7. CADRE THEORIQUE DU TRAVAIL
1. Théorie de l'offre et de la
demande
L'offre et la demande sont respectivement la
quantité de biens ou de services que les agents économiques sur
un marché sont disposés à vendre ou à acheter en
fonction des prix.
Si la théorie de l'offre et de la demande recouvre pour
Roger Guesnerie une intuition ancienne, sa formalisation débute en 1838
lorsqu'Augustin Cournot introduit la courbe de la demande. Plus tard, Alfred
Marshall introduit une courbe de l'offre représentant l'offre en
fonction des prix. Dans le cadre de la théorie de l'équilibre
partiel entre l'offre et la demande, à l'intersection
de ces deux courbes se trouvent le prix et la demande d'équilibre.
L'intérêt du modèle de l'offre et de la demande est qu'il
permet hors du formalisme sophistiqué de l'équilibre
général d'appréhender de façon intuitive les
mécanismes à l'oeuvre dans la décision d'allocation des
ressources en économie de marché.
18 Jean-Louis Loubet del Bayle, op
cit
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a. Histoire de la théorie de l'offre et de la
demande
Les tentatives de déterminer comment l'offre et la
demande interagissent ont commencé avec la Richesse des Nations
d'Adam Smith publié en 1776. Dans ce livre, il fait
l'hypothèse que le prix de l'offre est fixe, mais que la demande va
augmenter ou diminuer selon que le prix diminue ou augmente. David Ricardo en
1817 publie Des principes de l'économie politique et de
l'impôt dans lequel l'idée d'un modèle
économique est pour la première fois proposée. Il explique
de façon plus rigoureuse les hypothèses utilisées pour
démontrer la loi de l'offre et de la demande.
Durant le XIXe siècle l'école de
pensée marginaliste voit le jour avec les travaux de Stanley Jevons,
Carl Menger, et Léon Walras. L'idée principale est que le prix
est déterminé par le prix le plus élevé, le prix
à la marge. C'est une importante amélioration par rapport aux
idées d'Adam Smith à propos de la détermination des prix
d'offre.
Finalement, la plupart des bases de la théorie moderne
de l'offre et de la demande ont été finalisées par Alfred
Marshall et Léon Walras qui ont combiné les idées de
détermination de l'offre et les idées à propos de la
détermination de la demande afin de chercher un point
d'équilibre.
Depuis la fin du XIXe siècle, la
théorie de l'offre et de la demande a peu évolué. La
plupart des travaux ont conduit à examiner les cas particuliers du
modèle (oligopole, coût de transaction,
non-rationalité).
b. Définitions
L'offre d'un bien est la quantité d'un
produit offert à la vente par les vendeurs pour un prix donné.
Contrairement à la demande qui est la quantité
d'un certain produit demandée par les acheteurs pour un prix
donné. Le prix d'un bien est considéré comme une
quantité dépendant (entre autres) de l'offre et de la demande.
De ce principe on tire une loi mathématique : la
loi de l'offre et la demande. Cette loi est souvent
généralisée par une loi des
marchés, dénomination utilisée pour
désigner la loi qui régit un marché, avec ou sans
intervention de l'État.
Gravitation du prix
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Offre et demande en fonction du prix
c. La loi de l'offre et de la demande
La loi de l'offre et de la demande est l'un des
éléments essentiels expliquant le fonctionnement d'une
économie de marché. Elle indique comment se concilient, par
l'arbitrage pacifique du marché, les intérêts apparemment
contradictoires des offreurs et des demandeurs.
En particulier la loi de l'offre et de la demande nous montre
que, sur n'importe quel marché, il existe toujours un niveau de prix qui
supprime la pénurie (ou l'excédent) et qui équilibre la
quantité offerte et la quantité demandée (pour ce prix,
les producteurs sont prêts à vendre la même quantité
de biens que celle que les consommateurs veulent acheter). Un tel niveau de
prix est qualifié d'optimal, parce qu'il maximise les avantages et
minimise les inconvénients, pour les vendeurs comme pour les acheteurs.
Ce niveau de prix, qui résulte de l'offre et de la demande,
détermine un équilibre qui est qualifié de stable, ce qui
signifie que si l'on s'éloigne de cet équilibre, des
mécanismes automatiques (ceux du marché) ramènent vers
l'équilibre ; c'est ainsi, par exemple, que pour un niveau de prix
inférieur à l'équilibre, il existera un excès de la
demande sur l'offre qui va provoquer une hausse des prix qui perdurera jusqu'au
retour à l'équilibre ; cette hausse des prix, en particulier, va
pousser les producteurs à augmenter l'offre, résorbant ainsi la
pénurie potentielle.
Ce mécanisme de rééquilibrage repose
naturellement sur la libre variation des prix. En ce sens, le blocage des prix,
leur fixation autoritaire par les pouvoirs publics, constituent toujours une
aberration économique. Si le prix est fixé à un niveau
trop élevé, la surproduction est inévitable ; c'est par
exemple le cas de nombreux produits agricoles, à l'intérieur du
marché commun, pour lesquels il existe des prix garantis qui
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favorisent une surproduction et créent les
excédents que l'on connaît. Un raisonnement identique peut
être appliqué au marché du travail, où un salaire
minimum trop élevé est créateur de chômage. En sens
inverse, si le prix est fixé par les pouvoirs publics à un niveau
trop bas (prétendument pour empêcher l'inflation), la demande
excède
l'offre, ce qui entraîne la pénurie : l'exemple du
contrôle des loyers explique largement les pénuries de logement
que l'on a pu observer. Ce type de déséquilibre est encore plus
évident dans les économies planifiés, où tous les
prix sont bloqués et où se développent les
pénuries, les files d'attente et le marché noir.
La loi de l'offre et de la demande fait souvent
référence à l'équilibre partiel sur un
marché. Dans les marchés où l'équilibre partiel
s'applique, on constate les effets suivants :
? lorsque les prix montent
o l'offre a tendance à augmenter: les producteurs sont
incités à offrir plus de biens, de nouveaux producteurs sont
incités à s'installer, les détenteurs de ce bien sont
incités à s'en séparer.
o la demande a tendance à baisser: plus les prix sont
élevés, moins les acheteurs sont disposés à
acheter.
? lorsque les prix baissent
o l'offre a tendance à baisser: les producteurs sont
moins incités à produire.
o la demande a tendance à augmenter: moins les prix
sont élevés, plus les acheteurs sont disposés à
acheter.
Présenté autrement, étant donné un
marché où pour chaque prix on associe l'offre (la quantité
que l'ensemble des vendeurs veulent bien vendre), et la demande (la
quantité que l'ensemble des acheteurs veulent bien acheter), il existe
un point d'intersection qui maximise le nombre d'échanges. Un prix un
peu au-dessus laissera des vendeurs voulant bien vendre sans acheteur. Un prix
un peu en dessous laissera des acheteurs voulant bien acheter sans vendeur.
Dans les deux cas, le nombre d'échanges sera aussi plus petit qu'au
point d'intersection. Il y aura de toute façon des acheteurs et des
vendeurs qui ne seront pas satisfaits, mais ce sera à cause du prix et
non pas parce qu'ils n'ont trouvé personne en face.
Une courbe d'offre et de demande correspond à un nombre
donné d'offreurs et de demandeurs. Une augmentation (ou une diminution)
du nombre d'offreurs ou de
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demandeurs provoque un déplacement vers la droite ou
vers la gauche, et donc une modification de l'équilibre.
Ayant constaté que ce principe pouvait s'appliquer
à bon nombre de marchés, les économistes ont longtemps
cherché quelles étaient les conditions que devaient remplir un
marché pour que le point d'équilibre soit atteint.
d. L'équilibre
général
En 1983, l'économiste franco-américain
Gérard Debreu obtient le prix Nobel d'économie pour avoir
rigoureusement démontré qu'une concurrence pure et parfaite
permet un équilibre et un seul, de l'offre et de la demande.
Cas spéciaux d'offre et de demande
En partant d'un postulat où les richesses ne sont pas
rares mais abondantes, nous avons alors une courbe de l'offre qui a la
même orientation que la demande. En effet, si les coûts sont
maîtrisés, et en appliquant le principe d'économie
d'échelle, l'unité supplémentaire produite sera meilleur
marché. Cela signifie donc que plus la production augmente, plus le prix
de revient unitaire diminue. C'est le cas pour de nombreux produits,
abstraction faîte du renchérissement du coût de la vie. En
prenant le secteur alimentaire par exemple, le volume offert provoque une
diminution du prix. Le rabais de quantité dérive aussi de ce
point de vue. Cette théorie a été rédigée
par Alain Zuin, lors de ses études en sciences économiques et
sociales, à Genève, en 2004. Il existe aussi des cas où
l'on constate que la demande augmente en même temps que le prix, tandis
que la baisse du prix provoque une baisse de la demande
? les biens de Giffen sont des biens de première
nécessité important dans le budget des consommateurs : le
renchérissement de ces biens entraîne un effet d'appauvrissement
équivalent à une perte de revenu, qui impose de renoncer à
d'autres consommations plus chères et à se rabattre sur ces
biens, malgré la hausse de leur prix ; inversement, une baisse du prix
de ces biens libère des ressources financières qui permet aux
consommateurs de se tourner vers des produits plus chers et réduit la
demande.
? de manière très marginale, pour certains biens
et services de luxe extrêmement chers (notamment sur le marché des
oeuvres d'art et sur celui du recrutement de chefs d'entreprises) des
comportements inverses, où lorsque les prix augmentent, les vendeurs
sont moins disposés à vendre et les acheteurs plus
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désireux d'acheter. Ce phénomène est
nommé effet Veblen, effet de snobisme ou effet d'ostentation.
? spéculation, qui se généralise en
situation de déflation ou, inversement, d'inflation : la hausse du prix
d'un bien (ou une hausse générale des prix) peut être
interprétée comme le signe d'une rareté future ou d'une
bonne affaire dont les autres sont en train de profiter, donc comme le signale
qu'il faut acheter maintenant et le plus possible, car plus tard le bien ne
sera plus disponible ou il sera plus cher : la demande augmente. Inversement,
une baisse de prix peut s'interpréter comme le signale qu'il est
avantageux d'attendre pour acheter, car le bien sera disponible encore moins
cher plus tard : la demande baisse.
? l'effet d'Akerlof ou effet de marque se produit lorsque des
consommateurs, face à deux produits parfaitement substituables,
préfèrent le produit le plus cher, lui supposant une meilleure
qualité.
Il existe aussi des phénomènes plus complexes
où le mécanisme de l'offre et de la demande ne joue qu'avec
retard :
? les consommateurs peuvent puiser dans leur épargne
pour maintenir leur consommation quelque temps, en dépit d'une hausse du
prix. Ce phénomène est nommé effet de cliquet.
? les consommateurs peuvent avoir besoin de temps pour adapter
leur consommation à la nouvelle situation des prix (exemple : changer
d'énergie pour leur chauffage, adopter un véhicule plus
sobre).
e. Evolution de la demande
Lorsque davantage de personnes désirent un bien, la
quantité qui en est demandée pour un prix donné tend
à augmenter. Cette hausse de la demande peut dériver d'une
évolution des goûts, quand les consommateurs accroissent le
désir qu'ils ont d'un bien donné. L'évolution de la
demande peut être représentée graphiquement par une
translation de la courbe de demande vers la droite. La courbe initiale D1 est
alors remplacée par la courbe D2. La conséquence de ce changement
est la hausse du prix d'équilibre qui passe de P1 à P2, tandis
que s'accroît également la quantité d'équilibre qui
passe de Q1 à Q2.
Inversement, lorsque la demande diminue, les
phénomènes inverses se produisent. La quantité
échangée décroît ainsi que le prix.
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f. Evolution de l'offre
Lorsque les coûts de production de l'offreur sont
modifiés, la courbe de l'offre se déplace en conséquence.
Si, par exemple, quelqu'un découvre une nouvelle manière de faire
pousser le blé, les producteurs tenteront d'accroître les volumes
vendus, si bien que la courbe S0 se déplacera vers la droite et
deviendra S1. Cet accroissement de l'offre provoque une diminution du prix
d'équilibre qui passe de P1 à P2. Quant à la
quantité d'équilibre, elle augmente de Q1 à Q2 car la
quantité demandée est accrue par la baisse du prix. Cette
évolution n'a d'effet que sur l'offre, la courbe de la demande reste
elle identique.
g. L'offre et la demande sur un marché
organisé
Sur un marché organisé, tel qu'une bourse
financière, la cotation d'un titre ou d'une obligation est choisie de
manière que le nombre de transactions soit le plus grand possible.
Un agent de change est chargé de réunir les
offres de vente et les demandes d'achat : les ordres de bourse. Chaque offre de
vente à un cours limite en dessous duquel le vendeur ne veut pas vendre.
Chaque demande d'achat a un cours limite au-dessus duquel l'acheteur ne veut
pas acheter. Chaque limite étant différente, l'agent doit choisir
une valeur telle que le nombre de ventes est égal au nombre d'achats.
Mathématiquement, ce cours permet aussi de maximiser le nombre
d'échanges car toute autre valeur laisserait des vendeurs voulant bien
vendre mais sans acheteur et inversement.
h. Loi du marché ou contrôle des
prix
Graphique en faveur d'un système de prix libres pour
réguler l'offre et la demande, The Freeman, 1958, traduction
libre (consulter l'original)
Les économistes libéraux critiquent ou
dénoncent les pratiques de contrôle des prix, ne serait-ce que
parce qu'elles seraient contre-productives.
Des pratiques de contrôle des prix ont toujours
existé3. Elles consistent en la fixation de prix (exemple :
les prix des consultations médicales ou celui du blé dans la
France d'après-guerre4), en l'instauration de prix minimums
(exemple : le salaire minimum) ou pour protéger les autres clients des
vendeurs contre le risque de faillite des vendeurs (exemple : les tarifs de
certains contrats d'assurance) ou pour protéger les producteurs actuels
contre la concurrence de nouveaux venus (exemple : l'interdiction de la vente
à
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perte), en l'instauration de prix maximums pour
protéger les acheteurs (exemple : le taux d'usure), ou encore en
l'encadrement de l'évolution des prix (exemple : la limitation de la
hausse des loyers).
? Lorsque les pouvoirs publics veulent protéger les
vendeurs, ils instituent un prix minimum (par exemple un salaire minimum)
supérieur au prix d'équilibre. Il s'ensuit dans le modèle
(voir sur le graphique) que la demande est inférieure à l'offre,
et même inférieure à la demande qui correspondrait au prix
d'équilibre, si bien que l'offre n'est pas satisfaite (exemple : dans le
monde du travail, il y a alors progression du chômage). D'après ce
modèle, cette politique, mise en oeuvre pour protéger les
vendeurs, a donc pour effet pervers d'empêcher certains vendeurs de
vendre. Pour le Prix Nobel d'économie Gary Becker : « augmenter le
salaire minimum, c'est augmenter le chômage ».
? De même, lorsque les pouvoirs publics veulent
protéger les acheteurs, ils instituent un prix maximum inférieur
au prix d'équilibre. Il s'ensuit dans le modèle (voir sur le
graphique) que l'offre est inférieure à la demande, et même
inférieure à l'offre qui correspondrait au prix
d'équilibre, si bien que certains producteurs ont intérêt
à ne plus produire et qu'une partie de la demande n'est pas satisfaite.
D'après ce modèle, cette politique, mise en oeuvre pour
protéger les acheteurs, a donc pour effet d'empêcher certains
acheteurs d'acheter.
Les contrôles de prix prennent maintenant en compte les
mécanismes de l'offre et de la demande (exemple : quota de production
pour le lait en Europe)5.
Une autre forme de contrôle des prix est l'obligation
pour tous les vendeurs d'appliquer le même prix, comme le prix unique des
livres en France.
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Équilibre entre offre et demande, en concurrence, et
situation lorsque l'État impose un prix
plafond.
i. Politique de la demande et politique de
l'offre
En économie politique, on distingue souvent deux types de
politiques opposées.
La politique de la demande (Thomas Malthus, John Maynard Keynes,
Karl Marx) met
l'accent sur la demande, les dépenses, par crainte
d'excès d'offre, d'excès d'épargne, de surproduction, de
« manque de débouchés » pour les produits, provoquant
le chômage
et la fermeture des entreprises. Pour Marx, la sous-consommation
ouvrière finira par causer la perte du capitalisme. Keynes explique la
crise de 1929 par une faiblesse de la
demande globale : il faut donc augmenter la demande et les
dépenses publiques pour assurer le plein-emploi, la dette publique
étant vue comme un « levier ». La crise
pétrolière des années 1970 devait montrer
l'inefficacité de cette théorie qui entraîne
inflation et stagnation économique.
La politique de l'offre, dont la première formulation fut
la loi de Say ou loi des
débouchés, joue sur les incitations à la
production, au travail, à l'épargne, à l'investissement,
par la baisse des impôts et la dérégulation. Une
croissance
économique durable ne peut naître que d'une
augmentation du volume de travail ou de la productivité. Le travail et
le capital, combinés au sein des entreprises, sont des facteurs
premiers, et non une finalité en soi ; c'est l'offre, la prise de risque
par les
entrepreneurs, qui « tire » la demande
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2. Théorie de la localisation
La théorie de la localisation
s'intéresse à la localisation géographique des
activités économiques. Elle est devenue une partie
intégrante de la géographie économique, des sciences
régionales et de l'économie spatiale. La théorie de la
localisation répond à la question : quelles activités
économiques se localisent où et pourquoi ?
La théorie de la localisation se base principalement sur
la théorie microéconomique, notamment sur l'hypothèse que
les acteurs économiques agissent dans leur propre intérêt.
Conséquemment, les firmes choisissent des situations qui maximisent
leurs profits et les individus choisissent celles qui maximisent leur
utilité.
a. Origines
Même si certains chercheurs plus anciens devraient recevoir
quelques crédits (Richard Cantillon, Etienne Bonnot de Condillac, David
Hume, Sir James D. Steuart, et David Ricardo), c'est surtout à partir du
premier livre Der Isolierte Staat de Johann Heinrich von Thünen
en 1826 qu'on peut situer la naissance de la théorie de la localisation.
D'ailleurs, le principal spécialiste des sciences régionales
Walter Isard a nommé von Thünen le père de la
théorie de la localisation. Dans Der Isolierte Staat, von
Thünen a noté que le coût de transport des biens consume une
partie de la rente économique de Ricardo. Il a noté que parce que
ces coûts de transport et la rente économique varient suivant les
biens, la distance du marché résulte en différentes
utilisations du sol et en différentes intensités de cette
utilisation.
À partir de von Thünen, une sorte
d'hégémonie allemande s'est installée dans la
théorie de la localisation, notamment avec le livre Die Zentralen
Orte in Sûddeutschland de Walter Christaller en 1933, lequel a
formulé une grande partie de ce que nous connaissons aujourd'hui comme
la théorie des lieux centraux. Une contribution notable a
été apportée par Alfred Weber, qui a publié
Über den Standort der Industrien en 1909. À partir d'un
modèle semblable à une structure physique adaptée des
idées de Pierre Varignon (Varignon frame), Weber a appliqué les
tarifs du transport ferroviaire des matières premières et des
produits finis à la fonction de production des produits finis pour
développer un algorithme qui détermine la situation optimale pour
une usine, ce qui l'a conduit à formuler le célèbre
problème de Weber. Il a aussi introduit les distorsions induites par la
main-d'oeuvre ainsi que par les forces
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Mémoire Billy UCBC
d'agglomération et de désagglomération.
Weber a ensuite discuté le groupement des unités de production,
anticipant les zones de marché de Lösch.
Avant les travaux d'Alfred Weber, Carl Wilhelm Friedrich
Launhardt a conçu une grande partie de ce pour quoi Weber a reçu
crédit. De plus, ses contributions sont curieusement plus modernes dans
leur contenu analytique que celles de Weber. Ceci indique que Launhardt
était en avance sur son temps et qu'il n'a simplement pas
été compris de la plupart de ses contemporains. Il n'est pas
sûr que Weber ait connu les publications de Launhardt. Weber a
certainement été influence par d'autres, en particulier Wilhelm
Roscher et Albert Schäffle, qui a probablement lu l'oeuvre de Launhardt.
Quoi qu'il en soit, la pensée dans le domaine de la localisation ne
s'est développée qu'après la publication du livre de
Weber.
b. Johann Heinrich von Thünen
Johann Heinrich von Thünen, parfois
Thuenen, né le 24 juin 1783 à Canarienhausen,
aujourd'hui Wangerland, Basse-Saxe, décédé le 22 septembre
1850 à Tellow près de Teterow, Mecklenburg, était un
économiste allemand.
Il publie en 1826 chez Friedrich Perthes à Hambourg le
résultat de ses réflexions économiques dans un ouvrage
intitulé "l'État isolé en relation avec l'agriculture
et l'économie nationale" ("Der isolierte Staat in Beziehung auf
Landwirthschaft und Nationalökonomie"). Compte tenu de la
qualité de ses recherches, il est nommé en 1830 docteur
honoris causa par l'université de Rostock.
Il publie enfin, l'année de sa mort, la deuxième
partie de son ouvrage dans laquelle il présente sa théorie du
"salaire naturel", formule exprimée dans une équation
qui est gravée sur sa pierre tombale à Prebberede-Belitz
près de Teterow.
c. Théorie
Dans sa théorie de l'État isolé, Thünen
est parti de l'idée d'"homme économique" développée
par Adam Smith, selon laquelle le producteur cherche à maximiser le
profit de sa terre. Thünen, propriétaire terrien, savait qu'un tel
profit repose sur l'utilisation optimale des surfaces et des coûts de
transport. En se concentrant sur ces deux variables, et en faisant
disparaître les autres facteurs, il obtient un État isolé
homogène, avec une ville-marché en son centre. L'économie
dans la zone avoisinante se réorganise alors en fonction du comportement
économique prédéfini. Le coût du transport
dépend de la distance et du produit. Le profit par unité de
surface (rente de
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situation) décroît plus la distance au marché
est grande. La rente de situation, selon le terme utilisé par
Thünen, doit être comprise comme la valeur maximale qu'un producteur
peut payer pour la terre, sans perdre d'argent.
Thünen conclut que la production d'une denrée ne vaut
la peine qu'à une distance donnée du marché. En dehors de
cette distance, soit le coût de la terre (rente foncière) ou de
transport devient trop élevé, soit une autre culture est plus
rentable. Thünen ayant calculé les coûts de transport par la
distance à vol d'oiseau du marché, les zones ainsi
définies sont circulaires : les anneaux de Thünen.
Les produits ayant des coûts de transport
élevés (légumes, lait dans le cadre du calcul de
l'époque) sont localisés où la rente foncière est
la plus élevée. À l'inverse, les produits ayant des
coûts de transport plus faibles (bétail vif par exemple) sont
localisés dans les zones les plus éloignées du
marché. La rente foncière caractérise le montant le plus
élevé que le producteur d'un produit donné peut payer, et
constitue un indicateur de la compétitivité sur ce produit dans
la ville-marché.
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