Conclusion
Au travers de ce mémoire, nous avons tenté
d'accorder usage de l'image photographique et déclenchement de
l'expression personnelle, de la communication et des interactions orales dans
l'apprentissage du français enseigné comme langue seconde
d'hôte.
Certes, l'oeuvre iconographique de par sa charge culturelle,
mythologique, sémantique et sémiologique peut impliquer les
apprenants dans une recherche personnelle de sens qui trouve sa finalité
dans l'acte de parole et l'écoute de l'autre. Certes, l'image tend
à questionner l'individu, à le contraindre à la
réflexion et à la résolution d'un problème
l'impliquant dans son rapport au monde. Certes, elle l'encourage à
déployer sa créativité et son imagination, à
valoriser son vocabulaire, à se référer à soi,
à l'autre, au temps et à l'espace, à libérer ses
capacités d'expression et de communication. Néanmoins, il ne
convient nullement, de négliger les variables subjectives, liées
à l'âge, à la psychologie (notons la confiance en soi et en
ses propos) et à l'expérience linguistique, sociale et culturelle
de chaque apprenant, qui influeront sur ses pensées et ses prises de
parole, à l'influence du groupe et du contexte sur l'individu. Ainsi, le
cas de Gaëlle, apprenante qui n'accepte que partiellement l'entrée
dans les champs de l'expression et de la communication orales, est
symptomatique des limites de notre dispositif qui s'appuie, au-delà des
capacités langagières intrinsèques, sur l'implication
socio-psychologique effective de chacun comme le démontre l'exemple
d'Amina, apprenante prolixe aux connaissances langagières moins
approfondies, mais plus prompte à s'engager dans la communication et
l'échange oral, à dépasser ses connaissances du moment
pour s'exprimer de manière personnelle et créative. Il n'est
cependant pas impossible qu'une telle situation puisse être
contrecarrée par la mise en place d'un étayage
individualisé, hors contexte de groupe, et d'une
répétition de séances similaires pour placer
progressivement tout apprenant mal à l'aise dans une
sérénité plus propice au déploiement de l'acte de
parole.
Le dispositif mis en oeuvre a permis de favoriser
l'éclosion d'une expression personnelle orale chez les apprenants
impliqués et de placer l'enseignement/l'apprentissage de la langue
parallèlement au champ des enjeux communicationnels et interactionnels.
En prenant position, en créant verbalement, en réagissant et en
se référant aux propos des autres (professeur inclus), en les
questionnant, en initiant sciemment une conduite des débats et une
déritualisation des schémas de classe classiques, en s'accordant
ou s'opposant, en négociant et en argumentant, les apprenants
s'impliquent dans une recherche de sens, communiquent et interagissent en
réaction à l'image. Ils expriment leurs pensées et leur
individualité, se redéfinissant, ainsi, en tant que locuteurs
sociaux, personnes-sujets de leur énonciation. Cet ensemble
d'éléments se révèle propice à
l'appropriation de la langue ; et la validité de
l'effectivité d'une favorisation de l'expression personnelle, de la
communication et des interactions orales n'exige pas, à notre sens, un
cumul exhaustif de ces comportements chez chacun, en dépit de leurs
apparitions, à des degrés différents, chez, notamment,
quatre apprenants (Amina, Carin, Junko et Vince). En effet, suite à
notre analyse, nous notons que lesdits enjeux soulevés par la
séance se révèlent empreints d'une polymorphie certaine
comme nous le signale l'exemple de Nadine, qui, bien qu'elle ne prenne que peu
part aux actes de commentaires personnels, fait preuve d'une capacité
à réagir aux prises de parole des autres participants et à
s'impliquer dans les autres motifs communicationnels sous-tendus par les
photographies. Son comportement reste lié à un souci de
comprendre l'image par le regard de l'autre et l'écoute de sa
pensée.
A nos questionnements, nous répondons, ainsi, que si
l'image photographique permet de favoriser l'émergence d'une expression
personnelle, d'une communication et d'interactions orales en classe de FLSH (et
ce quel que soit le niveau en langue des apprenants), elle reste
néanmoins dépendante de facteurs humains. De plus, ce
mémoire se borne à l'analyse d'un groupe classe unique
(composé d'adultes aux profils socioculturels et langagiers
définis) et ne peut, de ce fait, tendre à l'éviction de
certains biais inhérents à ce type de recherches basé sur
la communication. La multiplication des séances types, destinées
à différents groupes, aurait pu permettre une mise en perspective
et en condition plus riche de la problématique initiale. La
réalité du terrain ne put permettre la réalisation d'une
telle démarche et la confrontation de données multiples. Nous
pensons, pour conclure, reproduire ce dispositif, qu'il conviendra de moduler
et d'améliorer, à des situations professionnelles futures
d'enseignement du français en tant que langue étrangère ou
seconde d'hôte.
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