0. INTRODUCTION
L'explosion démographique, la pauvreté et
l'urbanisation rapide et très souvent incontrôlée en
Afrique constitue des facteurs majeurs de dégradation de l'environnement
global (Beaujeu - Garnier et al., 1963 ). Pour Dumont (1989), la
dégradation de l'état physique du globe s'accélère
et rien ne laisse présager un renversement des tendances dans un avenir
prévisible.
En 1981, les experts estimaient la population mondiale
à 4492 millions d'habitants avec un taux d'accroissement de 1,7% par an
(Ramade, 1982 ) et à 5,2 milliards en 1991 (Sheila B. Reed, 1995 ). Les
calculs indiquent ainsi une augmentation moyenne d'environ 5 millions des
personnes par mois (Riou, 1981). Les estimations pour les années 2000,
2025, et 2100 sont respectivement de 6,3 milliards (Ramade, 1982 ), 8,5
milliards et 10 milliards (Wilches - Chaux, 1995 ). On pense que 95 % de la
croissance démographique se produira dans les régions en voie de
développement où les ressources ont déjà atteint
leurs limites. Pour l'Afrique, les projections indiquaient 587 millions
d'habitants en 1990, 768 millions pour l'an 2000 (QUID, 1984 cité par
Dejoux, 1988), 1,5 milliards en 2030 et 3 milliards en 2100 (Banque Mondiale,
1992 ). Actuellement, la population africaine ne représente que 10 % de
la population mondiale. Cependant, son taux moyen de croissance annuelle est
très élevé et représente 3% contre une croissance
agricole d'à peine 1% (Dumont, 1989 ). Pour la République
Démocratique du Congo, les estimations indiquent 53 millions d'habitants
{Anonyme, 2002}. La densité moyenne de la population est de 18 habitants
au Km2 répartie sur un territoire d'une superficie de 2 345
000 Km2 selon Ngondo et al (1992 ).
Cette population en pleine croissance se concentre de plus en
plus dans les villes qui se développent à un rythme exponentiel
sous l'effet combiné de la croissance naturelle et des
phénomènes migratoires. Le puissant attrait des villes sur les
campagnes peut s'expliquer notamment par le fait que l'urbanisation est
associée au progrès social et économique, au
développement de l'éducation, à l'amélioration des
conditions générales de santé ainsi qu'à
l'accès aux services sociaux, à la culture et à la
politique ( ONU, 1970 ). De 1990 à 1995, la population urbaine mondiale
est passée de 29% à 45% ( PNUD, 1996 et Besse, 1998 ). Le taux
d'accroissement annuel de la population urbaine est révélateur de
cette dynamique : de 1950 à 1975, il s'est élevé
à 3% dans le Monde, à 4% dans le tiers - Monde en
général et à 5% en Afrique contre moins de 1 % dans les
régions les plus avancées {WRI et al, 1997. Le contraste est donc
frappant. En République Démocratique du Congo, la population est
urbaine à 40% avec un taux de croissance de 7 à 8% {Anonyme,
2002} soit 21 200 000 habitants dont un tiers résident à
Kinshasa. Ngondo et al.{1992 )ont estimé le taux de croissance de la
population urbaine de Kinshasa à 6,3% contre 3,30% pour l'ensemble du
pays
La surpopulation associée à l'insuffisance des
ressources et au manque d'une volonté politique ferme est à
l'origine des très graves problèmes dans tous les domaines :
chômage, augmentation du nombre des sans - abris et des mal logés,
prolifération des établissements d'urbanisation spontanés,
augmentation de la misère et élargissement du fossé entre
les pauvres et les riches, insécurité
croissante, détérioration du parc immobilier, des services
et des infrastructures, mauvaise utilisation du sol, érosions
catastrophiques et spectaculaires, saturation des moyens de transport,
aggravation de la pollution et en particulier celle des eaux, manque d'espace
vert et vulnérabilité accrue aux catastrophes et surtout la
survenance régulière des catastrophes majeures à
répétition telles que les inondations, l'ensablement...
Kinshasa est un exemple d'écosystème urbain
tropical confronté à des problèmes complexes. Ces derniers
sont nombreux et diversifiés quant à leurs causes respectives
dont la pauvreté, la croissance démographique explosive et
incontrôlée et une extension spatiale tentaculaire et très
rapide demeurent les causes les plus importantes.
Le bassin versant de la rivière N'Djili
n'échappe pas à cette triste réalité. La croissance
démographique explosive, la pauvreté et les difficultés de
logement sont à la base d'une crise écologique multiforme et
aiguë observée dans cette aire. Il en résulte une forte
pression sur les ressources et en particulier sur les terres avec comme
conséquence l'occupation illégale et irrationnelle de tous les
espaces apparemment disponibles y compris les zones marginales très
critiques (lit majeur des rivières, zones inondables et zones fragiles
à fortes pentes sensibles à l'érosion). Aujourd'hui, il
constitue la partie de Kinshasa qui est le théâtre du plus grand
nombre des catastrophes naturelles: érosions, inondations,
ensablement... Des chercheurs commencent à s'intéresser à
différents aspects environnementaux, sociaux, économiques et
même géologiques de cette partie de la ville. Malheureusement, les
études menées à ce jour sont caractérisées
par leur approche tout à fait sectorielle qui ne permet pas
d'appréhender les divers problèmes dans leur ensemble et dans
leurs interrelations. Ce travail est le premier essai d'une étude
systémique appliquée à ce bassin versant qui revêt
une grande importance pour la ville.
Dans ce travail, nous nous proposons d'étudier
l'état global du bassin versant de la rivière N'Djili et d'en
établir le diagnostic environnemental. Pour ce faire, les objectifs
poursuivis sont les suivants:
1) Etablir un diagnostic environnemental exhaustif en
identifiant les divers types de dégradation du site et en
étudiant l'impact des problèmes de l'environnement sur la
qualité de la vie de la population dans le bassin versant;
2) Evaluer la qualité des eaux;
3) Réaliser la cartographie numérique
écologique et environnementale en indiquant les zones à
risques vis - à - vis des catastrophes naturelles;
4) Proposer des solutions pour réduire l'impact des
catastrophes liées aux dégradations de l'environnement ainsi que
des pistes solutions pour un aménagement rationnel en vue de
l'utilisation rationnelle, optimale, durable et équitable des ressources
en terres et en eaux et d'améliorer la qualité de l'environnement
et les conditions de vie de la population.
Le présent travail comprend trois parties : la
méthodologie qui comprend l'étude du milieu (bassin versant de la
rivière N'Djili) et les méthodes appliquées en vue
d'atteindre les objectifs fixés dans le présent travail, les
résultats obtenus (résultats des analyses physico - chimiques et
biologiques des eaux de la rivière N'Djili, état de
l'environnement global des municipalités situées dans le bassin
versant de la rivière N'Djili) et enfin, la discussion, conclusion et
recommandations. L'environnement global a été analysé
ainsi que les cas particuliers des communes les plus touchées notamment
Kisenso, Matete, Limete, Masina. Toutefois, il faut signaler que seules les
catastrophes naturelles survenant régulièrement dans la partie
urbaine du bassin ont été étudiées tant dans leurs
causes que dans leurs conséquences sur le site et sur l'homme. Des
solutions appropriées ont été proposées pour
améliorer la qualité de l'environnement et les conditions de vie
de la population et réduire l'impact des catastrophes qui sont devenues
une plaie pour la ville.
Il faut cependant signaler que ce travail a connu de
nombreuses difficultés : l'importance des distances parcourues sous
la pluie et sous un soleil accablant, la difficulté d'accéder
à la documentation et aux matériels et appareils utiles pour le
prélèvement et l'analyse des données et surtout les
difficultés d'accès à certains sites dans les quartiers
d'extension par suite des contraintes de terrain.
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