PRE-MEMOIRE DE FIN DU PREMIER CYCLE
LICENCE
3
THEME : Les insuffisances de la Constitution
burkinabè du 02 juin 1991
Soutenu publiquement par :
Monsieur Guetwendé Gilles SAWADOGO
Directeur de recherche :
Monsieur Sounkalo OUATTARA
Année universitaire : 2013/2014
DEDICACE
A ma mère Elisabeth pour son amour !
A toute ma famille pour le soutien et l'affection !
REMERCIEMENTS
Mes remerciements vont très sincèrement à
Mon directeur de suivi, Monsieur Sounkalo OUATTARA, enseignant à l'UPO
qui n'a ménagé aucun effort pour m'accompagner dans la
rédaction de ce document.
Ils vont également à l'endroit de tous mes
enseignants, à l'administration de l'UPO ainsi qu'à tous mes
camarades étudiants, particulièrement à Jessie Josias
OUEDRAOGO pour le soutien et la disponibilité.
Introduction
La constitution des hommes intègres1(*). Ainsi peut-on surnommer la
constitution burkinabè du 02 juin 19912(*), première du genre depuis le changement de nom
du pays en 1984. La fin de la guerre froide ainsi que les nouvelles exigences
pour bénéficier de l'aide internationale ont soufflé en
Afrique l'ère de la démocratisation au début de la
dernière décennie du XXème siècle. Alors que
certains pays hésitaient encore à se lancer dans cette entreprise
de construction démocratique, « le Burkina Faso a pris le
parti du réalisme »3(*) en entamant un processus
constitutionnel qui dotera le pays d'une nouvelle constitution en juin 1991.
Précisons que la constitution ainsi adoptée en 1991, fondant la
IVème République, est précédée par les
constitutions du 27 novembre 1960, du 14 juin 1970 et du 13 novembre 1977 qui
instituèrent respectivement les trois premières
Républiques sous la Haute Volta.
« La constitution est la norme suprême du
pays » ainsi qu'il ressort de l'arrêt Marbury vs
Madison de la Cour suprême des Etats Unis de 1803, ce qui correspond
à une définition formelle de la constitution. Elle est l'ensemble
des règles relatives à l'organisation, au fonctionnement des
institutions, à la dévolution du pouvoir politique ainsi qu'aux
libertés des citoyens selon une définition
matérielle de la constitution ; et Francis DELPERE de dire qu'elle
« est la règle juridique originaire qu'une ou plusieurs
sociétés politiques qui entendent fonder un Etat se sont
données en vue de permettre la réalisation efficace du bien
public».4(*)
Par référendum, 1 502 397
Burkinabès5(*) ont
adopté le 02 juin 1991, la constitution de la quatrième
République. Le Capitaine Blaise Compaoré par un Kiti
n°an-VIII-330/FP/PRES du 11 juin 1991 la promulgue. L'adoption de cette
constitution serait une idée personnelle du capitaine Blaise
Compaoré, chef du Front Populaire (sorte de parti unique au pouvoir)
qui, dès 1989 a exprimé son désir de voir le pays se doter
d'une constitution dans le cadre d'un processus de démocratisation. Il
donne donc instruction au Front Populaire lors de son congrès du
1er au 4 mars 1990 de constituer une commission constitutionnelle
chargée d'élaborer un projet de constitution qui après
être amendé par les assises nationales tenues du 14 au 15
décembre de la même année est soumis à l'approbation
du peuple le 02 juin 1991.
Elle a été modifiée à plusieurs
reprises depuis son adoption. La mouture en vigueur comprend 173 articles
réunis dans XVII titres : ces titres traitent respectivement des
droits et devoirs fondamentaux, de l'Etat et de la souveraineté
nationale, du Président du Faso, du gouvernement, du Parlement, des
domaines respectifs de la loi et du règlement, des rapports entre le
gouvernement et le parlement, du pouvoir judiciaire, de la haute cour de
justice,du conseil économique et social et des organes de
contrôle, des collectivités territoriales, de l'unité
africaine, des traités et accords internationaux, du conseil
constitutionnel, du médiateur du Faso, du conseil supérieur de la
communication, de la révision, des dispositions finales et, enfin des
dispositions transitoires.
Les multiples révisions de la constitution s'inscrivent
dans le cadre du principe selon lequel chaque peuple a le droit d'adapter sa
constitution à ses réalités et à ses aspirations
mais témoignent aussi de la quête d'une perfection de la
constitution, comme quoi toute oeuvre humaine est perfectible. Nous inscrivons
donc notre travail dans une optique de décèlement et d'analyse
des insuffisances de la constitution burkinabè du 02 juin 1991.
Il ne s'agira pas pour nous de blâmer absolument la
constitution du Burkina Faso qui a des points de luminosité
constitutionnelle6(*)
selon l'expression du Professeur Abdoulaye SOMA. En effet, d'après
l'analyse du Professeur SOMA, la constitution du 02 juin 1991 est non seulement
source d'une stabilité à la fois constitutionnelle et politique
mais elle est aussi une constitution démocratique dans son esprit
normatif et dans son agencement institutionnel. La constitution du Burkina Faso
a donc le mérite d'avoir obtenu des acquis notables, notamment sur le
plan du libéralisme politique.
Seulement, faîte par des hommes pour des hommes, toute
constitution souffre d'imperfections. Les constitutions africaines, et donc
celle du Burkina Faso, n'échappent pas à la règle. Elles
contiennent, elles aussi, « certaines
bizarreries » qui « proviennent de la
rédaction même de la Constitution car son texte n'est pas exempt
d'erreurs, de contradictions et de lacunes »7(*) . Des
éléments factuels sont aussi de nature à imperfectionner
ces constitutions. Loin donc d'être une occasion de blâme, cette
étude se propose de mettre à nu des imperfections pour en
rechercher des solutions et aboutir à une constitution capable d'assurer
au Burkina Faso une vie constitutionnelle normale et conforme à la
théorie du droit constitutionnel.
Quelles sont donc les insuffisances de la constitution
burkinabè du 02 juin 1991 ? Quelles sont celles liées aux
éléments factuels et à l'environnement de la
constitution ? Que peut-on reprocher à la constitution du Burkina
Faso dans son fond ?
Sans prétendre être exhaustif sur les
insuffisances que comporte la constitution du Burkina Faso, nous
décelons et analysons les insuffisances formelles (chapitre 1) et
fondamentales (chapitre 2) qui nous semblent capitales et que le pouvoir
constituant gagnerait à corriger dans de brefs délais.
Chapitre 1. Les
insuffisances formelles
La constitution du Burkina Faso comporte des insuffisances qui
résultent aussi bien de sa procédure d'élaboration et
d'adoption (Section 1) que de sa procédure de révision (section
2). Ces insuffisances de formes expliquent l'échec de la constitution
à fonder un Etat de droit démocratique puisque comme on le dit en
droit : la forme tient le fond en l'état.
Section 1. Les insuffisances
résultant de l'élaboration de la constitution
La constitution du Burkina Faso détient certaines de
ses insuffisances du contexte dans lequel elle a été
élaboré (§1) et des modalités de son adoption
(§2).
§1. Le contexte
d'élaboration et d'adoption de la constitution
La Constitution du Burkina Faso a été
adoptée dans un contexte politique défavorable (A). Elle a par
ailleurs été taillée sur le modèle de la
constitution française (B).
A. Le contexte politique
défavorable
Le Burkina Faso a eu une histoire politique tumultueuse (1)
depuis son accession à la souveraineté internationale. Cela a du
impacté négativement la constitution du 02 juin 1991 qui
à bien voir a été imposée aux autorités
politiques d'alors (2).
1. Le passé politique
tumultueux
Le Burkina Faso depuis son accession à
l'indépendance a navigué entre constitutionnalisme et
périodes d'exceptions. D'abord, la Haute-Volta a eu sa première
République de 1960 au 03 janvier 1966 avec Maurice Yaméogo.
Ensuite, la deuxième République intervint en 1970 et ne durera
que quatre (04) années c'est-à-dire jusqu'en 1974. La
Troisième République, enfin, qui naît en 1978 ne vivra que
jusqu'au 25 novembre 1980.
De 1960 à 1991, date d'adoption de la Constitution de
la quatrième République, le Burkina Faso connût douze (12)
années discontinues de vie constitutionnelle normale. Entre ces
années de vie constitutionnelle ont intervenu des périodes
d'exceptions : la première République a été
interrompue par le soulèvement populaire du 03 janvier 1966 à la
suite de laquelle le pays a plongé dans un régime d'exception
jusqu'en 1970 sous le commandement du général Sangoulé
LAMIZANA. La seconde République a, elle, été
écourtée en 1974 par l'avènement de la période dite
du « Renouveau national », toujours avec le
général Sangoulé Lamizana. La fin de la troisième
République est le fait du colonel Saye ZERBO et de son Comité
militaire de redressement pour le progrès national (CMRPN) le 25
novembre 1980. Puis ce sera la période de successions de coups d'Etat
militaire. En novembre 1982, c'est l'avènement du Conseil de salut du
peuple (CSP) avec le médecin-commandant Jean-Baptiste OUÉDRAOGO,
suivi, en août 1983, par l'avènement du Conseil national de la
révolution (CNR) du capitaine Thomas SANKARA. Le 15 octobre 1987, c'est
l'avènement du Front populaire avec le capitaine Blaise
COMPAORÉ8(*).
Cette histoire politique et constitutionnelle tumultueuse a pu
avoir une incidence sur la qualité de la constitution du 02 juin 1991
car la construction démocratique est un processus de longue haleine qui
se sédimente et se perfectionne continuellement. On pourrait penser que
le Burkina Faso n'était pas suffisamment prêt à aller dans
un processus constitutionnel, n'eût été parce que cela lui
semble avoir été imposé.
2. Le caractère imposé de la constitution
Une partie de la doctrine pense que la constitution du Burkina
Faso est de conception authentique ou autonome et relève de la
volonté politique du capitaine Blaise Compaoré qui a
initié le processus constitutionnel dès novembre 1989 avant le
discours de la Baule du 20 juin 1990. Une autre opinion postule que ce sont les
pressions internationales à l'instar du fameux discours de
François Mitterrand à la Baule, le triomphe international du
mouvement libéral, le vaste mouvement de démocratisation en
Afrique ainsi que les revendications internes de démocratie et de
libertés qui ont contraint le Front populaire à engager le
processus démocratique et constitutionnel. L'ouverture
démocratique et la constitutionnalisation étant devenue la
condition sine qua non de l'aide internationale, on peut douter de la
bonne volonté du Président COMPAORE d'instaurer une vie
constitutionnelle par conviction. La constitution
« imposée » sera donc adoptée pour à
la fois « plaire » aux partenaires financiers du Burkina
Faso en donnant l'illusion d'une démocratisation et calmer les remous
sociopolitiques internes. Cette situation a pu conduire à l'adoption de
règles constitutionnelles formelles qui ne seront pas respectées
ou seront modifiées plus tard en raison de leur caractère
importé.
B. Le mimétisme constitutionnel
La Constitution du 02 juin 1991 a été fortement
inspirée de celle de la France adoptée en 1958. La transposition
automatique de la démocratie française (1) au Burkina Faso s'est
soldée par un échec (2) du constitutionnalisme
burkinabè.
1. La transposition des systèmes et
institutions français
Si l'on définit le mimétisme comme
« la transposition d'une Constitution d'un Etat vers un autre
Etat, une exportation plus ou moins consciente et plus ou moins
complète »,9(*) l'on peut se rendre compte que la constitution du
02 juin 1991 n'échappe pas à la catégorie des
constitutions mimées. En effet, la constitution burkinabè
reproduit exactement les règles et les institutions françaises
issues de la constitution de 1958 « à la virgule
près ». De l'organisation de l'institution
présidentielle au modèle de justice constitutionnelle en passant
par l'organisation du Parlement, l'aménagement des rapports entre
parlement et gouvernement, le système de parti, le titulaire de la
souveraineté, ainsi que pour bien d'autres institutions, le Burkina Faso
a copié la France. Le constituant burkinabè (et celui africain en
général) a fait de la constitution et de la pratique
françaises un modèle. Il a trouvé en la France leur
modèle de démocratie, or de la déclaration de Bamako
signée le 3 novembre 2000 par les Ministres et chefs de
délégation des États et gouvernements des pays ayant le
français en partage lors du Symposium international sur le bilan des
pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans
l'espace francophone, il ressort qu'« il n'y a pas de mode
d'organisation unique de la démocratie et que, dans le respect des
principes universels, les formes d'expression de la démocratie doivent
s'inscrire dans les réalités et spécificités
historiques, culturelles et sociales de chaque peuple ». Le
constituant burkinabè n'ayant pas pris cette considération en
compte, il en résulte un échec du constitutionnalisme.
2. L'échec du au
mimétisme
De manière contradictoire, on pourrait reprocher aux
constituants africains d'avoir importé intégralement la
Constitution de 1958 ou dans l'autre sens, de n'avoir pas
préservé sa cohérence en la transposant de manière
incomplète. La transposition intégrale est ce qui nous parait
être un handicap à la réussite du constitutionnalisme
burkinabè.
S'il faut reconnaitre que « toute l'histoire des
constitutions, à partir de quelques rares prototypes originaux, est
faîte d'imitations »10(*), une Constitution ne peut être
transposée entièrement et doit nécessairement se plier au
contexte politique et social de l'Etat concerné. Le constituant doit
alors procéder à un double mouvement. Il doit d'abord «
dépoussiérer » la Constitution qu'il souhaite transposer
dans son Etat et ensuite sélectionner les dispositions qui lui seront
utiles11(*). En effet, une
Constitution étant faite sur mesure, elle contient des dispositions qui
ne sont pas transposables, notamment parce qu'elles sont obsolètes. Dans
le cas du Burkina, le constituant a transposé systématiquement
les institutions françaises dans la constitution sans tenir compte du
contexte sociopolitique et économique du pays. L'exemple le plus
frappant est l'institution en 1991 du bicamérisme alors que les autres
pays à l'instar de la Côte d'Ivoire avaient par réalisme
institué un monocamérisme. Les différentes
révisions controversées de la constitution se rapportant sur ces
mêmes dispositions sont une preuve de l'échec du mimétisme
constitutionnel au Burkina Faso. Mais les modalités peu
démocratiques dans l'adoption ont aussi joué sur la
qualité de la Constitution burkinabè.
§2. Les modalités
d'adoption de la constitution
L'établissement de la constitution pose
nécessairement la question du pouvoir constituant. Selon qu'il est plus
ou moins démocratique, on parle de constitution ou de charte
octroyée. La constitution du Burkina Faso peut être classée
dans le camp des « constitutions octroyées » (A).
Toujours dans le cadre de l'établissement de cette constitution, la
transition n'a pas été gérée de façon
efficiente (B).
A. Le caractère octroyé de
la constitution
Si une commission constitutionnelle a été
créée pour l'élaboration de la constitution
burkinabè de la IVème république, il n'en demeure pas
moins que cette constitution est un acte de volonté exclusif du
capitaine Blaise Compaoré et du Front Populaire (1). La consultation
populaire n'avait pour objet que de légitimer ou plébisciter (2)
la volonté du « prince ».
1. La constitution, acte de volonté
du Front Populaire
Le capitaine Blaise Compaoré, président du
comité exécutif du Front Populaire déclarait ceci le
1er mars 1990 lors de son discours d'ouverture du congrès du
parti : « l'approfondissement de la démocratie
requiert l'élaboration et l'adoption d'une constitution, loi
fondamentale du pays, qui devra consacrer les bases du régime social
présent et réaffirmer notre projet de
société ». Par ailleurs, il donne
« mandat à la coordination et au comité
exécutif du Front Populaire pour procéder à la formation
d'une commission constitutionnelle (...) qui rédigera un texte
constitutionnel conforme aux réalités et aux aspirations de notre
peuple ».
Par Kiti n°an VII 0279/FP/CFP/CE, du 20 avril 1990, la
commission constitutionnelle est créée. Cet acte
présidentiel crée unilatéralement la commission
constitutionnelle, détermine sa composition et ses attributions. Ainsi,
il ressort de l'article 4 que la commission constitutionnelle est
« chargée de rédiger un avant projet de
constitution sur la base des directives et des matériaux mis à sa
disposition par le comité exécutif du Front
Populaire ». La commission constitutionnelle fonctionnait donc
sur la base de « directives » et
« matériaux » émanant du Front Populaire. En
clair, c'est la volonté du Front Populaire qui déterminait le
fonctionnement de la commission.
Un congrès du Front Populaire devrait par ailleurs
examiner l'avant projet de constitution12(*). Il est aussi prévu que le président de
la commission constitutionnelle, nommé par le Président du
comité exécutif du Front Populaire13(*), devrait rendre compte
régulièrement à ce dernier « du
déroulement et de l'avancement des travaux »14(*).
Cette façon d'organiser la commission constitutionnelle
et le processus d'élaboration de la constitution ne correspond pas
à une conception démocratique des modes d'établissement de
la constitution. En effet, en l'espèce c'est la volonté du Front
populaire qui a été la plus déterminante, et au Professeur
Abdoulaye SOMA d'affirmer que « le Front Populaire a
été l'alpha et l'oméga de l'adoption de cette
constitution ». Cette position est d'autant plus vraie quand on
sait que la commission constitutionnelle était composée de 104
membres dont 64 étaient membres du Front Populaire et donc acquis
à sa cause, sans compter les membres issus des services techniques
étatiques tout aussi acquis au regard d u contexte sociopolitique.
Le Front Populaire a donc initié l'élaboration
et l'adoption de la constitution, en a déterminé le contenu par
des moyens qui sont les siens, la volonté populaire étant
manifestement minimisée. La consultation populaire engagée
ultérieurement n'avait vraisemblablement pour mission que de
légitimer cette volonté du Front Populaire.
2. Le référendum, une
consultation légitimante
Après l'élaboration de la constitution par la
commission constitutionnelle, il fallait la soumettre à l'approbation du
peuple pour lui donner plus d'autorité car « il est
difficilement concevable aujourd'hui qu'une constitution soit mise en vigueur
sans avoir été soumise au suffrage populaire »15(*). En l'espèce, la
consultation populaire s'apparente beaucoup plus à un plébiscite
qu'à un référendum car dans le contexte sociopolitique de
l'époque, ce serait utopique de prétendre que le peuple avait la
double possibilité d'accepter ou de rejeter le texte. Le Professeur
Abdoulaye SOMA souligne à propos que si la constitution du Burkina Faso
n'est pas unilatéralement octroyée au même titre que la
charte octroyée de 1814 en France, elle comporte un caractère
octroyé car « il faut bien avoir une conception
évolutive de l'octroi dans la modernité constitutionnelle quand
le peuple est mis en filigrane d'un processus constitutionnel où il fait
de la figuration politique en lieu et place d'en être l'acteur principal
comme le voudrait la pure logique démocratique »16(*). L'association du peuple
au processus d'établissement de la Constitution n'était
visiblement pas le souci du « prince ». Cet état des
faits s'est aussi ressenti dans la manière de gérer la
période transitoire entre l'adoption de la Constitution et la mise en
place des institutions.
B. La question de la gestion de la
période de transition
La gestion de la période transitoire a
été monopolisée par le Front populaire à qui le
constituant originaire a attribué la gestion de la transition (1). Le
comble est qu'il y a eu une scission au sein de la classe politique sur la
question, un consensus n'ayant pas été trouvé (2).
1. L'accaparement de la gestion par le
pouvoir en place
Dès l'élaboration de la constitution, le Front
Populaire s'est arrogé le pouvoir de gérer la période
transitoire, c'est-à-dire la période entre l'adoption de la
constitution et la mise en place des institutions. En effet, le constituant qui
rédigeait la constitution sur la base de directives et de
matériaux mis à sa disposition par le Front Populaire a
disposé à l'article 170 de la Constitution
que« le Chef de l'Etat et le
Gouvernement sont habilités à prendre les mesures
nécessaires à la mise en place des institutions ».
En plus l'article 172 dispose
que« jusqu'à la mise en place
des institutions, le Chef de l'Etat et le Gouvernement continuent d'agir et
prennent les mesures nécessaires au fonctionnement des pouvoirs publics,
à la vie de la Nation, à la protection des citoyens et à
la sauvegarde des libertés ». C'est donc une
érection du capitaine Blaise Compaoré et de son gouvernement en
organes de transition. Cela est critiquable en ce que cette période est
délicate et méritait d'être négociée et
gérée par l'ensemble de la classe politique pour la mise en place
d'institutions stables, impartiales et transparentes. Cet accaparement de la
transition par le Front populaire ou du moins l'attribution de la gestion de la
période transitoire par la Constitution au pouvoir
révolutionnaire en place a contribué à dégrader le
crédit de la Constitution ainsi que des institutions qui en
émanent. Ailleurs, la transition depuis l'élaboration de la
constitution a été gérée par l'ensemble de la
classe politique dans le cadre d'une conférence nationale
souveraine : c'est l'exemple du Bénin. Au Burkina Faso,
malheureusement, cette transition s'est effectuée sans qu'il n'y ait
jamais eu ne serait ce qu'un compromis s'apparentant à un consensus.
2. L'absence d'un consensus
La gestion de la période de transition ayant
été confiée au pouvoir en place, des problèmes
surgiront aussitôt. L'opposition politique ne tarda pas à
contester cet accaparement. « Après l'adoption et la
promulgation de la constitution, la scène politique burkinabè a
connu un regain d'agitation avec des alliances et des manoeuvres de tous
genres. On retiendra plusieurs gouvernements dits de transition pour calmer la
tension politique ou pour contourner certaines
questions »17(*). Tous ces gouvernements d'union nationale
échouèrent, un consensus n'ayant jamais été
trouvé sur les principes de gestion de la transition. Il y a d'une part
un Front populaire qui croit avoir le monopole de la transition qu'il
détient de la constitution18(*) et d'autre part, une opposition qui veut profiter du
gouvernement d'union nationale pour revendiquer une instance souveraine. Pour
l'opposition, le processus démocratique chemine dans la pénombre.
Elle exige donc « la clarté et la
transparence » dans la conduite du processus. Le pouvoir en
place ne lâchera jamais prise et l'opposition démissionnera de ces
gouvernements mais cela n'a pas empêché le Front populaire de
poursuivre le processus. Comme on le voit, il n'y a jamais eu de consensus sur
les règles du jeu durant cette période. Ce n'est donc pas
étonnant que des institutions mises en place sans consensus
éprouvent des difficultés à fonctionner. La Constitution
n'était donc pas en mesure d'installer un véritable régime
constitutionnel du fait des conditions de son établissement. La
révision de la constitution est aussi importante dans un processus
constitutionnel, pourtant la constitution du 02 juin 1991 présente des
lacunes en la matière.
Section 2. Les
insuffisances résultant de la révision de la constitution
Il n'y a pas de mal à réviser une constitution.
D'ailleurs, le changement des réalités et des aspirations du
peuple obligent à respecter ce principe d'adaptabilité de la
constitution. Comme le stipule bien la déclaration française des
droits de l'Homme et du citoyen, « un peuple a toujours le droit
de revoir, de réformer et de changer sa Constitution. Une
génération ne peut assujettir à ses lois les
générations futures »19(*). Il est donc clair que lorsque
nous parlons d'insuffisances dans la révision de la Constitution, nous
faisons allusion à autre chose : en effet, la procédure de
révision de la Constitution du Burkina Faso marginalise le peuple
(§1) mais aussi les révisions constitutionnelles sont des occasions
de manipulation de la constitution au Burkina Faso (§2).
§1. La marginalisation du
peuple dans les processus révisionnels
Affirmer que le peuple burkinabè est mis à
l'écart des processus peut étonner, a priori, pour qui sait que
la constitution du 02 juin 1991 accorde au peuple aussi bien l'initiative de la
révision20(*) que
le pouvoir de révision de la constitution21(*). La marginalisation est
pourtant une réalité visible à partir même du texte
constitutionnel qui consacre le principe de la révision par la voie
parlementaire (A). L'initiative de la révision accordée au peuple
par le mécanisme de la pétition est difficile voire illusoire
à mettre en oeuvre (B).
A. Le principe de la révision
parlementaire
En prévoyant que la constitution peut être
révisée par une majorité des trois quarts (¾) des
membres du Parlement (1), le constituant burkinabè fait du recours au
référendum une exception (2).
1. La révision au trois quarts
(¾) des membres du Parlement
L'alinéa 3 de l'article 164 de la constitution du 02
juin 1991 dispose que «le projet de révision est adopté
sans recours au référendum s'il est approuvé à la
majorité des trois quarts (3/4) des membres du Parlement convoqué
en Congrès par le Président du Faso ». C'est
l'intention du constituant français de 1946 qui a été
transcrite dans la constitution du 02 juin 1991 burkinabè. En effet, des
motifs, il ressort que les constituants de 1946 ont « voulu qu'il
ne soit fait recours au référendum que lorsque la volonté
des représentants du peuple ne se serait pas manifestée d'une
manière particulièrement forte, soit par une très large
majorité des trois cinquièmes dans chacune des deux
assemblées ». De façon analogue, le constituant
burkinabè n'a voulu recourir au peuple que si leurs représentants
n'ont pas par une majorité qualifiée des trois quarts (¾)
approuvé le projet de révision.
Il est vrai que plusieurs raisons militent en faveur de la
révision parlementaire de la constitution. D'abord, les parlementaires
sont les représentants du peuple, donc leur vote n'équivaut pas
moins au vote du peuple. Ensuite, l'organisation d'une consultation populaire
requiert un investissement colossal en termes de moyens financiers que de
mobilisation en ressources humaines, techniques et logistiques ; ce qui
semble énorme pour un pays en voie de développement. Enfin, la
consultation populaire n'aboutit pas toujours à un résultat
différent. Le peuple en majorité non instruit est souvent
manipulé, ce qui fausse l'équité et la
sincérité de la consultation.
Cependant, ériger la révision parlementaire en
principe compromet la démocratie car les parlementaires qui sont avant
tout des politiciens pourraient en abuser surtout quand on connait le contexte
de déséquilibre des forces tenant au fait majoritaire à
l'Assemblée nationale. La preuve est que depuis l'adoption de la
constitution, le peuple burkinabè n'a pas été une seule
fois consulté alors que la constitution a fait l'objet de sept
révisions, lesquelles ont consisté essentiellement en
faction-défaction-réfaction, et ce, toutes les fois que le parti
au pouvoir, qui a toujours eu la majorité requise22(*) pour la réviser, en
avait besoin. C'est alors regrettable que le peuple souverain ne soit
consulté qu'exceptionnellement.
2. Le référendum, une
exception
« Dans une démocratie, la seule source
possible de légitimité est la volonté du peuple souverain.
De ce point de vue, le référendum et l'initiative ont un grand
avantage car ils sont le moyen le plus direct de s'assurer de la volonté
populaire. Le citoyen sera plus facilement prêt à contourner une
loi défendue par les élites, ou introduite grâce au
chantage ou à la corruption, qu'une loi qui reflète le
consentement libre et conscient de la majorité des
citoyens»23(*).
Voici un peu résumé l'importance de la consultation populaire en
général et du référendum en particulier. Le
constituant burkinabè semble occulter cela quand il érige la
consultation du peuple en exception. En effet, l'article 164 de la
constitution prévoit que « le projet de révision
est adopté sans recours au référendum s'il est
approuvé à la majorité des trois quarts (3/4) des membres
du Parlement convoqué». On a là une consécration
constitutionnelle de l'exception du recours au référendum qui n'a
lieu que si le parlement n'arrive pas à réunir les trois quarts
(¾) nécessaires à la révision de la Constitution. La
lacune est accentuée par le fait majoritaire qui a fait que depuis
l'adoption de la Constitution, aucune révision par voie
référendaire n'a eu lieu. Pourtant, nous sommes à sept
révisions.
Alexis de Tocqueville écrivait qu' « au-dessus
de toutes les institutions [...] réside un pouvoir souverain, celui du
peuple, qui les détruit ou les modifie à son gré
»24(*). Il est
donc malheureux de « quasi exclure » le peuple de la
révision de la constitution alors que la souveraineté nationale
lui appartient25(*) et
surtout quand on connait les velléités politiques de la
révision parlementaire. L'initiative de révision accordée
au peuple aurait été salutaire si elle n'était pas
qu'illusoire.
B. La pétition, un droit
illusoire
Le constituant burkinabè donne un droit constitutionnel
(1) au peuple d'initier une pétition. Le problème est que ce
droit est illusoire du fait que la volonté populaire peut être
bloquée (2).
1. La pétition, un droit
constitutionnel
Les citoyens peuvent prendre eux-mêmes l'initiative de
demander la révision de la constitution. La procédure s'ouvre
alors par une pétition, comportant un nombre minimum de signatures
prévu par la constitution, qui devrait aboutir à l'examen du
texte par le Parlement et ensuite à l'adoption du projet de texte soit
par voie parlementaire, soit par voie référendaire. Au Burkina
Faso, c'est l'article 161 de la constitution qui prévoit que
« l'initiative de la révision de la Constitution
appartient (...) au peuple lorsqu'une fraction d'au moins trente (30 000)
personnes ayant le droit de vote, introduit devant l'Assemblée nationale
une pétition constituant une proposition rédigée et
signée ».
Il ressort de cette disposition qu'il faut réunir au
moins trente mille signatures valables pour mettre en oeuvre la
procédure de révision de la constitution sur initiative
populaire. Ce nombre dans le contexte burkinabè n'est pas difficile
à obtenir : pour exemple, la pétition « touche pas
à mon article 37 » initiée par le Professeur Augustin
LOADA a réuni plus du double du nombre de signatures exigées par
la Constitution. Du reste cette pétition, ainsi que bien d'autres, n'a
pas abouti du fait des blocages par les autorités compétentes qui
ne daignent pas entériner le processus.
2. La possibilité de blocus de la
volonté populaire
La possibilité d'initier une pétition
accordée au peuple manque son but du fait qu'obligation n'est pas faite
au Parlement d'entériner la volonté du peuple exprimée par
voie de pétition. En effet l'article 98 dispose que la pétition
doit être déposée sur le bureau de l'Assemblée
nationale et souligne que« le droit
d'amendement appartient aux députés et au Gouvernement quelle que
soit l'origine du texte ». Il s'ensuit que la pétition,
expression de la volonté populaire peut être bloquée aussi
bien par le Parlement que par le gouvernement. Comment comprendre que des
organes constitués puisse censurer la volonté du
peuple alors que la souveraineté nationale appartient au peuple? En
1993, une pétition initiée par le Mouvement Burkinabè des
Droits de l'Homme et des Peuples aux fins de la relecture du code de
l'information. Cette pétition a été simplement
écartée au profit d'un projet de loi gouvernemental. En 2010, la
pétition « touche pas à mon article 37 »
initiée par le Professeur LOADA a été
déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale. Aucune
suite n'a été donnée à ce projet. C'est bien
dommage parce que ce droit constitutionnellement consacré aurait permis
de faire face à la mauvaise volonté des gouvernants et des
politiciens. Malheureusement, tout est bien agencé de sorte à
pouvoir manipuler les règles, en l'occurrence celles constitutionnelles,
à la guise des politiciens.
§2. Les manipulations de
la constitution
L'on pourrait légitimement se demander à quoi
servent les constitutions africaines quand on observe la pratique et l'objet
de certaines révisions constitutionnelles en Afrique.Dire que les
révisions constitutionnelles au Burkina Faso consistent en une
manipulation de la constitution n'est pas un blasphème. Les faits sont
là pour donner raison à l'auteur d'une telle affirmation. Non
seulement la Constitution est trop révisée (A), toute chose qui
le vide de son sens initial, mais ces révisions revêtent un
caractère fantaisiste (B).
A. La fréquence des
révisions constitutionnelles
Pour bien appréhender le caractère excessif des
révisions constitutionnelles au Burkina (2) il convient de
présenter ses révisions de 1991 à 2014 (1).
1. Les révisions constitutionnelles
de 1991 à 2014
Depuis son adoption en 1991, la constitution du Burkina Faso a
été révisée sept fois. La première
révision est intervenue en 1997 et a consisté en la suppression
des référents révolutionnaires de la constitution ainsi
que la suppression de la clause limitative du mandat présidentiel
à deux26(*). La
seconde opérée en 2000 a consacré la réduction de
la durée du mandat présidentiel de sept à cinq ans, le
retour à la limitation du nombre de mandat à deux ainsi que
l'éclatement de la Cour Suprême en quatre structures
différentes (Cour de Cassation, Conseil d'Etat, Cour des Comptes et
Conseil Constitutionnel)27(*). En 2002, la loi N°001-2002/AN du 22 janvier
2002 s'est essentiellement attachée à la transformation de la
forme d'organisation du pouvoir législatif en la faisant passer d'un
parlement bicaméral à une assemblée monocamérale et
ce par la suppression de la Chambre des représentants. La
quatrième révision est intervenue en 2009 en vue de combattre
«le nomadisme politique» et d'opérer une meilleure
répartition des compétences entre le Conseil constitutionnel et
le juge administratif en matière de contentieux électoral. La loi
N°023-2012/AN du 18 mai 2012 a inscrit dans la constitution la
possibilité et les modalités d'une prorogation du mandat des
membres du Parlement marquant la cinquième révision. La
sixième révision de portée très étendue a
été le fait de la loi N°033-2012/AN du 11 juin 2012 qui a
apporté des changements significatifs à divers niveaux dont
notamment:
- le préambule, en constitutionnalisant la chefferie
traditionnelle, le genre ainsi que certaines valeurs républicaines et
éthiques;
-la fonction présidentielle pour ce qui concerne les
conditions d'éligibilité;
-le mode de désignation du premier ministre;
-l'organisation du pouvoir législatif qui redevient
bicaméral avec la création d'un Sénat;
-l'organisation et le fonctionnement du Conseil
constitutionnel avec un réaménagement de la composition de
l'institution ainsi que du mode de désignation de ses membres et de son
président, la modification des conditions de saisine par les
parlementaires, l'introduction de la question prioritaire de
constitutionnalité et la reconnaissance d'un pouvoir
d'auto-saisine ;
-L'introduction de deux nouveaux titres qui consacrent la
constitutionnalisation du Médiateur du Faso et du Conseil
Supérieur de la Communication;
-la création d'un article 168.1 qui octroie une
amnistie pleine et entière aux anciens chefs d'Etat du Burkina Faso pour
la période allant de 1960 à 2012.
Enfin et pour la septième fois le constituant
dérivé adoptait le 13 novembre 2013 une loi de révision
constitutionnelle pour mettre en suspend les institutions issues de la
révision de juin 2012, notamment en permettant à
l'Assemblée nationale de délibérer seule avant la mise en
place effective du sénat et au conseil constitutionnel de statuer avant
la nomination des autres membres désormais prévus.
En 22 ans donc d'existence, la constitution du Burkina Faso a
été révisée sept fois, excessif à notre
avis.
2. Le caractère excessif des
révisions
Lorsque l'on essaie de faire le ratio des révisions
constitutionnelles au Burkina, l'on se rend compte que la constitution du 02
juin 1991 a été révisée une fois tous les trois ans
environs. S'il est vrai qu'elle est moins révisée que la
constitution française de 1958 qui connait en moyenne une
révision par an ainsi que celle sénégalaise qui est
révisée tous les semestres, il faut reconnaitre que le ratio de
révision au Burkina est élevé, les pays cités
n'étant pas un modèle à suivre en la matière, et,
le Burkina Faso faisant ses premiers pas dans le renouveau constitutionnel
devant avoir des principes cardinaux stables sur une certaine période
pour la sédimentation de son constitutionnalisme. Le Professeur
Abdoulaye SOMA affirmait à propos qu'avant les révisions de 2012,
la fréquence de révisions était soutenable, acceptable.
Cela signifie que maintenant, c'en est trop ! Entre 2012 et 2014, la
constitution a été révisée trois fois et un
processus de révision est à l'horizon. Cela est excessif pour un
pays en quête de constitutionnalisme comme le Burkina. Cela est
aggravé par le fait que les révisions ont consisté en des
réformes assez quantitatives et fondamentales : certains
préfèrent parler d'un changement de constitution, le texte
initial ayant été profondément retouché.
S'il faut être d'avis avec Jean Du Bois de Gaudusson,
spécialiste français du droit constitutionnel, pour qui
« une constitution se change, en effet, et c'est parfaitement conforme
à l'État de droit ; si l'on fait référence au cas
français, on s'apercevrait qu'une constitution peut se changer assez
souvent, dès lors que les procédures sont respectées et
que la révision s'effectue dans les formes républicaines
», il ne faudrait cependant pas que ces révisions soient trop
fréquentes car avant tout le principe voudrait que l'on change la
constitution pour l'adapter au contexte, à la génération.
L'on pourrait utilement se demander s'il y a eu un changement de contexte ou de
génération entre 1991 et 2014 ou même entre 2012 et 2014
pour qu'on ait autant de révisions en si peu de temps. Ce
caractère excessif est d'autant plus irritant quand on sait que les
révisions ont porté sur les mêmes dispositions. C'est quand
même trop de revenir sur l'article 37 de la constitution à trois
reprises28(*) ou sur la
nature du Parlement à deux reprises en si peu de temps. Si l'on a un
droit de réviser la constitution, il ne faut pas en abuser car comme le
souligne le Professeur Jean WALINE : « chaque fois que l'on
révise la Constitution il y a le risque de jouer
«l'apprenti-sorcier» c'est-à-dire de remettre en cause le
très subtil équilibre que réalise la Constitution. Je
serais tenté de dire qu'il n'y a pas de révision innocente de la
Constitution et qu'avant de réviser il faut soigneusement
réfléchir à toutes les conséquences
éventuelles que pourrait avoir, ne serait-ce que par ricochet, la
modification apportée »29(*). Cela ne semble pas être la
préoccupation du constituant dérivé burkinabè qui
révise la constitution assez souvent, lesquelles révisions ont
d'ailleurs et malheureusement un caractère fantaisiste.
B. La fantaisie de la révision
Les révisions constitutionnelles qui se sont
passées au Burkina Faso depuis l'adoption de la constitution l'ont
été soit de façon irrégulière (1), soit pour
satisfaire des besoins politiques et politiciens (2).
1. L'irrégularité des révisions
Le titre XV de la constitution fixe la procédure de
révision de la constitution du Burkina Faso. La lecture de ce titre nous
révèle que la constitution du Burkina Faso est plus ou moins
rigide. Il existe deux voies de révisions de la constitution : la
voie référendaire et la voie parlementaire. Que l'initiative de
la révision provienne du peuple, du gouvernement ou d'un membre du
parlement, l'article 163 prescrit qu'elle est « dans tous les
cas, soumis au préalable à l'appréciation du
parlement ». Selon que le Parlement approuve ou rejette
« l'idée » de la révision, on poursuivra ou
non le processus. L'appréciation est réputée être
positive dès lors que la majorité absolue des membres du
parlement a voté « pour » le projet. Après
l'étape de l'appréciation, le projet de révision est soit
soumis au référendum, soit soumis au vote du Parlement qui,
dès lors qu'il vote le texte aux trois quarts (¾) des membres,
l'adopte. Aucune révision constitutionnelle par voie
référendaire ne s'étant encore réalisée dans
le cadre de la constitution du 02 juin 1991, c'est la révision par voie
parlementaire qui nous intéressera. Pour cette voie, la constitution
prescrit un vote en deux temps. Le Professeur Abdoulaye SOMA souligne que
« ce sont là deux phases complètement
différentes avec deux logiques complètement différentes
avec deux majorités complètement
différentes »30(*).Cependant, les deux opérations
(l'appréciation et l'adoption du projet) étant
réalisées par le même organe (Parlement), il y a eu lors de
toutes les révisions, une irrégularité de la
procédure. En effet, le fait majoritaire aidant, dès
l'étape de l'appréciation, les révisions initiées
ont reçu l'onction parlementaire avec plus des ¾ des membres, ce
qui a fait croire au parlement qu'il n'était plus nécessaire de
procéder à l'étape de l'adoption. Il y a donc eu deux
opérations en une. Si l'on peut penser que le résultat serait le
même, il n'est pas moins évident qu'il y a eu une violation de la
procédure fixée par la loi fondamentale. C'est d'ailleurs
à la fois étonnant et dommage que le juge constitutionnel qui n'a
que le pouvoir de contrôler la procédure de révision n'ait
pas sanctionné ces violations. C'est peut être parce que ces
révisions poursuivent des fins politiques que le contrôle a
été moins rigoureux, probablement du fait de l'influence du
politique sur le juge constitutionnel.
2. Les fins politiciennes des révisions
La révision de la constitution à des fins
politiques est le jeu favori des autorités étatiques en Afrique.
Ces types de révisions sont qualifiés de déconsolidantes
par la doctrine. Au Burkina Faso, certaines révisions constitutionnelles
présentent manifestement ce caractère. L'exemple le plus frappant
est celui touchant la disposition se rapportant au mandat présidentielle
(disposition plusieurs fois triturée). « Depuis le
renouveau constitutionnel sous la quatrième république, c'est
l'une des dispositions les plus révisées mais celle dont la
révision a été la plus réticente et la plus
controversée »31(*). En 1997 alors que la constitution prévoit
que le président du Faso est élu pour sept ans et
rééligible une fois, une révision, initiée par le
camp du Président Compaoré sentant le temps en passe d'avoir
raison sur lui, intervient pour permettre au chef de l'Etat d'être
réélu à volonté. La crise sociopolitique
consécutive à l'assassinat odieux de Norbert ZONGO et ses
compagnons a contraint le Président Compaoré sur proposition du
collège des Sages à revenir sur cette disposition afin de
réinsérer la clause limitative du mandat présidentiel en
2000, ramenant d'ailleurs le mandat à cinq ans. Une
interprétation assez incongrue du Conseil constitutionnel avait permis
au Président Compaoré d'être candidat aux élections
de 2005 et 2010, lui qui avait pourtant exercé deux mandats de sept ans.
La scène politique burkinabè est tumultueuse depuis que le
Président Compaoré affiche ses intentions de revenir sur cette
disposition afin de pouvoir se présenter aux élections
présidentielles de 2015. Les révisions s'apparentent beaucoup
plus à des réactions face à une volonté politique
et politicienne qu'à une nécessité d'adaptation de la
volonté du peuple au contexte.
Toutes ces lacunes formelles, qu'elles résultent de
l'élaboration ou de la révision de la constitution, ont pu avoir
une incidence sur la substance même de la constitution qui ne saurait
avoir des règles de qualité aptes à régir la vie
démocratique du pays.
Chapitre 2. Les
insuffisances fondamentales
Il est assigné à la constitution une double
mission à savoir l'encadrement du pouvoir et la protection des droits et
libertés fondamentaux des citoyens. Malheureusement, la constitution du
Burkina Faso présente d'énormes insuffisances fondamentales lui
empêchant d'atteindre les objectifs qui sont les siens. C'est une
constitution sans véritable constitutionnalisme (Section 1) qui a
été établie. Certaines dispositions complètement
« bizarres » (section 2) peuvent être
décelées.
Section 1. L'absence d'un
véritable constitutionnalisme
Le principe de Montesquieu cherche un système de
gouvernement qui empêche le pouvoir d'être despotique et qui
garantit la liberté des citoyens32(*). La constitution du Burkina Faso est au stade
où elle brille par sa faiblesse de la limitation des pouvoirs (§1)
ainsi que par la faiblesse du contrôle de constitutionnalité
(§2).
§1. La faiblesse de la
limitation du pouvoir
L'idée de limitation du pouvoir est à l'origine
de l'élaboration des constitutions. Cet objectif est mis à mal au
Burkina Faso, aussi bien par l'institutionnalisation d'un exécutif fort
(A) que par son corolaire, la faiblesse des autres pouvoirs (B).
A. L'institutionnalisation d'un
exécutif fort
Elle s'affiche par la reconnaissance au chef de l'Etat de
pouvoirs exorbitants (1) ainsi que par d'énormes attributions reconnues
au gouvernement (2).
1. Les pouvoirs exorbitants du Chef de
l'Etat.
Clé de voûte de l'édifice institutionnel,
le chef de l'Etat, chef de l'exécutif, est investi de pouvoirs
importants qui lui permettent de contrôler l'appareil administratif,
économique et les forces armées. Il dispose également de
prérogatives telles que son pouvoir de dissolution qui lui permettent
d'influencer le pouvoir législatif. Aussi préside t-il l'instance
suprême du pouvoir judiciaire, à savoir le Conseil
supérieur de la magistrature. Il nomme, par ailleurs, six (06) des douze
(12)33(*) gardiens de la
constitution et du processus électoral (juges constitutionnels). Il a un
très grand pouvoir en matière de nomination des
personnalités de la Haute administration, des ambassadeurs et
envoyés extraordinaires. Enfin, il dispose d'un pouvoir
référendaire et exerce des pouvoirs exceptionnels en
période de crise.
Ainsi, le Président du Faso détient une
plénitude de pouvoirs au regard des règles normatives. Cette
hégémonie de l'institution présidentielle pourrait
connaître son paroxysme si certaines situations de fait viennent
s'ajouter, par exemple, le fait majoritaire, le leadership personnel du
Président.
Du coup, le Président du Faso se pose comme le
principal personnage de la République sans que pour autant les autres
pouvoirs puissent disposer de moyens constitutionnels pour le
contrôler : un Président monarque non soumis à aucun
contrôle, voilà la réalité de la fonction
présidentielle sous la Quatrième République. Le
constituant a ainsi fait du Président du Faso un homme fort alors que
comme l'a souligné le Président Barack OBAMA, «l'Afrique
n'a pas besoin d'homme fort, mais d'institutions fortes ».
2. Les attributions du gouvernement
Le gouvernement burkinabè est comme
« l'appendice » du pouvoir exécutif. Le premier
ministre qui préside le gouvernement « dirige et coordonne
l'action gouvernementale. Il est responsable de l'exécution de la
politique de défense nationale définie par le Président du
Faso. Il exerce le pouvoir réglementaire conformément à
la loi, assure l'exécution des lois, nomme aux emplois civils et
militaires autres que ceux relevant de la compétence du Président
du Faso ».
Le gouvernement dispose d'importants pouvoirs surtout en
matière règlementaire. L'article 108 de la constitution fait du
règlement un principe par rapport à la loi. Au titre de l'article
61 de la constitution, « le Gouvernement est un organe de
l'Exécutif. Il conduit la politique de la Nation ; à ce titre, il
est obligatoirement saisi : des projets d'accords internationaux, des projets
et propositions de lois, des projets de textes réglementaires. Il
dispose de l'Administration et des Forces de défense et de
sécurité ».
Il existe une possibilité d'engagement de la
responsabilité du gouvernement mais cela n'a qu'une valeur folklorique
dans le contexte politique burkinabè actuel marqué par le fait
majoritaire. Le gouvernement règne ainsi avec le Chef de l'Etat en
maître incontesté et incontestable, ce qui à pour
corollaire la faiblesse des autres pouvoirs.
B. La faiblesse des autres pouvoirs
La conséquence de la superpuissance de
l'exécutif est que ce dernier domine sur le Parlement (1) et la justice
(2) dont l'indépendance est douteuse.
1. La prédominance de
l'exécutif sur le Parlement
L'examen des relations entre les deux principales institutions
politiques que sont l'Exécutif et le Parlement révèle une
prédominance du premier sur le second. Certes, depuis 1992, le pays
s'est doté d'un Parlement avec les élections législatives
du 24 mai de la même année. Certes, la constitution encadre les
dites relations. Mais celles-ci sont loin d'être
équilibrées. En effet, aux termes l'article 84 de la constitution
de 1991, l'Assemblée nationale vote la loi, consent l'impôt et
contrôle l'action du gouvernement.
De même, la constitution, en son Titre VII,
réglemente de manière précise les rapports entre le
gouvernement et l'Assemblée nationale. Il s'agit là, diront les
éminents constitutionnalistes burkinabè, d'« un
parlementarisme rationalisé » qui, dans le cas de la IVe
République burkinabè, permet à l'Exécutif de notre
pays de compter sur « la discipline parlementaire » d'une
majorité souvent écrasante ; Il en découle des
rapports asymétriques entre l'Exécutif et le Parlement,
c'est-à-dire des relations qui sont marquées par un profond
déséquilibre, une prédominance du premier sur le second.
Pour preuves, les différentes révisions constitutionnelles que le
pays a connues depuis 1991 vont généralement dans le sens du
renforcement de la position dominante de l'Exécutif. Et surtout il y a
ce pouvoir de dissolution dont dispose le Président du Faso sur le
Parlement. La limitation du domaine de la loi par l'article 101 de la
constitution par rapport au domaine règlementaire est un symptôme
de la hiérarchie formelle de l'exécutif sur le Parlement. Il
ressort d'ailleurs des grands axes de réflexion du comité
exécutif du Front populaire sur l'élaboration du projet de
constitution du Burkina Faso fixés, au cours d'une réunion
consacrée essentiellement à la rédaction de l'avant-projet
de constitution, en sa séance du 24 avril 1990 au point 4 qu'il s'agit
d'instaurer une « prééminence du chef de l'Etat sur le
Parlement »34(*).
La domination de l'exécutif s'exprime aussi sur le
pouvoir judiciaire qui a une indépendance douteuse malgré sa
consécration formelle.
2. L'indépendance douteuse de la
justice
Au Burkina Faso, l'article 129 de la Constitution du 11 juin
1991 affirme sans détour que le pouvoir judiciaire est
indépendant. Deux considérations au moins contribuent à
réduire la marge d'indépendance théorique reconnue
à l'organe judiciaire du Burkina. Il s'agit d'une part de la tutelle
administrative et financière étroitement exercée sur lui
par l'exécutif et d'autre part du pouvoir de nomination. Le budget est
élaboré et exécuté par l'administration centrale du
ministère de la Justice et non par les cours et tribunaux
détenteurs du pouvoir de juger. Aussi, le recrutement, la
répartition et la gestion des magistrats relèvent-ils des
services centraux du ministère de la Justice avec un certain droit de
regard d'autres ministères tels que la Fonction publique et les
Finances. En plus de la tutelle administrative et financière que
l'exécutif exerce sur le corps judiciaire, le pouvoir exécutif
est détenteur d'une importante capacité pour limiter
l'indépendance des juges : le pouvoir de nomination des magistrats.
Ces derniers sont nommés par un décret pris en conseil des
ministres. La règle de l'inamovibilité se trouve
atténuée par les textes d'application de la norme
constitutionnelle. Un dernier élément et c'est le plus important
et le plus critique c'est la présidence de l'instance suprême de
la justice c'est-à-dire le conseil supérieur de la magistrature
assurée par le Président du Faso et le garde des sceaux, ministre
de la justice : c'est un coup au principe de séparation des
pouvoirs et cela limite considérablement l'institution judiciaire.
De ce qui précède, l'affirmation de l'article
129 de la Constitution du Burkina Faso selon laquelle le pouvoir judiciaire est
indépendant ne sera rien d'autre qu'un mythe tant que des dispositions
urgentes n'auront pas été prises pour rétablir la
notoriété de l'institution judiciaire. A propos de justice, la
justice constitutionnelle est faible.
§2. La faiblesse de la
justice constitutionnelle
La faiblesse de la justice constitutionnelle burkinabè
se perçoit dans la faiblesse du contrôle de
constitutionnalité (A) et dans les défaillances du contentieux
des droits de l'Homme (B).
A. La faiblesse du contrôle de
constitutionnalité
Le contrôle de constitutionnalité est un
élément important, voire indispensable pour l'aboutissement d'un
constitutionnalisme réussi. C'est en effet, un mécanisme de
« sanction garantissant la suprématie de la
constitution » qui permet au juge constitutionnel de censurer les
normes juridiques contraires aux normes fondamentales de valeur
constitutionnelle. Le contrôle de constitutionnalité au Burkina
Faso est faible et cela s'explique par l'indépendance douteuse de la
juridiction constitutionnelle (1) ainsi que le pouvoir limité de cette
institution (2).
1. Le doute sur l'indépendance du
conseil constitutionnel
Dans de nombreux pays, on trouve un minimum de règles
destinées à assurer aux juges constitutionnels une
indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. Ces règles
sont relatives à la durée du mandat, à la nomination,
à l'inamovibilité des fonctions, au non renouvellement de mandat
et aux incompatibilités. Au Burkina Faso, c'est plutôt la
modalité de nomination qui suscite la question de l'indépendance
du Conseil constitutionnel. Aux termes de l'article 153, « le
Conseil constitutionnel comprend : les anciens chefs de l'Etat du Burkina Faso
; trois magistrats nommés par le Président du Faso sur
proposition du ministre de la justice ; trois personnalités
nommées par le Président du Faso dont au moins un juriste ; trois
personnalités nommées par le Président de
l'Assemblée nationale dont au moins un juriste ; trois
personnalités nommées par le Président du Sénat
dont au moins un juriste ». C'est donc l'exécutif et le
législatif, deux pouvoirs constitués, qui interviennent dans ces
nominations. Les nominations sont toujours sujettes à polémique
car toute nomination est politique parce que faite par une autorité
politique. Mais l'important réside dans la capacité des personnes
nommées à rendre la justice constitutionnelle en toute
indépendance et impartialité sans tenir compte des
autorités de nomination, en d'autres termes à assumer le devoir
d'ingratitude à l'égard desdites autorités de nomination,
comme disait maître Robert Badinter dans son interview au journal le
Monde en 1986. Dans le cas du Burkina Faso, le Conseil constitutionnel n'est
pas encore parvenu à ce stade surtout que les nominations se font
plutôt par affinité politique. Le juge Burkinabè est
toujours allé dans le sens de la volonté du politique même
quand l'inconstitutionnalité de la mesure est perceptible même par
l'étudiant en première année de droit : c'est
l'influence du politique sur le juriste. A ce « devoir de
reconnaissance » dont vouent les juges constitutionnels à
l'égard leur autorité de nomination s'ajoute le caractère
limité de leur pouvoir, rendant ainsi le contrôle de
constitutionnalité inefficace.
2. La limitation des pouvoirs du juge constitutionnel
L'article 152 de la constitution résume en deux
paragraphes les attributions du conseil constitutionnel. Aux termes de cet
article, « le Conseil constitutionnel est l'institution
compétente en matière constitutionnelle et électorale. Il
est chargé de statuer sur la constitutionnalité des lois, des
ordonnances ainsi que la conformité des traités et accords
internationaux avec la Constitution. Il interprète les dispositions de
la Constitution. Il contrôle la régularité, la transparence
et la sincérité du référendum, des élections
présidentielles, législatives et est juge du contentieux
électoral. Il proclame les résultats définitifs des
élections présidentielles, législatives et
locales ». L'article 154 ajoute que « le Conseil
constitutionnel veille au respect de la procédure de révision de
la Constitution ». C'est grosso modo, les pouvoirs
constitutionnellement reconnus au Conseil constitutionnel.
Nous estimons qu'au regard de ces attributions, le juge
constitutionnel est limité surtout en matière de contrôle
de constitutionnalité des lois qui est son domaine favoris. En octroyant
au Conseil, seulement le contrôle de la procédure de
révision de la constitution, le contrôle ne peut qu'être
limité. Des lois fondamentalement inconstitutionnelles ne peuvent
être censurées par le juge tant que la procédure de
révision a été respectée. Malheureusement, le
Conseil a une lecture littérale des dispositions, se refusant tout
pouvoir de contrôle sur des éléments autres que
procéduraux. Nous avons l'exemple de la révision
constitutionnelle de 2009 sur la transhumance politique qui au fond
était contraire à la constitution mais a pu passer du fait de
cette limitation du Conseil constitutionnel. En 2012 dans une décision
audacieuse et heureuse35(*), le juge constitutionnel s'est estimé
compétent pour contrôler au delà des questions de
procédures des questions intéressant le fond. Espérons que
la pratique constitutionnelle confère ou élargisse le pouvoir du
juge constitutionnel et le rende fort pour un constitutionnalisme réussi
et pour la construction d'un Etat démocratique.
B. Les défaillances du
contentieux des droits de l'Homme
Au Burkina Faso, « la machine constitutionnelle
de protection des droits fondamentaux tourne à vide »36(*) parce que la constitution
dans son titre premier consacre des droits aux citoyens qui malheureusement,
ne peuvent pas s'en prévaloir devant l'institution constitutionnelle en
mesure de sanctionner leur violation. Non seulement le justiciable n'a pas la
possibilité n'accéder directement au juge (1) mais l'exception
d'inconstitutionnalité est, on peut le dire, un droit illusoire (2).
1. L'inaccessibilité directe du
juge constitutionnel par le citoyen
« La justice constitutionnelle est
consubstantielle au constitutionnalisme dont la finalité est d'encadrer
le pouvoir des gouvernants et de protéger la liberté des
gouvernés »37(*). La constitution du Burkina Faso est la
meilleure constitution du monde a-t-on pu dire, tant elle a une
consécration assez exhaustive des droits fondamentaux. Seulement, en
matière de droits de l'Homme, « il ne s'agit pas seulement
de proclamer mais aussi de protéger, de mettre hors d'atteinte du
pouvoir »38(*). Cette mission de protection des droits
fondamentaux ne saurait être mieux assurée que par la juridiction
constitutionnelle chargée de veiller à la protection de la
constitution en général.
Au Burkina Faso, cette mission est confiée au Conseil
constitutionnel, qui du reste n'est accessible que par certaines
personnalités politiques que sont le Président du Faso, le
Premier ministre, le Président de l'Assemblée nationale, le
Président du Sénat, 1/10ème des membres de
chaque Chambre39(*). La
seule accessibilité possible de citoyens au Conseil Constitutionnel est
le recours accordé aux candidats en matière électorale.
L'on pourrait se demander pourquoi consacrer des droits si les principaux
bénéficiaires ne peuvent pas s'en prévaloir devant la
juridiction compétente pour sanctionner leur violation? Ceci est on ne
peut plus clair, une très grande faiblesse du système
burkinabè de protection des droits fondamentaux. Au Bénin voisin,
le citoyen dispose d'un droit de saisine du juge constitutionnel et une
abondante jurisprudence enrichissante existe en la matière40(*). C'est sans doute pour combler
cette lacune que la formule de l'exception d'inconstitutionnalité a
été retenue.
2. L'exception
d'inconstitutionnalité, un droit illusoire
Parce que tous s'accorde à reconnaître que
l'inaccessibilité directe du juge constitutionnel par le citoyen est une
faiblesse du système constitutionnel de protection des droits
fondamentaux, un palliatif a été trouvé : c'est ainsi
que la loi organique du 11 avril 2000 sur le conseil constitutionnel en son
article 25 et plus tard la révision constitutionnelle du 11 juin 2012
ont consacré le mécanisme de l'exception
d'inconstitutionnalité. Aux termes de la dernière disposition
citée : « Si, à l'occasion d'une instance en cours
devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative
porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le
Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du
Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation. Le Conseil constitutionnel se
prononce dans un délai déterminé par la loi ».
Cela dit, des imperfections subsistent toujours. D'une part, l'exception
d'inconstitutionnalité ne porte que sur les textes législatifs
violant les droits des citoyens. Et les actes constituants des violations des
droits de l'Homme (comme les actes de torture), qui les sanctionne ? S'il
est vrai que le juge pénal s'en chargera, celui-ci n'est pas juges des
droits de l'Homme. Au Bénin, nonobstant la sanction des actes violant
les droits fondamentaux qui constituent en tout état de cause des
infractions pénales, le juge constitutionnel a sanctionné
plusieurs cas de violations des droits de l'Homme41(*). D'autre part, il appartient
à la juridiction suprême devant laquelle une exception
d'inconstitutionnalité a été soulevée de
procéder au renvoi préjudiciel devant le juge constitutionnel.
Que faire si le Conseil d'Etat ou la Cour de Cassation refuse de
procéder au renvoi préjudiciel ? Rien, semble être la
décision du Conseil constitutionnel qui a l'occasion de l'affaire EROH a
refusé de recevoir la demande de la société alors que la
Cour de cassation a refusé de saisir le Conseil constitutionnel. C'est
donc consacrer un droit dont la jouissance n'est pas garantie.
Au delà du fait que le constitutionnalisme soit un
mythe à cause des insuffisances dans la limitation du pouvoir et du
contrôle de constitutionnalité des lois (et partant la protection
des droits fondamentaux), la constitution comporte d'autres
« bizarreries constitutionnelles » qu'il convient de
relever.
Section 2. Les autres
« bizarreries constitutionnelles»42(*)
Les dispositions jugées
« bizarres » sont celles qui sont incomplètes
(§1) et celles qui sont incohérentes (§2).
§1. Les dispositions
incomplètes
La constitution du 02 juin 1991 comporte des dispositions
incomplètes. L'incomplétude de ces dispositions est de nature
à être source de problèmes (A) ou à engendrer des
incertitudes (B).
A. Les incomplétudes
problématiques
Au titre des incomplétudes problématiques, il
faut noter la non détermination des conséquences de la
disparition d'un candidat à l'élection présidentielle (1)
ainsi que la nature des avis des consultations du Président du Faso aux
autres institutions (2).
1. Les conséquences de la
disparition d'un candidat à l'élection présidentielle
L'article 39 de la constitution dispose que
« le Président du Faso est élu
à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si cette
majorité n'est pas obtenue au premier tour de scrutin, il est
procédé quinze jours après à un second tour. Seuls
peuvent s'y présenter les deux candidats qui, le cas
échéant, après retrait de candidats moins
favorisés, se trouvent avoir recueilli le plus grand nombre de suffrages
au premier tour. Le Président du Faso est alors élu à la
majorité simple».
Il y a une question que la constitution ne règle pas,
qui pourtant peut être source de problèmes si le cas venait
à se produire. Que faire lorsqu'un candidat aux élections
présidentielles décède ou est empêché entre
le premier tour et la proclamation des résultats, entre la proclamation
des résultats du premier tour et l'organisation du second tour, et entre
l'organisation du second tour et la proclamation définitive des
résultats ? Sur toutes ces questions, le constituant
burkinabè est muet. Une constitution doit être précative et
non réactive. Il ne faudrait pas attendre que la situation se
présente avant de chercher des voies et moyens pour réviser la
constitution afin de remédier la situation.
Dans certains pays, cette question est réglée.
C'est la formule de la constitution française de 1958 qui nous a
semblée la plus exhaustive, la plus juste et la plus judicieuse. Aux
termes de l'article 7 de ladite constitution, « si, avant le
premier tour, un des candidats décède ou se trouve
empêché, le Conseil constitutionnel prononce le report de
l'élection », aussi « en cas de
décès ou d'empêchement de l'un des deux candidats les plus
favorisés au premier tour avant les retraits éventuels, le
Conseil constitutionnel déclare qu'il doit être
procédé de nouveau à l'ensemble des opérations
électorales ; il en est de même en cas de décès ou
d'empêchement de l'un des deux candidats restés en présence
en vue du second tour ».
Le constituant burkinabè gagnerait donc à
s'inspirer de cette judicieuse formule pour régler cette question
cruciale avant que le temps et les situations ne lui en imposent. C'est
d'ailleurs ce qu'il doit faire pour ce qui concerne la nature des consultations
du Président du Faso qui est indéterminée.
2. L'indétermination de la nature
des consultations du Président du Faso
L'article 49 de la constitution impose au Président du
Faso de consulter le Premier ministre, les Présidents du Sénat et
de l'Assemblée nationale avant l'usage de son pouvoir de
référendum législatif. La dissolution de
l'Assemblée nationale est aussi précédée d'une
consultation des dites autorités conformément à l'article
50 de la constitution. La même exigence lui est prescrite à
l'article 59 où en sus de la consultation des institutions
suscitées, il doit consulter le Président du Conseil
constitutionnel dans le cadre de la mise en oeuvre des pouvoirs exceptionnels.
Si l'on s'accorde sur le caractère obligatoire de la
consultation, la nature des avis de ces institutions n'est pas
précisée par la Constitution. S'agit-il d'avis simples ou des
avis conformes ? Le Président du Faso peut-il passer outre un avis
défavorable pour poursuivre l'opération engagée ou
a-t-il l'obligation de surseoir à son projet dans ce cas ?
La question est d'importance en ce qu'en cas d'opposition
entre le Président du Faso et le Président de l'Assemblée
nationale par exemple, il y a un risque de blocage ou même de coup d'Etat
qui ne dit pas son nom.
Il faudrait donc que le constituant revienne sur ces
dispositions pour nous apporter plus de précisions pour éviter
d'éventuels problèmes et surtout nous sortir des incertitudes
dans lesquelles certaines dispositions de la constitution nous mettent.
B. Les incomplétudes engendrant
des incertitudes
Certaines dispositions du fait de leur incomplétude
rendent incertain leur objet. C'est le cas de la déclaration des biens
du Président au conseil constitutionnel (1) et l'imprécision sur
le pouvoir référendaire du Président du Faso (2).
1. L'inutile déclaration des
biens du Président au conseil constitutionnel
Le louable souci de prévenir et de sanctionner
l'enrichissement illicite des gouvernants aux dépens de l'Etat s'exprime
lapidairement au travers de l'alinéa 2 de l'article 44 de la
constitution en ces termes : « au cours de la
cérémonie d'investiture, le président du Conseil
constitutionnel reçoit la déclaration écrite des biens du
Président du Faso ». Cette disposition assez vague est
incomplète donc incertaine et aboutissant à son
inefficacité. D'abord, la constitution demande au Président de
déclarer ses biens à l'entrée en fonction mais pas
à la fin de son mandat. Pourtant cette obligation est faite aux membres
du gouvernement ainsi qu'aux présidents d'institutions43(*). Sur quelle base pourra t-on
évaluer l'enrichissement du Président ? Ensuite, cette
déclaration est faite au Conseil constitutionnel alors que cette
institution n'a aucun pouvoir de contrôle financier encore moins de
poursuite pénale. Enfin, la déclaration est écrite alors
qu'il serait louable de « porter les déclarations à
la connaissance du public qui, en sa qualité de juge aurait pu nous dire
si ce sont des déclarations fausses ou non ». Tout le
mystère autour de cette disposition fait que cette disposition manque
d'efficacité et parait même inutile. Ce genre
d'incomplétudes se fait fréquent dans notre constitution à
l'image de l'imprécision sur le pouvoir de convocation
référendaire du Président du Faso.
2. L'imprécision sur le pouvoir
référendaire du Président du Faso
« Le Président du Faso peut, après
avis du Premier ministre, du Président du Sénat et du
Président de l'Assemblée nationale, soumettre au
référendum tout projet de loi portant sur toute question
d'intérêt national». Ainsi, l'article 49 accorde au
Président du Faso un pouvoir de convoquer tout seul un
référendum portant sur « tout projet de loi »
qu'il estime revêtir un « intérêt
national ».
Voici une formulation assez vague qui peut donner lieu
à des interprétations extensives et ainsi conduire à des
abus. Le premier problème tient à la notion de « tout
projet de loi ». La question se pose de savoir si la loi de
révision constitutionnelle est une loi. Peut-on déduire de
l'article 49 que le Président du Faso peut convoquer un
référendum pour une révision de la constitution ? Il
y a là une situation assez délicate quant on se situe dans une
définition assez large de la constitution qui est formellement
définie comme la loi fondamentale d'un pays : tout compte fait, une
loi de révision de la constitution est avant tout une loi. Cependant, la
procédure de révision de la constitution est minutieusement
régie par le titre XV de la constitution et une certaine conception tend
à affirmer que le Président du Faso n'est pas fondé
à convoquer un référendum constituant sur la base de
l'article 49.
Le second problème résulte du silence de la
constitution sur ce que l'on doit entendre par « toute question
d'intérêt national ». Comment apprécie t-on le
caractère d'intérêt national d'une question ? Qui
détermine ce qui est d'intérêt national ? A l'ombre de
la révision de l'article 37 qui fait débat actuellement, l'on
serait mieux situé si l'article 49 était clair.
Le silence du constituant est assez incompréhensible en
ce que la constitution française, de laquelle il s'est fortement
inspiré, a énuméré de manière limitative les
questions sur lesquelles le Président peut convoquer un
référendum. En fait, l'article 11 de la constitution
française dispose que « le Président de la
République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des
sessions ou sur proposition conjointe des deux Assemblées,
publiées au Journal Officiel, peut soumettre au référendum
tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des
réformes relatives à la politique économique, sociale ou
environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou
tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans
être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le
fonctionnement des institutions ».
Consacrer de manière vague que le Président peut
soumettre au référendum tout projet de loi sur toute question
d'intérêt national ouvre une voie à l'abus et à un
pouvoir illimité accordé au Président qui
interprète et qualifie les évènements comme il l'entend.
Au-delà de ces incomplétudes, la constitution contient des
dispositions incohérentes.
§2. Les
incohérences constitutionnelles
Il y a une incohérence dans les dispositions relatives
aux relations entre le Présent et le Premier ministre (A). Certaines
dispositions sont même contradictoires (B).
A. Les relations problématiques
entre le Président et le Premier ministre
Le Burkina Faso a un exécutif bicéphale. Le
Président du Faso élu au suffrage universel et le Premier
ministre dont la nomination au sein de la majorité parlementaire est
imposée par la constitution44(*). Cette exigence est de nature à entrainer des
situations de blocages et d'instabilité institutionnels (2) en situation
de cohabitation tout compte fait incohérente (1).
1. L'incohérence de la
cohabitation
Le conseil consultatif sur les réformes politiques
(CCRP) a proposé que le Premier Ministre soit nommé dans la
majorité parlementaire, ce qui fût fait par la révision
constitutionnelle du 11 juin 2012. Avant cette révision, le
Président du Faso nommait à volonté le Premier ministre.
Il nommait généralement des gens de son bord politique, ses
camarades de longue date, « ses bras droit » en termes
profanes. Cela ne choquait personne puisque le Président et le Premier
ministre travaillent en parfaite collaboration ; c'est le contraire qui
aurait étonné.
La nomination du Premier ministre dans la majorité
parlementaire s'explique par le souci affiché du CCRP de
réajuster ou rééquilibrer les pouvoirs en vue de tendre
vers un système parlementaire. Cette exigence ne pose aucun
problème lorsque le parti du Président du Faso a la
majorité au Parlement. Des difficultés surgissent par contre,
dès lors que l'on se retrouve dans une situation de cohabitation. Dans
le cas où la majorité parlementaire est différente de la
majorité présidentielle, la nomination du Premier ministre dans
la majorité parlementaire nous semble incohérente, on pourrait
même dire contre nature d'un point de vue politique. En effet, si l'on se
situe dans un contexte politique, l'on s'aperçoit qu'il y a une
opposition de ligne et de programme politique entre le Président et le
parti politique d'opposition. Le Premier ministre issu de la majorité
parlementaire se verra ainsi dans l'obligation de diriger et coordonner
l'action gouvernementale, et d'exécuter la politique de défense
nationale définie par le Président du Faso45(*) conformément au
programme et à la ligne politique de ce dernier. Aux termes de l'article
46 de la constitution, c'est le Président du Faso qui « fixe
les grandes orientations de la politique de l'Etat. », lesquelles
peuvent être fondamentalement aux antipodes des orientations
défendues par le parti de la majorité parlementaire. On se
retrouvera devant une situation où l'opposition exécute un
programme qu'elle a combattu plusieurs années durant. Il y'a u risque
élevé de blocage et d'instabilité.
2. Les risques de blocages et
d'instabilité
Entre l'exigence de nomination du Premier ministre dans la
majorité parlementaire et sa révocation par le Président,
il y a déjà une contradiction. En effet, cette exigence devrait
avoir pour but de rééquilibrer le pouvoir au sein de
l'exécutif. En permettant au Président du Faso de révoquer
le Premier ministre quand il l'estime nécessaire à l'atteinte de
l'intérêt supérieur de la nation, c'est encore une occasion
d'absolutisme que l'on accorde au Président. Il s'ensuit qu'il y a un
risque continu d'instabilité politique. Le Président du Faso
collabore étroitement et obligatoirement avec le Premier ministre.
L'article 46 prévoit que le président du Faso nomme les ministres
sur proposition du Premier ministre ; il doit aussi requérir l'avis
du Premier ministre avant la prise de certaines décisions. Lorsque les
majorités présidentielle et parlementaire sont confondues, il n'y
a pas de problème. En période de cohabitation, le superpuissant
Président devra composer avec le Premier ministre. Il y aura surtout
dans le contexte sociopolitique burkinabè une situation
d'instabilité et de blocage institutionnels. Le gouvernement qui doit
avoir l'onction du Parlement ne peut être composé sans l'accord du
Premier ministre issu de ce clan politique, le Président qui estimera la
situation préoccupante révoquera le Premier ministre ou dissoudra
le parlement, toute chose qui n'est pas de nature à favoriser les
relations entre ces institutions. Il y a donc une incohérence
instaurée par la constitution. L'examen plus poussée permet de
détecter des dispositions contradictoires dans la constitution.
B. Les dispositions contradictoires
La lecture de la constitution du 02 juin 1991 laisse voir des
contradictions qui ressortent des dispositions telles que la condition de
nationalité pour être candidat à l'élection
présidentielle (1) ou encore la déchéance du
député démissionnaire de son parti (2).
1. La condition de nationalité du
candidat à l'élection présidentielle
L'article 38 de la constitution fixe les conditions de
candidature aux élections présidentielles. Aux termes de cette
disposition, « tout candidat aux fonctions de Président du
Faso doit être Burkinabè de naissance, être âgé
de trente cinq ans au moins et de soixante quinze ans au plus à la date
du dépôt de sa candidature et réunir les conditions
requises par la loi ».
Ainsi pour espérer être un Président du
Faso, il ne suffit pas d'être Burkinabè, il faut être un
« Burkinabè de naissance ». Il nous semble qu'il y a
une contradiction entre cette disposition et celle de l'article premier de la
même constitution qui interdit « les discriminations de toutes
sortes notamment celles fondées sur (...) la naissance ... ».
Si l'on peut comprendre le constituant qui a pu penser
qu'être Burkinabè de naissance est une garantie d'attachement
à la nation, le Burkinabè de naissance qui a passé toute
sa vie en Australie ne donne pas non plus cette garantie.
Si l'on définit la discrimination comme le fait de
traiter différemment deux personnes dans la même situation ou le
fait de traiter identiquement deux personnes dans des situations
différentes46(*),
l'on se rend compte que pour la course à la présidentielle, les
Burkinabè sont dans la même situation et que cette condition de
naissance exclut une personne de la possibilité de devenir
Président dans sa vie si celle-ci n'a que le Burkina Faso comme pays
depuis sa naturalisation. Revenir sur ces dispositions ainsi que celle qui
impose au député démissionnaire de démissionner de
son parti donneront plus de cohérence à la constitution.
2. La
déchéance du député démissionnaire de son
parti
Le Burkina Faso a opté pour un système qui allie
des éléments de la souveraineté nationale et ceux de la
souveraineté populaire. En effet, l'article 32 de la constitution du 02
juin 1991 stipule que « la souveraineté nationale appartient
au peuple qui l'exerce dans les conditions prévues par la
présente Constitution et par la loi ».
Cependant, la souveraineté nationale semble être
l'option principale du constituant qui intitule le titre II ainsi qu'il
suit : « De l'Etat et de la souveraineté
nationale ». On sait que le principe de la souveraineté
nationale, d'origine française, a été consacré par
la Déclaration Française des Droits de l'Homme et du Citoyen de
1789 qui en son article 3 déclare que « le principe de
toute souveraineté réside dans la nation. Nul corps, nul individu
ne peut exercer d'autorité qui n'en émane
expressément ». L'option pour la souveraineté
nationale implique que la souveraineté n'est pas atomisée, que le
vote n'est pas un droit mais une fonction, qu'elle s'exerce par
l'intermédiaire de représentants, que ses représentants
décident utilement au nom et pour le compte de tout le monde, que ces
représentants n'ont pas de compte à rendre aux électeurs
mais à la nation. Parce qu'elle allie les deux principes, la
constitution du Burkina Faso prévoit le droit de vote et suffrage
universel.
En vertu de ce principe de la souveraineté nationale,
une révision constitutionnelle du 22 janvier 2002 a consacré le
principe du mandat non impératif en disposant à l'alinéa 1
de l'article 85 que « tout mandat impératif est
nul ». Pour combattre ce que l'on a pu appeler
« transhumance politique » ou encore « nomadisme
politique », la constitution a été
révisée en 2009 introduisant un alinéa 2 à
l'article 85 qui dispose que « toutefois, tout
député qui démissionne librement de son parti ou de sa
formation politique en cours de législature est de droit remplacé
à l'Assemblée nationale par un suppléant... ».
Il y a manifestement une incompatibilité, voire une contradiction
entre ces dispositions. Il y a d'une part l'alinéa 1 qui prescrit la
nullité du mandat impératif, ce qui signifie que le
député élu ne reçoit d'injonction de personne et
n'a pas de compte à rendre à ces électeurs. D'autre part,
il y a l'alinéa 2 qui oblige le député qui change de parti
en cours de mandat à démissionner, comme si celui-ci
représentait son parti à l'Assemblée nationale. Dans le
cadre de la souveraineté nationale, un député
représente la nation et non un individu, encore moins un parti
politique. Il y a là donc une contradiction résultant de la
formulation même du texte constitutionnel. L'amalgame institué
entre souveraineté nationale et souveraineté populaire ne saurait
non plus justifier cette stipulation incompatible à la norme
constitutionnelle déjà existante. C'est pourquoi la
révision de 2009 devrait être censurée par le juge
constitutionnel pour inconstitutionnalité au fond; malheureusement,
le conseil constitutionnel a eu une lecture littérale et orthodoxe des
attributions, refusant d'exercer un contrôle de constitutionnalité
des lois constitutionnelles quant au fond.
Conclusion
L'analyse de la constitution burkinabè du 02 juin 1991
révèle qu'elle comporte des insuffisances à la fois
formelles et substantielles. Sur sa forme, les insuffisances résultent
d'une part de l'élaboration de la constitution et d'autre part de la
révision de celle-ci. La constitution a été en fait
élaborée dans un contexte politique peu favorable au vu de
l'histoire politique du pays et du caractère imposé de la
constitution. Outre cela, la constitution a été un
« produit importé » qui a montré ses limites
à s'adapter au contexte burkinabè. Les modalités
d'adoption de la constitution on aussi été peu
recommandables : en fait c'est une constitution octroyée qui a
été adoptée par référendum en vue de
légitimer la volonté du Front populaire. La gestion de la
période transitoire entre l'établissement de la constitution et
la mise en place des institutions a été aussi confisquée
par le pouvoir en place sans un consensus entre les détracteurs
politiques.
Pour ce qui concerne la révision de la constitution,
force est de constater que le peuple est marginalisé dans les processus
révisionnels, la révision par voie parlementaire étant le
principe et la consultation du peuple l'exception. La possibilité
donnée au peuple d'initier une révision par voie de
pétition est un droit illusoire, difficile à mettre en oeuvre. La
constitution qui est sensé traduire la volonté du peuple est
ainsi manipulée par le parlement qui de façon
irrégulière révise la constitution à des fins
politiciennes.
Sur le fond de la constitution, il faut remarquer que la
constitution existe sans constitutionnalisme, c'est-à-dire sans l'esprit
qui fonde la philosophie politique libérale : la limitation du
pouvoir47(*). Il y a un
déséquilibre marqué entre les pouvoirs avec la domination
du chef de l'Etat et du gouvernement sur les autres institutions. Le parlement
est soumis et l'indépendance de la justice douteuse, le contrôle
de constitutionnalité est défaillant parce que le juge
constitutionnel est limité et peu indépendant, le système
de justice constitutionnelle des droits de l'homme est inefficace. D'autres
« bizarreries » se rencontrent dans la loi fondamentale
burkinabè : certaines dispositions incomplètes, lesquelles
sont problématiques et engendrent des situations d'incertitudes,
d'autres sont incohérentes parce que minées de contradictions.
Voici résumé quelques insuffisances de la
constitution du 02 juin 1991. Des réformes importantes doivent
être engagées afin de corriger ces insuffisances avant que la
nécessité de le faire ne se fasse pressante. Nous devons avoir
une constitution de précaution et non une constitution de
réaction. Les éminents constitutionnalistes du pays ont
exprimé cette nécessité à plusieurs reprises. Plus
récemment, alors que le Professeur Abdoulaye SOMA et la
Société Burkinabè de Droit Constitutionnel parle d'une
« réforme constitutionnelle profonde »48(*) de la constitution, le
Professeur Séni OUEDRAOGO propose que l'on passe à une
Vème République49(*). En tout cas, révision profonde ou passage
à une cinquième République, il faut que des correctifs
soient trouvés pour que le constitutionnalisme burkinabè triomphe
à jamais.
Bibliographie
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v De TOCQUEVILLE (A), de la démocratie en
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v DELPERE (F), Droit Constitutionnel, Tome I, Les
données constitutionnelles, Bruxelles, Larcier, 2ème
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v IBRIGA (L.M), Introduction à l'étude du
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http://www.la-constitution-en-afrique.org/categorie-10195474.html)
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Conventions, textes législatifs et
règlementaires
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v La constitution française du 4 octobre 1958
v Constitution béninoise du 02 décembre 1990
v Déclaration Française des Droits de l'Homme et
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v Déclaration de Bamako adoptée le 3 novembre
2000 par les ministres et chefs de délégation des états et
gouvernements des pays ayant le français en partage lors du «
symposium international sur le bilan des pratiques de la démocratie, des
droits et des libertés dans l'espace francophone
v Loi N°002/97/ADP portant révision de la
constitution du 27 janvier 1997
v Loi N° 003-2000/AN portant révision de la
constitution du 11 avril 2000
v Loi N°001-2002/AN portant révision de
la constitution du 22 janvier 2002
v Loi portant révision de la constitution du
N°015-2009/AN du 30 avril 2009
v
LOI N° 033-2012/AN portant révision de la Constitution
du 11 juin 2012.
v loi organique n°011-2000/an portant composition,
organisation, attributions et fonctionnement du conseil constitutionnel et
procédure applicable devant lui.
Jurisprudence
v Décision n° 2010-015/CC portant
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député Mihyemba Louis Armand Ouali.
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(affaire EROH).
v Décision DCC 02-014 du 19 Février 2002, cour
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Articles de journal
v Les manoeuvres de « transition démocratique
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de la SBDC favorables à une réforme constitutionnelle profonde,
lefaso.net du 08 février 2014
(http://www.lefaso.net/spip.php?article57843).
v Lefaso.net du 04 février 2014 (
http://www.lefaso.net/spip.php?article57776
v Révision de la constitution: La nouvelle loi ne
résout pas le problème, selon le Pr Abdoulaye Soma, burkina24 du
20 novembre 2013,
(http://burkina24.com/2013/11/20/revision-de-la-constitution-la-nouvelle-loi-ne-resout-pas-le-probleme-selon-le-pr-abdoulaye-soma)
v Le rapport du collège des sages publié sur
(
http://thomassankara.net/spip.php?article56)
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Autres
v Centre pour la Gouvernance Démocratique, avis et
décisions commentes de la justice constitutionnelle burkinabé de
1960 a nos jours, 2009
v Coalition des organisations de la société
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v Annuaire Béninois de justice constitutionnelle,
Presse Universitaire du Bénin, I-2013.
Sites internet
www.burkina24.bf
www.laconstitution-en-afrique.net
www.lefaso.net
www.legiburkina.bf
Table des matières
Introduction
- 1 -
Chapitre 1. Les insuffisances formelles
- 4 -
Section 1. Les insuffisances résultant de
l'élaboration de la constitution
- 4 -
§1. Le contexte d'élaboration et
d'adoption de la constitution
- 4 -
A.
Le contexte politique défavorable
- 4 -
1.
Le passé politique tumultueux
- 4 -
2.
Le caractère imposé de la constitution
- 5 -
B.
Le mimétisme constitutionnel
- 6 -
1.
La transposition des systèmes et institutions
français
- 6 -
2.
L'échec du au mimétisme
- 7 -
§2. Les modalités d'adoption de la
constitution
- 7 -
A.
Le caractère octroyé de la constitution
- 8 -
1.
La constitution, acte de volonté du Front
Populaire
- 8 -
2.
Le référendum, une consultation
légitimante
- 9 -
B.
La question de la gestion de la période de
transition
- 10 -
1.
L'accaparement de la gestion par le pouvoir en place
- 10 -
2.
L'absence d'un consensus
- 11 -
Section 2. Les insuffisances résultant de la
révision de la constitution
- 11 -
§1. La marginalisation du peuple dans les
processus révisionnels
- 12 -
A.
Le principe de la révision parlementaire
- 12 -
1.
La révision au ¾ des membres du Parlement
- 12 -
2.
Le référendum, une exception
- 13 -
B.
La pétition, un droit illusoire
- 14 -
1.
La pétition, un droit constitutionnel
- 14 -
2.
La possibilité de blocus de la volonté
populaire
- 15 -
§2. Les manipulations de la constitution
- 15 -
A.
La fréquence des révisions
constitutionnelles
- 16 -
1.
Les révisions constitutionnelles de 1991
à 2014
- 16 -
2.
Le caractère excessif des révisions
- 17 -
B.
La fantaisie de la révision
- 18 -
1.
L'irrégularité des révisions
- 19 -
2.
Les fins politiciennes des révisions
- 20 -
Chapitre 2. Les insuffisances fondamentales
- 21 -
Section 1. L'absence d'un véritable
constitutionnalisme
- 21 -
§1. La faiblesse de la limitation du pouvoir
- 21 -
A.
L'institutionnalisation d'un exécutif fort
- 21 -
1.
Les pouvoirs exorbitants du Chef de l'Etat
- 22 -
2.
Les attributions du gouvernement
- 22 -
B.
La faiblesse des autres pouvoirs
- 23 -
1.
La prédominance de l'exécutif sur le
Parlement
- 23 -
2.
L'indépendance douteuse de la justice
- 24 -
§2. La faiblesse de la justice constitutionnelle
- 25 -
A.
La faiblesse du contrôle de
constitutionnalité
- 25 -
1.
Le doute sur l'indépendance du conseil
constitutionnel
- 25 -
2.
La limitation des pouvoirs du juge constitutionnel
- 26 -
B.
Les défaillances du contentieux des droits de
l'Homme
- 27 -
1.
L'inaccessibilité directe du juge
constitutionnel par le citoyen
- 27 -
2.
L'exception d'inconstitutionnalité, un droit
illusoire
- 28 -
Section 2. Les autres
« bizarreries » constitutionnelles
- 29 -
§1. Les dispositions incomplètes
- 29 -
A.
Les incomplétudes problématiques
- 29 -
1.
Les conséquences de la disparition d'un
candidat à l'élection présidentielle
- 30 -
2.
L'indétermination de la nature des
consultations du Président du Faso
- 30 -
B.
Les incomplétudes engendrant des incertitudes
- 31 -
1.
L' inutile déclaration des biens du
Président au conseil constitutionnel
- 31 -
2.
L'imprécision sur le pouvoir
référendaire du Président du Faso
- 32 -
§2. Les incohérences constitutionnelles
- 33 -
A.
Les relations problématiques entre le
Président et le Premier ministre
- 33 -
1.
L'incohérence de la cohabitation
- 33 -
2. Les risques de blocages et d'instabilité
- 34 -
B.
Les dispositions contradictoires
- 35 -
1. La condition de nationalité du candidat
à l'élection présidentielle
- 35 -
2. La déchéance du député
démissionnaire de son parti
- 36 -
Conclusion
- 38 -
* 1Burkina Faso, le nouveau
nom de la République de Haute Volta signifie littéralement
« pays des hommes intègres.
* 2 Un débat existe
sur la date de la Constitution qui a été adoptée le 02
juin 1991 mais promulguée le 11 juin. Alors que dans le langage
politique, on retient la date du référendum, les juristes
estiment que l'on doit plutôt dire « Constitution du 11 juin
1991 », une loi entrant en vigueur à sa promulgation. Le
débat a engendré une incertitude qui a conduit à la non
mention de la date dans les visas.
* 3 A. LOADA et L.M. IBRIGA,
droit constitutionnel et institutions politiques, mars 2007, p 361
* 4F. DELPERE, Droit
Constitutionnel, Tome I, Les données constitutionnelles, Bruxelles,
Larcier, 2ème édition, 1987, p. 13
* 5 Ce chiffre correspond
à 90,75% des suffrages exprimés avec un taux de participation de
49% de la population en âge de voter, in A. SOMA, La constitution du
Burkina Faso : espérance d'une démocratie
intègre, Temple du savoir, 2013, page 29.
* 6 A. SOMA, la constitution du
Burkina Faso, l'espérance d'une démocratie intègre, 2013,
page 62
* 7François LUCHAIRE,
« Douze bizarreries constitutionnelles - bien
françaises », in Mélanges Gérard Conac,
Paris, Economica, 2001, p. 151.
* 8 Récit de l'histoire
politique du Burkina Faso par Arsène Bongnessan Yé in A. B.
Yé, les fondements politiques de la IVème République, PUF,
Ouagadougou,1998
* 9 F. DARGENT, Les
échecs du mimétisme constitutionnel en Afrique noire francophone,
atelier n°4 (
www.droitconstitutionnel.org/congresNancy/comN4/dargentT4.pdf),
09 septembre 2014.
* 10J. RIVERO, « Les
phénomènes d'imitation des modèles étrangers en
droit administratif », in Mélanges W. J. Ganshof Van Der
Meersch, tome III, Bruxelles, Bruylant, Paris, LGDJ, 1972, p. 620.
* 11 F. DARGENT, Les
échecs du mimétisme constitutionnel en Afrique noire francophone
(www.droitconstitutionnel.org/congresNancy/comN4/dargentT4.pdf)
* 12 Article 4 alinéa 2
du Kiti n°an VII 0279/FP/CFP/CE, du 20 avril 1990.
* 13 Le Président et le
vice président de la commission ont été nommés par
Kiti n°an VII-288 FP/CFP/CE du 02 mai 1990. Le médecin commandant
B. Arsène YE fût nommé Président et Benoît
LOMPO vice Président.
* 14 Article 5 du Kiti
n°an VII 0279/FP/CFP/CE, du 20 avril 1990
* 15 Ph. ARDANT et B. MATHIEU,
Institutions politiques et droit constitutionnel, 24ème
édition, lextenso éditions, LGDJ, 2012, page 87
* 16 A. SOMA, La constitution
du Burkina Faso : espérance d'une démocratie intègre,
Temple du savoir, 2013, page 33
* 17 Les manoeuvres de «
transition démocratique » sous Blaise Compaoré, MUTATIONS
N°47 du 15 février 2014
* 18 Article 70 de la
constitution du 02 juin 1991
* 19 Article 28 de
Déclaration Française des Droits de l'Homme et du Citoyen,
1789.
* 20 Aux termes de l'article
161 de la constitution, l'initiative de la révision de la constitution
appartient (...) au peuple...
* 21 L'article 164 de la
constitution indiquant la procédure de révision de la
constitution stipule que « le projet de teste est ensuite soumis au
référendum ».
* 22 L'article 164 de
constitution exige une majorité qualifiée des ¾ des membres
du parlement pour la révision.
* 23 Geoffrey de Q. WALKER,
The People's Law, Collingwood, Victoria, Centre for Independent
Studies, 1987, p. 50.
* 24Alexis de TOCQUEVILLE, de
la démocratie en Amérique, Tome II, Paris, 1840.
* 25 La souveraineté
nationale appartient au peuple aux termes de l'article 32 de la Constitution du
02 juin 1991.
* 26 Loi N°002/97/ADP
du 27 janvier 1997
* 27Loi N° 003-2000/AN du
11 avril 2000
* 28 L'article 37 a
été révisé en 1997 et en 2000. Des discussions sont
houleuses actuellement en ce que cette disposition est encore dans le
collimateur d'une révision pour permettre à Blaise
Compaoré de se présenter en 2015.
* 29 En 2002, le constituant
était revenu sur cette disposition pour supprimer la seconde chambre
avant de revenir au bicamérisme en 2012.
* 30
http://burkina24.com/2013/11/20/revision-de-la-constitution-la-nouvelle-loi-ne-resout-pas-le-probleme-selon-le-pr-abdoulaye-soma,
consulté le 19 août 2014.
* 31 A. SOMA, La
constitution du Burkina Faso : espérance d'une
démocratieintègre, Temple du savoir, 2013
* 32 Montesquieu, de l'esprit
des lois, 1748
* 33 Avant la réforme de
2012 qui a porté le nombre à douze (12), le Conseil
constitutionnel était composé de neuf (09) membres. La
révision constitutionnelle de 2013 a instauré une disposition
transitoire sur l'ensemble des prescriptions de a réforme de 2012 non
encore en vigueur : le Conseil constitutionnel comporte ainsi à ce
jour neuf (09) membres en sus de son Président.
* 34 Arsène B. YE,
les fondements politiques de la IVème République, PUF,
Ouagadougou, 1995
* 35
Décision n°2012-008/CC
sur la conformité à la Constitution de la loi de
révision constitutionnelle portant prorogation du mandat des
députés de la IVème législature.
* 36 A. SOMA, La
constitution du Burkina Faso : l'espérance d'une démocratie
intègre, temple du savoir, Ouagadougou, 2013, page 53
* 37 Theodoro HOLO, La
justice constitutionnelle, Pouvoirs, page 114
* 38 Philippe ARDANT,
les constitutions et les libertés, pouvoirs, page 64
* 39Article 157,
constitution du 02 juin 1991
* 40 Consulter à cet
effet l'annuaire béninois de justice constitutionnelle, Presse
Universitaire du Benin, I-2013
* 41En exemple, nous avons la
Décision DCC 02-014 du 19 Février 2002, cour constitutionnelle du
Bénin.
* 42 Termes empruntés au Professeur
Stéphane BOLLE in BOLLE (S), Des bizarreries constitutionnelles «
made in » Afrique, (
www.la-constitution-en-afrique.org/article-30629434.html)
consulté le 19 août 2014.
* 43 Article 77, constitution
du 02 juin 1991.
* 44 Article 46 de la
constitution du 02 juin 1991
* 45 Article 63 de la
constitution du 02 juin 1991
* 46 Définition
donnée par la Cour de Justice des Communautés Européennes
dans l'affaire opposant la commission à l'Italie, décision rendue
en 1963.
* 47 Coalition des
organisations de la société civile pour les réformes
institutionnelles et politiques,Propositions de réformes
institutionnelles et politiques, septembre 2011.
* 48Politique nationale : Le Pr Soma et les
autres membres de la SBDC favorables à une réforme
constitutionnelle profonde, lefaso.net du 08 février 2014
(http://www.lefaso.net/spip.php?article57843).
* 49 Lefaso.net du 04
février 2014 (http://www.lefaso.net/spip.php?article57776)
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