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Le rôle disciplinaire des OPA durant la vague de rachats des années 80 aux USA.

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par Antoine SUZZONI
Université de Nice Sophia Antipolis - DEA MASTER 2 2004
  

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Chapitre 2

Les caractéristiques des cibles

Durant la décennie 80 l'industrie américaine a dû s'adapter à de nombreux chocs (progrès technologique, choc pétrolier, dérégulation). La vague d'OPA semble avoir permis la transformation de l'industrie américaine .

Mitchell et Mulherin (1996) ont trouvé que dans sept industries (divertissement, drugstore, pétrochimie, production télévisuelle, textile, pneu et sidérurgie) au moins les trois quart des firmes ont soit été rachetées, soit ont reçu une offre de rachat qui n'a pas abouti, soit se sont restructurées entre 1982 et 1989. Ils trouvent aussi que 50% des rachats dans une industrie donnée sont regroupés sur une période de deux ans. Un-peu comme si les premiers rachats brisaient un équilibre précaire et qu'il fallait de nombreux autres rachats pour en retrouver un autre. Dans une première partie nous verrons comment le choc pétrolier a conduit les firmes américaines à se restructurer,  comment l'avènement du pneu radial a amené les industriels du pneu à fermer 37 usines et à supprimer 40% des emplois dans cette industrie, ou bien encore, pourquoi les pilotes de ligne ont dû accepter des réductions de salaires. Dans une seconde partie nous nous intéresserons aux performances des firmes, nous confronterons plusieurs études empiriques afin de voir si elles corroborent la théorie du free cash-flow .

Section 1 : Les industries visées et la question du démantèlement des conglomérats

Il semblerait que les industries ayant subi des chocs (dérégulation, progrès technologique, choc pétrolier,...) aient été particulièrement concernées par la vague de rachats. L'un des éléments que l'on ne peut occulter lorsqu'il s'agit d'expliquer la vague d'OPA c'est le choc pétrolier des années 70. L'industrie pétrolière a subi de plein fouet l'embargo décrété par les pays de l'OPEP en 1973 et l'arrêt des exportations de pétrole par l'Iran en 1978 et 1979 . Bien sûr, de nombreuses autres industries ont subi ce choc , ce fut notamment le cas pour l'industrie du pneu et le transport aérien.

Intéressons nous d'abord à ce qui s'est passé dans l'industrie pétrolière .

§1 Les compagnies pétrolières

Entre 1973 et 1979 les prix du pétrole ont augmenté dix fois. L'accroissement des prix du brut a été à l'origine d'importants cash-flow pour les compagnies pétrolières. En effet, la demande de pétrole ne chuta pas immédiatement et les compagnies qui détenaient toutes d'importantes réserves de brut purent engranger d'importants cash-flow. En 1984 le cash-flow des dix plus grandes compagnies pétrolières était de 48.5 milliards de dollars, ce qui représentait 28% du cash-flow total des deux cents plus grandes entreprises américaines (Dun's Business month survey).

Cependant on anticipait un déclin de la demande (lorsque les prix du brut augmentent, la demande ne diminue pas immédiatement (faible élasticité prix)). Ainsi le niveau optimal des capacités de distribution, de raffinage et des réserves de brut chuta au début des années 80 ;ce qui laissa l'industrie pétrolière avec des capacités excédentaires. Au même moment les profits étaient élevés ; cela arriva parce que la productivité moyenne des ressources de l'industrie augmentait tandis que la productivité marginale diminuait ( Jensen 1986).  L'industrie avait besoin d'être restructurée ; les réserves de brut des compagnies étaient trop importantes et la profitabilité de l'exploration pétrolière et des forages diminuait à cause de la baisse de la demande .

Conformément à la théorie du free cash-flow , les managers, au lieu de verser le cash-flow libre aux actionnaires, continuèrent à investir dans des projets d'exploration bien que les rendements moyens furent inférieurs au coût du capital. Ils entreprirent aussi des programmes de diversification. Ces programmes furent à l'origine de rachats d'entreprises de vente au détail , (Marcor racheté par Mobil)  de manufacture (Reliance electric racheté par exxon) , de fabrication d'équipements de bureau (Vydec racheté par Exxon).  Les compagnies pétrolières rachetèrent même des sociétés d'extraction minière (Kennecott par Sohio, Anaconda minérals par Arco, Cyprus mines par Amoco).

Ces acquisitions ont fait partie des moins réussies de la décennie, en partie à cause de la malchance (par exemple l'effondrement de l'industrie minière) et en partie à cause du manque de compétence des managers à l'extérieur de l'industrie pétrolière (Jensen 1986).

A ce stade nous ne pouvons occulter le fait que si les rachats peuvent servir à sanctionner les managers, ils sont aussi pour eux le principal moyen de gaspiller le cash-flow libre. Rappelons que pour Jensen (1986) ces acquisitions non rentables sont tout de même préférables (socialement) à des projets de croissance interne non rentables, dans la mesure où ces acquisitions permettent aux actionnaires des cibles de percevoir une partie du cash-flow libre.

Deux études indiquent que les dépenses d'exploration dans l'industrie pétrolières ont été trop importantes depuis la fin des années 70. Mc Connell et Muscarella (1986) cités par Jensen (1986) ont trouvé que les annonces d'augmentation des dépenses d'exploration entre 1975 et 1981 étaient associées à des baisses de cours systématiques (et vis versa).

Picchi cité par Jensen (1986) a trouvé que les dépenses d'exploration entre 1982 et 1984 avaient en moyenne un rendement avant impôt inférieur à 10% .

Le foreur indépendant T Bonne Pickens de la société Mesa pétroleum fut un des premiers à comprendre que l'industrie pétrolière devait être restructurée, il fut le premier à lancer une OPA sur une compagnie pétrolière . Cette OPA fût la première d'une longue série de fusions  qui conduisirent les compagnies pétrolières à faire d'importants versements aux actionnaires (ventes de leurs réserves de brut dont le produit fût versé aux actionnaires ). Elles réduisirent considérablement leurs dépenses en exploration ainsi que leurs capacités de raffinage et de distribution . Cela s'est traduit par d'importants gains en efficience et en valeur . Les gains totaux pour les actionnaires , générés par les fusions entre Gulf et Chevron ,entre Getty et Texaco et entre Dupont et Conoco s'élevèrent à plus de 17 milliards de dollars (Jensen 1986). Allen Jacob (1986) cité par Jensen (1986) estime à 200 milliards de dollars les gains totaux liés à la réduction de l'inéfficience dans 98 compagnies avec d'importantes réserves de brut en 1984 .

La menace d'OPA a aussi joué un rôle très important dans la réduction de l'inéfficience dans cette industrie . Les restructurations défensives de Philips et Unocal et la restructuration volontaire d'Arco ont permis aux actionnaires de réaliser des gains allant de 20 à 35% de la valeur initiale des actions. Les restructuration étaient couplées à des rachats d'actions allant de 25 à 53% de la capitalisation boursière des compagnies (plus de 4 milliards dans chaque cas) .

L'autre industrie dans laquelle la vague de rachats a eu des conséquences spectaculaires c'est l'industrie du pneu.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway