1.2. Problématique et justification
La restructuration du système bancaire dans les
années 1980 s'est traduite par la disparition en Afrique,
particulièrement dans les pays membres de l'UEMOA, de plusieurs
établissements de crédit notamment les banques de
développement (Guérin et Servet, 2004). Ces établissements
présentaient la particularité d'intervenir en milieu rural comme
en milieu urbain, au profit de certaines franges de la population
habituellement délaissées par les établissements de
crédit classiques que sont les agriculteurs, les artisans, les jeunes
diplômés, les micro et petits entrepreneurs, les femmes
exerçant des activités génératrices de revenus.
Suite à cette restructuration, différents intermédiaires
financiers souvent qualifiés d'Institutions de Micro-Finance (IMF)
spécialisés dans l'attention à ce type de clientèle
ont vu le jour (Guérin et Servet, 2004). Selon les mêmes
auteurs, le rôle de ces institutions consiste à offrir des
services financiers de base (épargne, crédit, assurance,
transfert de fonds, etc.), aux montants réduits, à des
populations pauvres, afin de leur donner la possibilité d'investir et de
se prémunir en cas de difficultés (conditions climatiques
défavorables à la production, dépenses imprévues
liées à une maladie ou à la perte de biens, etc.). Dans ce
cadre, Zeller (2000) a perçu le crédit octroyé par les IMF
comme un moyen d'augmenter le revenu, et par conséquent la consommation,
les investissements futurs et l'accumulation des biens. Agnikpè (1999) a
affirmé quant à lui, que la micro-finance est un instrument de
lutte véritable contre la pauvreté, qui pourrait permettre
d'intégrer une part importante du secteur informel dans le dynamisme
économique des pays qui en sont tributaires. Perçue comme telle,
la micro-finance ne pourrait, aux fins d'aboutir à son objectif de
contribution à l'amélioration des conditions de vie des
ménages pauvres, se passer d'un secteur qui concerne plus de la
moitié de la population.
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Léonie KOUMASSA : Thèse d'Ingénieur
Agronome, Décembre 2007
Contribution de la micro-finance à l'adoption de nouveaux
paquets technologiques de production de riz dans le département des
Collines
Précisément au Bénin, l'agriculture
occupe 70% de la population et contribue pour environ 36 % à la
formation du PIB (INSAE 2002). Mais, selon Wampfler (1999), le financement des
activités agricoles présente des caractéristiques
spécifiques, tant en termes de diversité des-services
nécessaires (besoins de trésorerie, d'investissement à
moyen et longs termes...), qu'en termes de risques (incertitude sur la
production, risques covariants, climatiques...). Les services financiers ne
peuvent donc être utilisés efficacement et rentabilisés que
dans un contexte économique favorable. Or le secteur agricole est plus
que jamais en ces temps de libéralisation, un secteur à haut
risque, faiblement organisé et mal régulé.
Au Bénin, le riz est une denrée qui prend une
importance grandissante dans la structure de consommation des ménages
aussi bien en milieu urbain que rural (Midingoyi, 2003). Si on s'en tient aux
statistiques officielles du Bénin, il y a un déficit de l'ordre
de 50.000 tonnes de riz décortiqué entre la production et la
consommation. En 2002 plus particulièrement, la production rizicole
était estimée à 55.000 tonnes de riz paddy (soit 30.000
à 35.000 tonnes de riz consommable) tandis que la consommation
était estimée à 80.000 tonnes de riz usiné
(Abiassi, 2006). Pour combler ce déficit, l'Etat est contraint d'en
importer, ce qui engendre une perte importante de devises au niveau de la
balance commerciale.
Dans le souci de pallier cette situation, le gouvernement a
opté pour l'intensification des systèmes de production. Ainsi, au
niveau des facteurs d'amélioration des conditions techniques de
production du riz au Bénin, de nombreuses études et
expérimentations ont été entreprises par les structures de
recherche en l'occurrence l'INRAB (Institut National des Recherches Agricoles
du Bénin) et l'ADRAO (Association pour le Développement de la
Riziculture en Afrique de l'Ouest) ; mais ces travaux ne sont que faiblement
valorisés (CCR, 2005). Selon l'INRAB (1996), l'adoption d'une innovation
est tributaire de nombreux facteurs parmi lesquels nous pouvons citer :
? la complexité de la technologie ;
? la mise en place de fonds initial ;
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Léonie KOUMASSA : Thèse d'Ingénieur
Agronome, Décembre 2007
Contribution de la micro-finance à l'adoption de nouveaux
paquets technologiques de production de riz dans le département des
Collines
? le bénéfice net escompté ; et
? les possibilités d'intégration de la
technologie dans le schéma socio-culturel de l'exploitant.
Par ailleurs, Fall (2005) dans une étude d'impact de la
production rizicole en Mauritanie, avancent que les raisons les plus souvent
évoquées pour justifier la faiblesse de l'intensité
culturale dans la sous région sont entre autres, la difficulté
d'accéder au crédit, le manque de main d'oeuvre
saisonnière, la mauvaise gestion de l'eau et des terres,
l'indisponibilité de nouvelles variétés permettant la
double culture et la rentabilisation des investissements. De plus, la
théorie de l'économie politique soutenue par Popkin (1979)
cité par Kouévi (2002) stipule que la non adoption d'une
innovation s'explique par le fait que, soit le paysan ne veut pas, soit il ne
peut pas. Ceci met en exergue la problématique du financement et montre
le rôle crucial que peut jouer le crédit dans l'adoption d'une
innovation. Cependant, dans la plupart des localités du Bénin, la
problématique du crédit agricole ainsi que le financement de
l'investissement productif constitue un défit majeur pour
l'accroissement de la production et de la productivité.
Dans un contexte où le riz, autrefois denrée de
luxe devient un aliment ancré dans les habitudes alimentaires et par
conséquent très adapté pour assurer la
sécurité alimentaire, il est nécessaire d'évaluer
la contribution de la micro-finance à l'accroissement de la production
de cette denrée à travers l'adoption de nouvelles
technologies.
De plus, de nombreuses études sur la micro-finance
montrent sa contribution à l'amélioration du revenu (Salé,
2001), son accessibilité par les ménages pauvres (Mensah, 2002),
les critères d'octroi et les déterminants du remboursement
(Azagnandji, 2002), la pérennité de ces institutions (Messan,
2003) etc. Mais il n'y a pratiquement pas d'études qui se focalisent sur
la micro-finance et l'adoption de nouvelles technologies. Les questions qui se
posent alors sont : Quelle est la contribution des IMF à l'adoption des
technologies? Les conditions établies par les IMF favorisent-elles les
producteurs de riz ? Quels sont les besoins réels en financement des
riziculteurs du centre Bénin? C'est à ce panel de questions, que
nous allons essayer de
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Léonie KOUMASSA : Thèse d'Ingénieur
Agronome, Décembre 2007
Contribution de la micro-finance à l'adoption de nouveaux
paquets technologiques de production de riz dans le département des
Collines
répondre à travers le thème ci
après: La micro-finance dans l'adoption des nouveaux paquets
technologiques de production de riz dans le département des
Collines.
Afin de répondre à ces préoccupations,
nous nous sommes fixés certains objectifs de recherche.
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