L'union africaine à l'épreuve de la démocratie( Télécharger le fichier original )par christelle GBOH Université catholique de l'Afrique de l'ouest- Unité universtaire d'Abidjan ( Côte d'Ivoire) - Maitrise en droit- option : relations diplomatiques et consulaires 2010 |
PARTIE I : UNE DEMOCRATIE PROMUELes bases d'une reconsidération de la démocratie avaient déjà été jetées bien avant la naissance de l'Union Africaine21(*). Bases qui lui ont conférées une assise non négligeable. Ainsi résolue à promouvoir la démocratie sur l'ensemble du continent africain et de la faire respecter, l'Union Africaine oriente ses Etats membres vers le respect des normes internationales tels que la résolution des conflits par la voix pacifique22(*), le respect des droits de l'homme etc.... De sorte que, s'inscrivant dans la veine de globalisation de la démocratie, elle va tenter de faire de la démocratie un acquis sur le continent africain à l'instar des autres organisations internationales, qui constituent une source d'inspiration pour elle. Ainsi, des organisations telles que l'Union Européenne, l'Organisation des Nations Unies, le Conseil de l'Europe, l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, l'organisation des Etats Américains lui serviront d'exemple. L'ONU étant l'O.I. universelle par excellence va promouvoir la démocratie et inviter ses Etats membres à y adhérer. De sorte que, l'U.A. doit s'aligner sur les principes défendus par l'O.N.U, de par la suprématie de ladite O.I. De facto, l'U.A. devient l'ambassadeur de la démocratie sur le plan sous régional. Elle promeut donc la démocratie à l'instar de cette O.I. Cependant, elle ne se contente pas de la diffuser, mais la présente comme une norme obligatoire23(*). La démocratie devient alors un principe fondamental, c'est-à-dire un droit (mieux un devoir) accordé à tous les Etats parties de l'U.A. La démocratie est donc érigée en norme fondamentale et ceci à travers un cadre normatif novateur (CHAPITRE I). De fait, elle ne va pas seulement se contenter d'édicter des règles, mais tenter d'établir et même de rétablir la démocratie à travers des actes concrets, actes qui vont constituer pour elle, un acquis démocratique (CHAPITRE II). CHAPITRE I : L'APPORT NORMATIFL'avènement de l'Union Africaine, constitue en soi un événement majeur dans la vie institutionnelle du continent africain. Ainsi de par son fait, de nombreux changements vont s'opérer dans la vie du continent. L'un de ses nombreux changements s'instaure dans le cadre de la démocratie. En effet, l'UA, remplaçante de l'OUA, affiche ouvertement dans son Acte constitutif 24(*) sa préférence pour un régime démocratique. Si sa préférence pour le régime démocratique n'a rien de particulier en soi, dans la mesure où l'OUA qui l'a précédée avait une préférence identique, l'UA émet une particularité. En effet, l'UA ne se contenter pas d'adopter le régime démocratique tout en laissant le libre choix à ses membres de choisir la démocratie la mieux adaptée à leurs réalités. Au contraire, elle définit ce qu'elle entend par démocratie. Elle tente, au surplus, de la faire accepter par l'Afrique, toute entière. Ainsi, le du 31 janvier 2007, elle se dote d'une charte dénommée « charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance ». Cette charte élabore un ordonnancement démocratique (SECTION I) commun à l'Afrique toute entière. Cet acte juridique de portée internationale, présente les élections comme la clé de voûte de la démocratie (SECTION II). SECTION I : UN ORDONNANCEMENT DEMOCRATIQUE ELABORELa charte africaine de la démocratie est le fruit de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'Union Africaine (UA) et a été adoptée, lors de son huitième sommet tenu à Addis-Abeba, en Ethiopie, du 29 au 30 janvier 2007. Par cette charte, l'UA a mis en avant les principes qu'elle considère démocratiques (PARAGRAPHE I). Cette charte a aussi le mérite de démontrer l'étroitesse des rapports du lien entre démocratie, Etat de droit et droit de l'homme (PARAGRAPHE II). PARAGRAPHE I : LA MISE EN AVANT DES PRINCIPES DEMOCRATIQUESLes hautes parties contractantes, membres de l'UA, au nombre de cinquante trois(53), lorsqu'elles s'engagèrent dans l'élaboration de la charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, prônaient certains principes. Les principes selon VIRALLY « restent synonymes de règles juridiques abstraites, fournissant les bases d'un régime juridique susceptible de s'appliquer à de multiples situations concrètes, soit pour les réglementer de façon permanente, soit pour résoudre les difficultés qu'elles font naître »25(*) . Pour ce qui est de l'U.A. ceux-ci tiennent lieu de conditions pour qu'un Etat africain puisse être qualifié d'Etat démocratique. Ainsi, on a les principes politiques (A) et les principes juridiques (B). A-LES PRINCIPES POLITIQUESL'Afrique est un continent à règles et à politiques propres. La gestion du pouvoir des pays la composant est fortement imprégnée de la gestion du pouvoir précoloniale. En effet, elle était organisée en tribus, en chefferies. L'apport du colonisateur pour permettre un semblant d' « assainissement » dans l'organisation de ces différents sociétés africaines, qu'il jugeait et comprenait mal, fut déprécié par les colonisés. Ceux-ci réclamèrent donc le départ des colons hors de leurs territoires. Les Africains ayant la gestion politique du continent, se sont transformer, le plus souvent, en véritables oppresseurs voire bourreaux pour leur congénères. Niant, ainsi les principes politiques qui forment l'ossature de la démocratie. Parmi ceux-ci, figurent en bonne position le respect des droits de l'homme. C'est l'homme qu'il faut promouvoir dans toute sa splendeur et sa diversité. L'histoire des droits de l'homme est aussi ancienne que celle du droit, qu'il s'agisse de coutumes non écrites ou de codes gravés dans la pierre. Enracinés dans des convictions religieuses ou philosophiques, souvent obtenues à l'issue de combats politiques ou de luttes sociales, les droits de l'homme, ou « droits de la personne humaine » expriment « la reconnaissance de la dignité inaliénable de la personne humaine ». En tout lieu et en tout temps, ici comme ailleurs, l'homme doit être protégé de toutes formes d'actes de nature à lui faire perdre sa valeur. Malheureusement, les régimes africains ne l'ont jamais compris. En témoigne, le bilan macabre du règne d'Idi Amin DADA 26(*) du 25 janvier 1971 au 11 avril 1979. Son régime, en seulement 8 ans, a fait environ 300 000 morts. Il a laissé un pays en ruines : une inflation de plus de 200%, une dette de 320 millions de dollars, une agriculture abandonnée, des usines fermées et une corruption généralisée. Quant à son homologue tchadien Hissène HABRE, il n'a pas fait mieux que lui. Président de la république du Tchad de 1982 à 1990 à la suite du coup d'État qui renversa Goukouni OUEDDEI, il gouverna en dictateur. Condamné pour crimes contre l'humanité par un tribunal de Ndjamena, il est actuellement réfugié au Sénégal. Hissène HABRE est soupçonné d'être responsable de la mort de près de 40 000 personnes. En bon pédagogue, l'UA s'est sentie obliger de restituer les choses. L'organisation panafricaine ne s'est pas limitée au seul principe du respect des droits de l'homme. Elle a énoncé d'autres principes tout aussi importants auxquels elle croit fermement : · La tenue régulière d'élections transparentes, libres et justes ; · La promotion de l'équilibre entre les hommes et les femmes dans les institutions publiques et privées ; · La participation effective des citoyens aux processus démocratiques et de développement et à la gestion des affaires publiques ; · Le renforcement du pluralisme politique, notamment par la reconnaissance du rôle, des droits et des obligations des partis politiques légalement constitués, y compris les partis politiques d'opposition qui doivent bénéficier d'un statut sous la loi nationale. L'esprit qui soutient ces dispositions de portée politique est la vie en société. Celle-ci doit, selon l'UA, se passer dans un environnement dépourvu de violence, égalitaire et surtout où la loi de la majorité est érigée en valeur inestimable. Révolue alors, l'époque des hommes qui étaient perçus comme des sur-êtres et tirant leur supériorité d'une essence divine. L'homme comme la femme doit être vu à sa juste valeur. Tous sont et demeurent égaux en droit. Mieux, ils doivent être traités équitablement dans tous les aspects de la vie politique et sociale. En outre, L'Union Africaine souhaite rompre avec l'ère infernale des coups d'Etat. C'est pourquoi, figure au nombre des principes la ténue régulière d'élections. Mais elle ne s'est pas arrêtée là. NON. Elle va jusqu'à qualifier les élections. Elle les veut transparentes, libres et justes. A ses yeux, une élection doit présenter sur le continent africain ces trois critères. Enfin, l'UA fait du jeu politique une institution qui se veut civilisée. L'Etat doit donc garantir les droits des partis politiques. Ceux-ci ne doivent en aucun cas voir leurs activités mises à mal sous réserve d'être légalement constitués. La politique n'est donc pas la guerre dans la vision de l'UA. Tels sont les principes politiques que l'Union défend dans sa charte africaine de la démocratie. Mais ceux-ci ne sont pas les seuls car en plus d'eux, elle en défend qui sont cette fois-ci de portée juridique. * 21 La déclaration des chefs d'Etat et de gouvernement de l'O.U.A. de 1990 sur la situation politique et socio-économique en Afrique et les changements fondamentaux intervenus dans le monde ainsi que « la déclaration de Lomé de 2000 sur une réaction de l'O.U.A. face aux changements anticonstitutionnels de gouvernements » jettent les bases d'une reconsidération de la démocratie. * 22 Article 33 de la charte des Nations Unies * 23 Si la charte africaine de la démocratie, des élections et de la bonne gouvernance est ratifiée elle lie tous les Etats ayant ratifiés. Par voie de conséquence la démocratie devient une norme obligatoire. * 24 Art 3.g de l'acte constitutif de l'UA * 25 Michel VIRALLY, "Le rôle des "principes" dans le développement du Droit international", in. Le Droit international en devenir, Essais écrits au fil des ans, Paris, P.U.F., 1990, p. 197. * 26 Idi Amin DADA Oumee ( 17 mai 1924 - 16 août 2003) fut un militaire et chef d'État ougandais au pouvoir entre le 25 janvier 1971 et le 11 avril 1979. Il a laissé l'image d'un dictateur fou, violent, sanguinaire et cannibale. |
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