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Le rôle disciplinaire des OPA durant la vague de rachats des années 80 aux USA.

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par Antoine SUZZONI
Université de Nice Sophia Antipolis - DEA MASTER 2 2004
  

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C) L' augmentation du taux d'endettement et ses conséquences

1 Les restructurations

Denis (1990) trouve qu'en moyenne le taux d'endettement passe de 21% avant à 42.6% après le paiement défensif . Saffieddine et Titman trouvent qu'en moyenne les firmes qui ont subi une tentative d'OPA (entre 1982 et 1991) ont augmenté considérablement leur taux d'endettement durant l'année qui a suivi . Avant la tentative d'OPA le taux d'endettement moyen des firmes de l'échantillon était de 59.8% , un an après la tentative d'OPA il était de 71.5% .

Une augmentation brutale du taux d'endettement peut avoir des conséquences positives sur une firme qui génère beaucoup de cash-flow libre. En effet, l'impératif lié au remboursement de la dette peut être à l'origine de la crise qui motivera l'arrêt des programmes d'expansion et la vente des divisions qui auraient plus de valeur à l'extérieur de la firme  (Jensen 1986) .

En accord avec Jensen,  Saffieddine et Titman (1999) trouvent que les firmes qui ont accru leur endettement plus que la moyenne de l'échantillon  ont en moyenne versé à leurs actionnaires, dans l'année qui a suivi l'OPA manquée, une somme équivalente à 5% de leur capitalisation boursière sous forme de dividendes spéciaux . Durant cette même année ces firmes ont racheté en moyenne plus de 11% de leurs actions.

Autres résultats intéressants : entre l'année - 1 et l'année +3 , ces firmes ont réduit de 28% leurs dépenses en capital ; leurs cessions d'actifs ont augmenté de 45% en deux ans et elles ont réduit leurs effectifs de plus de 5.5% durant l'année qui a suivi l'OPA . Les résultats statistiques indiquent aussi que ces firmes se sont recentrées . Leur cash-flow (compte tenu de la variation de la valeur comptable des actifs) s'est accru de 14.5% en quatre ans, ce qui n'est pas exclusivement dû aux cessions d'actifs mais aussi à une amélioration de la motivation des managers. Conformément à ces résultats, l'étude conduite par Nohel et Tarhan (1998) montre que la plupart des rachats d'actions s'inscrivent dans un plan de restructuration plus global qui inclus d'importantes cessions d'actifs .

Denis (1990) constate que 24 des 37 firmes de son échantillon (firmes ayant réalisé un paiement défensif ) ont entrepris des restructurations ;onze d'entre elles ont réduit leurs effectifs. Les choses se passent un-peu comme si les managers de la firme ayant échappé au rachat mettaient en oeuvre les restructurations qu'aurait entrepris le raider.

De plus, un fort taux d'endettement permet de réduire les dépenses discrétionnaires des managers et évite que ces derniers n'investissent le cash-flow libre dans des projets pas ou peu rentables (Jensen 1986, 1989) .

Nohel et Tarhan (1998) trouvent que les firmes qui avaient un ratio Tobin's Q faible avant le rachat de leurs actions ont, trois ans après, amélioré leurs performances opérationnelles de 23.3% .

Tous ces résultats empiriques corroborent l'idée de Jensen selon laquelle, c'est l'impératif lié au remboursement de la dette qui va déclencher la crise à l'origine des restructurations. C'est à travers des programmes comme ceux là, que la shareholder value a commencé à s'imposer ; c'est la menace d'OPA qui a conduit les managers à changer d'état d'esprit.

Cependant comme nous l'avons déjà dit, l'accroissement du taux d'endettement augmente la vulnérabilité de la firme face à un retournement conjoncturel.

2 Les difficultés rencontrées par les firmes endettées

L'augmentation du taux d'endettement à l'issue d'une recapitalisation n'a pas toujours eu des conséquences positives. Denis et Denis (1995) constatent que 31% des firmes qui se sont endettées pour racheter leurs actions entre 1985 et 1988 ont ensuite rencontré des difficultés financières. Il semblerait que ces firmes aient eu des problèmes pour céder les actifs qu'elles avaient prévu de vendre aux prix prévus ; les estimations suggèrent que si elles avaient pu vendre aux prix prévus elles auraient pu rembourser.

 Le premier élément qui permet d'expliquer la réduction de liquidité du marché des actifs, c'est la récession qui a frappé les USA à la fin des années 80 . Cependant, la restriction des conditions d'émission des obligations à haut risque (junk bonds) en 1989 a certainement contribué à rendre le marché des actifs moins liquide en diminuant les fonds disponibles pour l'achat des actifs .

Pour Jensen (1991) cité par Denis et Denis (1995) les changements dans la réglementation ont contribué à augmenter la probabilité de défaillance des transactions à fort levier financier en réduisant les possibilités pour les firmes en détresse de recontracter avec leurs créanciers.

Palepu et Wruck (1992) cités par Denis et Denis (1995) considèrent que les rachats d'actions défensifs ont tendance à être moins bien structurés que les rachats d'actions volontaires. Cependant d'après Denis et Denis (1995) ce ne fut pas la principale cause de détresse financière.

Ainsi, c'est la menace d'OPA qui a conduit des centaines de grandes entreprises cotées à racheter leurs actions en s'endettant, puis à se restructurer. Ces plans de restructuration ont fait brutalement remonter les cours des entreprises concernées. En quelque sorte, les managers en place ont fait sous la pression des raiders ce que ces derniers auraient fait si ils avaient racheté l'entreprise . La menace d'OPA a servi d'argument aux PDG qui ont ainsi pu faire accepter les restructurations aux syndicats et aux autres groupes de pression .

A travers ces plans de restructuration défensifs c'est la shareholder value qui a commencé à s'imposer, les managers ont dû reconnaître qu'ils n'avaient pas tout fait pour maximiser la valeur pour les actionnaires.

On peut considérer que les restructurations correspondaient à cette époque à la défense anti-OPA la plus loyale vis à vis des actionnaires. Cependant, à partir de 1988 un nouveau type de défenses a commencé à s'imposer : les pilules empoisonnées et les lois anti-OPA .

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery