III. REACTION DES POPULATIONS FACE AUX PROJETS DE
CONSEVATION.
III.1. Une population sceptique à l'égard
des retombées des projets.
Les projets de conservation de l'interzone ont
été conçu et mis en place sans une consultation
préalable des populations locales. Certes ces projets visent une
amélioration des conditions de vie de ces populations. Toutes les
promesses faites à leur endroit pour l'amélioration de leurs
conditions de vie les laissent indifférents. Selon eux « l'Etat
veut une fois de plus nous tromper pour atteindre ses objectifs. Le parc
national de Nki a été établi depuis 2005 et les
populations n'ont rien en retour jusqu'à nos jours.»
déclare le chef de Ngoyla village. "Imaginez qu'un matin, on
arrive chez vous et qu'on vous informe que votre forêt est
désormais protégée avec tout ce que cela implique. Le tout
sans vous demander votre avis et sans aucune compensation de quelque forme que
ce soit !" clame un agriculteur dans le bulletin Sffancommunauté
(Sauvegarde de la faune et de la flore dans l'arrondissement de Ngoyla) du 15
septembre 2011. Ces populations ont des mauvais souvenirs sur les autres
projets de conservation qui ont été mis en place dans leur zone.
Elles pensent que les projets de conservation seront mise en oeuvre de la
même manière que les autres projets de conservation (RBD, parc
national de Nki et le parc national de Boumba-Bek) qui sont les pierres d'angle
de l'initiative TRIDOM au Cameroun. La RBD s'est superposée aux
territoires traditionnels des Baka ce qui a poussé la plupart à
s'installer ailleurs. Ils ont été donc expulsés de leur
forêt et ils sont mis à l'écart dans la gestion de cette
forêt. Les limites orientales du parc national de Boumba-Bek ont
été décidées ailleurs à l'insu des
résidents et sans leurs consentements. De plus la répression
faite dans leur localité est une « répression sauvage
». Les promesses faites lors de la mise en place du PNN ne sont pas encore
tenues. Ils sont persécutés par les écogardes à
travers les saisies abusives. « Ils confisquent nos gibiers, le seul
que nous avons pour nourrir notre famille. Nous ne pouvons plus manger la
viande en paix ; ils fouillent même nos marmites. Tu tues une gazelle qui
détruit tes cultures, ils t'envoient en prison en disant que tu es un
braconnier alors qu'ils sont des complices des
118
braconniers et des opérateurs commerciaux qui
trafiquent la viande de brousse. Où est donc notre
bénéfice dans la conservation ? » s'indigne un
habitant. Il résume la situation par une plaisanterie qu'il tient de
leur ancien maire : « Toute autorité qui est affectée
à Ngoyla arrive en pleurant, du fait de notre enclavement, et en repart
en pleurant, regrettant de ne plus jouir des fruits du braconnage qu'ils
pratiquent tous une fois installés.» Ces exemples
négatifs ont portés beaucoup de populations de la zone à
associer les projets de conservation à une expulsion forcée sans
compensation, à l'élimination de leurs droits sur leurs
territoires et à une marginalisation socio-économique. Ces
populations pensent que l'amélioration de leurs conditions de vie qui
est promis par les promoteurs de la conservation est un moyen utilisé
pour détourner leur attention afin de confisquer leur forêt. Elles
sont habitées par un esprit de révolte lorsqu'on leur parle de la
conservation de cette zone.
Ces populations se plaignent surtout contre l'Etat comme nous
montre le graphique ci-après :
100
E
40
Effe5ctifs
ect
50
fs
60
90
80
70
30
20
10
0
Promoteurs du projet
27
ONG Etat Exploitants
forestiers
84
87
16
Source : enquête de terrain, Août-septembre 2011.
Figure N°20 : Acteurs concernés par les
récriminations des populations dans l'interzone.
De ce graphique on constate que les populations se plaignent
plus contre l'Etat. Selon elles c'est lui qui devait les sensibiliser et
développer leur localité, mais il ne les sensibilise pas ; il ne
les implique pas dans la gestion des ressources et elles n'ont pas
d'alternatives. On constate ensuite que les plaintes contre les ONG comme le
WWF sont également très considérables. Elles affirment que
les saisies effectuées par le personnel du MINFOF sont abusives. Pour
cette raison elles ont souvent de très mauvaises relations avec les
agents de cet ONG. Freudenthal E. et al (op cit.) mentionne qu'au sorti du
travail de terrain mené par FPP (Forest Peoples Programme) en 2010
«le WWF était encore très impopulaire auprès de
la
119
population locale du fait qu'il promeut l'imposition de
restrictions à la chasse, à tel point que les habitants de la
ville de Ngoyla refusaient de vendre des produits alimentaires au personnel du
WWF». Les promoteurs des projets viennent en troisième place,
les populations affirment qu'elles n'ont pas été
impliquées dans la conception du projet. Les plaintes contre les
exploitants forestiers sont enregistrées seulement dans les
localités où l'exploitation forestière est effective :
Messok, Zoulabot 2 et Nkondong 1.
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