SECTION II : L'IMPORTANCE DE L'ÉCOLOGIE
L'acception générale fait de l'écologie
un domaine de réflexion très vaste, puisque par biotique il faut
entendre la totalité du monde vivant (les animaux, les plantes, les
microorganismes, mais pouvant aussi inclure les autres individus, la
société, etc.) et par abiotique il faut entendre tout ce qui
n'est pas vivant (la connaissance, les objets, la technologie, etc.).
La conservation des ressources naturelles vivantes, les
végétaux, les animaux, les micro-organismes et les
éléments non vivants de l'environnement dont elles ont besoin
pour vivre est essentielle pour le développement. À l'heure
actuelle, la conservation de la flore et de la faune sauvages figurent bien
à l'ordre du jour des gouvernements : près de 4 pour cent de la
surface de la Terre sont en effet aménagés explicitement pour
préserver des espèces et des écosystèmes; les pays
sans parcs nationaux sont très peu nombreux. Il ne s'agit pas de
décider si oui ou non la conservation de la nature est une bonne chose,
mais bien de déterminer comment la mener à bien dans
l'intérêt national et en fonction des moyens dont dispose chaque
pays.
I : La croissance inclusive, le développement
durable et l'environnement
Une croissance économique, inclusive et forte, permet
aux populations d'améliorer leurs conditions de vie et crée des
espaces dans lesquels peuvent prospérer de nouvelles idées. Mais
cette croissance se traduit souvent par une dégradation de
l'environnement, qui porte atteinte à la santé humaine et
à la qualité de vie, menace l'approvisionnement en eau et met en
péril les écosystèmes, limitant la croissance des
générations futures. De plus, une croissance à court
terme, qui amoindrit le capital naturel, est soumise à des cycles
d'expansion-récession et ceux qui vivent près du seuil de
pauvreté peuvent chuter bien en dessous de ce seuil.
1 : Modification de la qualité de la
croissance
Il est vrai que la croissance inclusive est une croissance
permettant d'offrir des opportunités aux citoyens, mais pour être
durable, et donc pour être au profit des générations
présentes et surtout futures, son action doit respecter l'environnement.
Une méthode de mesure est la comptabilisation du capital naturel , qui
tient compte de la valeur des richesses naturelles dans la planification du
développement et dans les comptabilités nationales, tout
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comme une famille tiendrait compte de la valeur de sa maison
et du coût de son entretien pour définir la part du revenu qu'elle
peut dépenser.
Le développement durable, c'est autre chose qu'une
simple croissance. Il faut en effet modifier le contenu même de cette
croissance, faire en sorte qu'elle engloutisse moins de matières
premières et d'énergie et que ses fruits soient répartis
plus équitablement. Ces mesures s'imposent dans tous les pays, dans le
cadre d'un ensemble de mesures visant à préserver notre capital
écologique, améliorer la répartition des revenus, et
réduire notre vulnérabilité aux crises
économiques.
Depuis toujours, les progrès de l'humanité sont
dus à l'ingéniosité de l'homme et à ses
capacités de travailler en collaboration. Ces qualités ont
été souvent utilisées dans le passé de
manière constructive pour réaliser des progrès dans le
domaine de l'environnement et du développement : la maîtrise de la
pollution de l'air et de l'eau, par exemple, ou encore la rentabilisation des
matières premières et de l'énergie. Beaucoup de pays
pauvres ont réussi à accroître leur production alimentaire
et à contenir la croissance démographique. Certains
progrès techniques, en médecine notamment, ont pu être
largement diffusés.
Notre incapacité à gérer l'environnement
et à maintenir le cap du développement risque de submerger tous
les pays. Environnement et développement ne sont pas deux défis
distincts; ils sont liés, inexorablement. Le développement ne
peut se maintenir si la base de ressources ne fait que se
détériorer; l'environnement ne peut être
protégé si la croissance ne tient pas compte du coût de la
destruction de l'environnement. Ces problèmes ne peuvent être
traités séparément dans le cadre d'institutions et de
politiques fragmentaires. Ils sont imbriqués dans un système
complexe de causes et d'effets.
Tout d'abord, les agressions contre l'environnement sont
liées. Par exemple, la déforestation, qui amplifie le
ruissellement, accélère l'érosion du sol et la
sédimentation des fleuves et lacs. La pollution de l'air et
l'acidification ont une part dans la mort des forêts et des lacs. Ces
liens signifient que les différents problèmes doivent être
attaqués simultanément. En outre, le succès dans un
domaine, la protection des forêts, par exemple, peut améliorer les
chances de réussite dans un autre, telle la conservation des sols.
Ensuite, les agressions contre le milieu et les structures du
développement économique sont, elles aussi, liées. Ainsi,
certaines politiques agricoles peuvent très bien
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être responsables de la dégradation des sols, de
l'eau, des forêts. Ce sont les politiques énergétiques qui
provoquent l'effet de serre, l'acidification, le défrichement pour
obtenir du bois de chauffage. Toutes ces agressions menacent le
développement économique. Il faut donc intégrer
l'économie et l'écologie dans la prise de décisions et
dans le processus législatif, non seulement pour protéger
l'environnement, mais encore pour protéger et favoriser le
développement. L'économie, ce n'est pas seulement produire des
richesses ; l'écologie ce n'est pas uniquement protéger la
nature; ce sont les deux ensembles qui permettent d'améliorer le sort de
l'humanité.
En troisième lieu, les problèmes
écologiques et économiques sont liés à de nombreux
facteurs sociaux et politiques. Un exemple : la rapidité de la
croissance démographique, qui a un impact tellement profond sur
l'environnement et le développement dans beaucoup de régions, est
partiellement due à des facteurs tels la condition des femmes et
d'autres valeurs culturelles. Qui plus est, les agressions contre
l'environnement et le développement inégal peuvent attiser les
tensions sociales. Nous pourrions soutenir que les structures du pouvoir dans
une société donnée sont au coeur même de la plupart
des défis qui sont posés sur le plan de l'environnement et du
développement. Ainsi, toute nouvelle approche du problème doit
comporter des programmes de développement social en vue notamment
d'améliorer la condition des femmes, de protéger les groupes
vulnérables et d'encourager la participation des échelons locaux
à la prise de décisions.
Enfin, la nature systémique des problèmes joue
non seulement à l'intérieur d'un pays, mais aussi entre pays. Les
frontières nationales sont devenues tellement poreuses que les
distinctions classiques entre les questions d'importance locale, nationale et
internationale se sont estompées. Les écosystèmes, en
effet, ne respectent pas les frontières. La pollution des eaux se
propage le long de fleuves, de lacs, de mers que se partagent plusieurs pays.
L'atmosphère transporte la pollution sur de vastes distances. De gros
accidents, ceux notamment qui ont lieu dans les réacteurs
nucléaires ou dans les usines ou entrepôts de matières
toxiques, peuvent se propager à l'échelle d'une région
entière.
D'autres articulations encore entre environnement et
économie jouent à l'échelle mondiale. Par exemple,
l'agriculture ultra-subventionnée des pays industrialisés
à économie de marché crée des excédents qui
font chuter les cours et sapent la viabilité de l'agriculture des pays
en développement. Dans les deux systèmes, les terres et les
autres ressources en souffrent. Un pays peut, isolément, arrêter
une politique agricole pour s'assurer des gains
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économiques et politiques à court terme, mais
aucun pays n'est en mesure à lui seul d'élaborer des politiques
capables d'assumer le coût financier économique et
écologique des politiques agricoles et commerciales d'autres pays.
2 : De nouvelles approches de l'environnement et du
développement
La responsabilité des questions d'environnement a
toujours été confiée aux ministères de
l'Environnement, qui n'ont pas grand pouvoir pour empêcher ou
maîtriser les destructions causées par les politiques et pratiques
dans les domaines de l'agriculture, de l'industrie, du développement
urbain, des forêts, des transports. La société s'est
gardée de confier la responsabilité d'empêcher la
dégradation de l'environnement aux ministères et agences qui
causent ces problèmes. Ainsi, nos pratiques en matière
d'environnement interviennent le plus souvent a posteriori. Il s'agit en effet
de reboiser, de reprendre des terres aux déserts, de reconstruire nos
centres urbains, de rétablir des habitats naturels, de rendre leur
intégrité à des terres vierges. Pour pouvoir anticiper et
prévenir la dégradation de l'environnement, il faudra tenir
compte des dimensions écologiques des politiques en même temps que
des dimensions économiques, commerciales, énergétiques,
agricoles et autres.
Dans la plupart des pays, les politiques d'environnement
s'attaquent aux symptômes de la croissance pernicieuse; ces politiques
ont donné certains résultats positifs et il convient de les
continuer, voire de les renforcer. Cela dit, cela ne saurait suffire. Ce qui
s'impose, c'est une nouvelle approche : l'ensemble des nations devrait viser un
type de développement où s'articuleraient la production et la
conservation des ressources, et où les deux seraient associées
à une politique permettant à tous de vivre correctement et
d'accéder équitablement aux ressources.
La notion de développement durable offre un cadre
permettant d'intégrer politiques d'environnement et stratégies de
développement, ce mot étant entendu au sens le plus large. Nous
voyons souvent dans le « développement » simplement
le processus de changement économique et social dans le tiers monde. Or,
l'intégration de l'environnement et du développement est une
nécessité dans tous les pays, riches ou pauvres. La poursuite du
développement durable nécessite des changements dans les
politiques nationales et internationales de tous les pays.
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Le développement durable, c'est s'efforcer de
répondre aux besoins du présent sans compromettre la
capacité de satisfaire ceux des générations futures. Il ne
s'agit en aucun cas de mettre fin à la croissance économique, au
contraire. Inhérente à cette notion est la conviction que nous ne
pourrons jamais résoudre les problèmes de pauvreté et de
sous-développement si nous n'entrons pas dans une nouvelle
période de croissance dans le cadre duquel les pays en
développement auront une large part et pourront en tirer de larges
avantages.
La croissance économique s'accompagne toujours d'un
danger pour l'environnement, puisqu'elle exerce des pressions sur les
ressources (Jean-François Fagnart, Bertrand Hamaide, 2012)1.
Mais les décideurs fidèles au principe du développement
durable feront en sorte que les économies en développement
respectent leurs bases écologiques et que ces dernières soient
protégées, de manière à alimenter la croissance
à longue échéance. La défense de l'environnement
est donc inhérente à l'idée de développement
durable, tout comme l'est la volonté de s'attaquer aux causes
plutôt qu'aux symptômes.
Il n'existe aucun modèle idéal de
développement durable, car les systèmes sociaux, les
systèmes économiques et les conditions écologiques varient
beaucoup d'un pays à l'autre. Chaque pays devra trouver sa voie propre.
Mais, indépendamment de toutes ces différences, le
développement durable doit s'envisager comme un objectif à
atteindre à l'échelle mondiale.
Aucun pays ne peut se développer dans l'isolement. Le
développement durable exige donc une nouvelle orientation des relations
internationales. La croissance durable à long terme nécessitera
de profonds changements pour donner lieu à des flux de produits, de
capitaux et de techniques plus équitables et tenant mieux compte des
impératifs de l'environnement.
Les mécanismes précis de la coopération
internationale nécessaires pour assurer le développement durable
varieront d'un secteur à l'autre et d'une institution à l'autre.
Cela dit, il est indispensable que la transition vers ce développement
durable soit gérée
1 Jean-François FAGNART et Bertrand HAMAIDE,
Reflets et Respectives de la vie économique, De Boeck
Supérieur, 2012, p. 5-8.
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conjointement par toutes les nations du monde. L'unité
des besoins de l'homme nécessite un système multilatéral
qui s'appuie sur le principe démocratique du libre consentement et qui
admette que la planète, certes est une, mais que le monde aussi est
un.
Donc, le respect de l'environnement est un point
essentiellement à prendre en considération. Les problèmes
de l'exploitation irrationnelle et continue des ressources naturelles,
notamment les forêts et les mines sont pris en compte et
solutionnés dans l'approche de la croissance inclusive et le
développement durable par la collaboration de tous les citoyens, pour
eux et pour les générations futures.
Au niveau de la lutte pour le climat, nombreuses
conférences ont été initiées. Toutes les
conférences pour le climat ont pour objectif général de
lutter contre la dégradation de la couche d'ozone sans quoi les
êtres humains se trouveront dans une impasse inéluctable.
La conférence des parties (COP 21) qui a eu lieu
à Paris à la fin de l'année 2015 est la
21ème conférence à la Convention-Cadre des
Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). Cette conférence
a pour but de limiter le réchauffement climatique à seulement 2%.
Cette convention reconnaît l'existence d'un changement climatique
d'origine humaine et donne aux pays industrialisés le primat de la
responsabilité pour lutter contre ce phénomène. Ce sommet
doit aboutir à un accord international sur le climat, applicable
à tous les pays, dans l'objectif de limiter le réchauffement
mondial à 2 °C d'ici 2100.
Selon Hans JONAS1, il y a une obligation
d'existence des générations futures, qui pourrait être
remise en cause par la forme qu'a prise le développement technique
à l'époque contemporaine. Il s'agit donc pour les
générations présentes de veiller, non aux droits des
générations futures, mais à leur obligation
d'existence. Veiller à l'obligation des générations
futures d'être une humanité véritable est une obligation
fondamentale à l'égard de l'avenir de l'humanité, dont
dérivent seulement toutes les autres obligations à l'égard
des hommes à venir. Le problème du développement durable
ne se pose donc pas sous l'angle des droits, mais des obligations et des
devoirs.
1 Hans JONAS est un philosophe allemand, celui qui
a théorisé le premier la notion de développement durable
dans Le principe de responsabilité en 1979.
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La définition classique du développement durable
provient du rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l'environnement et
le développement. Ce rapport insiste sur la nécessité de
protéger la diversité des gènes, des espèces et de
l'ensemble des écosystèmes naturels terrestres et aquatiques, et
ce, notamment, par des mesures de protection de la qualité de
l'environnement, par la restauration, l'aménagement et le maintien des
habitats essentiels aux espèces, ainsi que par une gestion durable de
l'utilisation des populations animales et végétales
exploitées.
Cette préservation de l'environnement doit être
accompagnée de la « satisfaction des besoins essentiels en ce
qui concerne l'emploi, l'alimentation, l'énergie, l'eau, la
salubrité ». Cela étant, on se heurte à une
difficulté, qui est de définir ce que sont les besoins des
générations présentes, et ce que seront les besoins des
générations futures. On pourrait retenir par exemple les besoins
élémentaires pour se nourrir, se loger, et se déplacer.
Afin de subvenir aux besoins actuels sans pour autant recourir
à une utilisation non durable de ressources non renouvelables, un
scénario en trois points a été proposé, notamment
par des associations comme négawatt dans le domaine de l'énergie
:
? sobriété (techniques utilisées avec
parcimonie) ;
? efficacité (techniques plus performantes) ;
? utilisation de ressources renouvelables (par exemple :
l'énergie solaire ou les éoliennes, au travers de projets
d'électrification rurale).
Le patrimoine culturel ne doit pas être oublié :
transmis de génération en génération et faisant
preuve d'une grande diversité, l'UNESCO en souhaite la
préservation. La culture au sens large (ou l'environnement culturel)
s'impose d'ailleurs peu à peu comme un quatrième pilier du
développement durable.
Inclure la durabilité oblige les gouvernements à
prendre en compte les effets de leurs décisions sur l'environnement. Le
programme des Nations unies recommande que tous les gouvernements adoptent la
comptabilisation du capital naturel de façon à ce que leurs
efforts en vue d'un développement durable soient cohérents,
précis et comparables à long terme. Institutionnaliser la
durabilité sous cette forme en fera un élément
intrinsèque de la gouvernance au quotidien.
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