4.-
ETUDE DES CAS : INONDATION DE NOVEMBRE 1999 A JANVIER 2000 A KINSHASA
1.- Phénomène cause :
Cette crue était provoquée par la
montée des eaux des rivières du bassin nord - ouest ayant comme
exutoire la rivière Ubangui et la montée des eaux des
rivières du bassin sud - ouest avec comme émissaire la
rivière N'Djili.
Une partie de la ville de Kinshasa se trouvait sous eau depuis
la fin du mois de novembre 1999.
Alors que la hauteur normale des eaux est de 3,70 m ne
dépassant pas un maximum de 4,70 m au mois de novembre, les crues du
fleuve avaient atteint et même dépassé le seuil d'alerte de
5,20 m. Ces crues, consécutives aux fortes pluies observées
à partir du mois d'octobre 1999 concernaient simultanément les
versants nord et sud du bassin du fleuve. Elles provenaient de tous les
affluents importants du fleuve Congo notamment les rivières Kasaï,
Kwango, Kwilu, Inkisi et Ubangui.
Le phénomène s'est caractérisé par
le renvoi des eaux du fleuve dans ses affluents sur une distance d'environ 1,5
Km provoquant des inondations. Dans ces conditions, les eaux semblaient ne plus
couler et se comportaient comme une véritable mare qui s'élargit
sans cesse engloutissant progressivement toutes les zones inondables.
La rivière N'Djili s'est trouvée sous la double
emprise des crues du fleuve Congo et des rivières du Bas - Congo :
rivières Inkisi et Dingi - Dingi. C'est ce qui explique la
gravité des problèmes observés au niveau du bassin versant
de la rivière N'Djili par rapport aux autres bassins versants de la
ville de Kinshasa.
2.- Situation hydrométrique :
Située à l'altitude de 272,12 m, la station
hydrométrique de Kinshasa, implantée au niveau du Port public se
trouve être l'exutoire d'un bassin versant de 3 747 320 Km2
sur l'ensemble de la superficie du bassin congolais. Elle donne la situation
hydrologique du fleuve Congo et de ses affluents à hauteur de
Kinshasa.
Tableau 41 : Côtes hydrométriques (en
mètre) dépassées une fois en moyenne en 5 ans, 10 ans, 25
ans et 50 ans à Kinshasa
Années
|
5 ans
|
10 ans
|
25 ans
|
50 ans
|
Côte hydrométrique (en mètre)
|
4,71
|
4,91
|
5,08
|
5,25
|
Maximum connu : 6,26 m atteint le 17 décembre
1961
Plus hautes eaux connues : 5,25 m atteint le 18
décembre 1908
3.- Conséquences :
- La population à risque était estimée
à 1 500 000 personnes dont un tiers c'est - à dire 500 000
devrait être prise en charge comprenant 150 000 sinistrés sans
abri et 350 000 sinistrés reçus en familles d'accueil. Mais le
nombre des personnes touchées par les inondations de 1999 - 2000 et
effectivement sans abri s'est élevé à 65 000
sinistrés qui ont été répartis dans 30 sites. Le
tableau 38 donne la répartition des sinistrés par sites et le
tableau 39 donne la répartition des sinistrés par quartier et
commune :
Tableau 42:
Répartition des sinistrés des inondations de janvier 1999
à février 2000 par commune et par quartier
Commune
|
Quartier
|
Nombre des sites
|
Populations sinistrées
|
%
|
Limete
|
Ndanu
|
17
|
11 332
|
36,1
|
Résidentiel
|
1
|
3 000
|
9,6
|
Madrandele
|
3
|
3 090
|
9,8
|
Kingabwa
|
1
|
1 160
|
3,7
|
Total
|
22
|
18 582
|
59,2
|
Masina
|
Abattoir
|
1
|
1 000
|
3,2
|
Kisenso
|
-
|
1
|
4 800
|
15,3
|
Matete
|
Maziba
|
4
|
6 500
|
20,7
|
Total Bassin versant de la N'Djili
|
28
|
30 882
|
98,4
|
Ngaliema
|
Kinsuka -pêcheurs
|
2
|
510
|
1,6
|
Total général
|
|
30
|
31 392
|
100
|
Tableau 43:Nombre des
sinistrés des inondations de novembre 1999 à février 2000
réparti par site d'hébergement
N°
|
Nom du site
|
Nombre des sites
|
Adresse
(Avenue)
|
Quartier
|
Commune
|
Population
|
1
|
IMPEXKIN
|
1
|
Mwepu
|
Ndanu
|
Limete
|
1847
|
2
|
Couvent des Soeurs
|
1
|
Mbaku
|
Ndanu
|
Limete
|
100
|
3
|
Maison Charlotte
|
1
|
Mwepu
|
Ndanu
|
Limete
|
249
|
4
|
Efablo
|
1
|
Goodyear
|
Ndanu
|
Limete
|
664
|
5
|
Ecole St Bernard
|
1
|
Goodyear
|
Ndanu
|
Limete
|
106
|
6
|
FANAIR
|
1
|
Mbaku
|
Ndanu
|
Limete
|
1318
|
7
|
SBK
|
1
|
Muzu
|
Ndanu
|
Limete
|
995
|
8
|
Basilua
|
1
|
Mbaku
|
Ndanu
|
Limete
|
105
|
9
|
IREZA
|
1
|
Goodyear
|
Ndanu
|
Limete
|
2888
|
10
|
Kansebu
|
1
|
Goodyear / REGIDESO
|
Ndanu
|
Limete
|
237
|
11
|
Tshanga - Tshanga
|
1
|
Goodyear
|
Ndanu
|
Limete
|
269
|
12
|
Témoins de Jéhovah
|
1
|
De l'usine
|
Ndanu
|
Limete
|
104
|
13
|
REGIDESO Ferme
|
1
|
Mbaku
|
Ndanu
|
Limete
|
127
|
14
|
FALIZA
|
1
|
REGIDESO
|
Ndanu
|
Limete
|
2000
|
15
|
SIKINEX
|
1
|
REGIDESO
|
Ndanu
|
Limete
|
155
|
16
|
CHANIMETAL
|
1
|
17 ème Rue
|
Limete/Industriel
|
Limete
|
3000
|
17
|
I.T.I/ kitomesa
|
1
|
-
|
|
Kisenso
|
4800
|
18
|
SITRACO 1
|
1
|
Rond - point Madrandele
|
Madrandele
|
Limete
|
2245
|
19
|
SITRACO 2
|
1
|
Rond - point Madrandele
|
Madrandele
|
Limete
|
500
|
20
|
SHAAN
|
1
|
Kingabwa n° 6229
|
Madrandele
|
Limete
|
345
|
21
|
DELOGNE
|
1
|
Brasseries
n° 1
|
Kingabwa
|
Limete
|
1160
|
22
|
Kinsuka
|
2
|
-
|
Kinsuka/ pêcheurs
|
Ngaliema
|
510
|
23
|
ALIVIA
|
1
|
|
Abattoirs
|
Masina
|
1000
|
24
|
MAZIBA
|
4
|
|
Maziba
|
Matete
|
6500
|
25
|
Papa Kasongo
|
1
|
Goodyear
|
Ndanu
|
Limete
|
84
|
26
|
Papa Sapa
|
1
|
De la Digue
|
Ndanu
|
Limete
|
84
|
|
Total
|
30
|
|
31 442
|
Source : Rapport de l'atelier provincial de formation
à la prévention et à la gestion des catastrophes
(2000)
A Kinshasa, il existe trois stations de captage et
d'épuration des eaux : sur la rivière Lukunga, dans la baie
de Ngaliema sur le fleuve Congo et sur la rivière N'Djili qui produisent
respectivement 45 000, 50 000 et 110 000 m3 d'eau potable par jour
(Pain, 1984). L'usine de la rivière Lukaya, en construction et dont les
travaux sont arrêtés, n'est pas encore opérationnelle. Elle
aura une capacité nominative de 36 000 m3 d'eau
traitée par jour (Konde, 1993). Comme on peut le constater, l'usine de
production de l'eau potable de la REGIDESO installée sur la
rivière N'Djili est la plus importante de Kinshasa. En effet, elle
dessert plus de 70 % de la quantité d'eau traitée pour
l'approvisionnement du réseau urbain de Kinshasa. L'importance de cette
station de captage, de traitement et d'épuration d'eau se traduit
également par le nombre des communes et l'importance de la population
qui est servie. En effet, il s'agit des communes suivantes : Kimbanseke,
N'Djili, Masina, Limete, Lemba, Matete, Kisenso, Barumbu, Ngiri - Ngiri (en
partie jusqu'au niveau de l'avenue Assossa), Kasa - Vubu, Selembao et Kalamu.
Une interruption de l'activité de cette usine
entraîne des problèmes complexes et une pénurie aiguë
d'eau potable qui perturbe la vie de toute la ville en allant bien au -
delà des limites du bassin versant de la rivière N'Djili. Lors
des inondations de novembre 1999 à février 2000
l'activité de cette station de la REGIDESO s'est retrouvée
réduite et même menacé de blocage par suite de
l'arrêt des trois des six moteurs de l'usine et de la rupture de la digue
construite en amont de l'usine pour la protection de celle -ci. L'usine ne
tournait qu'à la moitié de sa capacité ce qui exigea la
mise en place d'un système de rationnement pour éviter le pire en
gérant rationnellement la quantité d'eau potable produite.
4.- Etendues du désastre :
Neuf communes ont été touchées de
novembre 1999 à décembre 2000 : Ngaliema, Barumbu, Limete,
Matete, N'Djili, Kisenso, Masina, N'Sele (Kinkole) et Maluku. 4 communes
supplémentaires se sont ajoutées en janvier 2000 : Ngaba,
Makala, Bumbu et Lemba. Comme on peut le constater, cette grave catastrophe
hydrologique a frappé essentiellement les communes appartenant au bassin
versant de la rivière N'Djili : Limete, Matete, N'Djili, Kisenso,
Masina et Lemba. La gravité de la calamité se traduit notamment
par le nombre des sites d'hébergement et l'importance de la population
frappés de plein fouet par ces événements : 26 sites
d'hébergement sur 30 ont été implantés dans l'aire
du bassin versant de la rivière N'Djili soit 86,7 % ; la fraction
de la population sinistrée résidant dans le bassin versant de la
rivière N'Djili s'élevait à 23080 sur un total de 31442
personnes installées dans les sites d'hébergement pour l'ensemble
de la ville ce qui représentait 73,40 % dont 11 332 étaient
installés dans 17 sites localisés dans le quartier Ndanu soit
49,09 %. Ce quartier apparaît donc comme le lieu le plus
vulnérable par excellence vis - à - vis des inondations dans
toute la ville de Kinshasa. A lui seul, il a connu l'installation de
près de 56,67 % des sites d'hébergement des sinistrés ce
qui correspond à 65,38 % de l'ensemble des sites installés dans
le bassin versant de la rivière N'Djili.
Comme on peut le constater, les inondations constituent une
situation d'extrême urgence par la gravité des dégâts
matériels, l'étendue des pertes en vies humaines et par le nombre
des agglomérations qui sont frappées au même moment par
cette calamité. Elles se sont produites avec une rare violence en 1903,
de décembre 1961 à janvier 1962. Cette dernière dont il
est question qui s'est étendue de novembre 1999 à janvier 2000
s'est révélé être plus grave par sa durée et
son ampleur. Les deux premières crues n'avait duré que deux mois.
En effet, non seulement elle avait commencé beaucoup plus tôt que
d'ordinaire mais aussi s'est poursuivie jusqu'en février de l'an 2000.
Le nombre d'agglomération atteintes a été très
important: toutes les villes riveraines du fleuve et de ses principaux
affluents notamment Matadi, Mbandaka, Bandundu, Boma, Kimpese, Inkisi et
même des villes ou des régions entières des Pays voisins
drainés par le bassin du Fleuve Congo ont été
frappées par cette grave calamité naturelle. C'est le cas de la
ville de Bangui en République Centre - africaine et la partie Nord de la
République du Congo. A Brazzaville, le quartier Yoro où
résident de 10 000 à 20 000 habitants a été
complètement inondé et les habitants se déplaçaient
en pirogue pour aller d'un lieu à un autre. Cependant, Kinshasa semble
être la ville la plus atteinte par cette calamité. La crue a
atteint et même dépassé la côte d'alerte qui est de 4
m 40 à Kinshasa. Au 29 novembre 1999, la côte hydrométrique
était déjà à 5 m 43. Et à Kinshasa, la
partie basse du bassin versant de la rivière N'Djili se
révèle être le lieu le plus vulnérable.
3.3.2.2.- LES EROSIONS
L'érosion, c'est le déplacement des
matériaux du sol: argile, sable, matières organiques (feuilles
mortes, déchets de bois, excréments des animaux, sels
minéraux...) sous l'action du vent ou de l'eau. Il s'agit respectivement
de l'érosion éolienne et de l'érosion hydrique
provoquée par le ruissellement de l'eau à la surface du sol.
L'érosion peut entraîner de graves conséquences:
déracinement des arbres, remplissage des bas-fonds par l'ensablement,
destruction des infrastructures et des habitations, effondrement des routes...
L'érosion par le vent est souvent moins spectaculaire mais peut avoir
des effets tout aussi graves que l'érosion hydrique. Comme le dit
Duchaufour (1995), le sol est le point le plus sensible de l'environnement
terrestre et l'érosion en est une des formes les plus graves de
dégradation.
Toutes les villes congolaises sont affectées par des
érosions catastrophiques et très souvent spectaculaires. On peut
citer notamment : Bagata, Bandundu, Bulungu, Gungu, Kasongo - Lunda,
Kenge, Kikwit, Popokabaka, Moanda, Mbandaka, Ilebo, Kananga, Kabinda, Tshikapa,
Mbuji - Mayi, Kinshasa, Dilolo, Kalemie, Kasenga, Likasi, Lubumbashi, Sandoa,
Bukavu...Dans certaines d'entre elles, le phénomène a pris une
allure catastrophique. Tel est le cas de Kananga et Kinshasa. Celui - ci
demeure néanmoins le cas le plus spectaculaire et le plus dramatique
surtout qu'il s'agit de l'une de plus grandes Villes d'Afrique. On y recense
à ce jour près de 400 érosions dont 48 ont atteint des
dimensions spectaculaires affectant environ 4500 ha (Atelier Provincial de
formation à la gestion des catastrophes, novembre 2000).
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