CONCLUSION
Les populations qui vivent dans l'interzone Dja-parc national
de Nki sont déjà assez informées du projet de conservation
de leur zone. Cependant, elles craignent encore parce que au regard des autres
projets visant la conservation des ressources naturelles, elles pensent
qu'elles ne tireront pas profit de cet initiative de conservation. Les
différents promoteurs de ce projet ont mis en place plusieurs moyens qui
leur permettront de réussir la conservation. Certains de ces moyens
à l'instar de la sensibilisation et du financement des projets incitent
les populations locales à oeuvrer pour la conservation. Cette zone en
conservation est entrain d'accueillir de nouvelles infrastructures et une
immigration des populations à la recherche du travail qui entrainent une
nouvelle dynamique pour ce massif forestier.
20 PA'AH P. A.(2010) Droits des communautés
confrontées aux zones minières exclusives
transfrontalières : cas des communautés riveraines des mines de
fer et d'or de mbalam au Cameroun. P9
21 DURKHEIM, E., Les règles de la méthode
sociologique, 13ème édition, Paris, PUF,
2007, p. 112.
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CONCLUSION GENERALE
La présente étude qui est intitulée
« les moyens d'existence des populations dans l'interzone
Réserve de Biosphère du Dja-parc national de Nki :
compatibilité ou incompatibilité avec les objectifs de
conservation », visait à identifier les différentes
activités des populations de cette zone et de montrer leurs impacts sur
la conservation. Pour cela nous avons posé la question de savoir si les
activités menées par les populations dans l'interzone
Réserve du Dja-parc national de Nki pour trouver leurs moyens
d'existence sont compatibles avec les objectifs de conservation. L'objectif
visé ici était d' « établir le niveau/degré de
compatibilité-incompatibilité entre les activités humaines
menées dans l'interzone Réserve du Dja -Parc national de Nki et
les objectifs de conservation ». De manière particulière
s'agissait pour nous de :
- Relever les facteurs naturels et socio-économiques
qui favorisent le développement des activités dans l'interzone
;
- Caractériser les moyens d'existence des populations ;
- Analyser les différentes techniques avec lesquelles sont
menées ces activités ;
- Mettre en perspective les activités menées et les
stratégies de conservation.
Pour atteindre ces objectifs de recherche, nous avons
formulé une hypothèse principale
qui stipule que « les activités menées dans
l'interzone sont compatibles pour l'heure avec les objectifs de conservation
étant donné que les densités humaines sont faibles ».
Mais de façon spécifique nous avons considéré que
:
- Le milieu naturel et les composantes
socio-économiques actuels sont à l'origine de la richesse de
cette zone dont la valorisation dépend des perspectives de l'acteur ou
des acteurs concernés ;
- La chasse sous toutes ses formes y est prédominante
et constitue la principale source de revenus ;
- Les différentes activités sont
développées avec des outils rudimentaires et des techniques
traditionnelles qui réduisent la pression sur la forêt ;
- L'accroissement démographique et la création de
nouvelles infrastructures
stimulent une dynamique qui à long terme pourrait
être néfaste pour la conservation.
Pour vérifier cette hypothèse nous avons
adopté une démarche hypothético-déductive. La
recherche documentaire et la collecte des donnés primaires sur le
terrain nous ont permis d'obtenir les résultats suivants qui ressortent
dans les différents chapitres.
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Le milieu physique offre des conditions favorables au
développement de nombreuses activités humaines parmi lesquelles
les activités agricoles qui constituent la principale occupation des
enquêtés. Il regorge aussi des potentialités importantes
pour le développement de la chasse, la collecte des PFNL et la
pêche. Le petit commerce et l'artisanat y sont aussi pratiqués
mais de façon négligeable. L'exploitation minière est en
plein essor dans cette zone. Dans cette zone enclavée et peu
peuplée, il existe donc de nombreux types de ressources (forêt,
mines, PFNL, faune...) qui intéressent de nombreux acteurs avec des
objectifs différents. Ces différents acteurs n'ont pas la
même perception sur la valorisation des ressources de ce massif
forestier. Pour les populations locales il faut exploiter ces ressources pour
se nourrir et pour se développer ; pour les exploitants légaux et
clandestins, il faut tirer profit de ces ressources et pour l'État et
les ONG de conservation cette exploitation doit être faite de
façon durable. Tout ceci contribue à confirmer notre
hypothèse selon laquelle « le milieu naturel et les composantes
socioéconomiques actuels sont à l'origine de la richesse de cette
zone dont la valorisation dépend des perspectives de l'acteur ou des
acteurs concernés.»
Par ailleurs, cette abondance des ressources est à
l'origine du développement de nombreuses activités comme
l'agriculture, la chasse, la récolte des PFNL, la pêche,
l'artisanat,... Les populations tirent de ces activités des revenus
assez considérables qui leur permettent d'assurer leur survie.
L'enclavement, les faibles densités des populations et les
difficultés de stockage des produits agricoles rendent difficile la
commercialisation des produits agricoles. Cependant les produits de la chasse
constituent la seule source de protéines animales des populations de
notre zone d'étude. Ces produits sont sollicités aussi bien par
les populations autochtones que celles venues des autres localités et
des villes. Les revenus mensuels tirés de cette activité ont
été estimées à 83 730 Fcfa. Comparé à
ceux de l'agriculture qui s'élèvent à 75 910 Fcfa, la
vente des produits de la chasse constitue la première source de revenus
des populations de l'interzone. A travers cette dimension de la
réalité sociale, se vérifie notre hypothèse selon
laquelle « la chasse sous toutes ses formes y est prédominante et
constitue la principale source de revenus.»
Sur la base des principaux critères de
compatibilité et d'incompatibilité que nous avons établis,
nous pouvons dire que ces différentes activités ne constituent
pas pour le moment un handicap à la conservation de cette zone. En
effet, 96 % des enquêtés conservent les arbres dans leurs champs,
74% ont une durée de jachère supérieur à 4 ans. 84%
des chasseurs déclarent qu'ils utilisent le piège comme outil de
chasse. Bien que certaines techniques comme le fusil, le câble d'acier et
la pêche par empoisonnement ne soient pas compatibles avec la
conservation, les techniques les plus utilisées sont de type
traditionnel et
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le matériel est rudimentaire et primitif. Les faibles
densités des populations, l'abondance des ressources et ces techniques
traditionnelles réduisent les impacts de ces activités sur
l'environnement. C'est là aussi que le troisième aspect de notre
hypothèse se trouve confirmé, en ce sens que « les
différentes activités sont développées avec des
outils rudimentaires et des techniques traditionnelles qui réduisent la
pression sur la forêt.»
Cette zone n'abrite pas seulement les projets de conservation.
Elle est en train d'accueillir de nouveaux projets comme ceux miniers et des
infrastructures de transport. Ces différents projets drainent vers cette
localité de nombreuses populations. De nouveaux besoins comme ceux en
terres agricoles, en bois de chauffe, en protéines animales etc se font
de plus en plus sentir dans cette zone. Tous ces idées confirment
l'hypothèse qui stipulait que «l'accroissement démographique
et la création de nouvelles infrastructures stimulent une dynamique qui
à long terme pourrait être néfaste pour la
conservation.»
À la fin de cette étude, nous pouvons dire que
les activités menées par les populations dans l'interzone sont de
type traditionnel et de ce fait, elles ont des impacts peu significatifs sur la
conservation. Cette recherche nous a permis de comprendre que dans un contexte
de faibles densités humaines (dans l'interzone les densités sont
de 1,04 hbts/km2) et sans facteurs extérieurs qui doivent
pousser les populations à augmenter la production, les populations
développent des techniques d'exploitation des ressources qui leur
permettent de conserver leur milieu. Ces activités combinées aux
différentes techniques et aux faibles densités des populations
nous permettent de confirmer notre hypothèse principale.
Au cours de cette recherche, nous avons fait face à
l'hostilité de certaines populations de cette zone. Nous avons eu
également des difficultés pour communiquer avec certaines
personnes enquêtées. Nous avons souvent fait recours à un
traducteur pour aider dans nos échanges. Les pistes suivantes pourraient
être explorées dans les études ultérieures,
notamment une étude approfondie sur l'impact des retombées de la
conservation dans la lutte contre la pauvreté dans l'interzone.
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