I. CADRE THEORIQUE
1. Problématique
Dans le monde 70% des terres arides sont touchées par
la désertification et chaque année ce sont dix (10) millions
d'hectares de terres arables qui se dégradent. Ce
phénomène touche aujourd'hui gravement cent trente (130) millions
de personnes dont soixante (70) millions en Afrique. En ce qui concerne les
terres émergées, le tiers soit quatre (04) milliards d'hectares
est menacé par la désertification (PIERSOTTE, 2005). Quant au
continent africain, il concentre 45 % des surfaces désertiques du globe
et 50 % des surfaces Sony occupés, soit par les déserts les plus
chauds, soit voués à la désertification et d'autres
facteurs (CODESRIA ,1992). Aussi le taux de déboisement est de l'ordre
de 0.22% dans le monde alors qu'en Afrique ce taux est de 0.78 % (FAO, 2000).
Encore environ 37 % des terres en Afrique sont affectées par la
sécheresse et la désertification.
En effet, selon Sue WILLIAMS, les deux tiers des terres arides
de la planète, qui abritent ses plus grands «greniers », sont
sérieusement dégradées. Ce dernier appréhende la
désertification non pas comme l'extension des déserts existants,
mais comme la dégradation des terres dans des zones arides, semi-arides
et subhumides sèches, essentiellement à cause des variations
climatiques (comme la sécheresse) et des activités humaines non
raisonnées (FAYE, 2011).
En outre, Brabant P. (2009) soutient que la dégradation
des terres a considérablement augmenté depuis une soixantaine
d'années, au Nord comme au Sud.
Dans la même lancée Lester Brown, (2001)
révèle qu'un tiers de toutes les terres cultivées perdent
aujourd'hui leurs couches arables plus vite qu'elles n'en gagnent, ce qui
amoindrit leur productivité.
Notons aussi qu'au début des années 1970, la
succession d'années sèches a eu comme conséquence
principale, du fait de la prédominance des cultures sous pluies, une
évolution chaotique des productions agricole.
Par ailleurs, La dégradation actuelle de
l'environnement ou encore des ressources naturelles constitue un
problème préoccupant. L'impact des modifications de
l'environnement sur les
populations, sur le fonctionnement des
écosystèmes et sur le développement économique et
social est devenu une préoccupation majeure (Guéye, 2010).
Ainsi, La dégradation des terres est un grave
problème, qui dépasse les frontières nationales, les zones
écologiques et les groupes socio-économiques. Elle peut avoir des
conséquences catastrophiques pour les habitants des zones arides.
En effet, les zones arides regroupent les populations les plus
pauvres de la planète et celles-ci sont particulièrement
vulnérables aux effets de la détérioration des sols. Cette
dernière en revêt un caractère complexe où se
mêlent l'action de la nature et notamment la sécheresse et celle
des hommes.
Depuis plus de quatre (4) décennies, les pays du Sahel
et le Sénégal en particulier sont confrontés à une
dégradation accélérée de leurs ressources
naturelles et de leur couverture végétale (Gaye et al. 2000 ;
Diagne, 2001 ; Batterbury et al. 2001 ; Hulme, 2001). En plus ,les effets
néfastes de la dégradation des terres agricoles dépassent
aujourd'hui largement le monde rural et affectent toute l'économie
nationale, essentiellement tributaire du secteur rural.
Par ailleurs, la dynamique de la dégradation des
conditions climatiques dans la commune de Diossong a eu des effets
néfastes sur l'environnement.
Ainsi, les ressources naturelles subissent de plus en plus de
fortes pressions liées aux activités humaines qui sont le
principal facteur de dégradation de l'Environnement. Les causes les plus
cités sont l'agriculture industrielle, les feux de brousse et la
pression démographique qui est souvent dénoncée par des
experts qui soutiennent que « les populations humaines en essor rapide
dégradent l'environnement à un rythme
accéléré, notamment dans les pays tropicaux »
(Wilson, 1988).
Ces phénomènes qui sont d'ordre climatiques et
anthropique sont dûs à la baisse de la formation des milieux secs,
arides, semi-arides et désertiques (Mainguet, 1995). Face à cette
situation, les populations, les animaux et les végétaux qui y
vivent, développent des stratégies d'adaptation.3
Pendant les dernières décennies, dans les
régions des savanes il y'avait une grande croissance
démographique résultant d'un taux de fécondité
élevé (7.6 enfant par femme) et d'une forte baisse
13
3 Mainguet M. 1995. L'homme et la
sécheresse.
de la mortalité due à l'augmentation des
activités sanitaires depuis les années 1980. L'effet
immédiat a été l'augmentation des surfaces
cultivées et la disparition des jachères, élément
clé dans l'équilibre du système agricole traditionnel. Les
sols dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne, ont une faible
fertilité intrinsèque et les éléments nutritifs
exportés ne sont pas remplacés de manière adéquate.
Cette dynamique a entrainé une dégradation rapide de la
fertilité des sols, entrainant une baisse de la productivité
agricole (Pourtier, 2001).
D'autres effets s'ajoutent à cela comme la
déforestation, qui est due à l'augmentation du besoin du
combustible (bois de chauffe, pharmacopée, artisanat...) et le
surpâturage dû à l'augmentation croissant du bétail
consécutif au progrès de la santé
vétérinaire. Une autre cause de la dégradation a
été également l'affaiblissement des règles et
pratique d'exploitations traditionnelles. Les structures traditionnelles
villageoises, qui organisaient autrefois l'utilisation équilibré
du terroir se désagrègent aujourd'hui, car cette autorité,
n'a pas intégré la nouvelle situation : la croissance
démographique, l'introduction de nouvelles techniques et la
généralisation de l'économie marchande. Quelques pratiques
traditionnelles, comme la culture itinérante et le paillage des champs,
ont été également abandonnées car elles entrent en
contradiction avec le besoin de l'espace.4
D'autre part, on a conservé quelques pratiques
culturales qui appauvrissent le sol, principalement le recours
systématique au feu. Au niveau du couvert végétal, on
conserve une simplification de l'écosystème (avec la disparition
de beaucoup de types d'arbres), la biomasse diminue ainsi que l'enracinement,
souvent gêné par les techniques culturales (croûtes de
battance et fond de labour).
La couverture du sol est réduite dans le temps (cycle
de 4 à 6 mois) et protège mal la surface du sol contre les rayons
du soleil (les températures extrêmes augmentent) et contre la
battance des pluies (formation de croûtes de battance et d'un fort
ruissellement (Pourtier, 2001).
Au niveau du sol, le climat est plus chaud et plus sec sous
culture et l'énergie est moins bien amortie que sous forêt :
- La litière est très réduite, sauf en cas
de plantes de couvertures ;
- le taux de matière organique, l'activité de la
microflore et de méso faune dimunie ;
14
4 Pourtier R. 2001. Afrique noire
15
- la macroporosité s'effondre au bout de quelques
années, la capacité d'infiltration dimunie ; - le sol devient
plus compact et accuse les discontinuités spatiales : pellicule de
battance et fond de labour.
Dès lors, on comprend que les fuites
d'éléments nutritifs s'accélèrent. De ce fait, les
apports compensatoires diminuent la fertilité physique et chimique de la
terre après des années de cultures intensives.
Avec la dégradation accélérée des
sols et des conditions climatiques, les paysans sont confrontés à
des problèmes majeurs parmi lesquels :
- la baisse de la pluviométrie pendant des
décennies qui ne cesse d'avoir des répercussions
sur le milieu ;
- la baisse des rendements qui conduit à la non
satisfaction des besoins alimentaires ;
- la récurrence du problème d'autosuffisance
alimentaire ;
- la disparition de certains types de cultures qui ne peuvent
germer qu'en milieu humide ;
- l'érosion accélérée due à la
faible couverture du sol, qui devient nu et soumis aux forts
vents qui emportent la bonne terre et laisse le sol nu qui
devient inapte à la culture.
Bref, le déclin de l'agriculture dans la commune de
Diossong résulte de cette situation de découragement des
producteurs, à laquelle s'ajoute une pluviométrie
irrégulière et déficiente. A cela s'additionne une crise
des secteurs, le manque de diversification de la production, la salinisation et
le déboisement qui provoquent une dégradation des sols. Face
à cette situation, il faut chercher des stratégies pour amoindrir
les risques. Ceci exige une innovation ou un changement de stratégie
vers d'autres types de cultures. C'est dans ce contexte de crise agricole que
naisse la culture de l'anacarde.
Ce mémoire permet de contribuer à une meilleure
connaissance de la culture de l'anacarde comme une stratégie adaptative
des paysans de la commune de Diossong, face à la dynamique de la
dégradation des conditions climatiques puisqu'elle reste jusqu'à
présent méconnue. Autrement dit, elle reste encore inconnue et
mal maîtrisée par les populations. C'est dans ce cadre que
s'inscrit notre thématique de recherche.
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Une étude de ce genre suscite des réflexions
autour de plusieurs questions afin de mieux cerner le problème de
recherche.
Questions de recherche
Pour mener à bien ce travail nous posons les questions
suivantes :
Quels sont les facteurs de la dégradation des sols dans la
Commune de Diossong ?
La culture de l'anacarde est-elle une réponse
pertinente face aux contraintes liées à la dégradation du
milieu ?
Quelles sont les méthodes d'entretiens et de protection
qui sont mises en place pour protéger les anacardiers ?
Comment se déroule le système de production des
anacardiers ? Comment s'effectue la commercialisation des noix d'anacarde ?
Quelles sont les contraintes et avantages liés à la
culture de l'anacarde ?
Quelles sont les perspectives qui s'offrent aux producteurs
des noix d'anacarde pour un développement harmonieux ?
1.1. Intérêt, justification du thème et
finalité de la recherche
Inscrite dans le cadre de la recherche sur la culture de
l'anacarde en tant que réponse des paysans, cette étude trouve
son intérêt et justification dans plusieurs raisons.
Face à la vitesse de dégradation des conditions
climatiques, il est important de faire une étude pour contribuer
à la compréhension de cette destruction des terres dans cette
zone. Saisir les facteurs de détérioration des sols serait
important dans le but de réduire considérablement ses effets mais
aussi pour éviter une situation irréversible et essayer
d'analyser les stratégies d'adaptations.
En plus, le choix de ce thème se justifie par le poids
économique que pèse cette culture dans l'économie de la
commune de Diossong. Le souci est donc de mettre en relief, la dynamique de
dégradation des conditions climatiques du milieu et les
stratégies d'adaptation des populations, à travers la culture de
l'anacarde. En dehors de cela, il est intéressant d'analyser la
manière dont les paysans l'entretiennent si nous référons
bien sûr aux autres cultures.
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La finalité est de montrer que la dégradation
des conditions climatiques dans cette partie du delta du Saloum ne concerne pas
seulement les sols mais elle affecte aussi le couvert végétal.
Pour ce faire, il faut des mesures ardues en cherchant des stratégies
adaptatives pour permettre aux populations de résister à ce
phénomène de détérioration.
L'anacardier permet de restaurer la forêt mais aussi de
procurer des fruits à la population. Cette double fonction qu'elle joue
nous a poussés à mettre l'accent sur cette spéculation
pour analyser son avenir sur la zone.
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