2. Evolution de la domanialité publique en RDC
La ville de Lubumbashi qui constitue la délimitation
spatiale de ce travail, est un sous-ensemble qui se trouve dans un ensemble
global, d'où les règles générales de la gestion du
domaine public édictées en RDC la concernent et n'échappe
pas à toutes les réalités de son environnement global qui
la contient. Par conséquent, nous allons retracer l'évolution da
la gestion de la domanialité publique pendant la période avant,
pendant et après la colonisation.
Avec l'histoire anthropologique, le domaine public existait
bel et bien sous une ou une autre forme, notamment dans les entités
traditionnelles, société à chefferie, monarchie d'Afrique
en générale, au Congo en particulier, qui ont existé avant
la colonisation, ces entités considéraient le sol comme un bien
appartenant à la communauté dont le responsable - Patriarche,
Roi, ... - ne pouvait le disposer de son propre gré ni
l'aliéner sans consentement des autres membres de la
société, car le chef, Patriarche ne disposait sur ces biens que
d'un pouvoir de gestion et non de propriété. Ceci laisse entendre
que le principe d'inaliénabilité, garant du domaine public,
existait quoi que n'étant pas expressément énoncée
dans une loi, et tous les biens de la communauté entre autre Palais
royal, objets symbolique du pouvoir royal ainsi que d'autres biens
étaient jalousement protégés par toute la population.
Avec l'avènement de la colonisation, une approche
moderne sur la gestion du domaine public s'est introduite d'une manière
significative, l'essentielle de cette gestion reposait sur la loi du 18 Octobre
1908 (Charte coloniale), modifiée par la loi du 05 Mars 1912 et
remplacée par l'arrêté-loi du 19 Mai 1942 (B.O 1942 P 278)
il t était une nette distinction entre « cession »
qui désigne un acte impliquant le transfère de la
propriété et la « concession » qui
désigne un acte impliquant seulement le transfère des droits de
jouissance. Selon que l'on se trouvait en présence de l'un ou de l'autre
mode d'attribution du droit, les règles applicables variaient tant en ce
qui concerne les règles de compétence qu'en ce qui concerne les
règles de fond.
Le Roi, par arrêté, pouvait céder ou
concéder à titre gratuit et à condition dérogeant
au droit commun des terres pour une superficie n'excédant pas dix (10)
hectares, il devait en outre, approuver les cession ou concession à
titre gratuit, octroyées par les gouverneurs pour une superficie ne
dépassant pas dix hectares dans les circonscriptions urbaines et 200
hectares des terres pour les terres rurales. Les gouverneurs des provinces et
les représentants des comités CNKi, CSK avaient la
compétence ordinaire en matière de cession et de concession
à titre onéreux, leur compétence était
limitée à 10 hectares des terres urbaines et 500 hectares des
terres rurales. Ils étaient par ailleurs autorisés à
déléguer aux conservateurs des titres fonciers, au pouvoir de
vendre ou louer les terres dont la superficie n'excédant pas 2
hectares.
Dans le régime général des cessions et
concessions pour favoriser la colonisation (décret du 13 Janvier 1947),
les compétences étaient dévolues au gouverneur
général, pour autant que la superficie à concéder
ou à céder n'excédaient pas 5 hectares, si la destination
était résidentielle et 100 hectares pour une destination agricole
ou d'élevage, ce régime était limité aux terres
rurales et l'acte de concession ou de cession ne pouvait intervenir
qu'après occupation provisoire et une mise en valeur au moins partielle.
Le régime du décret après avis du conseil colonial
constituait un quatrième degré de compétence. Le
cinquième niveau de compétence en la matière était
constitué par obligation d'un décret subordonné au
dépôt préalable au projet de convention sur le bureau des
chambres législatives, pour octroyer des cessions de plus de
100 000 hectares, pour des concessions des superficies excédant
25 000 hectares consentie pour une durée supérieur à
30 ans.
En fin, le sixième niveau de compétence, la Loi
seule pouvait octroyer des cessions impliquant une aliénation de
souveraineté (rectification des frontières) ou autoriser des
dispositions spéciales de cession d'exploitation des services publics
(transport) qui impliquent une charge financière pour l'Etat.
Quant aux règles de fond, elles avaient essentiellement
comme but d'obliger le pouvoir concédant à subordonner la
validité des actes de cession ou de concession à la
présence dans ces actes des certaines closes de rachat et la
nomenclature des cas de déchéances.
Le régime juridique esquissé, ne s'appliquait
pas aux terres dites « indigènes » car,
parallèlement au régime foncier applicable aux terres domaniales
et intéressant les non indigènes, toute une législation
s'était développée, destiner à faire respecter le
droit d'occupation des « indigènes » et à
organiser un régime de propriété pour ces derniers.
Les premières tentatives de modifier les règles
ci-dessus rappelées, datent de 1966 avec l'ensemble des dispositions
communément connues sous la dénomination de « Loi
Bakajika » l'objet avoué de ce texte était de redonner
à l'Etat la plénitude de ses droits sur les terres domaniales en
annulant notamment le pouvoir de céder ou de concéder les terres
domaniales, qui avait été attribué à certaines
comités comme la C.N.Ki et la C.S.K. Dans la même optique de lutte
contre le pouvoir concédant concurrent t compagnies qui avaient
bénéficiées des grandes concessions ou cessions et y
abusaient de leur droit en gelant les terres au mépris de
l'intérêt général, sont intervenues la Loi
constitutionnelle n°71/008 du 31 Décembre 1971 et la Loi
n°71/009 du 31 Décembre 19971.
Néanmoins, le bouleversement opéré dans
ce domaine par la consécration constitutionnelle du principe
« la propriété de l'Etat sur le sol » ne fut
pas pleinement opérationnelle malgré les nombreuses modifications
intervenues dans les mesures d'exécution. C'est ainsi que la Loi
n°73-021 du 20 Juillet 1973 portant régime général
des biens, régime foncier et immobilier et régime de
sûreté telle que modifiée et complétée par la
Loi n°80-008 du 18 Juillet 1980 est intervenue pour harmoniser et lever
l'équivoque sur la gestion en la matière. Notons par la suite que
parmi les idées forces qui constituent la trame, nous retrouvons une
uniformisation du droit foncier en domanialisant toutes les terres et en ce
compris les terres naguères dites « terres
indigènes ».
C'est cette Loi qui fixe les modalités
générales sur la gestion des dépendances du domaine public
en RDC, il se dégage cependant, dans l'exécution de ladite Loi,
des écarts et des irrégularités, que nous essayerons
d'analyser chemin faisant dans le présent travail surtout en ce qui nous
concerne dans la ville de ville de Lubumbashi.
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