CONCLUSION GENERALE
Nous voici arrivé au terme de notre travail qui a
porté sur l'inopportunité de la législation congolaise
d'amnistie dans le processus de pacification de la RDC. En effet, la
notion d'amnistie bien qu'ancienne, a évolué dans le temps. A
l'origine, l'amnistie avait seulement un caractère réel,
c'est-à-dire qu'elle n'avait été adoptée qu'en
considération de la nature des faits auxquels elle s'appliquait, mais
aujourd'hui, elle peut revêtir un caractère personnel prenant en
compte une certaine catégorie d'individus.
Ainsi, la principale question qui a constitué le
socle du présent travail était relative aux effets de la notion
d'amnistie. En effet, l'amnistie a pour effet fondamental de
dépouiller rétroactivement certains faits de leur
caractère délictueux : sans doute, les faits ont bien eu
lieu, mais ils sont sensés, par une fiction juridique, n'avoir
jamais été incriminés par la loi et si ces faits font
objet des poursuites et que leur auteur a été condamné,
cette condamnation devient automatiquement caduque et par la suite, les
sanctions qu'elle contenait cessent de pouvoir recevoir application.
A ce propos, la loi d'amnistie de 2014 est beaucoup plus
explicite et beaucoup plus claire lorsque dans son exposé des motifs
mention est faite concernant les effets énergiques de cette mesure.
Par voie de conséquence, l'amnistie qui est une loi
d'oubli qui doit apaiser les esprits de ceux qui ont subi des exactions et
ces derniers doivent comprendre qu'après tous ces
événements, ils sont appelés à vivre ensemble,
au-delà de toute haine. Par ce motif, cette loi devrait être
l'initiative de cette population victime de ces actes en traduisant leur
volonté du pardon et de cohabitation pacifique.
Or, les lois d'amnistie en RD Congo, peuvent être de
façon générale, considérées comme une
simple institutionnalisation d'une impunité dans le sens où
les circonstances qui les entourent les justifient et surtout lorsque
certains objectifs visés par cette mesure ne sont pas atteints
notamment l'apaisement d'esprit après une période de tension en
instaurant une paix réelle et durable.
Par nature, certains crimes jugés plus graves sont,
pour des raisons évidentes, exclus du champ d'application de ces
lois. Tel est le cas des crimes de guerre, crimes contre l'humanité,
crimes de génocide et le terrorisme. En effet, le principe de
l'imprescriptibilité et celui de la non amnitiabilité des
crimes du genre devraient, en toutes circonstances, être
scrupuleusement respectés en raison de l'importance que les nations
civilisées accordent à la dignité de la personne humaine.
Mais, il est vrai que cette obligation se trouve, surtout dans les pays
où les conflits armés sont chroniques pour divers motifs,
confrontée à une nécessité qui est la paix
durable, qui peut, dans la mesure du possible, constituer une contrepartie
que l'on doit supporter afin de pacifier le pays. Ce qui justifie une
adoption parfois incontrôlée des lois d'amnistie en RDC qui, pour
finir, ne devient qu'un cercle vicieux.
Dans l'espaced'une décennie, la RDC a adopté
quatre textes d'amnistie en violation parlante des normes internationales,
portant atteinte grave aux droits de l'homme, jugées
inaliénables, imprescriptibles, indivisibles, interchangeables et
inhérents à la personne humaine et ce, par une démarche
consistant à banaliser ces crimes en des simples faits de guerre,
faits insurrectionnels tombant directement dans le champ d'application de cette
mesure. Par voie de conséquence, tous les grands criminels se
trouvent hors toutes poursuites au moment où les victimes de ces
actes horribles sont laissées à leur triste sort.
Eu égard à ce qui précède, nous
nous sommes réalisé que la paix, l'objectif visé dans
cette démarche, demeure irréalisable, malgré
l'éponge jetée sur les atrocités dont sont victimes les
populations du Nord et du Sud Kivu par l'institution de l'amnistie. Ce qui nous
poussé à affirmer, sans risque d'être contredit, que la
législation congolaise d'amnistie est inopportun dans le processus
de pacification de la RD. Congo et ne se résume qu'en une
institutionnalisation de l'impunité.
Ainsi, outre les perspectives proposées dans le
présent travail pour la prévention des conflits armés
à l'Est du Congo, la mise en exercice d'une justice transitionnelle
permettant un passage certain vers une situation de paix tout en sortant d'une
période de guerre constitue un moyen très efficace qui vise non
seulement à élucider les principales causes de la guerre et
d'éventuelles réformes institutionnelles au motif de chasser de
l'administration toute personne, qui s'est, dans le passé, rendu
coupable d'un comportement déclencheur de la guerre soit directement
soit indirectement ; mais aussi et surtout l'aspect réparation en
faveur des victimes des actes graves de la guerre (violations massives des
droits de l'Homme), lequel aspect permet de remettre ces victimes dans leurs
droits sans oublier les poursuites sérieuses tant nationales que surtout
internationales à l'encontre des responsables criminels des violations
graves des droits de l'homme.
Ce qui constituera un échec à la complaisance
sinon complicité des autorités congolaises à
l'égard de la lutte contre l'impunité.
Mais, en tout état de cause, quelle que soit la
détermination avec laquelle la poursuite transitionnelle est
menée, le gouvernement doit faire attention à ne pas perdre de
vue les attentes de la population victime.
Enfin, pour notre part, la paix ne peut être
consolidée que là où les institutions judiciaires (cours
et tribunaux) sont fortes et capables de rendre une véritable
justice sans laquelle la paix serait impossible.D'autre part, une
réforme de l'armée s'avère indispensable aux fins de
neutraliser tous les groupes armés opérationnels dans le
Kivu. Et nous sommes dans l'attente de la réaction du gouvernement
congolais à l'égard d'actes terroristes commis par les
présumés ADF-NALU dans le territoire de Beni causant, au cours
d'une année, plus de 1 000 morts. Ne sera-t-il pas question d'une
éventuelle loi d'amnistie en faveur de ces criminels ?
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