II.2.2. Développement du système
financier et amélioration de l'allocation du capital
L'évaluation des investissements envisageables et des
conditions des marchés impliquent de larges coûts pour les
épargnants. Cette évaluation leur est néanmoins
indispensable pour toute prise de décision d'investissement. Des
épargnants peu informés sont en effet peu disposés
à financer des projets d'investissements à risque (Chanda, 2001).
Des coûts informationnels élevés ne peuvent dans ce cas que
nuire à l'accumulation du capital et à la croissance
économique.
Les intermédiaires financiers dans un système
financier développé sont capables de réduire les
coûts d'acquisition et de traitement de l'information (Diamond et
al., 1984 ; Boyd et Smith, 1997). La relation de long terme
qu'ils établissent avec les firmes réduit en effet les
asymétries informationnelles. Elle desserre en retour les contraintes
financières externes et améliore l'allocation du capital
(Greenwood et Jovanovic, 1990). Ces auteurs concluent leurs analyses en disant
que le travail des intermédiaires financiers est particulièrement
original puisqu'ils modélisent formellement les interactions dynamiques
à double sens entre le développement du système financier
et la croissance économique. Les modèles développés
par King et Levine (1993), Getlet et Rose (1994), Black et Moersch (1998),
Nguyen (2008) et Acemoglu et al. (2001) mettent également en
évidence le rôle des intermédiaires financiers dans
l'amélioration de l'allocation du capital. Ces modèles soulignent
particulièrement l'importance de la contribution des
intermédiaires financiers dans la promotion de l'innovation par la mise
à la disposition des entrepreneurs des fonds pour leur entreprise. Ils
montrent que, par l'identification et le financement des entrepreneurs avec les
meilleures chances d'oeuvrer avec succès des produits et des processus
de production novateurs, ces intermédiaires favorisent l'innovation
technologique et stimulent la croissance de la productivité.
II.2.3. Développement du système
financier et amélioration de la gestion des risques
Selon Levine (2005), dans un pays où le système
financiers est parfaitement développé, les contrats, les
marchés et les intermédiaires financiers émergent afin
d'améliorer la gestion des risques financiers, de réduire les
risques d'illiquidité des actifs financiers et de procéder
à un meilleur partage intertemporel des liquidités des actifs
financiers.
En complément à la recherche de Levine (2005),
la théorie traditionnelle de la finance met en évidence le
rôle des systèmes financiers relativement développés
dans la promotion de la croissance économique via leur effet sur la
diversification transversale du risque. Celle-ci présente une technique
de couverture contre les risques qui consistent en la détention de
portefeuilles diversifiés d'actifs, en l'investissement simultané
dans différents secteurs imparfaitement corrélés. De leur
côté, Acemoglu et Zilibotti (1997) modélisent les liens
entre la diversification transversale du risque et la croissance
économique. Ils reconnaissent l'importance du rôle des
arrangements financiers permettant la diversification transversale du risque
dans l'allocation régulière des fonds vers les utilisations les
plus productives et la stimulation de la croissance de la productivité.
Ils considèrent un modèle de croissance néoclassique
à générations imbriquées au sein duquel les agents
averses au risque peuvent placer leurs épargnes dans un actif sur peu
productif. Ils ont également accès à un large nombre de
projets risqués, imparfaitement corrélés et dont la
rentabilité anticipée est plus importante. A partir de ces
hypothèses, les auteurs montrent que plus les possibilités de
diversification des portefeuilles d'actifs sont multiples, plus
élevé est le nombre de projets risqués (et rentables)
financés et plus accéléré est le rythme de
croissance de la productivité.
Dans un langage beaucoup plus adapté, Varghese (2005)
pense que le système financier développé peut favoriser la
réduction des risques individuels liés aux projets
d'investissement grâce à son action sur la diversification et le
partage des risques. Pour lui, la réduction des risques stimule
l'accumulation du capital et améliore la rentabilité des
investissements. En retour, la croissement économique se trouve
affectée favorablement. En l'absence des marchés financiers
développés, les ménages ne peuvent investir que dans des
actifs peu liquides, car les risques idiosyncrasiques les empêchent
d'investir dans les actifs rentables.
Les analyses que nous venons d'effectuer montrent clairement
que le développement du système financier, à travers ses
effets directs sur la facilitation de l'affectation de l'épargne aux
firmes, l'amélioration de l'allocation du capital et
l'amélioration de la gestion des risques, assure à
l'économie des pays en développement une croissance
économique de long terme en permettant aux agents économiques
d'investir dans des secteurs beaucoup moins risqués et en accompagnant
ces investisseurs dans leur politique d'investissement. C'est dans la logique
de cette analyse que nous formulons l'hypothèse H2 de notre
recherche ainsi qu'il suit :
: Le développement du système financier induit
positivement la croissance économique au Cameroun.
Dans ce chapitre, nous avons tenté de passer en revue
la littérature théorique sur la relation entre la
libéralisation du compte de capital et la croissance économique
d'une part et la relation entre le développement du système
financier et la croissance économique d'autre part. Dans la
théorie, il ressort que les intermédiaires financiers assurent la
mobilisation de l'épargne et son affectation aux projets les plus
productifs favorisant ainsi la gestion des risques, la diversification des
actifs et l'innovation technologique. Les activités des
intermédiaires financiers stimulent donc la croissance économique
à travers l'accumulation du capital, l'augmentation de la
productivité globale des facteurs et l'intensification des
échanges financiers. Les analyses qui vont suivre vont monter en quoi
l'assouplissement des conditions d'intégration financière et
l'efficience de l'investissement étranger contribuent à
l'ajustement du degré de croissance économique d'un Etat.
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