurs vendeurs est tout aussi répandue. Deux causes distinctes sont à l'origine de cette situation : la saturation du marché et donc l'impossibilité d'obtenir un emplacement, de même que la nécessité de partager les frais d'installation et d'exploitation de l'installation.

43 Revente de pas porte : Compensation financière versée au propriétaire avant l'entrée dans les lieux et

dont il est difficile de déterminer les contours.

III.4.1.2 - les fraudes sur le loyer et la taxe journalière.

59

Nous avons relevé de nombreuses imperfections dans le recouvrement aussi bien pour les kiosques que pour les stands en ce qui concerne les taxes journalières. Nombreux sont les commerçants qui préfèrent s'acquitter d'un droit de place (timbre) quotidien plutôt que de verser le montant intégral d'une location trimestrielle.

Pour les timbres journaliers, on note la présence de plusieurs intermédiaires entre la trésorerie municipale et la collecte des timbres. Ces derniers causent à leur tour un manque à gagner pour la localité. Il se passe que l'argent issu du recouvrement tout secteur confondu, n'est pas reversé en totalité. Ces mauvais comportements ont malheureusement fait en sorte que les nombreuses recettes issues des recouvrements sont insuffisantes

III.4.1.3 - le phénomène d'accaparement et les conflits de

territoire.

Durant notre étude sur le terrain, nous avons pu remarquer que certaines zones dans le marché en lui-même ou au sein de l'espace qui l'entoure, sont coupées du reste de celui-ci. Ils sont par la force des choses devenus la propriété de certaines personnes. Le conflit qui en résulte tien lieu du fait que les recettes issue du prélèvement des taxes et autres impôts sur le marché, sont devenus un enjeu de pouvoir.

60

Chapitre IV

Le marché de Mont-Bouët : un

espace à risque

Les contraintes de fonctionnements

Toutes les grandes villes africaines connaissent encore une forte croissance démographique. Parallèlement, la situation économique a engendré au sein des marchés le développement du secteur informel et la multiplication des petits métiers.

A Libreville de façon générale, et à Mont-Bouët en particulier, ces éléments ont eu pour conséquence l'augmentation considérable des effectifs sur le marché existant. Toutefois, cette augmentation n'a pas été accompagnée d'une expansion significative du nombre d'équipements commerciaux. Ces deux facteurs conjugués sont en grande partie à l'origine de la situation actuelle caractérisée par la saturation, la désorganisation et l'insalubrité des équipements existants ainsi que par l'occupation anarchique et généralisée des emprises de la voirie par bon nombre de vendeurs.

La situation de profondes carences techniques et sanitaires qui prévaut sur l'ensemble du marché a deux causes essentielles : une insuffisance d'infrastructures techniques de base (drainage, eau, électricité) et un manque d'entretien et de services.

Sur la plupart des secteurs du marché, les infrastructures de base font défaut, soit parce que ces derniers n'ont jamais été construits, soit parce que, bien qu'existants, ils ne fonctionnent pas ou sont insuffisants. Quant à l'entretien et aux services (évacuation des déchets, nettoiement, entretien des installations et des réseaux) en raison des difficultés tant financières qu'organisationnelles de la part des autorités municipales et les prestataires privés, ils sont assurés de manière très imparfaite et, seulement, sur les quelques secteurs organisés.

Du point de vue organisationnel, les dysfonctionnements les plus apparents se traduisent principalement par le mélange des activités de gros et de détail, le regroupement non fonctionnel des produits, la présence d'activités nuisibles ou dangereuses sur le marché (utilisation de foyers dans les activités de restauration, blanchisserie, repassage, etc.).

61

L'ensemble de ces facteurs techniques, sanitaires et organisationnels créent des risques graves non seulement pour les usagers consommateurs, mais aussi pour les commerçants eux-mêmes.

Certains dysfonctionnements sont moins connus et demandent à être soulignés. On mentionnera, en particulier, le cercle vicieux qui s'est instauré à cause de la concurrence des vendeurs à la sauvette qui s'agglutinent autour du marché : la prolifération de ces vendeurs qui, pour la plupart, ne paient pas de droits de place, finit par entraver l'accès de celui-ci aux usagers consommateurs. Cette situation incite alors les commerçants du marché, qui eux paient des droits, à en sortir à leur tour pour tenter de maintenir leur chiffre d'affaires.

IV.1 - Un espace exigu et enclavé

Si le Marché de Mont-Bouët est le plus grand de Libreville, il n'en reste pas moins qu'il est aussi l'endroit de forte concentration humaine. Par rapport à la concentration de la population commerçante, les femmes sont les plus nombreuses de telle manière qu'elles sont les premières à subir les conséquences d'une telle surpopulation. Elles bénéficient moins des structures et doivent affronter quotidiennement plusieurs difficultés à la fois trouver une place, s'abriter des intempéries, des vols et surtout du phénomène de délinquance.

IV.1.1 - Les défauts de conception, les carences des infrastructures de base et les dysfonctionnements

Le marché, qui a été construit dans les années 1970 par les pouvoirs publics, présente à ce jour de nombreux défauts de conception. Ce tant par manque de concertation avec les usagers commerçants que par une insuffisante connaissance du fonctionnement des circuits d'approvisionnement et de distribution alimentaires en milieu urbain. On note ainsi la présence d'installations non fonctionnelles ou encore détournée de leur but premier, la non prise en compte lors de la construction du marché de zones de débarquement et de déchargement nécessaires à l'approvisionnement des commerçants, ce qui conduit à l'encombrement des abords du marché et souvent du quartier tout entier44.

Les infrastructures de base (eau, électricité et réseaux de drainage) font largement défaut ou ne fonctionnent que très imparfaitement. L'entretien du marché et les services

44 A. Gnammon- Adiko, « Les femmes, la restauration rapide et l'aménagement de la ville d'Abidjan »,

Food, nutrition and agriculture, no17-18, pp. 14-20 (18 réf.), 1996.

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sont bien plus que défaillants. En somme, le fonctionnement actuel du marché de Mont-Bouët est loin de pouvoir garantir l'hygiène et la salubrité nécessaires à la vente de produits destinés à la consommation ainsi que la sécurité des ses nombreux usagers.

IV.1.2 - Insuffisance des infrastructures

Qu'il soit planifié ou spontané, le marché est toujours en communication avec la fonction résidentielle. Dans le cadre de Libreville, et essentiellement à Mont-Bouët, le marché a été crée après l'installation des populations. Il a donc bénéficié d'un espace réduit dès son implantation et aujourd'hui encore, cet état de fait constitue un frein à son extension spatiale45.

Hormis la halle, la plupart de ces marchés ne comprenaient aucun aménagement spécifique en matière d'installations de vente ou de stockage. Il faut attendre la fin des années 1960 et le début des années 1970, ou le milieu des années 1980, pour voir la réalisation de nouveaux équipements sur plusieurs marchés centraux africain dont celui de Mont-Bouët. Ils ont concerné en priorité l'aménagement d'emplacements pour les nombreux marchands et commerçants lorsque la configuration du marché s'y prêtait : c'est la vogue des bâtiments à étages, principalement dans les grandes villes côtières (Lomé, Abidjan, Cotonou, Douala, Yaoundé, Libreville, etc.)46. Ce type de construction devait répondre aux contraintes d'espace et des nombreuses installations de vente nécessaires au coeur des capitales.

Le rez-de-chaussée de ces bâtiments était généralement conçu pour accueillir un certain nombre de commerçants de produits vivriers (étals maçonnés). Mais ces installations n'ont pas toujours été occupées conformément à leur destination originelle. Dans de nombreux cas, sous la pression de la demande, on y a installé des vendeurs de produits manufacturés qui les ont progressivement transformées (ajouts de tables et présentoirs, grillage, construction de murs en dur autour de l'étal, etc.) pour les adapter à leurs besoins d'exposition, de stockage et, par conséquent, de sécurité.

Si l'on excepte les grands projets de réaménagement récents, les équipements construits depuis les années 1970 se sont révélés non fonctionnels, car ils n'étaient que partiels. Ils n'ont, par conséquent, pas pu répondre à la demande croissante de places de vente sur le marché. Ils n'ont pu enrayer le développement incontrôlé d'un grand nombre de constructions précaires, d'abord sur les espaces encore non bâtis du marché, ensuite dans les allées intérieures, aboutissant ainsi à la saturation définitive de celui-ci47.

45 Hôtel de Ville Mairie de Libreville, AUVIL (Atelier d'Urbanisme de la Ville de Libreville), 2006

46 Wilhelm L., « Les Circuits d'Approvisionnement Alimentaire des Villes et le Fonctionnement des

Marchés en Afrique et Madagascar », FAO, 1997.

47 Idem.

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Enfin, au cours de la décennie 1980-90, l'occupation anarchique des rues adjacentes au marché par les installations des vendeurs ambulants devient très fréquente : un véritable "marché parallèle" se crée et dont les effectifs sont aussi importants que ceux du marché central.

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IV.2 - Un espace désarticulé et malsain

Le basculement démographique du rural vers l'urbain à partir des années post indépendances est le changement le plus spectaculaire qu'a connu Libreville au cours des dernières décennies. Cette région, rural à plus de 75% au moment de l'indépendance, a été avec l'apport des populations venues de l'intérieur du pays, urbanisée à plus de 65%. Pourcentage auquel il faut ajouter les populations venues de l'étranger, une tendance qui devrait se poursuivre au cours des prochaines années. La ville a pris au fil des ans une ampleur qui dépasse aujourd'hui les capacités locales de gestion, d'absorption et de financement.

Au sein d'un arrondissement densément peuplé, les limites du marché qui n'ont à l'origine pas été définies avec précision, se sont étendues de manière anarchique. Dans la mesure où les différents outils mis en place au fil du temps pour maîtriser l'espace du marché ont été de moins en moins adaptés et pour certains n'ont guère répondu à la situation économique et sociale de Libreville.

En dépit des efforts réalisés par les pouvoirs publics pour réhabiliter, rénover, construire et reconstruire, les conditions dans lesquelles fonctionnent les équipements restent dans la majorité des cas problématiques. Souvent mal drainés, soumis à des inondations, pas ou peu desservis en réseaux (eau, électricité, assainissement, éclairage), encombrés des décharges sauvages obstruant les voies d'évacuations, sous-équipés en toilettes publiques, sur densifiés, le marché de Mont-Bouët connait une situation sanitaire critique. Cette situation est d'autant plus préoccupante dans le cas ce marché de produits vivriers peut être à l'origine de la diffusion en ville d'épidémies, notamment de maladies hydriques.

Congestionné par les sureffectifs, les équipements marchands à Mont-Bouët sont depuis longtemps sortis de leurs limites. Les commerçants fixes et les nombreux ambulants ont pris possession des espaces publics voisins, des emprises de la voirie et dans bien des cas de la chaussée elle-même. Les conditions de circulation sont dans la plupart des cas extrêmement dégradées. Les temps de transports des personnes et des marchandises sont démultipliés, la pollution atmosphérique et la pollution par les effluents dépassent les seuils admissibles...

Ces dysfonctionnements affectent en premier lieu les équipements marchands eux-mêmes : les localisations centrales, autrefois les plus recherchées, sont dépréciées dans la mesure où il est de plus en plus difficile d'y accéder. Le marché dans son périmètre entier finit par perdre de son attractivité : beaucoup de biens sont disponibles à l'extérieur du marché, dans les rues avoisinantes, à des prix souvent inférieurs, auprès de "vendeurs à la sauvette" ou de boutiques informelles. Cette situation a créé avec le temps d'importantes nuisances telles que :

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- voies génératrices, selon les saisons de poussière ou de boue (image 9) ;

- voies non adaptées aux nouveaux engins de transports : embarras de la circulation, déchargements sauvages et stockages de produits parfois à même la voie ;

- réseau d'eau potable inadapté, insuffisant dans certains cas inexistants ;

- insalubrité liée aux mesures d'assainissement et d'approvisionnement en eau potable (absence ou engorgement des canalisations, absence en certain endroit du marché de bennes et bac à ordures) ;

- réseau électrique insuffisant et non adapté au développement des équipements nécessaires au conditionnement, à la manutention ou au stockage des produits et autres marchandises ;

- réseau d'éclairage public non adapté, accentuant ainsi les problèmes de sécurité sur le marché ;

- réseaux d'évacuations des eaux pluviales, domestiques et sanitaires inadaptés et

insuffisants, pouvant nuire à la qualité hygiénique des marchandises exposées ; - bâtiments mal adaptés aux conditions hygiéniques requises et aux méthodes de

confinement modernes des marchandises périssables ;

- sanitaires et toilettes publiques en nombre insuffisant ;

- collecte, traitement et évacuation des déchets liquides et solides mal organisés, non coordonnés ou insuffisants ce qui créent des problèmes d'hygiène et de santé publique ;

- absence de services à la personne (dispensaire, unité médicale) au sein du marché ;

- comportement des commerçants dont les pratiques ne garantissent pas l'innocuité des aliments, source indéniable de contamination (aliments à même le sol ou sur des étales inappropriées...) ;

- conflits de compétences ;

- absence de bornes incendie et de couloirs d'évacuations.

Finalement, c'est l'ensemble de la ville et de ses habitants qui sont affectés par les externalités négatives. Les coûts économiques engendrés par ces externalités imputables aux équipements marchands sont supportés par la collectivité.

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Image n°9 : le marché après les intempéries

'Rue d'un peu de tout", le commerce des produits vivriers se fait dans des conditions d'insalubrité inimaginables. Les commerçantes de plantain exposent à même le sol et vendent dans la boue et sous la pluie.

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre 2007

- les inondations à Mont-Bouët

Le phénomène d'inondation dans le quartier Mont-Bouët est la réponse à la logique selon laquelle, l'occupation du sol précède la planification urbaine comme c'est le cas dans de nombreuses villes africaines. Cet espace alluvial jadis marécageux est composé d'un sol argilo-sableux à très forte perméabilité et par conséquent favorable aux engorgements. A cette situation il faut ajouter un bâti incontrôlé et un fort drainage de ce secteur marqué par le phénomène d'apparition de cours d'eau saisonniers dans le périmètre du marché durant la saison pluvieuse.

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Image n° 10 et 11 : Mont-Bouët après la pluie

Des secteurs entiers du marché sont occupés par les eaux après un épisode pluvieux à Libreville.

Rue "d'un peu de Tout"

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre 2007.

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- le risque électrique

La précarité des aménagements et des installations électrique dans certain secteur du marché expose le site et les animateurs à une multitude de dangers. Ce dernier s'explique par la présence ça et là de nombreux câbles électriques "abandonnés" à l'air libre. Dans ce cafouillage l'ensemble des systèmes d'approvisionnement du marché se trouve ainsi saturé et nul ne saurait distinguer les conducteurs actifs des non fonctionnels vu que des poteaux électriques sont détournés de leur fonction première.

Image n° 12 : branchements en toiles d'araignée

Tissus et branchements anarchiques, exploitation des poteaux électriques à des fins logistiques et commerciales.

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre, 2007.

IV.2.1 - Mont-Bouët : un environnement insalubre

Les difficultés de circulation dans la ville et sur le marché, l'absence de parking, s'ajoutent aux difficultés de ramassage de stockage et de recyclage des ordures et déchets de toute origine. En milieu urbain, le développement durable48 implique la participation de tous les acteurs (publics et privés, individuels et collectifs) à prendre conscience des "effets néfastes" de la gestion urbaine sur l'environnement. Le pari est loin d'être gagné dans une ville où les problèmes environnementaux se posent en termes de gestion des déchets, de pollution de l'air, de l'eau et en nuisances de toutes sortes. La question y est d'autant plus complexe que chaque fonction de la ville renvoie à un aspect de l'environnement urbain. Faute d'infrastructure de conservation et d'équipement de stockage, dans l'impossibilité d'écouler rapidement et de façon rentable des denrées alimentaires essentiellement périssables.

C'est à partir de 1975 que les autorités municipales de Libreville intègrent le traitement des déchets dans leur politique de gestion urbaine. Mais elles restreignent leurs interventions aux seuls quartiers administratifs et résidentiels. Les quartiers péri centraux populaires sont alors exclus de ce privilège. Au début des années 1980, pour pallier à ces insuffisances, la commune cède l'hygiène et la salubrité de la ville à la Société Gabonaise d'Assainissement (SGA) et depuis 1998 à la Société de Valorisation des Ordures Générale (SOVOG). Ces sociétés privées détiennent le monopole sur les marchés en ce qui concerne la collecte et l'évacuation des ordures et autres déchets. Toutefois, le constat sur le marché de Mont-Bouët est des plus alarment. Les bacs à ordures sont noyés sous le poids de leurs contenus et de fortes nuisances étouffent les commerçants et les autres animateurs non seulement du marché mais aussi de ses alentours.

Répondre aux besoins des générations actuelles sans pour autant compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Il s'est construit comme une réponse objective des institutions et des entreprises aux nombreuses préoccupations de la société civile et de certaines organisations, relatives aux impacts environnementaux et sociaux de l'activité des principaux agents économiques sur la planète.

Tous les secteurs d'activité sont concernés par ce développement : l'agriculture, l'industrie, le commerce, mais aussi les services.

48

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De manière générale, la gestion des déchets à Libreville est marquée par de nombreux dysfonctionnements en matière de financement, de choix techniques et de schéma organisationnel. Les ordures non collectées sont déversées dans les drains et les cours d'eau, dans les caniveaux ou dans les décharges sauvages. Ces déchets causent des nuisances à l'environnement avec pour conséquence la dégradation de la qualité de l'eau, de l'air, du sol et de la santé publique. Les eaux de ruissellement sont généralement chargées en matières polluantes et peuvent souiller les sources, nuire à la faune et à la flore aquatique. L'air est pollué par le dégagement d'odeurs nauséabondes, résultat de la rapide fermentation des matières organiques arrosées par les eaux de pluies. Ceci entraîne

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la pollution de la nappe phréatique en contrebas de la Loubila49 où s'approvisionnent les citadins les plus défavorisés. Ces eaux qui s'infiltrent dans les sols sont d'autant plus dangereuses pour la santé publique qu'elles contiennent des germes pathogènes. La contamination de la nappe phréatique par les ordures ménagères, les déchets industriels et ceux des marchés vivriers favorise la prolifération des maladies hydriques comme la diarrhée, la dysenterie amibienne, la gale ou la typhoïde. La salubrité et l'hygiène du cadre de travail et de vie constituent avec la garantie de la sécurité les principales pommes de discorde entre les commerçants et l'autorité municipale. Si la communauté urbaine est pointée du doigt comme le principal responsable de l'insalubrité de la ville de Libreville et de ses marchés, c'est parce qu' « on ne sait pas à quoi servent les sommes collectées sous forme de taxes si ce n'est pour enrichir les amis et la famille du délégué du gouvernement auprès de la Communauté ».

Toutefois, il faut ajouter à ces problèmes de gestion humaine des contraintes techniques. Les inondations fréquentes de certaine partie du marché sont liées aux difficultés à gérer l'eau dans cette ville construite sur les marécages, où tombe beaucoup de pluie alors que le site est plat. Et ceci est aggravé par la forte croissance démographique. Les déficiences des services urbains à Libreville ne résultent pas seulement de l'insuffisance des ressources financières, mais d'abord de contraintes d'ordre institutionnel. Le plus grave est la forte concentration du pouvoir de décision au niveau central. Les structures actuelles sont intrinsèquement incapables d'une gestion attentive des besoins, même si elles étaient à l'écoute de ceux-ci. Les préoccupations propres de l'administration centrale s'accentuent au fur et à mesure que le centre des décisions s'éloigne des administrés. Les coûts des décisions augmentent avec leur centralisation et la qualité de l'information se détériore au fur et à mesure qu'elle passe des agents de terrain au pouvoir central.

IV.2.1.1 - l'évacuation des déchets liquides

Malgré les efforts soutenus par les services compétents de la voirie de Libreville, l'insalubrité dans les principaux marchés de la capitale persiste et risque de durer encore longtemps. Le marché de Mont-Bouët est de loin le plus touché par ce phénomène d'insalubrité. Il faut dire tout de suite que pour ce marché, la production des ordures et des déchets est massive et très diversifiée (liquides, solides et organiques). Les rejets se faisant d'une manière incontrôlée et le plus souvent à même le sol, on aboutit à des nuisances de tous ordres qui rendent par la suite le milieu impraticable. C'est surtout la forte accumulation des déchets qui pose aujourd'hui de nombreux soucis.

49 Rivière qui traverse le marché

En effet, il manque au sein du marché de Mont-Bouët les infrastructures nécessaires à la collecte, au stockage et à l'évacuation dans les meilleures conditions des déchets. Les rues à Mont-Bouët ne possèdent pas de bouches d'égouts pour l'évacuation des déchets liquides, les eaux usées ruissellent librement sur la chaussée dégageant ainsi des odeurs pestilentielles. Sur toute la Rue Bivouli, ces nuisances ne semblent pas pour autant déranger les commerçants qui y sont presque accoutumés. Les parties couvertes des principaux bâtiments sont très difficiles à nettoyer, car n'a pas été prévu dans les plans de constructions des canalisations pour l'évacuation des déchets de quelque nature que ce soit, alors que c'est sous ces même bâtiments que sont écoulées une grande partie des marchandises et autres denrées qui produisent les déchets nocifs à l'environnement (produits de boucherie, de pêche, fruits et légumes, etc.).

Aujourd'hui, le marché de Mont-Bouët ainsi que son air d'influence produisent une quantité impressionnante de déchets et de rebuts qui ne sont pas évacués à temps50. Les services de nettoyage paraissent déborder, dans la mesure où les équipes qui ont en charge le nettoyage du marché et de ses abords ne remplissent pas efficacement leur mission ; à cause d'une part du manque de personnel, et d'autre part de la grandeur du site. Bien que disposant du matériel et des outils (camions, brouettes, balais, pelles, râteaux, etc.).

Depuis 1979, le marché ferme ses portes pour son nettoyage quotidien entre 18h et 20 heures. Les pouvoirs publics sont allés plus loin en instituant un jour spécial dans la semaine durant lequel le marché est entièrement fermé pour être nettoyé (lundi).

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50 Nous n'avons pas pu avoir le volume en déchet que génèrent quotidiennement le marché de Mont-Bouët

et son air d'influence.

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Canal d'évacuation des eaux du marché détourné de sa fonction première et obstrué par des déchets de toutes sortes.

Effluent de la Loubila

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre, 2007.

IV.2.2. - L'entretien et le nettoyage du marché par les commerçants

Un nettoyage intérieur du marché est, dans presque tous les cas, assuré par l'Autorité du marché, mais toujours de façon très insuffisante. Les vendeurs pallient, dans la mesure du possible, l'insuffisance de ce service en recourant à un aide familial qui est chargé de faire le nettoyage de la place très tôt le matin. Si le nettoyage pose peu de problèmes pour les vendeurs de produits manufacturés, en revanche, les commerces produisant beaucoup de déchets (les produits vivriers et surtout la boucherie) ont beaucoup plus de mal à atteindre un niveau minimal d'hygiène.

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En somme, l'ensemble des dysfonctionnements constatés dans le secteur du marché de Mont-Bouët ont de lourdes conséquences pour les consommateurs, à la fois économiques (en alourdissant les prix finaux des produits), sanitaires et sociales.

Source de revenus pour les particuliers, le marché et les espaces qui l'entourent le sont également pour l'administration communale. Les grossistes et les détaillants ne sont pas les seuls demandeurs d'espace. La liste des acteurs qui exigent ce droit est longue : déchargeurs, porteurs, pousseurs, vendeurs de repas ou d'eau, fabricants d'étals ou de paniers, gardiens, locataires d'espaces de stockage et d'entrepôts, de magasins ou de la cour familiale. La communauté urbaine se trouve dans l'incapacité d'assurer l'hygiène et la salubrité sur le marché qui produit en contre partie de grandes quantités de déchets, mais également dans les rues et les carrefours. Le maintien de l'hygiène et de la salubrité se pose avec d'autant plus d'acuité à Libreville que l'abondance des précipitations accélère la décomposition rapide des immondices.

Il faut alors créer de nouveaux marchés, moderniser celui existant, augmenter sa capacité d'accueil, améliorer les infrastructures de base et les services, reformuler les règles de gestion, imaginer des solutions pour créer un cadre d'activité satisfaisant pour le commerce de rue (hygiène, salubrité, mais aussi prise en compte de son rôle), organiser et orienter les flux d'approvisionnement par la création d'équipements spécifiques (marchés de gros) : à Mont-Bouët le chantier est immense et plus qu'urgent.

IV.2.2.1 - les structures sanitaires

Dès sa mise en service dans les années 1970, le Marché de Mont-Bouët a été doté de latrines publiques et d'équipements d'adductions d'eau. Ceci en vue de satisfaire les besoins des commerçants voir des clients. Mais l'utilisation irrationnelle des équipements a occasionné la fermeture de la quasi-totalité de ceux-ci par les pouvoirs publics. De nos jours, l'absence des lieux d'aisances convenables pose des problèmes de commodité aux différents usagers du marché. Elle a des répercussions négatives sur l'état de propreté générale du marché et de ses environs.

Ainsi, la situation sanitaire du Marché de Mont-Bouët laisse à désirer vu que la rareté de toilettes est un problème de salubrité publique. Le marché dispose néanmoins de deux structures privées généralement occupées par des femmes, dans la mesure où elles sont les plus nombreuses à pratiquer le marché et qui leur faut un minimum d'intimité. Les hommes n'hésitent pas quant à eux à se mettre dans un coin et satisfaire leur besoin physiologique. L'accès à ces latrines est subordonné au paiement d'une somme variant de 200 à 400 Frs CFA (soit 0,60€)51.

51 1 € = 657 Frs CFA.

74

75

Le marché de Mont-Bouët au sein de la ville de Libreville en tant que la plus grande et la plus importante place commerciale, joue un rôle non négligeable pour les populations qui la compose : c'est un espace de vente et d'échanges qui permet aux habitants qui le pratiquent de se fournir en biens et en services. De par sa taille et son emplacement il est un équipement qui pèse énormément dans structuration de la ville. Porteur de centralité et constituant un haut lieu de sociabilité ; il est selon Troin J.F : « une des formes de commerce les plus humaines qui soient »52.

La question des équipements marchands est au coeur de la problématique des villes d'Afrique subsaharienne depuis plusieurs décennies et Libreville ne fait pas exception. Le marché de Mont-Bouët ne doit plus être seulement considéré par les collectivités locales ou les entrepreneurs privés comme un simple équipement rentable, produisant des recettes, mais comme un enjeu d'urbanisme, un outil du projet urbain. L'importance qu'a pris le marché de Mont-Bouët dans une cité confrontée à une croissance rapide dans un contexte économique dégradé en a fait progressivement un élément structurant de l'ensemble des dynamiques urbaines. Au delà de la fonction commerciale, les activités et les équipements qui lui sont liés sont ainsi devenus aujourd'hui un des paramètres dans la gestion et les stratégies de développement de la capitale gabonaise.

Cette étude sur la notion du risque que pose le principal centre d'approvisionnement de la ville de Libreville, aborde la question du marché dans sa globalité en prenant en compte ses fonctions sociales, économiques, politiques, fiscales, architecturales et partant, géographiques. Cette situation résulte du contraste selon lequel les premiers gestionnaires de la ville n'étant pas des urbanistes de formation, la prise de décision tendait à satisfaire les politiques du moment, dans un dénouement des aptitudes techniques en matière d'urbanisme. Cette logique managériale explique le choix de ce site en fond de vallée et qui avec le temps, la pression démographique et spatiale, les inondations, les risques de pollution et d'incendie sont devenus les conséquences logique de cet aménagement devenu précaire et insalubre.

L'enseignement principal que l'on peut retenir de cette étude, tien à la mise en exergue de la complexité réel du risque environnemental et sociétal, que notre analyse s'est donnée pour tâche de dévoiler à travers son organisation, ses modes de gestion et son fonctionnement. La dimension économique n'épuise pas cette complexité fruit d'un grand nombre de facteurs agissant et réagissant les uns sur les autres. Elle n'est qu'une des composantes multiples qui concourent au façonnement du territoire et ne prend tout son sens qu'en interaction avec d'autres paramètres tout aussi essentiel tels la densité de population, la culture ou le milieu physique. De ce point de vue, une approche construite sur la trilogie politique-espace-paysage répond à l'exigence d'une réflexion qui se veut globale.

52 Troin J-F. (2001) « Les métropoles des Sud » éd. Ellipse.

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Les conditions dans lesquelles s'exerce la fonction de gros et de détail pénalisent lourdement la chaîne d'approvisionnement et de distribution tout entière et représentent en définitive un facteur important du renchérissement des produits pour les consommateurs urbains. On constate en effet que le commerce des produits alimentaires, et tout spécialement celui des produits périssables, ne dispose ni d'aménagements ni d'installations spécifiques.

Les espaces sur lesquels les détaillants exercent leurs activités sont, d'une manière générale, dispersés dans le marché : les flux d'approvisionnement et le stationnement des véhicules de livraison occasionnent de nombreux problèmes de circulation et de congestion du marché entier. Partout, les conditions de fonctionnement sont gravement défectueuses : absence ou insuffisance d'équipements de stockage, mauvaises conditions de conservation, manque de place pour le stationnement, les opérations de déchargement, problèmes d'hygiène et d'insécurité. Les coûts qu'entraîne cette situation ne sont pas uniquement environnementaux, ils sont aussi et principalement économiques53.

L'examen de la situation dans ce secteur d'activité révèle de nombreuses carences et dysfonctionnements. Les déficiences constatées concernent en premier lieu l'insuffisance des équipements marchands. Le problème se situe à deux niveaux : d'une part, la construction du marché de Mont-Bouët s'est révélée au fil des années insuffisantes pour desservir correctement l'ensemble des zones urbanisées, d'autre part, l'augmentation considérable du nombre des commerçants sur le marché n'a pas été accompagnée d'une augmentation significative de la capacité à accueillir ceux-ci. Ces deux facteurs conjugués sont en large partie à l'origine de la situation actuelle qui se caractérise par sa saturation, sa désorganisation et l'insalubrité des équipements existants les risques qui en découlent, ainsi que par l'occupation anarchique généralisée des emprises de la voirie par les vendeurs et la multiplication de secteurs spontanés et le développement des activités informelles54.

Le marché, qui a été construits et modernisé par les pouvoirs publics, présente des défauts de conception, et ce tant par manque de concertation avec les usagers commerçants que par une insuffisante connaissance du fonctionnement du marché en tant qu'entité économique, sociale et politique.

A ce tableau noir il faut ajouter le manque d'infrastructures de base (eau, électricité et réseaux de drainage), ou celle qui se trouve sur le marché présentent des défauts de fonctionnement. Même si dans un souci de bien être certain des services et fonctions sont assurés par les commerçants eux-mêmes, se substituant ainsi aux pouvoirs publics et assurer ainsi un accès minimum à tous les usagers.

53 Wilhelm L. ; Wilhelm L. ; (1997) « Les Circuits d'Approvisionnement Alimentaire des Villes et le

Fonctionnement des Marchés en Afrique et Madagascar », FAO, 1997

54 Idem

Il s'est établit ainsi un cercle vicieux : les commerçants estimant que l'ensemble des services pour l'organisation desquels ils payent déjà et auxquels ils ont droit, ne leur sont pas rendus. Ils considèrent donc que la taxe perçue sur le marché est une ponction fiscale injustifiée et s'acquittent imparfaitement de leurs droits de place. De leur côté, les pouvoirs publics se montrent hésitants alors à améliorer substantiellement le recouvrement de ces droits (a fortiori de les augmenter) dont les recettes sont pourtant essentielles à leur budget. Ceci limite d'autant leurs possibilités de modernisation, d'extension ou de création d'équipements marchands. On constate, par ailleurs, de nombreuses dérives dans la gestion du marché : taxations souvent abusives des petites détaillantes, ententes avec les plus grands commerçants, fraudes multiples de la part de collecteurs insuffisamment rémunérés et insuffisamment formés.

Le développement et la modernisation des équipements marchands et des espaces commerciaux doivent constituer un objectif prioritaire pour les collectivités locales. Comme le souligne Gnammon-Adiko A. « Concevoir des marchés fonctionnels et des réseaux de communication demeure leur tâche phare. Les collectivités locales doivent, par conséquent, considérer ces investissements comme une obligation de leur mission »55. Aujourd'hui, les nombreux risques et les carences générales que fait ressortir le marché de Mont-Bouët sont telles que les autorités locales manquent d'éléments pour apprécier les priorités en matière d'intervention : par quel bout commencer, quelle hiérarchie dans les actions, quels en seront les différents coûts, les différents impacts, etc., avec quels acteurs, de quelles informations disposer pour pouvoir intervenir ? Il est alors nécessaire de les appuyer dans la mise en oeuvre d'une stratégie globale sur le secteur des marchés, les aider à clarifier les objectifs poursuivis, leur fournir les éléments d'informations dont elles ont besoin.

Améliorer la gestion et le fonctionnement de l'une des "vitrines commerciales librevilloise" est aujourd'hui une des missions à laquelle les pouvoirs publics en charge de la collectivité locale se doivent de répondre, dans la mesure où il est impératif d'améliorer le rendement de leurs redevances, afin de faire face à leurs obligations de service public. Cette notion de service public local, à caractère social fort, est particulièrement importante dans la période actuelle et certainement pour longtemps encore.

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55 Gnammon-Adiko A. ; (1996) « Les femmes, la restauration rapide et l'aménagement de la ville

d'Abidjan », Food, nutrition and agriculture, no17-18.

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· Google Earth : Image satellite de Libreville (le marché de Mont-Bouët)

81

Loi n° 77/80 du 26 novembre 1980
Instituant le bail à construction
dite « Loi MINKO »

82

L'Assemblée Nationale a délibéré et adopté ;

Le Président de la République, Chef du Gouvernement promulgue la loi dont la teneur suit :

Article premier : Constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s'engage, à titre principal, à éditer une ou plusieurs constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état pendant toute la durée du bail.

Art. 2 : le bail à construction est consenti par les titulaires de titre foncier ainsi que par les personnes bénéficiaires d'un décret d'attribution à titre provisoire ou d'un permis d'occuper.

Art. 3 : le bail à construction est conclu pour une durée déterminée comprise entre 6 et 25 ans, qui ne peut être prolongée par tacite reconduction.

La durée maximum du bail est fonction du montant de l'investissement à caractère immobilier réalisé par le preneur. Un décret pris en Conseil des Ministres fixera le maximum de la durée des baux à construction en fonction de l'importance de l'investissement.

Art. 4 : Le bail à construction est constaté par un acte authentique qui devra indiquer entre autres mentions :

- l'identité complète des parties, date et lieu de naissance, nom du conjoint,

nationalité et profession ;

- les titres de propriétés ou d'occupation du bailleur ;

- les coordonnées cadastrales et foncières du terrain à bâtir ;

- la nature et la valeur des constructions existantes ou à édifier ;

- la durée du bail et le montant du loyer périodique ;

- les obligations respectives des parties ;

- les clauses de révision du loyer s'il y a lieu ;

- les clauses que le bail ne pourra être exécuté qu'après l'expiration du délai

d'opposition prévu à l'article 14 ci-après et en cas de d'appel après décision de la

juridiction saisie.

Les baux à construction conclus verbalement sont nuls de même droit, même s'ils ont reçu un commencement d'exécution.

Art. 5 : Le bail à construction confère au preneur un droit réel immobilier qui s'analyse en droit de superficie.

Les parties conviennent de leurs droits respectifs de propriété sur les constructions existantes ou sur celles à édifier, ainsi que du montant du loyer périodique.

Art. 6 : Le preneur peut céder tout ou une partie de ses droits ou les apporter en société. Le cessionnaire ou la société est tenu des mêmes obligations que le cédant qui en reste le garant.

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Le preneur pourra hypothéquer son droit de même que les constructions édifiées sur le terrain loué, qui pourront être saisie dans les formes prescrites par la saisie immobilière. La durée de ces hypothèques ne peut excéder la durée du bail.

Le preneur peut consentir des servitudes passives indispensables à la réalisation des constructions prévues par le bail.

En cas de d'expropriation pour cause d'utilité publique, les indemnités profitent au bailleur et au preneur ou prorata de la durée amortie pour ce qui concerne les constructions.

Art. 7 : Pendant la durée du bail, le preneur est tenu à toutes les charges, taxes et impôts relatif tant aux constructions qu'au terrain.

Il tenu de maintenir les constructions en bon état, d'entretenir et d'effectuer les réparations de toute nature. Toutefois, il n'est pas obligé de reconstruire les bâtiments s'ils ont péri par cas forfaits ou de force majeure ou s'agissant de bâtiments existants au moment de la passation du bail par vice de construction antérieure audit bail.

Il répond de l'incendie des bâtiments existants et de ceux qu'il a édifié.

Sauf stipulation contraire du bail, il peut démolir, en vue de les reconstruire, les bâtiments existants.

Art. 8 : Enfin de bail, le bailleur devient propriétaire des constructions et profite des améliorations apporté par le preneur. La remise des constructions au bailleur en fin de contrat n'est pas assimilée à une vente.

Art. 9 : Les hypothèques, les servitudes passives autres que celles prévues au troisième alinéa de l'article 6 et toutes autres charges nées du chef preneur et notamment les baux et titres d'occupation consentis aux tiers portant sur les constructions s'éteignent de plein droit à l'expiration du contrat de bail.

Toutefois, si le bail prend fin avant son terme normal, par résiliation judiciaire ou amiable, les privilèges et hypothèques, visées au précédant alinéa et régulièrement inscrits, suivant le cas, avant la publication de la demande en justice tendant à obtenir la résiliation ou avant la publication de l'acte ou de la convention la constatant, ne s'éteignent qu'à la date primitivement convenue pour l'expiration du bail, à moins que les parties du bail et les tiers bénéficient en soient convenus autrement.

Art. 10 : Si, pendant la durée du bail, les constructions sont détruites par des cas forfaits ou de force majeure la résiliation pourra être prononcée par décision de justice, qui statuera également sur les indemnités qui pourraient êtres dues

Art. 11 : Le prix du bail est constitué en partie par la remise des constructions au bailleur en fin de contrat et en partie par le paiement en espèce d'un loyer périodique.

Art. 12 : Les parties doivent dans le délai de deux mois après la signature du contrat soumettre celui-ci au visa du Directeur Générale des Domaines, faute de quoi, ledit contrat est considéré comme nul et de nul effet.

84

85

La partie qui requiert le visa doit déposer en même temps que le contrat les coordonnées cadastrales du terrain et le devis descriptif et estimatif des travaux à réaliser. Récépissé du dépôt de ces documents est donné au déposant

Art. 13 : Les actes assujettis au visa doivent être déposés en trois exemplaires dans le délai de deux mois à la Direction Générale des Domaines pour les contrats qui ont pour objet les terrains situés dans la province de l'Estuaire et, en ce qui concerne les baux ayant pour assiette les terrains situés dans les autres provinces, auprès des Chefs de Services du Cadastre, lesquels sont tenus, de les transmettre à la Direction Générale des Domaines dans les plus brefs délais. Récépissé du dépôt est délivré aux intéressés et mention en est faite sur un registre ad-hoc ainsi que sur les actes.

Art. 14 : Le Directeur Général des Domaines statue dans les trois mois qui suivent le dépôt de la demande.

L'absence de notification de refus du visa dans le délai fixé ci-dessus équivaut à un avis favorable.

Le refus de visa est motivé.

Les parties peuvent faire opposition dans un délai de trois mois à partir de la notification de la déclaration de refus du visa, devant la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême qui statue en dernier ressort. Elles peuvent aussi opposer à la convention les modifications adéquates et reprendre les formalités d'obtention du visa.

La décision de la Chambre Judiciaire et la Cour Suprême ne peut faire l'objet d'un pouvoir en cassation

L'opposition exercée par les parties est suspensive à l'exécution du bail.

Art. 15 : Le visa prévu par l'article 12 ne remplace pas la formalité d'enregistrement, laquelle demeure obligatoire, étant entendu que les délais normaux d'enregistrement des baux à construction courent du jour où le visa a été réputé acquis.

Art. 16 : Les baux à construction qui ont pour assiette les terrains non immatriculés font l'objet après visa et dans les délais fixés par la loi foncière d'un dépôt dans un registre spécial tenu par Conservateur de la Propriété foncière en vue de leur publication à la diligence et aux frais du preneur.

Les baux à construire qui ont pour assiette des terrains immatriculés font l'objet après visa et dans les délais fixés par la loi foncière, d'une transcription des les Registres fonciers.

Art. 17 : Pendant un délai d'un an, à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, les preneurs, dont les baux à construction auront été conclus antérieurement, devront requérir le visa prévu à l'article 12 ci-dessus. Passé ce délai, les baux qui n'auront pas été soumis à cette formalité seront tenus pour nuls pour la période restant à courir.

Les baux ayant déjà fait l'objet d'une inscription dans les Registres fonciers ne rentrent pas dans le champ d'application des dispositions visées à l'alinéa précédant.

Si la nullité prévue à l'alinéa premier est encourue, le bail à construction est transformé en un bail ordinaire pour le temps restant à courir, moyennant les indemnités qui pourraient êtres dues.

Art. 18 : Les dispositions des articles 4, 6, 8, 9, 11, 12 et 17 seront d'ordre public.

Les contestations qui pourraient naître de l'application de la présente loi sont de la compétence des juridictions en fonction de l'investissement.

Art. 19 : Un décret fixera les modalités d'application de la présente loi et notamment la durée des baux à construction en fonction de l'investissement.

Art. 20 : La présente loi sera enregistrée, publiée selon la procédure d'urgence et communiquée partout où besoin sera.

Fait à Libreville, le 26 novembre 1980

Le Chef de l'Etat

El Hadj Omar BONGO

Par le Président de la République

Chef du Gouvernement le Premier Ministre.

Léon MEBIAME

Le Ministre d'Etat

Ministre des Domaines de l'Enregistrement de la Conservation Foncière de l'Habitat, de l'Urbanisme et du Cadastre.

Henri MINKO

Le Ministre de la Justice Garde des Sceaux

Théodore KWAOU

Décret n° 001270/PR/MINDECFHUC
portant application de la « Loi MINKO »
instituant le bail à construction.

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Le Président de la République, Chef du Gouvernement, Vu la constitution :

Vu le décret n° 278/PR et /PR du 27 février 1980, fixant la composition du Gouvernement, ensemble les textes modifiants subséquents ;

Vu la loi n° 77/80 du 26 novembre 1980 instituant le bail à construction : La Chambre Administrative de la Cour Suprême constituée :

Le Conseil des Ministres entendu ;

D E C R E T E

Article premier : La durée des baux à construction prévue par l'article 3 de la loi n° 77/80 susvisée comme suit :

VALEUR DE L'INVESTISSEMENT

DUREE MAXIMUM DES BAUX

Entre 5 et 15 millions

6 ans

Entre 15 et 30 millions

8 ans

Entre 30 et 45 millions

12 ans

Entre 45 et 60 millions

18 ans

Entre 60 et 100 millions

20 ans

Au dessus des 100 millions

25 ans

Art. 2 : Le Ministre des Domaines, de l'Enregistrement, de la Conservation Foncière, de l'Habitat, de l'Urbanisme et du Cadastre est chargé de l'application du présent décret qui sera enregistré publié selon la procédure d'urgence et communiqué partout ou besoin sera.

Fait à Libreville, le 3 décembre 1980

Le Chef de l'Etat

El Hadj Omar BONGO

Par le Président de la République, Chef du Gouvernement

Le Premier Ministre

Léon MEBIAME

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Le Ministre d'Etat,

Ministre des Domaines, de l'enregistrement de la Conservation Foncière,

de l'Habitat, de l'Urbanisme et du Cadastre.

Henri MINKO

88

NOTE CIRCULAIRE n° 1650/MINDECF/HUC-DGDE du
15 JUILLET 1981, pour Obtenir la durée maximum d'un bail
à construction par application des dispositions
du décret n°1.270/PR du 3 décembre 1980

La durée maximum des baux à construction, mentionnée à l'article 1er du décret n° 1270/PR du 3 décembre 1980 s'applique au montant supérieur de la tranche d'investissement de 15.000.000 de francs CFA, 8 ans à 30.000.000 de francs CFA, 20 ans à 100.000.000 de francs CFA et 25 ans et plus à plus de 100.000.000 francs CFA

A l'intérieur de chacune des tranches d'investissement, le calcul de la durée maximum se détermine de la façon suivante :

1. Pour la 1ère tranche de 5 à 15.000.000 de francs CFA, on applique la formule :

D = où D est la durée maximum cherchée et « I »

L'investissement donné. La durée maximum ainsi trouvée est arrondie au mois supérieur : par exemple, pour I = 7.000.000 de francs CFA.

D = = 2,8 ans ou 2 ans et 9,6 mois ou arrondis à 2 ans et 10 mois.

2. pour les 4 autres tranches, la durée maximum « D », correspondant à un investissement « I », est égale à la durée maximum de la tranche au dessus de celle où se situe « I », augmentée d'une durée calculée en fonction de l'écart existant entre l'investissement « I » et le montant minimum de la tranche où se situe, et proportionnellement à l'écart existant entre la durée maximum autorisée pour la tranche où se situe « I » et celle de la tranche inférieure.

Exemple :

1. I = 18.000.000 de francs CFA :

D = 6 ans +

D = 6 ans + (3/15) x 2 ans

D = 6 ans + (6 ans / 15)

D = 6 ans + 0.4 an

D = 6 ans et 4,8 mois

En arrondissant D = 6 ans et 5 mois

89

2. I = 38.000.000 de francs CFA

D = 8 ans +

D = 8 ans + (8/15) * 4 ans

D = 8 ans + 2,13 ans

D = 10,13 ans

D = 10 ans et 1,56 mois

En arrondissant D = 10 ans et 2 mois

Fait à Libreville, le 15 juillet 1981

Le Ministre des Domaines

de l'Enregistrement de le Conservation

Foncière de l'Habitat de l'Urbanisme et du cadastre.

Henri MINKO

PROVINCE DE L'ESTUAIRE RÉPUBLIQUE GABONAISE

90

COMMUNE DE LIBREVILLE UNION - TRAVAIL - JUSTICE

DÉLIBÉRATION N° 10 CM-ML

PORTANT CRÉATION D'UNE REDEVANCE SUR LA LOCATION DES KIOSQUES ET DES STANDS DANS LES MARCHES MUNICIPAUX.

LE CONSEIL MUNICIPAL DE LA COMMUNE DE LIBREVILLE

Vu la constitution et les textes modificatifs subséquents ;

Vu l'ordonnance N° 24/PR/MI/TC du 6 avril 1963, portant organisation des municipalités gabonaises et déterminant leurs règles de fonctionnement ;

Vu l'ordonnance N° 39/78 du 15 avril 1978, portant organisation de la municipalité de Libreville ;

Vu le décret N° 00993/PR du 12 septembre 1972, portant régime financier et comptable des collectivités secondaires ;

Vu le décret N° 388/PR du 5 mars 1983, portant nomination du Maire et des Maires Adjoints de la Commune de Libreville ;

Vu l'arrêté N° 001/CM/ML/SG du 4 juillet 1984, portant convocation du Conseil Municipal en session,

A adopté en sa séance du 13 juillet 1984, la délibération dont la teneur suit :

Article premier : Il est institué au profit de la Commune de Libreville une redevance sur la location des kiosques et des stands dans les marchés municipaux de Libreville.

Art. 2 : Les tarifs de cette redevance sont fixés comme suit : - pour la location des kiosques :

o Marché de Mont-Bouët ; loyer unique : 45.000 francs par mois ;

o Autre marché ; 25.000 francs par moins.

- pour la location des stands :

o

91

Marché de Mont-Bouët ; loyer unique : 700 francs par jour

o Autres marchés ; 500 francs par jour.

Art. 3 : Le paiement de la redevance sur la location des kiosques et des stands sera effectué trimestriellement et d'avance, sur rôle nominatif établi par l'Administration Communale, auprès de la caisse du Receveur Municipal.

Art. 4 : Les Commerçants locataires des kiosques et stands sont tenus après chaque paiement d'en présenter les pièces justificatives délivrées par la Recette Municipale.

000000 / 00 0000

92

Province de l'Estuaire République Gabonaise

Commune de Libreville Union Travail Justice

Conseil Municipal

DELIBERATION N° 002/2004/CL-CM

REGLEMANTANT LA LOCATION DES KIOSQUES
ET STANDS DANS LES MARCHES MUNICIPAUX

LE CONSEIL MUNICIPAL DE LIBREVILLE

Vu la constitution ;

Vu les décrets n°00127/PR et n°00128/PR des 26 et 27 janvier 2002, fixant la composition du Gouvernement, ensemble les textes modifiants subséquents ;

Vu la loi n° 19/96 du 15 avril 1996, relative à l'élection des membres des Conseils départementaux et des Conseils municipaux ;

Vu la loi n°15/96 du 6 juin 1996 relative à la décentralisation ;

Vu le décret n°00993/PR du 12 septembre 1972, portant régime financier et comptable des Collectivités secondaire ;

Vu la délibération n°10/CL-CM du 13 juillet 1984, portant location des kiosques et stands dans les marchés municipaux ;

Vu l'arrêter n°00082/PE/CL-SG du 13 avril 2004, portant convention du Conseil municipal en session ordinaire ;

Régulièrement constitué et réuni en séance ordinaire le 13 avril 2004

Le quorum étant atteint ainsi que l'atteste émargée des présences jointe au procès-verbal ; Vu le procès-verbal de la session ordinaire du 19 avril 2004 ;

Vu la délibération n°001/2004 CL-CM du 19 avril 2004 portant adoption du budget primitif de l'exercice 2004 ;

A adopté la délibération dont la teneur suit :

Article premier : la présente délibération modifie l'article 2 de la délibération n°010/CL-CM du 12 juillet 1984 portant création d'une redevance sur la location des kiosques et des stands sur les marchés municipaux.

93

Article 2 : l'occupation des kiosques et stands dans les marchés municipaux est soumise à la signature préalable d'un bail entre le Maire et le locataire donnant droit au payement d'un loyer.

Article 3 : le montant des loyers est fixé comme suit : ? Kiosques :

Marché de Mont-Bouët, loyer unique 60.000 FCFA/mois

Autres marchés, 32.000 FCFA/mois

? Stands :

Marché de Mont-Bouët, loyer unique 20.000 FCFA/mois

Autres marchés, 10.000 FCFA/mois

Article 4 : le payement du loyer est effectué trimestriellement et d'avance auprès du Receveur Municipal conformément au rôle nominatif établie pas l'administration communale.

Article 5 : la cession ou la sous-location des kiosques et des stands est strictement prohibée. Les contrevenants s'exposent à des sanctions financières sans préjudices des poursuites pénales prévues par la loi.

Article 6 : Le Maire et le Comptable Public sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution de la présente délibération.

Article 7 : la présente délibération qui abroge les dispositions antérieures, prend effet à compter de sa date de d'approbation, et sera enregistrée, publiée et communiquée où besoin sera.

Fait à Libreville le 19 avril 2004.

Par le Président du Conseil Municipal André Dieudonné Berre

94

95

Sommaire 2

Dédicace 4

Remerciements 5

Avant propos 6

Introduction Générale 10

Chapitre I Le marché de Mont-Bouët dans l'espace librevillois 18

I.1 Libreville en bref 18

I.2 Le marché de Mont-Bouët 19

Le site 19

La situation 20

I.2.1 Les construction 23

I.2.2 Les critères économiques 25

I.3 Le rôle du marché de Mont-Bouët dans l'approvisionnement et la

distribution et alimentaire à Libreville 27

I.3.1 Un marché d'approvisionnement et distribution 27

I.3.2 Un marché de consommation 27

I.4 Perception et vision locale du marché 29

I.4.1 Un espace de socialisation et un cadre de convivialité 29

I.4.2 Le marché est symbole de puissance et de prospérité du pays 30

I.4.3 La fonction socioculturelle du marché 30

I.4.4 La fonction esthétique et artistique 31

Chapitre II Le marché de Mont-Bouët dans le secteur commercial librevillois 32

II.1 Le secteur de la grande distribution 32

II.1.1 La petite distribution 33

96

II.1.2 Le dynamisme du commerce informel 34

II.2 Les animateurs du marché : grossistes, détaillants et clients 36

II.2.1 Les grossistes et demi-grossistes 37

II.2.2 Les détaillants 38

II.2.3 La municipalité 39

II.2.4 La clientèle 40

Chapitre III : Organisation et fonctionnement du marché de Mont-Bouët 42

III.1 Organisation spatiale et occupation du sol 42

III.1.1 l'occupation du sol et densité 44

III.2 Les infrastructures, services et situation sanitaire 46

III.2.1 Accès, circulation et drainage des eaux 46

III.2.2 Les services à Mont-Bouët 46

III.3 Les équipements et installations de ventes 49

III.3.1 Typologie des installations 50

III.3.2 Typologie des produits 54

III.4 La contribution de Mont-Bouët à la fiscalité locale 56

III.4.1 Avoir une place sur le marché 57

III.4.1.1 La sous-location et la revente de pas 58

III.4.1.2 les fraudes sur le loyer et la taxe journalière 59

III.4.1.3 le phénomène d'accaparement et les conflits de territoire 59

Chapitre IV : Le marché de Mont-Bouët : un espace à risque. Les contraintes

de fonctionnements 60

IV.1 Un espace exigu et enclavé 61

IV.1.1 Les défauts de conception, les carences des infrastructures de

base et les dysfonctionnements 61

IV.1.2 Insuffisance des infrastructures 62

97

IV.2 Un espace désarticulé et malsain 63

IV.2.1 Mont-Bouët : un environnement insalubre 69

IV.2.1.1 l'évacuation des déchets liquides 70
IV.2.2 L'entretien et le nettoyage du marché par les commerçants 72

IV.2.2.1 les structures sanitaires 73

Conclusion Générale 74

Bibliographie 78

Annexes 81

Table des matières 94






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