UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT-LOUIS
UFR DE SCIENCES JURIDIQUE ET POLITIQUE
Section Droit de l'Entreprise
MEMOIRE DE MAITRISE
LES DROITS FONDAMENTAUX
DES DETENUS AU SENEGAL
Sous la direction de
Mady Mary BOUARE
Maître assistant
UFR de Sciences Juridiques et Politiques - UGB
Certificat d'Aptitude à la profession d'Avocat
Présenté par
El-Hadj Badara NDIAYE
Etudiant en 4ème Année
Année universitaire 2003/2004
ABREVIATIONS
RADDHO : Rencontre Africaine pour la Défense
des Droits de l'Homme
RADI : Réseau Africaine pour le
Développement Intégré
PRI : Pénal Réforme
International
ONG : Organisation non Gouvernemental
DAP : Direction de l'Administration
Pénitentiaire
CPP : Code Procédure
Pénale
CP : Code Pénal
ONU : Organisation des Nations-Unies
OUA : Organisation de l'Unité Africaine.
DEDICACES
Je dédie ce modeste travail
à :
Ma Mère, Ndèye Aminata
FALL ;
Mon Père, Saliou NDIAYE ;
Mes Frères et soeurs : Bass, Fatou, Pape,
Malick, Manel, Bouba ;
Tous ceux qui me sont proches de par le
sang ;
Toutes ces merveilleuses personnes qui m'honorent de leur
amitié ;
Tous les camarades de promotion ;
Tous nos camarades qui n'ont pas eu la chance d'arriver
là où nous sommes aujourd'hui, pieuse pensée à
vous !
L'ensemble de la population carcérale du
Sénégal ;
Tous ceux qui luttent pour le respect et la promotion
des droits fondamentaux des détenus.
REMERCIEMENTS
Je rends grâce à ALLAH qui ne cesse de m'accorder
des bienfaits sans la moindre méride de ma part ;
Que la paix et la bénédiction soient sur son
envoyé MOHAMED (PSL)
Je remercie mes Père et Mère de m'avoir
procuré le bonheur de fréquenter les bancs de l'école.
Envers vous ma dette consciente ou non restera toujours très grande.
Je remercie tous les enseignants de l'UFR de Sciences
Juridiques et Politiques de m'avoir arraché des ténèbres
de l'ignorance et fait découvrir les joies et les délices de la
culture juridique. Avec vous, nous avons acquis le sens du jugement et l'esprit
d'organisation. Avec vous aussi, nous avons compris que « c'est mal
payer son « maître » que de vouloir toujours rester
son élève ».
Avec mon éternelle et sincère gratitude au
Professeur Mady Mary BOUARE, tout au long de ces mois consacrés à
la rédaction de ce mémoire, il n'a cessé de
répondre à mes questions les plus diverses, de formuler
d'innombrables suggestions et remarques fort judicieuses. Mais plus que tout,
c'est l'échange continuel d'idées qui changent un travail
solitaire parfois ardu en une source de joies. Je lui suis extrêmement
reconnaissant.
Je remercie enfin, tout le personnel de la Maison
d'arrêt et de correction de Diourbel avec une mention spéciale
à Pape Dial GAYE.
INTRODUCTION GENERALE
La liberté physique de la personne consistant dans le
droit d'aller et de venir sans entrave constitue un droit fondamental de tout
individu dans une société démocratique.
L'apparente simplicité du concept de liberté
physique cache en partie, la difficulté d'en limiter, avec
précision, les contours. On peut, en effet, s'interroger sur le
caractère dual de la liberté physique. Le droit ne
connaît-il que la liberté ou l'absence de liberté, ou
existe-t-il des situations intermédiaires de liberté
atténuée ou restreinte ? Le droit connaît,
néanmoins, une série d'exceptions au principe de la
liberté physique en vertu desquelles l'autorité publique et,
exceptionnellement, les particuliers peuvent priver une personne de sa
liberté. De nombreux textes, en effet, autorisent dans des circonstances
déterminées, des atteintes de cette nature. Il s'agit
tantôt de peines privatives de liberté prononcées par un
juge, de mandats d'arrêt décernés par un juge
d'instruction, de mises à la disposition du gouvernement
ordonnées par l'Exécutif. Tantôt d'arrestations
opérées par les forces de polices, de collocations
prononcées par le Juge de paix ou de détentions
exécutées sur réquisitions de l'office des
étrangers.1(*) Soit,
encore, de la saisie par un particulier d'une personne prise en flagrant crime
ou flagrant délit et sa remise aux agents de la force de
publique.2(*)
Par ailleurs, il importe surtout de préciser le sens
dans lequel on entend employer chacune des expressions utilisées. En
effet, les droits fondamentaux auxquels il est référence ici ont
d'une part des origines juridiques dans lesquelles s'affrontent les partisans
du droit naturel et les partisans - du positivisme. Ils ont d'autre part, des
origines extra-juridiques dans lesquelles le christianisme a joué un
rôle capital, au moins indirectement. Selon un certain nombre de
thèmes contenus dans le message chrétien, il est dit que :
« créer à l'image de Dieu, l'homme doit être
respecté. Quelle que soit sa déchéance apparente,
résultant de sa misère, voire de ses fautes, il reste une
créature divine ».3(*)
D'ailleurs, il n'arrive pratiquement jamais qu'une croyance
inspire immédiatement un système juridique. Dans la
quasi-totalité des cas, son influence dépend de la façon
dont elle est comprise et reçue, c'est-à-dire autant de ses
déformations que de son contenu propre.
Ainsi, les droits fondamentaux sont donc les droits essentiels
et inhérents à la nature humaine, de tout individu. Il en
découle un certain nombre de conséquences : d'abord leur
formulation est logiquement plus solennelle. Ensuite, leur valeur juridique les
situe au sommet de la hiérarchie des normes parce qu'ils concernent un
domaine primordial pour la vie humaine. D'ailleurs, il est désormais
universellement reconnu qu'il n'est pas d'existence humaine sans droit, pour
les détenus comme pour les autres. Il faut ajouter, en gardant une juste
perspective, qu'il convient d'entendre par détenu tout individu
privé de liberté en raison d'une mesure judiciaire de
prévention ou d'une mesure judiciaire de répression.
Le respect des droits fondamentaux des détenus est
très variable selon les époques et les sociétés.
Ils obéissent à une logique d'évolution qui coïncide
avec le processus de formation de l'Etat moderne. En effet, la reconnaissance
de l'Etat de droit a appelé la reconnaissance d'un certain nombre de
droits qui s'attachent à l'homme en tant qu'individu. Cependant, si nous
voulons bien nous détacher d'un vision manichéenne et
idéaliste du droit trop présent entre vrai droit et faux droit,
droit clair et droit flou, droit dur et droit mou, etc..., il suffit tout
simplement de prendre acte des grandes lignes de l'histoire pour
connaître l'état actuel des droits fondamentaux des
détenus. Ces derniers ont longtemps été ceux du plus fort,
c'est-à-dire ceux de l'administration judiciaire. Ils ont longtemps
été peu, voire pas du tout juridictionnalisé, ils
s'agissaient d'un certain nombre de droits de règlement, brutal et sans
appel. Or, aujourd'hui, les droits fondamentaux des détenus sont
partagés et juridictionnalisés. Partagés, car ils ne sont
plus seulement les droits de l'administration sur les détenus, mais
aussi les droits que les détenus peuvent opposer à
l'administration. Juridictionnalisé, car les juridictions,
administratives et judiciaires, sont de plus en plus appelées à
dire l'application juste des textes.
Ainsi, ces droits se transforment pour devenir un ensemble de
« textes faisant loi pour les acteurs concernés et constituant
des ressources d'actions dans leurs rapports
réciproques ».4(*) Pour cela, deux repères paraissent importants.
Il s'agit d'une part, de l'évolution du droit de punir et d'autre part
de l'évolution des peines.
Si à l'origine, les peines avaient un caractère
essentiellement afflictif, il est apparu par la suite que la période de
l'emprisonnement pouvait être mise à profit pour l'amendement du
détenu. Selon les pays et les époques l'une ou l'autre de ces
deux logiques peut prévaloir. Elles n'en demeurent pas moins
indissociables. Par ailleurs, s'agissant de l'évolution du droit, de
punir, il s'avère nécessaire de prendre des repères dans
l'histoire. La veille juridique, c'est aussi connaître les
évolutions du droit comparé et essayer d'en tirer un profil
optimal. Tout d'abord, nous possédons des descriptions
détaillées des méthodes employées par la police
communiste pour le traitement des prisonniers politiques. Ainsi, nous pouvons
donner l'exemple des prisons non officielles dans l'archipel du Goulag dans
l'ancienne URSS où le détenu était questionné
souvent durant des heures durant par des enquêteurs qui font tout ce
qu'ils peuvent pour l'effrayer, le troubler et le dérouter.
Dès l'instant où il est enfermé, la
victime est systématiquement soumise à toutes sortes d'agressions
physiques et psychologiques. Mal nourri, mal traité, ne pouvant dormir
que quelques heures par nuit, le détenu est moins tenu dans un
état croissant d'anxiété, d'attente et
d'appréhension cruelle. Des méthodes, du même genre, encore
que moins radicales ont été utilisées pendant la guerre de
Corée sur des prisonniers militaires. Dans leurs camps chinois, les
jeunes détenus occidentaux étaient soumis à une tension
systématique. Pour les minimes infractions, les coupables étaient
appelés au bureau du comandant, questionnés, rudoyés et
humiliées en public. La scène se répétait à
l'infini, à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, et ce
harcèlement continuel créait chez les détenus une
impression d'affolement et d'anxiété chronique.5(*) Ensuite, au
bénéfice de quelques nuances, nous avons aussi les prisons des
Lao gaï en Chine au temps de Mao et les prisons nazis au temps de Hitler
où les détenus vivaient dans la laideur quotidienne.
Par ailleurs, plus récemment et plus proche de nous,
l'exemple de la République de Guinée au temps de la figure
controversé de Sékou Touré qui fut célèbre
avec les prisons sinistres comme la prison de camayenne, la prison de Alpha
Yaya, la prison camp Boiro (...) plaide dans le même sens.6(*) Partant du principe de la
violation des droits humains dont étaient victimes des détenus de
ces différents pays précités, il s'avère
intéressant d'y établir une passerelle par rapport aux droits
fondamentaux des détenus au Sénégal. Autrement dit de voir
si le Sénégal s'est aligné dans la même logique
répressive ou plutôt dans une logique moralisatrice.
En effet, le droit pénal sénégalais, de
manière générale n'est pas resté indifférent
à toute cette évolution du droit pénal contemporain.
Durant la colonisation, le Sénégal a vécu la rigueur du
droit pénal français en plus de la rigueur qui accompagnait son
application dans les colonies. Cependant, le Sénégal n'a pas
tardé dès son accession à la souveraineté
internationale à édicter des mesures de protection sociale et
législative à l'endroit des détenus. Ainsi, en 1965, trois
codes d'un seul coup furent adoptés : le code pénal, le code
des contraventions et le code de procédure pénale. Il faut dire
que plusieurs modifications et compléments ont été
apportés à ces codes dans le souci de concilier le respect de la
liberté individuelle et les exigences de la répression. Cela
étant, que ce soit en France, au Sénégal ou ailleurs, on
assiste maintenant au développement d'une réglementation qui
impose le respect de la dignité inhérente à toute personne
humaine. Cette nouvelle réglementation découle des
premières tentatives d'humanisation de la prison qui s'inspire du
principe que « dans le pire assassin, une chose, au moins est
à respecter quand on punit son humanité. L'homme est
objecté à la barbarie des supplices, mais comme limite de
droit : frontière légitime du pouvoir de
punir ».7(*)
Ainsi, la vie carcérale correspond à un ensemble d'obligations,
de droits, de possibilités et d'interdits concernant les détenus
et faisant l'objet d'une réglementation particulière. Au moins,
s'agira-t-il ici des principales règles, car l'une des
caractéristiques de la vie carcérale est d'échapper
à la fantaisie, à l'imprévu et à l'initiative par
une réglementation minutieuse du temps et de l'agir. En retour, les
détenus bénéficient d'une sécurité
juridique : des limites sont fixées, une
prévisibilité est possible. Bien entendu, toutes ces
données juridiques demandent à être replacées dans
leur cadre général. En effet, le Sénégal, pays
où le renforcement des droits de l'homme est une priorité commune
à tous les niveaux, n'a pas tardé dès son accession
à la souveraineté internationale à édicter des
mesures de protection sociale et législative à l'endroit des
détenus. La consécration de ces droits trouve leur fondement,
tout d'abord, dans les instruments juridiques nationaux. Mais le passé
colonial a fait que ces instruments juridiques nationaux sont organisés
suivant l'architecture défini par le métropole. En d'autres
termes, la structure du système juridique obéit à une
sorte de mimétisme juridique et, cela est un facteur important dans la
méthodologie de l'étude de ces droits. Ainsi, les codes
napoléonniens ont beaucoup influencer le système juridique
sénégalais comme en attestent les lois de 1965 portant
respectivement code pénal, code de procédure pénale et
code des contraventions.
En dehors des codes, la Constitution contient des dispositions
garantissant les droits fondamentaux de tout individu. C'est elle qui parle de
l'inviolabilité de la personne humaine et de sa sacralité8(*), c'est elle qui parle aussi de
l'interdiction de toutes formes de détentions arbitraires.9(*) Mais, à ces principales
dispositions, s'ajoutent l'ensemble des décrets, arrêtés et
textes réglementaires qui régissent les établissements
pénitentiaires.10(*)
Par ailleurs, d'autres mentions relatives aux droits des
détenus figurent dans le droit international et sont très
générales. Elles obligent à avoir recours à des
instruments juridiques internationaux pour définir et interpréter
les droits de l'homme et de la citoyenneté de 1789, de la
déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre
1948. Deux traités servent à transformer la déclaration
universelle des droits de l'homme en une loi internationale que les Etats
signataires sont tenus de respecter : le Pacte international relatif au
droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels. Les mentions relatives aux droits
fondamentaux des détenus figurent aussi dans la Charte africaine des
droits de l'homme et des peuples. Par ailleurs, il y a aussi des instruments
internationaux plus spécifiques. Tel est le cas de l'ensemble des
principes pour la protection de toutes personnes soumises à une forme
quelconque de détention ou d'un emprisonnement,11(*) de l'ensemble des
règles minima pour le traitement des détenus12(*), de l'ensemble des
règles minima pour l'élaboration des mesures non privatives de
libertés13(*) et de
la Convention contre la torture et aux peines ou traitements cruels et
dégradants.14(*)
Il y a aussi les normes internationales spécifiques aux
mineurs et aux femmes, c'est-à-dire la Convention relative aux droits de
l'enfant, l'ensemble des règles des Nations-Unies concernant
l'administration de la justice pour les mineurs dites règles de Beijing,
les principes directeurs des Nations-Unies pour la prévention de la
délinquance juvénile dits principes de Riyad. Il y a enfin, les
normes spécifiques régissant les établissements
pénitentiaires.
Ces divers instruments déterminent l'étendue de
la protection des détenus par la loi. Ce qui s'avère
particulièrement important dans le cas d'une personne privée de
sa liberté. Cette protection est aussi bien valable pour les personnes
mises en examen que les personnes incarcérées. Les personnes
mises en examen constituent la catégorie des détenus qui n'ont
pas encore été jugés. Il peut s'agir des gardés
à vue ou des détenus provisoires. Toutefois, ils
bénéficient des même droits que les détenus
définitivement incarcérées voire même d'une plus
grande protection en raison de la présomption d'innocence dont ils
jouissent.
Cette protection est aussi valable pour les détenus
vulnérables qui auraient besoin d'une prise en charge
particulière. En tant que tels, ce sont les mineurs, les femmes et les
déficients mentaux. Enfin, cette protection est aussi étendue aux
détenus politiques qui doivent bénéficier d'un
régime spécial.
La revendication en terme « de droits fondamentaux
des détenus est donc un instrument qui a fait des avancées
considérables au Sénégal pour lutter contre une conception
latente et tenace, selon laquelle le détenu n'a pas des droits mais les
privilèges que l'administration veut bien lui octroyer.15(*) Enjeux majeurs dans un Etat
de droit, mais longtemps passés inaperçu dans les programmes
nationaux de défense des droits de l'homme, les droits fondamentaux des
détenus au Sénégal constituent actuellement un sujet
important et très vaste qui subit un effet de mode.
Mais, ces droits apparaissent parfois assez flous,
peut-être du fait de la polysémie de ces droits, probablement
aussi du fait des multiples registres des droits de l'homme auxquels ils
renvoient. Les droits de l'homme sont cruciaux en matière
d'emprisonnement. La privation de liberté est l'une des pires sanctions
que ce soit et elle doit être réglementée. Les prisons
sénégalaises se révèlent et sont
réputées être des lieux de non-droits. Il est par
conséquent important que les règles nationales, régionales
et internationales ainsi que les directives garantissant les droits de l'homme
aux détenus soient promues et entièrement
protégées. La nécessité s'avèrent de se
prémunir contre les mauvais traitements et les abus de pouvoir. Partant
de ces principes, il s'avère intéressant de voir comment peut-on
réellement apprécier l'étendue de la protection des droits
fondamentaux des détenus au Sénégal ?
En effet, sur le plan juridique, le Sénégal a
fait des avancées considérables dans la protection des droits
fondamentaux des détenus comme en témoignent les mesures
législatives instituant le juge de l'application des peines d'une part,
et l'intervention d'un avocat au moment de l'interrogatoire des suspects au
niveau des postes de police et de la réglementation d'autre part.
A cela s'ajoute le décret n° 98-49 du 17 janvier
1998 modifiant le décret n° 95-315 du 16 mars 1995 portant
répartition des services de l'Etat.16(*) Aux termes de ce décret, la direction de
l'administration pénitentiaire est ramenée au Ministère de
la Justice au moment où la réflexion sur l'exécution de la
sanction pénale entrait dans sa dernière phase.17(*) Ce rattachement marque le
souci de faire de l'exécution des peines la suite nécessaire de
la procédure qui a conduit le Professeur Serigne Diop, gardes des Sceaux
et Ministre de la Justice a affirmé que « depuis
l'indépendance, beaucoup de réformes ont été
engagées et beaucoup de chantiers ont été
ouverts » lors d'une conférence de presse au cours du
mois de janvier 2004 à l'ouverture de l'atelier de partage de
l'étude relative au programme sectoriel de la Justice ». C'est
là le chantier le plus important pour la consolidation des droits des
détenus pour le triomphe de la démocratie et de l'état de
droit.
Certes, le Sénégal a réalisé des
progrès et libéré des initiatives, si on compare à
d'autres pays qui sont dans les mêmes conditions de développement
historiques, mais nettement insuffisants. En effet, des centaines de
détenus vivent toujours dans la laideur quotidienne au
Sénégal. Les mauvais traitements, la torture, les trafics en tous
genre, la corruption des agents de l'administration de la justice, le
dénuement matériel et les médiocres conditions sanitaires
et hygiéniques dans les prisons, l'engorgement carcérale, la
vétusté et le délabrement des établissements
pénitentiaires en nombre insuffisant mais aussi et surtout leur
entretien lacunaire.
Par ailleurs, la durée excessive de la détention
provisoire qui est dans l'ordre de 40%, le mépris d'ordre culturel et
moral vis-à-vis des détenus, l'importance numérique
grandissante des couches vulnérables (femmes et mineurs), le faible
niveau de qualification des personnels pénitentiaires, etc...,
caractérisent généralement les centres de
détentions du pays. De ce fait, faire respecter les droits fondamentaux
des détenus reste un défi considérable,
particulièrement lorsqu'on considère l'impunité dans
laquelle les violations de ces droits se poursuivent au Sénégal.
Il faut ajouter aussi que la protection des droits fondamentaux des
détenus demeure donc inachevée et la durée de la
détention provisoire en matière criminelle n'est pas incluse dans
le Code de procédure pénale. De même l'absence de sanction
contre les tortionnaires dans le Code pénal et la non-intégration
de la torture dans le Code pénal contrairement à la ratification
de la convention contre la torture. L'application erronée des textes et
les maladresses rédactionnelles des textes sont à la base de cet
état de fait. Partant du principe que toutes ces lacunes peuvent
à elles seules profondément modifier le strict respect du
principe de la légalité des peines qui implique aussi la
manière dont elles devront être subies, tout porte à croire
que la protection des droits fondamentaux des détenus au
Sénégal est ineffective.
En somme, l'étendue de la protection des droits
fondamentaux des détenus au Sénégal sera en grande partie
appréciée en fonction du cadre juridique de la protection de ces
derniers, non pas simplement sur le plan théorique mais également
sur le plan pratique. Nous retenons que sur le plan législatif, le
Sénégal a fait des avancées significatives dans
l'élaboration de normes garantissant les droits fondamentaux des
détenus et dans l'intégration de règles fondamentales des
droits de l'homme dans la législation nationale.
Dans cette perspective, il s'avère nécessaire de
définir les contours du cadre juridique de la protection des droits
fondamentaux des détenus au Sénégal (première
partie).
En dépit, des avancées significatives du
Sénégal sur le plan législatif des lacunes sont
notées dans l'application des mesures édictées. Ce qui
nous amène à étudier l'ineffectivité de la
protection des droits fondamentaux des détenus au Sénégal
(deuxième partie).
PREMIERE PARTIE
LE CADRE JURIDIQUE DE LA PROTECTION DES DROITS
FONDAMENTAUX DES DETENUS AU SENEGAL
Les garanties accordées aux droits fondamentaux des
individus ne sont, désormais, étrangères à aucune
culture. Elles appartiennent au terroir de toutes les nations. Elles sont
universelles. On ne peut pas en choisir pour certains et en éliminer
pour d'autres ; qu'ils s'agissent des individus légalement
privés de leur liberté physique ou des autres, ces droits sont
indivisibles et interdépendants. Cependant, ces garanties n'ont
réellement de sens que s'il existe un véritable cadre juridique
qui les entoure.
La notion de cadre juridique renvoie à l'ensemble des
dispositions juridiques dont l'objet est d'assurer la protection des droits
reconnus. Ainsi, la détermination du cadre juridique de la protection
des droits fondamentaux des détenus n'est pas pur problème de
forme. Elle revêt en réalité une double
signification : elle peut être le symbole de la place qu'un certain
nombre d'instruments juridiques veulent accorder aux droits fondamentaux des
détenus ; elle préjuge souvent de la valeur juridique que le
législateur national veut leur conférer. On n'en trouvera
l'illustration tant au VIII siècle, époque à laquelle
commencent à apparaître les grandes déclarations de droits,
qu'à l'époque contemporaine, époque à laquelle leur
intégration dans le droit positif des Etats et en particulier celui du
Sénégal est effective.
Dans cette perspective, pour une partie de la doctrine, la
protection des droits fondamentaux ne s'analyse pas exclusivement par rapport
à leur contenu, mais également par rapport à leur place
dans la hiérarchie des normes. Ainsi, pour le doyen Louis Favoreu, les
droits fondamentaux sont « l'ensemble des droits et
libertés reconnus aux personnes physiques comme aux personnes morales en
vertu de la Constitution, mais aussi les textes internationaux et
protégés tant contre le pouvoir exécutif que le pouvoir
législatif par le Juge constitutionnel et par le Juge
international »18(*). Cette définition est très
limitée dans la mesure où elle exclut d'autres droits
fondamentaux qui peuvent ne pas avoir été consacrés comme
tels dans le droit positif ou par le juge. C'est pourquoi, l'approche
proposée par Etienne Picard correspond mieux au cadre juridique de la
protection des droits fondamentaux.19(*) Selon ce dernier, « les droits
fondamentaux sont des droits assez essentiels pour fonder et déterminer
plus ou moins directement les grandes structures de l'ordre juridique tout
entier en ses catégories ». Il n'exclut pas donc
l'hypothèse d'un droit fondamental non reconnu par le droit positif
interne. Les droits fondamentaux transcenderaient donc la hiérarchie
normative interne. Ce qui signifie qu'ils doivent être
considérées dans leur ensemble et que, pour les protéger,
une approche globale et équilibrée doit être définie
et encouragée par les institutions nationales. Dans ce cas, il
s'avère nécessaire de déterminer les instruments
juridiques applicables au Sénégal en la matière (chapitre
I). D'ailleurs, le renforcement de la protection des droits fondamentaux des
détenus au Sénégal consécutivement à la
réaffirmation sans cesse croissante des normes juridiques y
afférentes semble comme des avancées significatives du
Sénégal sur le plan législatif (chapitre II).
CHAPITRE I - LES INSTRUMENTS JURIDIQUES APPLICABLES AU
SENEGAL
La reconnaissance des droits fondamentaux des détenus
obéit à une logique d'évolution qui coïncide avec le
processus de formation de l'Etat moderne. En effet, la naissance de l'Etat a
appelé la consécration d'un certain nombre de droits essentiels
qui s'attachent aux personnes privées de leur liberté
physique.
L'universalité et la généralité de
ces droits a fait que la communauté a produit des instruments juridiques
d'une haute pertinence tendant à assurer leur promotion et leur
respect.
Cependant, ces invitations n'étant pas susceptibles
d'assurer l'intégration des normes dans le corps des règles
applicables sur le plan interne, il a fallu procéder à un
rééquilibrage au niveau du dispositif national. Ainsi, les divers
instruments juridiques assurant la protection des droits fondamentaux des
détenus au Sénégal découlent d'une capitalisation
d'expériences extérieures et des sécrétions de
l'ordre juridique interne.
Donc les instruments juridiques applicables au
Sénégal, peuvent être scindés en deux
branches : Nous avons d'abord les instruments juridiques internationaux
(section I) ensuite les instruments juridiques internes (section II).
Section I - Les instruments juridiques
internationaux
Une conception élargie des droits de l'homme est la
pierre angulaire de tout ce que le Sénégal tente d'accomplir
depuis son accession à l'indépendance.
Une des premières réalisations fut l'adoption
d'un certain nombre d'instruments juridiques internationaux, de très
grande portée qui ont servi de fondement à tout travail accompli
par la suite dans le domaine de la protection des droits fondamentaux des
détenus et qui ont été intégrés encore plus
profondément sur le plan juridique. Ces instruments juridiques
internationaux représentent le consensus de la communauté
internationale forgé au prix de grands efforts et non de la domination
d'un pays ou de traditions données.
Ils n'imposent pas une norme unique mais cherchent à
promouvoir des normes juridiques communes en matière de respect de la
dignité humaine. Aussi, ils se distinguent en des normes internationales
générales (paragraphe I) et des normes internationales
spécifiques (paragraphe II).
Parag. I - les normes internationales
générales
Les normes internationales générales se
répartissent en deux séries d'instruments qui peuvent être
distinguées suivant leur valeur juridique.20(*) Il s'agit en premier lieu des
déclarations de droits (A) et en second lieu des conventions
internationales (B).
A - Les déclarations de droits
La déclaration de droit se définit comme une
proclamation qui s'attache à la vie. Dans le cadre de notre étude
nous retiendrons deux déclarations qui vont expressément
consacrées par la Constitution sénégalaise du 07 janvier
2001. Ce sont la déclaration des droits de l'homme et du Citoyen du 26
août 1789 et de la déclaration universelle des droits de l'homme
de 1948.
1 - La déclaration des droits de l'homme et
du Citoyen de 1789
La déclaration des droits de l'homme et du citoyen du
26 août 1789 est entrée dans le système juridique
sénégalais par le biais de la Constitution du 7 mars 1963
21(*) et a
été réaffirmé dans la Constitution du 7 janvier
2001 qui dans son préambule affirme l'attachement du peule
sénégalais « aux droits fondamentaux tels qu'ils
sont définis dans la déclaration des droits de l'homme de
1789 ... ».
L'avènement de la démocratie marque une rupture
avec l'ancien ordre en consacrant la liberté comme le premier des
« droits naturels et imprescriptibles de
l'homme »22(*). Cependant l'exercice des droits naturels de chaque
homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la
société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne
peuvent être déterminées que par la loi : elles
correspond au pouvoir de punir. C'est ainsi que l'article 4 dispose que
« les bornes de la liberté ne peuvent être
déterminées que par la loi ».
La loi qui est l'expression de la volonté
générale des membres de toute la communauté
bénéficie d'un même traitement de faveur par rapport
à l'étendue des dispositions dans la déclaration.23(*) Ainsi, la loi est la grille de
référence qui permet de légitimer et de justifier l'action
de l'administration. Ainsi, elle permet d'abord de légitimer la
privatisation de liberté car étant la seule à pouvoir
interdire. En outre, la loi doit contribuer au respect de la
légalité qui est un autre aspect de la question sur laquelle la
déclaration s'est prononcée largement. De ces dispositions nous
pouvons déduire la consécration du principe de la
légalité des délits et des peines qui constitue l'axe
principale dans la protection des droits fondamentaux des détenus.
Cependant, il faut signaler que la déclaration n'a pas
une valeur juridique intrinsèque. En effet, c'est cette
particularité qui distingue les déclarations de droit, des
conventions. Donc, elle a besoin d'une consécration en terme de garantie
de droits qui l'intègre dans un système juridique
déterminé.
En effet, en proclamant l'attachement du peule
sénégalais aux droits fondamentaux tels qu'ils sont
définis dans la déclaration de 1789, le constituant a entendu
donner une valeur positive à ses dispositions.24(*) Ce qui est susceptible
à travers la déclaration universelle des droits de l'homme de
1948.
2 - La déclaration universelle des droits
de l'homme de 1948
Le cadre général des droits fondamentaux des
détenus s'articule autour de la première partie de la
déclaration (article 1 à 21) où les rédacteurs
réaffirment les droits fondamentaux de l'homme. Ainsi, on a
procédé à un redéploiement des droits
attachés à la personne humaine. Parmi ces droits, nous pouvons
relever notamment, les droits attachés aux détenus comme le droit
de ne pas être soumis à l'esclavage, à la torture et aux
arrestations arbitraires ainsi qu'aux droits à un jugement
équitable. De même la légalité devant la loi et la
sûreté ont été réaffirmées.25(*)
L'axe principale pour la protection des droits fondamentaux de
toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention
ou d'emprisonnement est l'article 05 de la DUDH, bien connu,
« Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines
ou à des traitements inhumains, cruels ou
dégradants ». En effet, le terme de
« traitement cruel, inhumain ou dégradant »
peut inclure la situation dans laquelle la personne est emprisonnée est
privée, temporairement ou de façon permanente, de l'usage de l'un
de ses sens (la vue ou l'ouïe par exemple) de la conscience du lieu
où elle se trouve et de la notion du temps. Ce principe est
particulièrement important lorsque l'on traite des questions de
discipline et de châtiment des détenus.26(*)
En outre, la « dignité
humaine » est une notion essentielle en matière de droits
des détenus, un concept invoqué par l'article 1er de
la DUDH, tout aussi célèbre selon lequel « tous les
êtres humains naissent libres et égaux en
dignité ». Les conditions de vie sont un des facteurs
essentiels qui déterminent « l'état d'esprit,
l'estime de soi et la dignité d'un
détenu ».27(*)
Si honorable que soit l'action unie dans la protection des
droits fondamentaux des détenus à travers la Déclaration
universelle des Droits de l'Homme de 1948, il faut signaler que le respect de
ces droits est redevable à plus d'un titre du système juridique
qui l'intègre.
Il faut signaler que la Déclaration se présente
sous la forme de résolutions adoptées par l'Assemblée
générale de l'ONU. Dès lors, elle ne saurait avoir une
force contraignante en elle. Donc, pour que la Déclaration puisse
générer des effets juridiques, elle doit être
intégrée dans le système juridique de l'Etat. Le
Sénégal n'a pas manqué de saisir cette opportunité
car la déclaration est citée dans la préambule de la
Constitution du 07 janvier 2001 au même titre que la déclaration
de 1789. Dès lors, nous pouvons dégager de cet attachement toutes
les conséquences juridiques requises pour l'application des dispositions
de la déclaration au Sénégal. Ainsi, nous pouvons dire que
la déclaration a une valeur positive au Sénégal.
Il faut en conséquence estimer aujourd'hui que
même si les déclarations des droits dans leur ensemble n'ont pas
une valeur juridique, le Sénégal de son côté a
procédé à leur promotion d'une manière telle que
les conséquences juridiques qui en découlent permettent de les
assimiler aux conventions.
B - Les conventions internationales
Ici, il s'agit d'étudier essentiellement les pactes
conclus sous les auspices des Nations-Unies et la Charte Africaine des Droits
de l'Homme et des Peuples.
1 - Les pactes des Nations-Unies
Les pactes conclu sous les auspices de l'organisation des
Nations-Unies sont venus combler l'insuffisance de la Déclaration de
1948 à savoir l'absence de force obligatoire qui affecte ses
dispositions. Ainsi, deux traités servent à transformer la
Déclaration universelle des droits de l'Homme en une loi internationale
que les Etats signataires sont tenus de respecter : le pacte international
relatif aux droits civils et politiques et le pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels.28(*)
Les préambules et les articles 1, 2, 3 et 5 de ces deux
pactes sont quasiment identiques. Les deux préambules proclament que les
droits de l'homme proviennent de la dignité inhérente aux
êtres humains. L'article 5 des deux pactes reprend la disposition finale
de la Déclaration universelle, en formulant des garanties visant
à empêcher toute destruction ou restriction illégitime des
libertés et droits fondamentaux.
Le pacte international relatif au droits civils et politiques
posent un certain nombre de droits qui tendent à assurer une meilleure
protection des droits des détenus. Ainsi, le droit à la
légalité et à la non discrimination a été
rappelé dans l'article 2 alors que l'article 10 dispose que
« toute personne privée de sa liberté doit
être traitée avec humanité avec le respect de la
dignité inhérente à la personne humaine ».
Certaines dispositions du pacte relatif aux droits civils et politiques sont
développés plus en détail dans leurs protocoles
facultatifs, dont l'un permet à tout individu de porter plainte et
l'autre en faveur de l'abolition de la peine de mort.
Cependant, il faut signaler que ses droits si
nécessaires que soit leur reconnaissance et leur respect ne sont pas
capables à eux seules d'assurer aux détenus un cadre
adéquat pour le développement de leur personnalité. C'est
pourquoi un autre pacte qui va dans le sens des droits économiques,
sociaux et culturels a été conclu. Ce pacte consacre ainsi le
droit à un niveau de vie suffisant, le droit à une nourriture,
aux vêtements et au logement.
Il faut signaler cependant que ces droits ainsi
envisagés sont difficiles à respecter surtout dans les pays
où le développement économique est restreint comme le
Sénégal. Mais toujours, est-il, qu'il demeure des
prérogatives qui sont exigibles de l'Etat qui ne doit ménager
aucun effort pour leur effectivité.29(*) Ainsi, l'Etat est appelé à mettre sur
pied l'infrastructure nécessaire à la réalisation du
respect de ces droits et le niveau de l'engagement de l'Etat est à la
mesure de la portée de ces pactes.
Les pactes étant des accords conclus par les sujets du
droit international leur valeur juridique découle du niveau d'engagement
de l'Etat. Ainsi, ces pactes entrent dans le système par voie de la
ratification ou de l'adhésion qui emporte le consentement à
être lié de l'Etat qui l'émet. Ces pactes ont une valeur
positive au Sénégal. Cela signifie qu'ils sont
générateurs d'obligations juridiques exigibles de l'Etat
sénégalais. Nous pouvons même dire qu'ils ont une valeur
supra-législative car suivant l'article 98 de la constitution du 07
janvier 2001 « les traités ou accords
régulièrement ratifiés ou approuvés ont dès
leur publication une autorité supérieure à celle des lois,
sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par
l'autre membre ».
C'est suivant ce schéma que fonctionne le
système de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.
2 - La Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples
La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
préparée pendant vingt ans, est adoptée finalement
à l'unanimité par la conférence des Chef d'Etat et de
gouvernement réunie à Naïrobi le 28 juin 1981. Elle est
entrée en vigueur le 21 octobre 1986. Elle proclame le
« caractère inviolable de l'être humain, le droit
à la dignité humaine ».
Les droits de l'homme sont cruciaux en matière
d'emprisonnement. La privatisation de liberté est l'une des pires
sanctions que ce soit et elle doit être réglementée. La
Charte africaine des droits de l'homme et des peuples prescrit ainsi des droits
fondamentaux inhérents à la personne humaine auxquels il ne peut
être apporté de dérogation, quelles que soient les
circonstances de temps et de lieu. C'est dire que les circonstances qui
généralement constituent des faits justificatifs avec atteintes
aux droits de l'homme n'influencent pas l'obligation de les respecter. Donc, ni
le sous-développement ni les difficultés politiques et
économiques ne peuvent justifier leur violation.30(*)
Dans le même ordre d'idée, il faut noter que
même si la charte africaine des droits de l'homme et des peuples n'est
pas inscrite dans la constitution sénégalaise au même titre
que la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et la
déclaration universelle de 1948, il n'en demeure pas moins qu'elle a une
valeur positive au Sénégal. Ces dispositions sont obligatoires au
Sénégal en vertu de l'article 98 de la Constitution du
Sénégal qui farde leur ratification. Nous pouvons dire aussi que
la charte s'intègre parfaitement dans le bloc de
constitutionnalité.31(*)
Outre ces instruments qui ont un caractère
général, il existe d'autres instruments spécifiques eu
égard à leurs objets.
Parag. II - Les normes internationales
spécifiques
Les mentions relatives aux droits fondamentaux des
détenus figurent dans le droit international et sont très
générales. Elles obligent à avoir recours à des
instruments plus spécifiques pour définir et interpréter
les droits qu'ils contiennent.
Sous les applications de normes internationales
spécifiques on vise essentiellement les normes internationales
spécifiques au traitement des détenus (A, ainsi que les normes
internationales spécifiques aux détenus vulnérables
(B).
A - Les normes internationales spécifiques au
traitement des détenus
Il s'agit entre autres de la Convention contre la torture et
autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de
l'ensemble des règles minima pour le traitement des détenus.
1 - La Convention contre la
torture
La convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984
considère la torture comme un supplice constitutif d'une violation des
droits de l'homme.
L'article 1er de la convention la définit en
ces termes : « aux fins de la présente convention, le
terme torture désigne tout acte par lequel une douleur ou des
souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement
infligés à une personne ... par des agents de la fonction
publique ou à leur instigation, aux fins notamment d'obtenir d'elle ou
d'un tiers des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle a
commis ou qu'elle est soupçonnée d'avoir commis ou de l'intimider
ou d'intimider d'autres personnes. Ce terme ne s'étend pas à la
douleur ou aux souffrances résultant uniquement des sanctions ou
occasionnées par elles ». La torture constitue une forme
aggravée et délibérée de peines ou de traitements.
Mais le paragraphe 2 de cet article prévoit que cette définition
ne porte pas atteinte à la définition que contiendrait un
instrument international ou une loi nationale et dont la portée serait
plus large. Les Etats parties conformément de l'article 2 doivent
prendre les dispositions nécessaires pour qu'un acte de torture ne se
produise pas sur le territoire national relevant de leur autorité.
La torture ne peut en aucun cas être justifiée
par les circonstances, s'agirait-il d'instabilité intérieure ou
de tout autre état d'exception. L'interdiction des traitements cruels
inhumains ou dégradants tend à préserver la dignité
humaine. Il faut éviter que la thérapeutique criminelle
poussé à l'extrême et sans discernement suffisant, ne
risque d'attenter à la dignité ou l'intégrité de la
personne humaine.32(*)
L'incorporation de la convention contre la torture dans le
système juridique du Sénégal qui a ratifié cet
instrument témoigne de son niveau d'engagement notoire dans
l'émergence d'une culture des droits humains.
Considérant, par ailleurs que, priver le détenu
de la satisfaction de ses droits et besoins fondamentaux, c'est
l'empêcher d'être humain à part entière et que, par
conséquent, la satisfaction de besoins de l'homme (éducation,
liberté, alimentation, santé, loisir) est une chose à
laquelle chaque humain est moralement et juridiquement en droit de
prétendre. Partant de ce principe, les Nations-Unies ont adopté
un ensemble de règles mimima pour le traitement des détenus qui
constitue un élément de base pour le respect des détenus
et de leur condition.33(*)
2 - L'ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus
Ces règles aident à donner corps aux instruments
internationaux sur les droits de l'homme bien qu'elles ne constituent pas un
traité international. Ces règles ont été
approuvés par l'ONU en juillet 1957 et une dernière a
été ajoutée en 1977 pour étendre leur application.
Ce sont plus des directives que des droits au sens strict du terme, un recueil
de bonnes pratiques et de bons principes pour le traitement des personnes
détenues et de la détermination des seuils minimaux. En
dépit de leur flexibilité, elles ont une force normative. Depuis
leur adoption en 1955, ces règles ont été
homologuées directement ou indirectement par d'autres instruments
internationaux et régionaux. La reconnaissance dont elles ont
bénéficié est une indication importante de ce qu'elles ne
peuvent pas être ignorées dans l'administration
pénitentiaire moderne.
Dans les principes directeurs pour le traitement des
prisonniers adoptés en 1990, l'assemblée générale
des Nations-Unies a formellement reconnu que « les règles
minima pour le traitement des détenus ont une grande valeur et influence
dans le développement de la politique et de la pratique
pénale ».34(*)
La reconnaissance dont ont bénéficié les
règles signifie qu'elles ont acquis un statut unique parmi les
instruments de justice criminelle internationale. La règle 1 explique
clairement que les règles n'ont pas pour objet de décrire en
détail un système pénitentiaire modèle. Mais elle
ne reflète que les conditions généralement admises de ce
qui était adéquat au moment de leur établissement. La
règle 2 note qu'en raison « de la grande
variété de conditions juridiques, sociales, économiques et
géographies que l'on rencontre dans le monde », toutes
les règles ne peuvent pas être appliquées
« en tout temps et en tout lieu ». La règle
6 insiste sur l'impartialité des règles qui doivent être
appliquées sans restrictions ni préjugé notamment, de
race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion, d'origine.
Les principes fondamentaux recommandent que les prisons
doivent être des « communautés biens
organisées sans risque pour la vie, la santé ou
l'intégrité physique des personnes
détenues » car les conditions de détention ne
doivent pas constituer un « châtiment
supplémentaires » pour la privatisation de liberté. De
plus les activités carcérales doivent aider les détenus
à se réinsérer et les conditions de détention
doivent respecter la dignité humaine et les normes acceptables pour la
société.
Les règles minima fournissent des directives
détaillées en matière de normes de logement35(*), d'hygiène36(*), d'habillement37(*), d'alimentation38(*), d'exercice physique39(*), de services
médicaux40(*), de
discipline41(*),
châtiment et des moyens de contraintes42(*). Les règles se penchent aussi sur al
séparation des détenus43(*).
Il faut signaler que ces règles ont été
intégrées dans le dispositif pénal
sénégalais. Mieux encore, elles ont une valeur législative
en ce sens qu'elles sont intégrées dans le code de
procédure pénale en annexe III intitulé :
« Le Régine des établissements pénitentiaires et
les conditions de détention. Ce qui constitue un soubassement de
l'administration pénitentiaire et détermine en même temps
son fonctionnement.
Par ailleurs, la réflexion menée au niveau
international sur la peine et plus spécifiquement sur la privation de
liberté a émergé la nécessité de prendre en
compte la personnalité du détenu. C'est ce qui fait qu'un certain
nombre d'instruments internationaux spécifiques aux détenus
vulnérables, aient été mis en oeuvre.
B - Les normes internationales spécifiques aux
détenus vulnérables.
Face à la violation des droits fondamentaux des
détenus vulnérables, qui sont nombreux à revendiquer une
plus grande protection, les instruments internationaux y ont accordé
autant d'intérêt, sino même plus, que les autres
catégories de détenus. Cependant, les énormes
différences de situations parmi les détenus vulnérables
compliquent souvent le problème. Mais cela n'a pas empêché
aux Nations-Unies de promouvoir, par diverses activités, des normes
spécifiques aux droits fondamentaux des mineurs et des femmes
détenus.
1 - Les normes internationales spécifiques
aux mineurs
Les normes internationales spécifiques aux mineurs
s'incarnent à travers la Convention relative aux droits de l'enfant, de
l'ensemble des règles des Nations-Unies concernant l'administration de
la justice pour les mineurs dites règles de Beïjing et des
principes directeurs des Nations-Unies pour la prévention de la
délinquance dits principes de Riyad.
L'objectif de la convention des droits de l'enfant44(*) est ici, de réserver au
mineur un traitement de nature à favoriser son « sens de la
dignité et de la valeur personnelle qui renforce son respect pour les
droits de l'homme et des libertés fondamentales d'autrui ».
L'ensemble des règles des Nations-Unies concernant
l'administration de la justice pour les mineurs définit des normes
universelles, auxquelles chaque pays devrait adapter ses lois dans le contexte
culturel qui lui est propre. Mieux encore, elles établissent un
régime minimum, avec des dispositions relatives aux soins, à
l'orientation, à la surveillance, au placement en famille, aux
programmes d'éducation générales et professionnelle, aux
solutions autres qu'institutionnelles pour assurer aux enfants détenus
un traitement conforme à leur bien-être et adapté à
la situation et à la nature de l'infraction commise.
Les principes des Nations-Unies pour la prévention de
la délinquance juvénile engagent les Etats à mettre en
place des politiques de prévention incitant les jeunes à
s'adonner à des « activités licites, utiles
à la société » dans la mesure où une
« perspective humaniste guidera ces politiques, les jeunes
pourront acquérir et développer une mentalité non
criminogène ».
Qu'en est-il des normes internationales spécifiques aux
femmes ?
2 - Les normes internationales spécifiques
aux femmes
De manière générale, les normes
internationales spécifiques aux femmes détenues invoquent la
séparation des quartiers de détention, les installations
spéciales nécessaires pour le traitement des femmes enceintes,
les femmes relevant de couches ou convalescentes, etc ...
Ainsi, les différentes réglementations
pénitentiaires sénégalaises relatives aux femmes
détenues ont intégré ces normes dans le droit positif
national. Elles s'inspirent, par ailleurs, des conventions internationales et
de « l'évolution sociale » dans la définition
des régimes de détention relatifs aux femmes, des modes
d'administration et de gestion des établissements pénitentiaires
pour les femmes mais aussi des droits et du travail pénitentiaire
relatifs aux femmes détenues.
Le constat qui se dégage de ces instruments
internationaux. C'est qu'ils visent la protection des détenus dans toute
leur dimension. Dans ce contexte international, les Etats ont le pouvoir
souverain d'adapter les droits fondamentaux des détenus à leur
situation nationale dans la mesure où ils n'enfreignent pas les normes
établies par les traités internationaux sur la protection des
droits fondamentaux des détenus.
Section II - Les instruments juridiques internes
Sous les applications d'instruments juridiques internes, on
vise essentiellement l'ensemble des normes législatives et
réglementaires dont l'objet est d'assurer la garantie des droits
reconnus.
Il est admis à l'échelle internationale que la
protection et la promotion des droits fondamentaux des détenus
relèvent avant tout de la responsabilité des Etats. Cela est tout
à fait logique car c'est lorsqu'ils s'enracinent dans l'environnement
juridique locale que ces droits sont le mieux protégés.
Cependant, cette protection juridique interne n'a réellement de sens que
s'il existe des instruments juridiques internes qui l'entourent. A cet effet,
le Sénégal a libéré des initiatives en
élaborant des instruments juridiques régissant les
établissements pénitentiaires (parag. I) et en adoptant des
textes garantissant les droits des détenus (parag. II).
Parag. I - Les instruments juridiques régissant les
établissements pénitentiaires au Sénégal
Au Sénégal, les établissements
pénitentiaires relèvent de l'Administration pénitentiaire
qui est placée sous la tutelle du Ministère de la Justice. Mais
il faut rappeler qu'à la veille de l'indépendance, la structure
chargée de la gestion des prisons dépendait de la direction des
Affaires politiques et Administratives du ministère de
l'Intérieur. Le décret n° 62-209 du 28 décembre 1962
l'en détachera pour la rattacher au Ministère de la Justice comme
le cas en France depuis 1945. Mais suite aux événements
politiques de 1963 au cours desquels le Président du Conseil de
l'époque, Mamadou Dia et ses partisans ont été
arrêtés, elle sera ramenée de nouveau au Ministère
de l'intérieur par le décret n° 63-209 du 28 décembre
1963. Elle sera érigée en Direction nationale en 1971 par le
décret n° 71-877 du 30 juillet 1971.
Mais avec le décret n° 98-49 du 17 janvier 1998
modifiant le décret 95-315 du 16 mars 1995 portant répartition
des services de l'Etat, la direction de l'Administration pénitentiaire
est ramenée désormais au Ministère de la Justice afin de
maintenir sous la même tutelle des services judiciaires et
pénitentiaires. Ce qui nous ramène à y étudier les
normes juridiques relatives d'une part à l'organisation des
établissements pénitentiaires (A) et d'autre part au
fonctionnement des établissements pénitentiaires (B).
A - Les normes juridiques relatives à
l'organisation des établissements pénitentiaires
L'organisation des établissements pénitentiaires
est régie par le décret n° 66-1081 du 31 décembre
1966 modifié et complété par le décrets
n°68-583 du 28 mai 1968 et n° 86-1466 du 28 novembre 1986. Ces
décrets organisent les catégories d'établissements
pénitentiaires au Sénégal ainsi que la répartition
des détenus entre les établissements pénitentiaires au
Sénégal.
1 - Les catégories d'établissements
pénitentiaires au Sénégal
Les établissements pénitentiaires sont
gérés au Sénégal par la direction de
l'Administration pénitentiaire (DAP) qui est l'une des directions du
Ministère de la Justice.
Il existe au Sénégal quatre catégories de
prisons dont la création, le regroupement, la suppression et le lieu
d'implantation sont soumis à la promulgation de décrets. Selon
l'article premier du décret portant organisation des
établissements : « les établissements
pénitentiaires sont crées, regroupés, supprimés par
des décrets. Ces décrets fixent ou modifient leur lieu
d'implantation ». Les catégories d'établissements
pénitentiaires au Sénégal sont :
· les maisons d'arrêt régies par le
décret n° 86-1466 du 28 novembre 1966. Elles reçoivent les
condamnés à l'emprisonnement de police45(*) et à la contrainte par
corps46(*).
· Les maisons de correction régies par le
décret n° 84-145 du 08 février 1984. Elles reçoivent
les autres condamnés à l'emprisonnement correctionnel47(*), auxquels il reste à
subir une peine inférieure à un an.
· Les maisons d'arrêt et de correction sont
implantées dans les régionales et les chefs lieux de
département. Elles reçoivent les condamnés à
l'emprisonnement auxquels il reste à subir une peine de quinze jours
à une année.
· Les camps pénaux sont régis par le
décret n° 66-1466 du 28 novembre 1986. Selon l'article 20 du
décret : « les camps pénaux reçoivent
les condamnés aux travaux forcés, à la détention
criminelle et auxquels il reste à subir une peine d'une durée
supérieure à un an, après le moment où leur
condamnation où la dernière de leur condamnation est devenue
définitive ». Il existe trois camps pénaux au
Sénégal : Dakar liberté IV, de Kédougou, et de
Koutal.
Dans l'ensemble, les lieux de détention au
Sénégal sont estimés en volume à 3503, 1 m3 et en
surface à 10 562,m². Tous ces établissements sont
regroupés au sein de régions pénitentiaires au nombre de
onze (11) au Sénégal et la répartition des détenus
s'effectue à travers une réglementation intégrant les
normes internationales de détention.
2 - La répartition des détenus entre
établissements
En application du principe d'individualisation, la
répartition des condamnés dans les prisons établies pour
peines s'effectue compte tenu de leur catégorie pénale, de leur
âge, de leur état de santé, de leur personnalité et
de leur sexe.
En application à ce même principe, les maisons
d'arrêt qui recouvrent les détenus provisoires doivent
établir des quartiers distincts avec les détenus
déjà condamnés.
La législation pénale sénégalaise
a procédé à ces normes d'affectation afin de
préserver le sens de la dignité des détenus et partant de
protéger leurs droits fondamentaux. Ainsi, l'article 11 du décret
n° 86-1466 du 28 novembre 1986 dispose que : « lorsque le
même établissement pénitentiaire sert à la fois de
maison d'arrêt et de maison de correction, une séparation est
établie autant que faire se peut entre :
les inculpés48(*), prévenus49(*), et accusés50(*) ;
les condamnés à l'emprisonnement correctionnel,
auxquels ils restent à subir une peine inférieure à un
an ;
les condamnés à l'emprisonnement de simple
police ;
les individus qui subissent la contrainte par
corps ».
Par ailleurs, dans chaque maison d'arrêt, maison de
correction et camp pénal, des quartiers distincts sont
aménagés pour les femmes et les hommes de telle sorte qu'il ne
puisse y avoir de communication entre eux (article 10 alinéa du
décret). Dans ce même ordre d'idées, l'alinéa 2 de
cet article prévoit la même séparation pour les mineurs
âgés de plus de 13 ans lorsqu'ils sont placées
provisoirement dans une maison d'arrêt. C'est ainsi que la maison
d'arrêt et de correction de Rufisque est réservée aux
femmes, celle de Hann (ex-fort B) aux mineurs et un pavillon spécial de
l'hôpital Aristide le Dantec pour les détenus malades.
La répartition des détenus entre les
établissements pénitentiaires doit aussi s'incorporer dans les
normes établies pour le fonctionnement des établissements
pénitentiaires.
B - Les normes juridiques relatives au fonctionnement
des établissements pénitentiaires
Ces normes concernent d'une part, le régime
pénitentiaire applicable au Sénégal et d'autre part, le
règlement intérieur des établissements
pénitentiaires au Sénégal.
1 - Les normes relatives au Régime
applicable au Sénégal
Traditionnellement, quatre systèmes
pénitentiaires sont concevables :
· celui de l'emprisonnement en commun par l'effet duquel
les détenus sont toujours ensemble, de nuit comme de jour. C'est un
système financièrement économique mais corrupteur.
· Celui de l'emprisonnement cellulaire51(*), consistant dans l'isolement
complet du détenu de jour comme de nuit, qui présente les
caractères inverses du précédent.
· Celui dit Auburnien ou mixte qui, combinant les deux
précédents, implique l'isolement du détenu matériel
la nuit et moral le jour (loi du silence).
· Enfin, celui dit progressif, souvent appelé
progressif irlandais, qui se caractérise par une libération par
étapes : le condamné passe par différents stades
intermédiaires qui vont du régime cellulaire jusqu'à la
liberté.
Qu'en est-il du droit sénégalais
actuel ?
L'emprisonnement doit être différencié
puisqu'il ne doit pas y avoir la même forme, selon qu'il s'agit d'un
prévenu ou d'un condamné, d'un correctionnaire ou d'un
criminel : maison d'arrêt, maison de correction doivent en principe
correspondre à ces différences. Ainsi, le régime des
établissements pénitentiaires modifié par les
décrets précités 52(*) définit les règles applicables au
Sénégal.
S'agissant de la détention provisoire, dans les maisons
d'arrêt ou par la suite de la distribution des locaux ou leur
encombrement temporaire, le régime de l'emprisonnement individuel ne
peut être appliqué à tous les prévenus, ceux
à l'égard desquels l'autorité judiciaire aura prescrit
l'interdiction de communiquer ou la mise à l'isolement doivent
être placés par priorité en cellule individuelle (article
13).
Dans les maisons d'arrêt et de correction, le
régime applicable est l'isolement complet de jour et de nuit,
c'est-à-dire le régime cellulaire prévu aux articles 688
et 691 du code de procédure pénale.
Deux régimes ont été prévus dans
les camps pénaux : le régime d'isolement partiel (encore
appelé régime auburnien) et le régime progressif. Aux
termes de l'article 691 du code de procédure pénale,
« les condamnés sont soumis dans les camps pénaux
à l'isolement de nuit après avoir subi éventuellement une
période d'observation en cellule ». Mais il peut être
apporté dérogation à ce principe. Quant au régime
progressif, il est cité à l'article 21 du code de
procédure pénale.
Le traitement d'exception concerne les malades mentaux, les
lépreux et les prisonniers dont l'état de santé ne permet
pas d'être soignés en prison. Ces derniers sont détenus au
pavillon spécial de l'hôpital Aristide le Dantec tandis que les
lépreux sont dirigés vers Koutal ou le camp Manuel à
Dakar.
Ces régimes sont donc équilibrés et fort
différenciés. Toutefois leur application pourrait poser
problème. De ce fait pour renforcer la protection des détenus, il
revient au règlement intérieur des prisons de déterminer
les détails et les conditions d'admission à chaque phase.
2 - Les normes relatives au règlement
intérieur des établissements pénitentiaires au
Sénégal
C'est l'arrêté ministériel n° 7117 du
21 mai 1989 qui organise le règlement intérieur des
établissements pénitentiaires. Aux termes de l'article premier de
cet arrêté, « le présent arrêté fixe
les dispositions générales applicables aux détenus et au
personnel de l'Administration pénitentiaire particulièrement en
ce qui concerne la discipline, les mesures d'ordre, les détails de
service en vigueur dans les établissements
pénitentiaires ». De là, découle une
série de dispositions préventives.
L'Administration pénitentiaire doit assurer la
détention du condamné et éviter son évasion. Elle
doit aussi assurer le bon ordre dans les établissements
pénitentiaires. A cet effet, l'ordre et la discipline constituent un
préalable important et doivent être, aux termes du
règlement intérieur, maintenus avec fermeté. Outre cette
discipline, la vie pénitentiaire revêt une place primordiale dans
le règlement intérieur.53(*) En effet, le règlement intérieur
s'intéresse d'une part à l'amendement c'est-à-dire
l'amélioration morale du coupable, et d'autre par le reclassement social
du libéré afin de faire rentrer dans la vie libre dont la peine
l'avait exclu.
Ces objectifs définis dans le règlement
intérieur découlent d'un certain nombre de textes garantissant
les droits fondamentaux des détenus au Sénégal.
Parag. II - Les textes garantissant les droits fondamentaux
des détenus au Sénégal
Il est admis à l'échelle internationale que la
promotion et la protection des droits fondamentaux des détenus
relèvent avant tout à la responsabilité des Etats membres.
Le Sénégal s'attache à cette conception et définit
dans ses textes fondamentaux les moyens d'assurer la protection de l'individu.
C'est ce qui traduit aussi bien à travers les normes juridiques
constitutionnelles (A) qu'à travers la législation pénale
nationale (B).
A - Les normes juridiques constitutionnelles
Le Sénégal, à l'instar des autres Etats
contemporains, a procédé à une constitutionnalisation des
droits fondamentaux des détenus depuis son accession à
l'indépendance en 1960. Ainsi, le Sénégal dans sa
constitution en date du 07 mars 1963 y proclamait son attachement aux
déclarations de 1759 et de 1948 et son adhésion aux
préambules des constitutions françaises de 1946 et 1958. Ceci
à travers d'une part le préambule et d'autre par le corpus de
règles constitutionnelles.
1 - Le préambule de la
Constitution
Le préambule de la Constitution est la partie
introductive de la Constitution qui détermine « les
valeurs et principes que contiennent la doctrine officielle du
régime ». Dès lors, il a fixé un certain
nombre de règles garantissant le respect des droits fondamentaux de tout
individu. En effet, après avoir rappelé un certain nombre de
principe (souveraineté, état de droit), le préambule a
proclamé le respect et la garantie des droits qu'il ne réglemente
pas pour autant. Ainsi, il affirme l'adhésion du Sénégal
aux traités internationaux conclu en matière de défense
des droits de l'homme.
Le préambule définit en quelque sorte des
grandes lignes de la réglementation en matière des droits
fondamentaux, même si nus constatons que ces droits sont posés de
manière générique. Cela constitue une profession de foi du
constituant sénégalais qui montre son attachement aux droits
fondamentaux en les plaçant au seuil de la charte fondamentale.
Cependant, il faut signaler que les dispositions du
préambule sont d'une application délicate. C'est pourquoi le
constituant sénégalais a entendu revenir sur ces droits dans le
corpus constitutionnel.
2 - Le corpus constitutionnel
L'importance qu'attache le constituant
sénégalais sur la protection des droits fondamentaux se justifie
davantage du fait qu'ils sont portés dans les premiers titres de la loi
fondamentale. En effet, il apparaît de la part du constituant
sénégalais, de consacrer certaines dispositions du titre II de la
Constitution aux droits fondamentaux des détenus. Ainsi, aux termes de
l'article 9 du titre II : « Toute atteinte aux
libertés et toute entrave volontaire à l'exercice d'une
liberté sont punies par la loi. Nul ne peut être condamné
si ce n'est en vertu d'une loi entrée en vigueur avant l'acte commis. La
défense est un droit absolu dans tous les états et à tous
les degrés de la procédure ». Dans ce même
ordre d'idées, l'article 7 dispose que : « la personne
humaine est sacrée. Elle est inviolable. L'Etat a l'obligation de la
respecter et de la protéger ».
Ces dispositions de la loi fondamentale confère
à l'Etat des obligations de respecter et de protéger la personne
humaine quelle que soit par ailleurs sa situation. Mais la pertinence de ces
dispositions est tributaire de leur portée.
Une belle pratique trouvant son fondement dans
l'évolution politique du Sénégal qui a
procédé ainsi à une constitutionnalisation des droits
fondamentaux des détenus. Par cette méthode, le
Sénégal a entendu plus de poids aux droits qui sont
définis. En effet, du point de vue de la logique juridique, plus la
source d'une disposition est élevée dans l'échelle des
normes juridiques, plus son respect et sa dignité s'imposent aux
gouvernants.
Cependant, il faut signaler que le système n'est pas
allé jusqu'au bout de sa logique car la constitution se réservent
simplement d'en proclamer les droits. Il appartient au législateur d'en
organiser la plupart de ces droits. Les normes juridiques constitutionnelles
sont donc renforcées par les normes juridiques législatives.
B - La législation pénale nationale
Face à la carence du texte constitutionnel qui se
borne tout bonnement à reconnaître les droits fondamentaux des
détenus sans pour autant d'en donner son contenu, le constituant fait
appel à la loi pour définir de manière concrète
leurs conditions d'exercice et leurs limites. Cette marge de manoeuvre ne lui
permet pas, néanmoins de pouvoir édicter des normes contraires
à celles de la loi fondamentale. Donc, la législation
pénale nationale bénéficie d'un fondement solide en tant
qu'instrument juridique interne incontournable dans la protection des droits
fondamentaux des détenus avec un domaine élargi qui comporte
cependant des limites.
1 - Le domaine de la législation
pénale nationale
La loi est votée par l'Assemblée nationale et
constitue l'expression de la volonté générale. Au terme de
l'article 67 de la Constitution du 07 janvier 2001, « la loi fixe
les règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales
accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés
publiques ; les sujétions imposées par la Défense
nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ».
Dès lors, la loi apparaît comme étant le facteur
déterminant du système social. Le domaine de la
législation pénale est élargi puisqu'au delà des
règles, le code de procédure pénale 54(*) et le code pénale
55(*) déterminent
les principes fondamentaux relatifs à la protection des droits
fondamentaux des détenus. La référence à la loi
témoigne d'une volonté du constituant d'accentuer le règne
de la protection de ces droits. Donc, nous pouvons dire de ce fait que
l'Assemblée nationale dispose d'une compétence de droit commun
pour reconnaître et organiser ces droits. La force conférée
à la loi dans l'organisation de ces droits se justifient aisément
car non seulement elle traduit les aspirations de la société,
mais aussi elle est d'un maniement plus simple. Donc si la loi atteint ses
objectifs on ne saurait trouver meilleure protection des droits fondamentaux
des détenus et trouver un système d'équilibrage avec la
gamme des instruments internationaux applicable au Sénégal an la
matière. Cependant, il faut dire que l'omnipotence de la loi
présente des limites.
2 - Les limites de la législation
pénale nationale
Les limites de la loi pénale sont internes au texte qui
lui donne sa valeur juridique. En effet, la constitution en fixant de
manière limitative, les matières législatives
détermine en même temps une limite qui s'analyse comme la mise en
place d'un cadre où toute action législative est
écartée. C'est ce qui légitime l'exercice du pouvoir
réglementaire.
De même, en faisant du juge, le gardien des droits
fondamentaux et des libertés accordés aux citoyens sans
distinction, la constitution limite le pouvoir des parlementaires, en ce sens
qu'elle soumet leur action au contrôle du Juge qui de par le
préambule de la constitution et les principes généraux du
droit peut fixer le contenu de la loi.
Cependant, il faut relativiser cette limite de la
législation pénale par le pouvoir réglementaire et les
pouvoirs du juge. Cela ne ruine en rien le caractère éminemment
exclusif de l'intervention du législateur en matière de droits
fondamentaux des détenus. Car, il faut signaler que l'exercice du
pouvoir exécutif ne saurait s'ériger en principe. En effet,
suivant les principes généraux du droit, le régime des
droits fondamentaux ne saurait faire que l'objet d'une habilitation
législative. Cette incapacité a été
constatée par le conseil d'Etat français dans son avis
consultatif du 06 février 1953, relative au transfert de
compétence en vertu de la loi d'habilitation. La compétence
législative est si attachée aux droits fondamentaux des
détenus que certains théoriciens ont tendance en à faire
une caractéristique de ces derniers.
Ainsi,, la loi se présente comme le relais qui permet
d'équilibrer ces droits en fonction de l'évolution des faits
sociaux.
En tout état de cause, le Sénégal a eu
à ratifier plusieurs textes internationaux relatifs à la
protection des droits fondamentaux des détenus de ces droits. Cette
capitalisation des expériences extérieures en la matière
et leur transposition dans l'ordre juridique interne est notoire au
Sénégal. Cela fait du Sénégal un pays très
avancé dans la protection des droits fondamentaux des détenus sur
le plan législatif.
CHAPITRE II - LES AVANCEES SIGNIFICATIVES DU SENEGAL
SUR LE PLAN LEGISLATIF
La description des instruments juridiques applicables nous
servira de fondement pour préciser les avancées significatives du
Sénégal, sur le plan législatif au cours de ces
dernières années ponctuées de progrès difficiles
mais réguliers, malgré de nombreux défis et de
fréquents revers.
Etant donné que la phase de réception et
d'intégration des normes en matière de législation
internationale des droits fondamentaux des détenus est quasiment
achevée, le Sénégal déploie maintenant ses efforts
juridiques et monopolise ses ressources législatives en vue de faire la
promotion de ces droits.
La législation pénale sénégalaise,
puissante inspiratrice de ce combat, est devenue la base d'un ensemble de
principes en plus cohésif de normes et de lois en matière de
garanties aux droits fondamentaux des détenus. Ce qui est susceptible
à travers deux constats :
- d'une part, l'affirmation législative des garanties
accordées aux détenus (section 1) ;
- d'autre part, la contribution significative du
législateur au renforcement des garanties judiciaires accordées
aux détenus (section 2).
Section I - L'affirmation législative des
garanties accordées aux détenus
La revendication en termes de « droits
fondamentaux des détenus » est un instrument qui a
tardé de prouver son efficacité dans les pays africains en
général et au Sénégal en particulier à cause
d'une conception latente et tenace selon laquelle le détenu n'a pas des
droits mais les privilèges que l'administration veut bien lui octroyer.
Or aujourd'hui, conquise de haute lutte, la protection des droits fondamentaux
des détenus au Sénégal ne cesse d'être
affirmée par la législation pénale
sénégalaise.
Etant donnée que la privation de liberté peut
résulter soit d'une présomption de culpabilité avant
l'intervention d'une décision définitive soit d'une peine
prononcée par un juge à la suite d'un jugement, elle doit
être faite de façon minutieuse et de sorte qu'elle ne
dégénère pas en abus. Le but étant une protection
optimale des justiciables sans pour autant sacrifier celle de la
société physique dans des conditions respectueuses de la
dignité humaine et des droits élémentaires reconnus. Dans
cette perspective, il convient d'analyser les garanties accordées aux
détenus avant jugement (paragraphe 1) et les garanties accordées
aux détenus à la suite d'un jugement (paragraphe 2).
Parag. I - Les garanties accordées aux
détenus avant jugement
Les contrôles et les vérifications
d'identités56(*),
la garde à vue et la détention provisoire sont autant d'atteintes
aux libertés et droits fondamentaux parmi lesquels figure la
liberté d'aller et de venir. Véritable privation de
liberté avant jugement mais justifiées par les
nécessités de l'enquête, la conduite de l'information et
les impératifs de l'ordre public, ces différentes arrestations
sont renfermées dans le code de procédure pénale du
Sénégal dans des strictes limites.
Partant du principe que les vérifications et
contrôles d'identités poursuivent des fins qui ne sont pas
nécessairement répressives, il convient de distinguer ici la
garde à vue et la détention provisoire qui sont plus
contraignantes et reposent sur une présomption de culpabilité.
Mieux, l'une et l'autre supposent qu'il y ait des raisons plausibles (charges
ou indices) de soupçonner que la personne arrêtée ou
détenue a commis une infraction. Cependant, la garde à vue (A)
reste une mesure policière qui exige un contrôle rapide et
effectif tandis que la détention provisoire (B) procède d'une
décision à caractère juridictionnel.
A - Les garanties accordées par la loi aux
gardés à vue
La garde à vue est une institution qui permet à
la police de maintenir à sa disposition, pendant un délai plus ou
moins court des personnes qui ne sont pas encore inculpées et qui ne
font pas non plus l'objet d'un mandat de dépôt ou d'arrêt.
L'individu ne cesse pas pour autant d'être pénalement
irréprochable puisqu'il demeure innocent au regard de la loi.
Malgré cette présomption d'innoncence, la garde à vue
produit des effets psychologiques qui peuvent marquer les individus pour
longtemps. C'est pourquoi, le gardé à vue se voit conférer
par la loi des garanties résultant des exigences temporaires et
matérielles de la détention et des garanties résultant du
contrôle médical et judiciaire.
1 - Les garanties résultant des exigences
temporaires et matérielles
C'est lorsqu'il s'agit de l'exécution proprement de la
garde à vue qu'on peut apprécier comment est traité le
présumé innocent. A cet égard, les délais
adoptés ainsi que les conditions matérielles de la
détention à vue peuvent être révélateurs.
Pour les délais, le législateur
sénégalais les a prévus relativement courts afin de
tempérer les atteintes portées à la liberté
individuelle. L'article premier de la loi n° 99-06 du 29 janvier 1999
modifiant certaines dispositions du code de procédure pénale dont
l'article 55 limite à vingt quatre (24) heures la durée de la
garde à vue et à quarante huit (48) heures « s'il
existe contre la personne des indices graves et concordants de nature à
motiver son inculpation ». Ce délai de quarante-huit heures
n'est renouvelable qu'une seule fois et sur autorisation écrite du
procureur de la République ou du président du Tribunal
régional selon l'alinéa 7 de l'article 55 CPP. Aussi en cas de
prolongation de la détention à vue, l'officier de police
judiciaire doit lui informer des motifs de la prolongation en lui donnant
connaissance des dispositions de l'article 56 CPP. Il lui notifie aussi en cas
de prolongation, son « droit de constituer conseil parmi les
avocats inscrits au tableau ou admis au stage ».
En ce qui concerne les conditions matérielles
d'exécution de la garde à vue, la personne gardée doit
être bien traitée, sa dignité respectée, et elle
doit encore être mise dans des conditions aussi proche que possible de la
normale. Cela suppose que la détention à vue ait lieu dans un
endroit distinct des établissements pénitentiaires. De même
« lorsque la personne gardée à vue est un mineur de
13 à 18 ans, l'officier de police judiciaire doit la retenir dans un
local spécial isolé des détenus majeurs ».
La portée de ces exigences temporaires et matérielles de la
détention à vue est fonction du contrôle médical et
judiciaire qui en résulte.
2 - Les garanties résultant du
contrôle médical et judiciaire
Ce contrôle a pour but de mettre les individus retenus
à l'abri des violences et des sévices policiers. Si le
contrôle judiciaire est considéré somme toute normal, le
contrôle médical quant à lui a suscité
controverses.
La garde à vue est une mesure de rétention
policière dont la mise en oeuvre est placée sous le
contrôle du parquet à tous les stades de la procédure,
l'article 55 CPP dispose dans son alinéa 5 que : « la
mesure de garde à vue s'applique sous le contrôle effectif du
procureur de la République, de son délégué ou le
cas échéant du président du Tribunal départemental
investi des pouvoirs du procureur de la République ».
Il est aussi à rappeler que seuls les officiers de
police judiciaire ont qualité pour décider des mesures de garde
à vue57(*) leur
compétence exclusive dans ce cas constitue une garantie
appréciable pour la liberté individuelle. L'officier de police
judiciaire doit justifier devant le magistrat compétent les dispositions
qu'il a prises comme la loi prévoit l'obligation de motiver cette mesure
très grave.
S'agissant du contrôle médical, l'article 56 CPP
dispose que : « si le procureur de la République ou son
délégué l'estime nécessaire, il peut faire examiner
la personne gardée à vue par un médecin qu'il
désigne, il peut également être saisi aux mêmes fins
et dans les mêmes délais par la personne gardée à
vue sous le couvert de l'officier de police judiciaire par toute personne ou
par son conseil ; dans le cas, il doit ordonner l'examen médical
demandé ». Il ne s'agit donc pas d'une obligation car ce texte
prévoit que l'examen médical est fait à la demande du
procureur de la République ou de l'intéressé. Mais dans
tous les cas, ce contrôle constitue une importante garantie car il
protége indirectement la liberté individuelle et peut dissuader
la police qui risque de voir sa responsabilité engagée en cas de
mauvais traitement.
Ainsi, quand on a à l'esprit l'article 59 CPP qui
dispose que : « lorsque des abus sont constatés de la
part des officiers de police judiciaire, le procureur de la République
ou son délégué en informe le procureur
général qui saisit la chambre d'Accusation »,
quand on a à l'esprit que la victime a subi de tels abus, peut saisir la
chambre d'accusation, quant on a à l'esprit le nombre de
« bavures » policières dans la plupart des pays et
plus particulièrement des pays en voie de développement , on ne
peut que se féliciter de ces contrôles et des garanties qu'ils
apportent au respect des droits fondamentaux des détenus.
Toutes ces garanties concernent aussi dans une certaine
mesure, les détenus provisoires.
B - Les garanties accordées par la loi au
détenus provisoires
La détention provisoire58(*), est l'arrestation préliminaire d'un individu
pour les nécessités de l'instruction. Elle dépasse la
simple suspicion et devient la conséquence légalement
tolérée de la prévention. En réalité
« tout individu est présumé innocent jusqu'à
ce qu'il ait été déclaré coupable ».
La loi du 27 février 1985 marque un pas important vers
la garantie des libertés individuelles. Cette mesure sera
dorénavant « provisoire » et non plus «
préventive », ce qui implique qu'elle sera moins
fréquente et moins prolongée que le passé, et
utilisée dans les cas les plus graves. Cependant, quelles que soient les
raisons qui peuvent être évoquées pour justifier cette
innovation, cette institution qui porte, par ailleurs, atteinte en un sens
à la présomption d'innocence suppose que soient bien connues les
garanties résultant des conditions de la durée et du
régime de la détention provisoire fixées par la loi.
1 - Les garanties relatives aux conditions et
à la durée de la détention provisoire.
La détention provisoire est l'incarcération de
l'inculpé dans un établissement distinct des
établissements où sont détenus des condamnés qui
purgent des peines. En principe, les détenus provisoirement sont
placés dans une maison d'arrêt et le législateur a pris les
précautions de préciser les conditions de cette privatisation de
liberté ainsi que sa durée afin d'en limiter les effets
délétères.
En précisant les conditions relatives aux motifs et aux
autorités compétentes, la législation nationale a voulu
limiter la détention abusives en ne laissant pas aux magistrats une
liberté totale d'appréciation et en ne permettant pas n'importe
qui de prendre une mesure aussi grave.
D'abord, pour les motifs, la loi prévoit que cette
mesure ne doit être ordonnée par le juge d'instruction que
lorsqu'elle se justifie soit par la gravité des faits, soit par la
nécessité d'empêcher la disparition des preuves de
l'infraction. En ce qui concerne les autorités compétentes, il
s'agit essentiellement du juge d'instruction.
Par ailleurs, pour faire de la détention provisoire une
mesure exceptionnelle, le législateur l'a prévue pour que les
infractions d'une certaine gravité et en plus il en limite la
durée. L'article 127 bis CPP crée un délai maximum de six
mois pour garder une personne en détention en matière criminelle,
mais à l'exception des cas où elle est obligatoire ainsi que pour
les infractions prévues aux articles 56 à 100 du code
pénal. Ainsi, la loi accorde aux prévenus en matière
correctionnelle, une garantie temporaire dans la mesure où elle fixe une
durée raisonnable au regard de la gravité des faits
reprochés à la personne mise en examen et de la complexité
des investigations nécessaires à la manifestation de la
vérité. Cette garantie temporaire est doublée d'une
garantie procédurale exceptionnelle qui transparaît dans le
régime de détention qui est conféré aux
prévenus.
2 - Les garanties relatives au régime de la
détention provisoire
Les garanties relatives de la détention provisoire
s'intéressent essentiellement aux modalités d'exécution
de cette détention ainsi qu'aux droits de la défense. Ce
régime, prévoit une séparation des détenus
provisoires59(*) des
individus condamnés, tout en permettant aux premiers d'avoir un
régime carcéral plus doux. Par ailleurs, les détenus
provisoirement ne sont astreints ni au travail 60(*) ni au port du costume pénitentiaire61(*). Ils ont la faculté de
renoncer à la ration journalière allouée par
l'établissement pénitentiaire et de faire venir à leurs
frais leur nourriture du dehors.
En ce qui concerne la contrôle de l'autorité
judiciaire, il constitue une garantie à laquelle le procureur de la
République doit veiller ainsi que les magistrats chargés de
l'instruction. L'action des magistrats est renforcée par l'action de la
commission de contrôle62(*).
Relativement aux droits de la défense, l'article 19 du
décret n° 86-1466 du 28 novembre 1986 prévoit que :
« les prévenus peuvent communiquer librement avec leur
conseil verbalement ou par écrit ... en dehors de la présence
d'un surveillant ». Ainsi, l'exercice des droits de la
défense est plus libérale que celle des gardés à
vue. L'importance du contrôle de l'autorité judiciaire et de
l'exercice des droits de la défense est évident puisqu'ils
permettent de garantir davantage les droits des prévenus.
Reste à savoir si les garanties ainsi offertes aux
détenus provisoires sont ipso facto, transposables aux personnes
déjà condamnées.
Parag. II - Les garanties accordées aux
détenus après jugement
Le dispositif législatif sénégalais
concernant les détenus après jugement est articulé en deux
séries distinctes de régimes : la première concerne
le régime général de détention (A) et la seconde
série les régimes particuliers de détention (B).
A - Les garanties relatives aux régimes
spécial de détention
A la suite des réactions humanitaires contre
l'arbitraire et la rigueur dans l'exécution des peines, l'une des
fonctions essentielles du régime pénitentiaire devient
l'amendement et le reclassement social du délinquant. A travers les
visées de l'Ecole de la Défense Sociale Nouvelle63(*), la fonction d'intimidation
devient secondaire, celle de réadaptation et de réinsertion
essentielle. S'inscrivant dans cette lancée, la législation
pénale sénégalaise a édicté un certain
nombre de garanties pour parvenir à ces fins. Tel est le cas des
garanties relatives aux conditions de vie des détenus mais aussi
à la discipline et au travail pénitentiaire.
1 - Les garanties relatives aux conditions de vie
des détenus
Les conditions de vie dans une prison figurent parmi les
principaux facteurs déterminants pour un détenu, son sens d'amour
propre est de dignité. Le professeur Mireille Delmas-Marty citant
Saleilles fonde la dignité que la peine devrait aider le détenu
à retrouver. « C'est le régime de la peine auquel on le
soumet qui seul peut être efficace pour le développement de
l'idée du bien et de la confiance en soi. C'est par-là que la
vraie dignité va renaître »64(*).
Ainsi, les conditions de vie des détenus doivent
revêtir une dimension matérielle et une dimension psychologique.
L'aspect matériel concerne la santé et la nourriture, l'aspect
psychologique a trait aux contacts avec le monde extérieur et à
la liberté de culte.
La santé des détenus doit être prise en
compte. Elle passe par divers facteurs qui influencent sur son état.
Ainsi, s'agissant du logement, les cellules ou chambres destinées
à l'isolement nocturne ne doivent être occupées 65(*) par un seul détenu. Si
pour des raisons spéciales, telles qu'un encombrement temporaire, il
devient nécessaire pour l'Administration pénitentiaire de faire
des exceptions à cette règle. Les locaux de détention et,
en particulier ceux qui sont destinées au logement des détenus
pendant la nuit, doivent répondre aux exigences d'hygiènes compte
tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, la surface
minimum, l'éclairage, le chauffage et le ventilation.
L'hygiène est l'autre volet de la santé. Aux
termes de l'article 33 de l'arrêté portant règlement
intérieur des établissements pénitentiaires66(*) repris dans l'annexe 3 du code
de procédure pénale : « la
propriété corporelle est exigée de tous les
détenus. Ils doivent faire leur toilette à chaque réveil
et se laver une fois dans la journée ... ». Les
détenus valides ont l'obligation de maintenir leur cellules propres,
l'administration pénitentiaire devant fournir les produits
nécessaires (savons, basins, balais ...).
Ainsi, l'hygiène regroupe à la fois
l'hygiène corporelle et celle des lieux. De même, les
installations sanitaires doivent permettre aux détenus de satisfaire aux
besoins naturelles au moment voulu, d'une manière décente et
propre.
La santé des détenus oblige à les passer
à un examen ou visite médicale pour déceler toute
affection de nature contagieuse et évolutive. A cet effet, l'article 42
de l'arrêté dispose que : « un médecin
généraliste est désigné auprès de chaque
établissement pénitentiaire pour veiller à la santé
physique et mentale des détenus, à défaut un infirmier
major y supplée ». Les détenus malades
bénéficient gratuitement des soins qui leur sont
nécessaires ainsi que de la fourniture de produits pharmaceutiques.
Enfin, la santé des détenus concerne
l'habillement et le couchage. Sur ce plan, les vêtements des
détenus ne doivent pas être dégradants ou humiliants. Les
détenus doivent aussi disposer d'un lit individuel.
L'autre aspect matériel concerne la nourriture des
détenus. Tout détenus doit recevoir de l'Administration
pénitentiaire aux heures usuelles une alimentation de qualité,
bien préparée et bien servie ayant une valeur nutritive
suffisante au maintient de sa santé et de sa forme.67(*) Le régime alimentaire
prévu est digne d'un restaurant diététique.68(*)
La dimension psychologique est tout aussi importante car
devant assurer l'équilibre psychique des détenus.
Le premier volet concerne les contacts avec
l'extérieur. Ces contacts sont maintenus. Les droits de l'homme relatifs
à l'interaction et à la communication ne sont pas abrogés
par l'incarcération.
En outre, si une réintégration est
affirmée par la législation pénale
sénégalais, il est nécessaire de maintenir et même
de renforcer les contacts avec l'extérieur. A ce propos, l'article 74 de
l'arrêté du 12 mai 1987 portant règlement intérieur
des établissements pénitentiaires dispose que :
« les détenus peuvent écrire tous les jours et sans
limitation, à toute personne sous réserve des dispositions
contraires ordonnées par la magistrat saisi du dossier de l'information
ou par le Directeur de l'Administration pénitentiaire s'il s'agit d'un
condamné ». Ainsi, la correspondance comme moyen de maintenir
les contacts est mentionné explicitement. Cependant, les lettres sont
soumises à la censure au départ comme à l'arrivée,
à l'exception de celles à destination ou en provenance des
défenseurs et des assistants sociaux.69(*) Les détenus doivent aussi être tenus
régulièrement au courant des événements les plus
importants. A cet effet, chaque établissement doit avoir une
bibliothèque à l'usage de toutes les catégories de
détenus.
Les visites sont un moyen plus puissant de relations sociales
extérieures. Elles ont lieu, selon l'article 70 du même
arrêté, « les dimanches, mercredis et jours
fériés ». Mais l'article 72 précise
que : « la durée d'une visite est de 15 minutes au
moins. Le parloir dans lequel elle s'effectue est mini d'un dispositif de
séparation. A titre de récompense, la visite peut se faire par
quinzaine dans une pièce dépourvue de dispositif de
séparation. Les détenus malades peuvent recevoir des visites au
lieu de leur hospitalisation ».
Le second volet est relatif à la liberté de
culte. Chaque détenu a la faculté de pratiquer le culte de sa foi
dans la mesure où cette pratique ne perturbe pas l'ordre et la
discipline. Un marabout et un aumônier catholique visitent
régulièrement les prisons. Il est à remarquer qu'un
assistant social est chargé d'assurer le service des
détenus.70(*) Ceci
participe de la dimension psychologique même si cette pratique n'est pas
courante.
Ces principes contenus dans les règles minima de
traitement des détenus, repris par la législation pénale
nationale fait du Sénégal un pays très avancé dans
la protection des droits fondamentaux des détenus sur le plan
législatif. Ce qui apparaît aussi dans le réglementation de
la discipline et du travail pénitentiaire.
2 - Les garanties relatives eu travail et à
la discipline pénitentiaire
Le travail pénitentiaire malgré son
caractère rétributif, parce qu'il est imposé et
réadaptateur, est un dérivatif à l'ennui. Le travail est
la principale activité en prison.
Le décret n°86-1466 du 28 novembre 1986
réglemente le travail dans les établissements
pénitentiaires en définissant les catégories des
détenus qui peuvent en bénéficier et en précisant
les modalités de rémunération, la durée du travail
et ceux qui sont les travaux disponibles dans les prisons, etc. En effet,
l'article 30 stipule que : « seuls les condamnés
à des peines privatives de liberté sont astreints aux travaux
pour des faits qualifiés crimes ou délits de droits commun qui
n'en sont pas dispensés en raison de leur âge, de leur
infirmité ou sur prescription médicale (...). Les
condamnés de police peuvent demander pour l'organisation et la
discipline du travail ». Le travail est donc un droit et tous
les détenus peuvent en demander même ceux qui n'y sont pas
astreints : les détenus politiques, des détenus purgeant des
peines contraventionnelles, les détenus provisoires. Deux formes de
travail sont souvent utilisées dans les prisons : le travail en
concession pour le compte d'un particulier.
En effet, « le travail est défini comme
un agent de la transformation carcérale ».71(*) Le travail n'est ni une
addition, ni un correctif au régime de la détention. Ce n'est
pas, non plus, une activité de production qui est utile car son
rendement est faible au regard de l'article 53 du décret
susmentionné. Il est un principe d'ordre et de régularité,
il véhicule, d'une manière insensible, les formes d'un pouvoir
rigoureux. Le travail pénal est conçu par le législateur
comme étant par lui-même une machinerie qui transforme le
détenu violent, agité et irréfléchi. Avec lui, la
règle et l'ordre s'introduisent dans la prison, ils y règnent
sans effort, sans emploi d'aucun moyen répressif ou violent.
Cependant, en cas de violation des règles d'ordre public de la prison,
des sanctions peuvent êtres prises à l'encontre du détenu
qui serait à l'origine. Mais faudrait-il que ces sanctions soient
mesurés pour respecter la dignité de l'individu.
La discipline est essentielle au maintien de l'ordre en
prison. Aux termes de l'article 2 de l'arrêté ministériel
n° 711 en date du 21 mai 1987 portant règlement intérieur
des établissements pénitentiaires, elle doit être
« maintenue avec fermeté sans apporter plus de restriction
qu'il n'est pas nécessaire pour le maintien de la sécurité
et de la bonne organisation de la vie en
collectivité ».
Par ailleurs, « certains châtiments, les
peines corporelles et toute sanction cruelle, inhumaine ou dégradante
sont strictement interdits ». Mieux, l'article 16 vise à
protéger aussi les droits du détenu en lui permettant
« d'être préalablement informé de
l'infraction relevé contre lui et mis en mesure de présenter ces
explications au Régisseur de l'établissement ou au Directeur
à l'administration pénitentiaire, selon la gravité de la
faute commise et sanction encourue ».
L'article 15 du même arrêté fixe les
sanctions disciplinaires auxquelles le détenu est exposé en cas
de manquements à la discipline. Les contraintes physiques ne sont
autorisées que dans des « circonstances
précises ». La privatisation sensorielle est formellement
interdite. La réduction de nourriture sont admises sous certaines
conditions. Les instruments de contraintes comme les fers, les menottes, les
camisoles de force ne sont pas autorisés. Les détenus sont donc
protéger contre toute action arbitraire. De ce fait, les détenus
peuvent faire réviser leur sanction. Ils ne sont pas exclus des plaintes
et des requêtes. Ils ont le droit de porter plainte sans craindre des
représailles ou de la censure et ce parallèlement à leur
« droit à un traitement juste » et à
l'interdiction de toute action ou punition arbitraire. Les condamnés
bénéficiant du régime spécial ont eux aussi des
droits garanties par la législation pénale
sénégalaise.
B - Les garanties accordées aux
condamnées bénéficiant du régime spécial de
détention
Est considéré comme condamné
bénéficiant du régime spécial de détention
celui qui aurait besoin d'une « prise en charge
particulière ». Cette dernière est accordée
à diverses catégories de détenus par la législation
pénale sénégalaise.
1 - Les catégories de détenus
bénéficiant du régime spécial de
détention
Ce sont en tant que tels, les détenus
vulnérables, les détenus politiques et les condamnés
à mort.
Les détenus vulnérables ce sont les
détenus qui en raison de leur âge, de leur état de
santé ou pour une considération de genre doivent
bénéficier d'un régime de faveur. C'est le cas des
mineurs, des femmes et des déficients mentaux ou physiques.
Tout d'abord, le dispositif législatif
sénégalais concernant les mineurs délinquants (articles
566 à 592 du code de procédure pénale) fixe la
majorité pénale à 18 ans. Mais, il convient de distinguer
suivant que le mineur est âgé de moins de 13 ans ou de 13 ans
à 18 ans. Le mineur âgé de moins de 13 ans, qu'il soit
auteur d'un crime peut seulement être l'objet de mesure de protection,
d'assistance ou d'éducation. Donc une peine ne peut être
prononcée pour cette catégorie de mineurs. Cependant, le mineur
âgé de 13 à 18 ans peut faire l'objet soit de mesure de
protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation soit une
condamnation pénale. Ainsi, seule cette dernière catégorie
de mineur peut faire l'objet d'une condamnation à des peines de prisons
à travers un régime spécial dont les principes ont
été mis en oeuvre dans les le code de procédure
pénale.
Ensuite, les femmes doivent bénéficier tout
comme les mineurs d'un régime spécial de détention. C'est
le cas des femmes enceintes, relevant de couches ou malades.
Par ailleurs, les détenus atteints de troubles mentaux
avérés tout comme ceux qui souffrent d'un handicap physique lourd
se voient accorder par la loi, un régime spécial de
détention.
Le régime spécial de détenu politique
peut être accordé suivant l'article 151 du code de
procédure pénale, sur requête de l'intéressé,
par le Ministre chargé de l'Administration pénitentiaire, aux
détenus qui subissent une détention préventive ou une
peine privative de liberté correctionnelle ou criminelle.
Enfin, les condamnés à mort sont aussi soumis
à un régime de détention particulière.
Toutes ces différentes catégories de
détenus se voient ainsi appliquer le régime spécial de
détention à travers une prise en charge particulière de la
personnalité de chacune d'elle.
2 - Les modalités d'application du
régime spécial
Les modalités d'application du régime
spécial de détention sont prévues aux articles 151
à 158 du code de procédure pénale. Ces dispositions
prévoient que « dans la mesure du possible, les
détenus bénéficiant du régime spécial
doivent être incarcérés dans un établissement
particulier et dans un quartier particulier d'établissement de
manière à être séparer des détenus
appartenant aux autres catégories » (article 153 du code
de procédure pénale). Ainsi, comme nous l'avons préciter,
la maison d'arrêt et de correction de Hann (ex-fort B) est
réservée aux mineurs, celle de Rufisque aux femmes, et le
pavillon spécial de l'Hôpital Le Dantec aux détenus
malades.
« Les femmes enceintes doivent aussi être
placées, pendant les deux dernières mois de leur grossesse, dans
un local séparé où elles resteront durant les deux mois
qui suivront l'accouchement ». Les femmes enceintes relevant de
couches ou convalescentes doivent bénéficier d'une prise en
charge particulière.
Par ailleurs, les condamnés bénéficiant
du régime spécial ne sont pas astreints au travail, mais peuvent
demander qu'il leur en soit donné. Aussi, ils peuvent recevoir, à
leurs frais, des livres de leur choix, des journaux et publications, de vivres,
utiliser des vêtements personnels. Ils peuvent, contrairement aux autres
condamnés, écrire ou recevoir des visites tous les jours, mais
dans les seules limites imposées par les nécessités du
service et, en ce qui concerne les visites, aux heures fixées par le
Régisseur.
Dans les cas des détenus astreints de troubles mentaux
avérés, l'Administration pénitentiaire doit non seulement
prévoir les soins psychiatrique exigés par l'état de
santé du détenu, mais aussi bannir toute sanction disciplinaire
incompatible avec le nouveau traitement requis pour un malade mental. Pour ceux
qui souffrent d'un handicap physique lourd, l'Administration
pénitentiaire doit lui garantir des conditions de confort minimales
permettant de faire face aux besoins liés au handicap.
L'application du régime spécial de détenu
politique, même si elle se fait de plus en plus rare, en même temps
que ces derniers subissent des mesures discriminatoires, telle la mise à
l'isolement, la législation pénale sénégalaise
continue d'affirmer, néanmoins, le régime spécial des
détenus politiques. En fait, les détenus politiques ont presque
toujours été soumis à un régime spécial de
détention : pas d'obligation au travail, pas de port de costume
pénale, libre réception des publications, de la correspondance et
des visites lesquelles pouvait avoir lieu dans la cellule, emprisonnement dans
des quartiers, voir des établissements distincts.
Enfin, les condamnés à mort sont aussi exempts
de tout travail et ne peuvent en obtenir. Ils peuvent fumer, lire et
écrire sans limitation. Ils sont soumis au régime des
prévenus en ce qui concerne la correspondance et les visites.
Au regard de la prise en charge particulière des
détenus bénéficiant du régime spécial, il
convient de noter plus profondément, l'affirmation législative
des garanties accordées aux détenus à tous les niveaux. Ce
qui fait du Sénégal un pays très avancé sur le plan
législatif en la matière. Ces avancées sont plus encore
susceptibles à travers les nouvelles initiatives du législateur
qui contribue ainsi, à sa manière au renforcement des garanties
judiciaires accordées au détenus.
Section II - La contribution significative du
législateur au renforcement des garanties judiciaires accordées
aux détenus.
Au-delà du caractère afflictif,
rétributif et intimidant de la peine, le reclassement du condamné
amené à réintégrer sa société est une
mission fondamentale désormais assignée à la sanction
pénale à partit de deux projets de loi que certains jugeaient
timides, le législateur, par son travail d'amendement, est parvenu
à construire au cours de la navette, deux textes de grande ampleur. Il
s'agit de la loi n° 2000-38 du 29 décembre 2000 modifiant le code
pénal et la loi n° 2000-38 du 29 décembre 2000 modifiant le
code de procédure pénale. En effet, ces deux lois ont mis fin
à cette contestable exception sénégalaise en
matière criminelle, qui privait les plus lourdement condamnées de
la possibilité de faire appel. La réforme ainsi
réalisée, dont les effets ont été immédiats,
était très attendue.
Ainsi, le législateur marque un progrès
décisif dans l'exécution de la peine à travers d'une part
le renforcement de son contrôle (parag. I) et d'autre part, la
modification et l'enrichissement de la palette des sanctions pénales
(parag. II).
Parag. I - Le renforcement du contrôle de
l'exécution de la peine
La réforme 72(*) introduit le juge de l'application des peines (A) et
crée de nouveau organes de contrôle dans l'exécution des
peines (B).
A - L'instauration du juge de l'application des
peines.
La loi n° 2000-38 du 29 décembre 2000 modifiant le
code pénal instaure le juge de l'application des peines dont les
principes directeurs sont fixés par la loi n°2000-39 du 29
décembre 2000 modifiant le code de procédure pénale.
L'instauration du juge de l'application des peines apparaît ainsi comme
un pas de plus du législateur dans sa quête de l'équilibre
entre les impératifs d'une défense sociale efficace et le respect
des droits fondamentaux des détenus. Ainsi, « il est
désigné au moins un juge de l'application des peines dans chaque
tribunal régional par arrêté du Garde des Sceaux, Ministre
de la Justice. Dans les Tribunaux départementaux situés en
dehors du siège d'un tribunal régional et comprenant dans leur
ressort un établissement pénitentiaire, un magistrat de la
juridiction est délégué à la fonction de juge de
l'application des peines »73(*).
L'instauration du juge de l'application des peines tend
à assurer la maîtrise de la répression qui est la condition
première de la justice aussi bien pour les condamnés en milieu
fermé que pour les condamnés en milieu ouvert.
1 - Le contrôle des condamnés
concernés par le milieu fermé
Le chapitre III relatif aux dispositions communes aux
établissements pénitentiaires affirme le principe des visites, de
ces établissements par le juge de l'application des peines, investi par
le nouveau texte, en l'occurrence la loi n° 2000-39 du 29 décembre
2000 modifiant le code de procédure pénal, de larges pouvoirs de
contrôle en détention.
Le pouvoir général d'avis de contrôle et
de surveillance que le juge de l'application des peines exerce sur la
détention l'oblige à pénétrer dans le
fonctionnement interne de celle-ci. En effet, l'article 693 du code de
procédure pénale modifié par la nouvelle loi
précitée confie désormais au juge de l'application des
peines, la détermination pour chaque condamné, auprès de
chaque établissement pénitentiaire, les principales
modalités du traitement pénitentiaire. Le juge de l'application
des peines peut donner aussi tous les ordres nécessaires qui devront
être exécutés dans les maisons d'arrêt tant pour les
besoins de l'instruction que pour tout autre acte de procédure. Par
ailleurs, dans les limites et les conditions prévues par la loi, le juge
de l'application des peines accorde les placements à l'extérieur,
les autorisations de sortie sous escorte, les permissions de sortir. Ces
mesures doivent être dûment motivées. Les catégories
de détenus bénéficiant de ces mesures sont placés
sous l'autorité du juge de l'application des peines. Cela signifie,
qu'il a aussi des pouvoirs de contrôle en milieu ouvert.
2 - Le contrôle des condamnés
concernés par le milieu ouvert
Le juge de l'application des peines est investi de larges
pouvoirs dans l'application des mesures de contrôle, et dans la
supervision du respect des obligations imposées aux condamnés
à l'emprisonnement avec sursis probationnaire, à l'ajourne-ment
avec probation, au travail au bénéfice de la
société, aux libérés conditionnels, aux
semi-libres.74(*) En
effet, aux termes de l'article 701 du code de procédure pénale
« le bénéfice de la libération
conditionnelle peut être assorti de conditions particulières ainsi
que de mesures d'assistance et de contrôle destinées à
faciliter et à vérifier le reclassement du
libéré ». Avec les nouvelles réformes du
code pénal et du code de procédure pénale, ces mesures
sont désormais mise en oeuvre par le juge de l'application des peines en
collaboration du comité du suivi en milieu ouvert. C'est le cas aussi
des mesures d'aide au libéré avec sursis probationnaire qui ont
pour objet de seconder les efforts du condamné en vue de le faire
rentrer dans la vie libre dont la peine l'avait exclu. Ces mesures qui
s'exercent sous la forme d'une aide à caractère social et, s'il y
a lieu d'une aide matérielle sont sous le contrôle effectif du
juge de l'application des peines.75(*) Ce dernier dispose également en milieu ouvert,
de pouvoirs d'enquête et de coercition. C'est ainsi qu'il peut
requérir les services de police ou de gendarmerie.
Partant de l'intervention du juge de l'application des peines
aussi bien en milieu fermé qu'en milieu ouvert tout porte à
croire que son instauration s'agit bien d'une grande réforme de
l'application des peines vise essentiellement l'amendement et le reclassement
social du délinquant. Cet objectif est aussi recherché dans la
création de nouveaux organes de contrôle dans l'appareil
judiciaire.
B - La création de nouveaux organes de
contrôle dans l'exécution des peines
La loi n° 2000-38 du 29 décembre modifiant le code
pénal a introduit dans l'appareil judiciaire de nouveaux organes que
sont : le comité de l'aménagement des peines, la commission
pénitentiaire consultative de l'aménagement des peines et le
comité de suivi en milieu ouvert. Les deux premiers organes sont
chargés de l'aménagement des peines alors que le dernier s'occupe
du suivi en milieu ouvert.
1 - Les organes chargés de
l'aménagement des peines
Il s'agit essentiellement du comité de
l'aménagement des peines et de la commission pénitentiaire
consultative de l'aménagement des peines.
Tout d'abord, le comité de l'aménagement des
peines « est crée dans le ressort de la Cour d'Appel dont
la composition et le fonctionnement sont fixés par décret. Le
comité de l'aménagement des peines est chargé de
l'aménagement des peines prononcées par les juridictions de
jugement ».76(*) Ainsi, aux termes de l'article 692-1 de la nouvelle
loi modifiant le code de procédure pénale : « en
matière correctionnelles, lorsqu'il reste à subir par la personne
condamné 1/3 de la peine prononcée, cette portion peut, pour
motif grave d'ordre médical, familial, professionnel ou sociale et
pendant un période n'excédant pas le double de cette portion,
être suspendue ou exécutée par fraction. La décision
est prise par le comité de l'aménagement des peines du lieu
d'exécution de la peine ». Mieux encore, l'article 693-2 de la
même loi précitée dispose que : « le
régime de la semi-liberté peut être octroyé par le
comité de l'aménagement des peines pour les motifs visés
à l'article 707-30 alinéa 1 du présent code aux
condamnés à titre définitif à une ou plusieurs
peines privatives de liberté qui ont purgé les 2/3 de leur
peine ». Le comité est également compétent pour
accorder des réductions de peines aux condamnés sous certains
conditions.
C'est dire donc que le comité de l'aménagement
des peines porte en lui-même les germes d'une réforme plus
générale de la procédure pénale, il augmente les
garanties judiciaires accordées par la loi aux détenus dans
l'exécution des peines.
Quant à la commission pénitentiaire consultative
de l'aménagement des peines, elle est établie au niveau de chaque
établissement pénitentiaire. La commission est
présidée par un juge de l'application des peines. Le procureur de
la République et le chef de l'établissement pénitentiaire
en sont membres de droit.
Elle est chargée de contrôler la situation de
chaque condamné et d'en informer le juge de l'application des peines.
Elle donne en outre son avis dans toutes les mesures d'aménagement des
peines prises par le juge de l'application des peines et du comité de
l'aménagement des peines. Ainsi, elle n'intervient pas dans
l'application de ces mesures. C'est au comité de suivi en milieu ouvert
qui doit assister le juge de l'application des peines et le comité de
l'aménagement des peines dans l'application parfaite de ces mesures.
2 - Le comité de suivi en milieu
ouvert
Un comité de suivi en milieu ouvert est institué
auprès de chaque tribunal régional. Il est présidé
par le juge de l'application des peines. Il doit, par ailleurs, assister ce
dernier dans l'application des mesures de contrôle, et dans la
supervision du respect des obligations imposées aux condamnés
à l'emprisonnement avec sursis probationnaire à l'ajournement
avec probation, au travail au bénéfice de la
société, aux libérés conditionnels, aux
semi-libres. Le comité de suivi en milieu ouvert assiste ainsi le juge
de l'application des peines dans la préparation de la réinsertion
professionnelle ou sociale du condamné.
La finalité de la peine privative de liberté
est, au-delà de la permission, l'amendement et le reclassement du
condamné. En effet, le code de procédure pénale
sénégalais, en son article 698 assigne « aux prisons
établies pour peines la mission de favoriser l'amendement des
condamnés et de préparer leur reclassement social ».
De la réflexion menée en droit pénal,
tant au niveau international qu'au niveau national, ont émergé
les initiatives particulières du législateur dans la modification
et l'enrichissement de la palette des sanctions pénales.
Parag. II - La modification et l'enrichissement de la
palette des sanctions pénales
La modification et l'enrichissement de la palette des
sanctions pénales apportées par le législateur constituent
des compromis entre le droit fondamental de l'individu et la défense de
la société. Mais il reste que le pouvoir judiciaire doit
s'incliner devant la volonté du législateur et ne pas subsister
ses critères de valeur à ceux exprimés formellement par
la loi. C'est un problème de démocratie.
S'agissant plus particulièrement des lignes directrices
des modifications et innovations apportées par le législateur
dans le domaine des sanctions pénales, elles se situent à deux
niveaux :
- l'introduction de nouvelles sanctions pénales
(A) ;
- la création de nouveaux modes d'exécution de
la sanction pénale (B).
A - L'introduction de nouvelles sanctions
pénales
Elle s'inscrit en effet dans la droite ligne du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques et des recommandations
des congrès quinquennaux des Nations-Unies pour la prévention du
crime et le traitement des délinquants qui exhortent dès 1980,
les Etats membres à doter leur système pénale de mesures
alternatives à l'incarcération. Cette présomption est
partagée par la commission africaine des droits de l'homme et des
peuples. Elle est prise aussi en considération dans la
déclaration de Kampala.77(*)
Cependant, ces mesures alternatives à l'emprisonnement
sont aussi accompagnées de peines complémentaires.
1 - Les sanctions alternatives à
l'incarcération
La loi n° 2000-38 du 29 décembre 2000 modifiant le
code pénal crée les mesures alternatives à
l'incarcération spécifiées dans les articles 9, 33-1, 35-1
et 35-2 du code pénal.
En effet, aux termes de l'article 33-1 de la loi modifiant le
code pénal : « lorsqu'un délit est puni d'une
peine d'emprisonnement une ou plusieurs des peines privatives ou restrictives
de droits suivants peuvent en outre être prononcées :
- la suppression, pour une durée de cinq ans au plus du
permis de conduire un véhicule à moteur : cette suspension
pouvant être limitée selon les modalités
déterminées par les articles 35-1 et 35-2 à la conduite en
dehors de l'activité professionnelle ;
- l'annulation du permis de conduire avec interdiction de
solliciter la délivrance d'un nouveau permis de conduire pendant cinq
ans au plus ;
- retrait définitif ou temporaire pour une durée
n'excédant pas cinq ans, de la licence ou de l'autorisation
administrative d'exploiter un véhicule à moteur ;
- la confiscation d'une ou plusieurs véhicules
appartenant au condamné ;
- l'interdiction de détenir ou de porter, pour une
durée de cinq ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
- la confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le
condamné est propriétaire ou dont il a la libre
disposition ;
- le retrait du permis de chasse avec interdiction de
solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au
plus.
Ces mesures sont désormais, autant de réponses
pénales offertes au juge. Ce qui constitue une garantie judiciaire
supplémentaire accordée aux détenus même si elles
sont assorties de peines complémentaires.
2 - Les peines complémentaires aux
sanctions alternatives
Elles sont spécifiées dans l'article 35-3 du
code pénal. En effet, le condamné qui viole les interdictions
résultant des peines se suspension ou l'annulation du permis de conduire
d'un véhicule à moteur, d'interdiction de détenir ou
porter une arme, de retrait du permis de chasse prononcées en
application de l'article 33-1 du code pénal sera puni à deux ans
d'emprisonnement ferme. Il en est ainsi, le fait par une personne recevant la
notification d'une décision prononçant à son égard
la suspension ou l'annulation du permis de conduire d'un véhicule, d'une
arme, de refuser de remettre le permis suspendu ou annulé ou la chose
confisquée à l'agent de l'autorité chargée de
l'exécution de cette décision.
Par ailleurs, le fait de détruire, détourner ou
tenter de détruire ou de détourner un véhicule ou une arme
confisquée en application de l'article 33-1 du code pénal sera
puni aussi des mêmes peines.
Au-delà de ces nouvelles sanctions pénales, le
législateur a aussi crée de nouveaux modes de la sanction
d'exécution.
B - La création de nouveaux modes
d'exécution de la sanction pénale
Il s'agit entre autre des nouveaux modes d'aménagement
des peines et du retrait de certaines condamnations du casier judiciaire.
1 - Les nouveaux modes d'aménagement des
peines
L'aménagement des peines est, à cet
égard, affirmé dans l'article 44-1 du code pénal qui
demande au juge pénal de prononcer les peines et de fixer leur
régime « en fonction des circonstances de l'infraction et
de la personnalité de l'auteur », l'article 44-2 du
même code énumère les modes d'aménagement des peines
désormais à la disposition du juge pénal, mesures dont les
règles d'exécution sont fixées par les articles 704
à 707-36 du code de procédure pénale.78(*)
Les nouveaux modes d'aménagement des peines introduits
par la loi n° 2000-38 du 29 décembre 2000 modifiant le code
pénal et répertoriés en son article 44-2 sont : le
sursis - la probation - le travail d'intérêt au
bénéfice de la société - la semi liberté -
le fractionnement de la peine et la dispense de la peine et l'ajournement.
Par ailleurs, ces différents modes d'aménagement
des peines ne peuvent être appliquées ou prescrits en cas de
récidive, en matière criminelle et en matière
correctionnelle pour les infractions afférentes aux détournements
de deniers publics, aux délits douaniers, au viol, aux attentats
à la pudeur, à la pédophilie, aux délits relatifs
aux stupéfiants.
Les règles relatives à l'exécution de ces
mesures sont fixées dans le titre IV du livre V du code de
procédure pénale à travers les articles 704-36 qui,
organisent les conditions d'octroi ainsi que le régime juridique de
chacune de ces mesures. Ainsi, la juridiction qui prononce un emprisonnement
peut assortir désormais celui-ci de ces modes d'aménagement des
peines.
Aussi pour favoriser davantage la resocialisation du
détenu, a étendu les nouveaux modes d'aménagement des
peines sur le casier judiciaire en y retirant la mention de certaines
condamnations.
2 - Le retrait de certaines condamnations du
casier judiciaire.
La loi n° 2000-39 du 29 décembre 2000 modifie le
titre III du code de procédure pénale et intègre dans ses
articles 726, 727, 732 et 734 les nouveaux modes d'aménagement des
peines (dispense de peines, ajournement, sursis ou probation). En outre, une
volonté d'oubli judiciaire à l'issue d'un délai suffisant
d'observation prévaut par le retrait du casier judiciaire et du bulletin
n°2 (articles 727 à 732) de certaines condamnations. En effet, les
fiches relatives à des condamnations effacées par une amnistie,
par la réhabilitation de plein droit ou judiciaire ou
réformés en conformité d'une décision de
rectification du casier judiciaire sont désormais retirées de ce
dernier. Sont également retirées du casier judiciaire des
décisions disciplinaires effacées par la réhabilitation.
C'est le cas aussi des condamnations assorties en tout ou partie du
bénéfice du sursis celles avec probation. Les dispenses de
peines, à l'expiration d'un délai de trois ans à compter
du jour où la condamnation est devenue définitive sont
également retirées du casier judiciaire.
En définitive, l'étude qui porte sur le cadre
juridique de la protection des droits fondamentaux des détenus au
Sénégal ne manque pas d'intérêt. Elle permet
d'appréhender l'environnement juridique de ces droits.
Ainsi, s'appuie-t-elle sur des instruments juridiques qui
reflètent les conceptions humanitaires et démocratiques
défendues depuis le 18ème siècle.
La législation pénale sénégalaise
ne manque pas aussi d'humanité si l'on considère la contribution
significative du législateur au renforcement des garanties judiciaires
accordées désormais aux détenus.
Il s'agira à présent de voir si elle est
cohérente dans son ensemble et si en réalité elle est
respectée ou si elle trahit sa logique intrinsèque.
Une remarque préliminaire souligne la
précarité des conditions d'existence des détenus relevant
une discordance entre la réalité et les textes destinés
à protéger le détenu.
Une deuxième remarque révèle
l'incohérence de la législation pénale souvent
inadéquate, lacunaire et ambiguë en matière de protection
des droits des détenus.
Ces deux remarques traduisent parfaitement
l'inefficacité de la protection des droits fondamentaux des
détenus au Sénégal.
DEUXIEME PARTIE
L'INEFFECTIVITE DE LA PROTECTION
DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS AU
SENEGAL
Le cadre juridique de la protection des droits fondamentaux
des détenus au Sénégal ainsi exposé ci-dessus est
ambitieux et même généreux, il ne manque pas
d'humanité Cependant, la ligne de partage entre le contenu de ce cadre
juridique de protection et les réalités observées semble
couler un rubicon tant l'écart est énorme. L'observation de ces
réalités permettent de constater que l'inefficacité dans
la protection des droits fondamentaux des détenus au
Sénégal est réelle. Si évidente que soit
l'affirmation, elle ne manque pas cependant d'être nuancée. Ainsi,
à quel niveau peut-on réellement appréhender
l'ineffectivité de la protection, au niveau du bilan normatif, du bilan
institutionnel ou au niveau du bilan conjoncturel ? Là est tout le
débat.
En effet, la protection des droits fondamentaux des
détenus est conditionnée par l'existence d'éléments
mêlés dont la remise en cause de l'un influe sur tous les autres.
Elle subit les soubressauts de son environnement qui reste lui-même
marqué par de profonds déséquilibres. En fait, les
ambitions avouées par le Sénégal dans un large
éventail de normes juridiques perdent inexorablement leur contenu et ne
deviennent en réalité qu'une protection de façade. Les
nouveaux mécanismes de protection affirmés par le
législateur à travers le renforcement des garanties judiciaires
accordées aux détenus sont en train de se diluer dans un torrent
de vices.
En tout état de cause, les droits fondamentaux des
détenus au Sénégal sont donc bafoués de bien des
côtés. Cependant, on permettrait une meilleure protection de ces
droits en limitant au strict nécessaire les atteintes qui peuvent
être portées à leur contenu. Pas en surfant sur la
conjoncture mais en changeant fondamentalement de direction, c'est à
dire en inscrivant des actions dans la durée autrement dit en tournant
le dos à l'improvisation, en s'attaquant aux causes de leur violation et
non en se focalisant sur leurs effets. C'est seulement dans ces conditions que
les types d'actions prioritaires à engager pour une meilleure
protection de ces droits seront crédités.
Dans cette perspective, une piste de réflexion, nous
semble-t-il, peut-être trouvée à travers d'une part,
(chapitre I) les efforts nécessaires à faire pour une meilleure
protection de ces droits (Chapitre II).
CHAPITRE I - LES MANQUEMENTS CONSTATES DANS LA
PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS
Protéger les droits fondamentaux des détenus,
c'est faire appliquer cordialement les textes nationaux et internationaux
déjà votés et ratifiés par notre pays ; c'est
revoir de manière critique les textes en vigueur pour qu'ils soient de
vrais outils au service du bien-être des détenus ; c'est
confectionner de nouveaux textes utiles afin de maintenir et de renforcer le
détenu dans ses droits, sa dignité et sa valeur propre en tant
qu'être humain.
Il paraît alors autorisé de se poser la question
de savoir si les détenus au Sénégal sont traités
avec « humanité et dans le respect de la dignité
inhérente à la personne humaine ? »
Répondre par l'affirmative c'est être à la
limite de la diffamation. En effet, au regard des conditions de la garde
à vue et de l'état des lieux des établissements
pénitentiaires, une évidence saute aux yeux : l'existence de
graves lacunes dans la protection des droits des détenus contrairement
aux conventions, traités, règles minima et autres pactes relatifs
au traitement des détenus.
Cependant, force est de reconnaître que les atteintes
aux droits fondamentaux des détenus tirent leur origine dans d'autres
facteurs sous-jacents aux conditions d'existence des détenus. Ces
facteurs, qui bloquent ou limitent l'effectivité de la protection des
détenus proviennent, pour l'essentiel, du manque de moyens des
administrations judiciaire et pénitentiaire, des mentalités peu
évoluées dans ce domaine et d'une législation
pénale souvent inadéquate.
Dans cette perspective, il s'avère nécessaire
d'étudier les facteurs de blocage dans la recherche de
l'effectivité de la protection (section 1) avant de voir, plus
amplement, les manquements constatés à travers les atteintes aux
normes établies en matière de détention au
Sénégal (section 2 ).
Section 1 - Les facteurs de blocage dans la recherche
de l'effectivité
La protection et la promotion des droits fondamentaux des
détenus dépendent de l'engagement de chaque Etat d'en assurer
leur effectivité. Prescriptions et prestations sont les moyens pour
parvenir à ces fins.
Les prescriptions se justifient par le fait que l'Etat
détient le monopole de la contrainte physique légitime dont le
pouvoir de punir n'est qu'une émanation. Le pouvoir législatif
est le principal dépositaire de la détermination des exigences de
la privation de liberté. Il vote les lois fixant les modalités de
la détention par des propositions qu'il fait ou par des projets que le
gouvernement dépose.
Cependant, les lacunes et les ambiguïtés des
textes en matière de protection des droits des détenus
constituent d'importants facteurs de blocage dans la recherche de
l'effectivité attendue. A cela s'ajoute la modicité des
prestations de l'Etat à l'endroit des citoyens privés de leur
liberté. L'Etat n'est en réalité qu'une
« corporation de services publics ». L'administration
pénitentiaire est un service public, l'administration judiciaire en est
un autre. Elles doivent assurer toutes les deux des prestations. Mais le manque
de moyens qui fait l'unanimité de l'administration pénitentiaire
et de l'appareil judiciaire constitue un autre facteur de blocage dans
l'application effective des droits accordés aux détenus.
Ainsi, les facteurs de blocage dans la recherche de
l'effectivité de la protection des droits fondamentaux des
détenus sont à la fois d'ordre administratif (parag. 1) et
d'ordre juridique (parag.2 ).
Parag. 1 - Les facteurs d'ordre administratif
L'administration est chargée de l'élaboration et
de la mise en oeuvre de la politique pénale. Cette dernière est
incarnée par ses différentes structures : l'administration
judiciaire en amont et l'administration pénitentiaire en aval.
Cependant, chacune de ces deux structures rencontre dans son rôle,
d'énormes contraintes. L'impact de ces contraintes sur les droits
fondamentaux des détenus n'est plus à démontrer mais
à déplorer. Une piste de réflexion, nous semble-t-il,
peut-être trouver à travers la faiblesse des moyens
économiques et la faiblesse des ressources humaines caractérisant
ces deux services.
A - La faiblesse des moyens économiques
Il fait l'unanimité de l'Administration
pénitentiaire, de l'appareil judiciaire et des structures de
contrôle et de surveillance des prisons. Dans ces conditions, la
protection des détenus ne pourra pas être assurée avec
efficacité.
1 - Au niveau de l'administration
pénitentiaire
On ne peut pas étudier de manière pertinente la
protection des droits fondamentaux des détenus en l'isolant des
difficultés du service pénitentiaire. Ces difficultés de
l'administration pénitentiaire dont la clé de voûte semble
être l'aspect économique n'est pas déconnecté de la
précarité des conditions e vie des détenus.
De même, on ne peut pas étudier de manière
pertinente la protection des droits fondamentaux des détenus en
l'isolant des autres services. Dans les prisons, comme dans la santé et
l'éducation, se joue également l'effet ajustement, lisible dans
la vétusté des locaux, leu insalubrité, leur
déficit, la promiscuité dans laquelle vivent les gens, les
maladies dont ils sont atteints etc. La seule différence c'est qu'on est
indifférent à la situation des détenus, ou encore, on la
trouve normale. En effet, peu de pressions sont exercées sur le
gouvernement pour dépenser des ressources rares à
l'amélioration du traitement des détenus. La situation
économique explique sans doute l'état des prisons. Presque toute
datent de l'époque coloniale. Les bâtiments étaient
anciennement affectés à divers usages. Certains étaient
des léproseries, des lazarets ou des écuries.79(*)
A titre d'exemple, au moment où le nombre des
écroués croissent et que l'inflation bas son plein, le budget
alloué à l'administration pénitentiaire diminue. C'est
ainsi que le budget réservé au matériel
s'élève à moins de 600 millions alors que les besoins sont
estimés à un (01) milliard. Cette donnée est à
prendre en compte pour bien comprendre le cri de famine et de détresse
des détenus de ziguinchor ou de Reubeuss, pour bien comprendre que
l'ordinaire du détenu peut être le
« diagan »80(*) ou le « youko » tant que le taux
alloué sera 340 fcfa/ jour/prisonnier, là où la norme
admise est le double soit 740 fcfa/jour/prisonnier. Du côté des
gardes pénitentiaires, le constat n'est guère plus reluisant, il
y a un fusil pour neuf agents, un pistolet automatique pour quinze gardes
pénitentiaires, là où un seul d'entre eux s'occupe de huit
détenus.81(*)
Cette faiblesse des moyens économiques existe aussi au
niveau de l'administration judiciaire.
2 - Au niveau de l'administration
judiciaire
L'indépendance de la justice dans un Etat
démocratique Républicain a été inventé,
comme le disait Montesquieu, pour créer un système de
gouvernement modéré. Or il n'y a de respect des droits
fondamentaux des citoyens que dans un gouvernement modéré. Cela
suppose bien sûr qu'on donne les moyens à la justice de remplir
aussi sa mission sans le cadre du contrôle de l'exécution des
peines prononcées, c'est-à-dire en infrastructures et
matériel, au plan financier (...). Certes, si l'on compare à
d'autres pays qui sont dans les mêmes conditions de développement
historique, le Sénégal a fait des avancées significatives
mais nettement insuffisant. En effet, sur le plan des infrastructures, il n y a
des villes où ce sont des maisons conventionnées qui ont servi de
tribunal, avec des salles d'audience de moins de 30 m² (...). Si l'on
prend le département de Pikine, le volume d'affaires est peut-être
aussi important que celui de 3 ou 4 juridictions départementales
réunies. Cette situation crée des retards concernant le nombre
des audiences et engendre consécutivement l'encombrement
carcérale dans la mesure où le plus grand nombre des
détenus est constitué par les détenus provisoires en
attente d'un jugement. La faiblesse des ressources humaines est aussi à
la base de cet état de fait.
B - La faiblesse des ressources humaines
La faiblesse des ressources humaines de l'administration
pénitentiaire et de l'Administration judiciaire se manifeste par leur
insuffisance quantitative et leur insuffisance qualitative.
1 - L'insuffisance quantitative des ressources
humaines
L'appareil judiciaire souffre d'un manque chronique de
personnel. En effet, le déficit de magistrat est une
réalité que personne ne peut nier au Sénégal,
malgré le programme spécial de recrutement de ces
dernières années.
Selon nos propres informations, un magistrat affecté
à Dakar doit traiter 250 dossiers par an. Cela n'est pas pour nous
étonnant car, au total 318 magistrats ont tété
recensés en 2003 au Sénégal dont une trentaine est
actuellement en détachement dans les différents
départements ministériels. Entre 1998 et 2003, les tribunaux
régionaux ont enregistré l'arrivée de 56 magistrats et 16
greffiers, précise le journal « Le populaire » du 3
et 4 avril 2004, qui évalue à 185 le nombre de greffiers
exerçant au Sénégal. Si l'on prend les 288 magistrats
disponibles pour une population de plus de 9 millions d'habitants on aura une
moyenne d'un magistrat pour 31 250 habitants. Dans de pareilles conditions, il
est difficile de prétendre à une justice performante et
respectueuse des droits fondamentaux de l'homme. C'est ce qui explique la
lenteur des procédures judiciaires. Les conséquences qui en
découlent sont la longue détention provisoire et les dénis
de justice. Les détenus provisoires se plaignent
énormément de ces lenteurs et insistent beaucoup sur la
nécessité d'accélérer la procédure au niveau
des cabinets d'instruction. C'est également le point de vue de beaucoup
de membres du barreau de Dakar. Aussi, des cas comme celui de Ibrahima Diallo,
ce détenu de Thiès qui a passé 13 ans en prison sans
jugement, seront-ils fréquents.
Il en est de même du personnel pénitentiaire qui
se trouve dans l'impossibilité d'accomplir correctement la mission qui
lui est confiée. En effet, le personnel pénitentiaire reste
insuffisant en quantité par le nombre de gardiens disponibles dans une
prison. L'engorgement carcérale pose un problème de surveillance
et par voie de conséquence de sécurité. L'insuffisance des
effectifs disponibles favorise à la fois la violence et les
évasions dans les établissements pénitentiaires. La
faiblesse des ressources humains révèle aussi une insuffisance
qualitative des magistrats et des agents pénitentiaires.
2 - L'insuffisance qualitative des ressources
humaines
L'insuffisance qualitative se manifeste par l'absence de
formation du personnel pénitentiaire en droits de l'homme et par la
méconnaissance des textes par les magistrats.
Le personnel pénitentiaire est formé à
l'Ecole Nationale de Police pendant une durée de 9 mois. Le programme de
la formation comprend : le droit pénal général, le
droit pénale spécial, la criminologie, les sciences
pénitentiaires, l'armement, le secourisme, la dactylographie. Comme on
peut le constater, les droits de l'homme ne sont pas pris en compte dans la
formation du personnel pénitentiaire. Dans la mesure où le
respect des droits de l'homme est, sans aucun doute, au-delà du concept,
un levier efficace pour l'amélioration des conditions de vie des
détenus et du respect de leurs droits, il s'agit de les promouvoir et de
les valoriser dans la formation des agents pénitentiaires. L'absence de
formation du personnel pénitentiaires en droit de l'homme est
peut-être à l'origine de la déconsidération et du
dédain dont sont paradoxalement victimes les détenus de la part
des agents du service pénitentiaire.
Au niveau des magistrats, il n'y a aussi une
méconnaissance des textes qui tire leur origine dans la formation de ces
dernières. En effet, la découverte au camp pénale de
liberté VI des filles mineures condamnées ou poursuivies de
prostitution de mineurs alors que de tels faits ne sont pas susceptibles de
sanction pénale selon notre législation pénale a conduit
l'Inspection générale de l'Administration de la Justice à
saisir le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice. Une circulaire du Procureur
Général près de la Cour d'Appel à l'adresse des
chefs de parquet ordonnant que cesse pareille pratique a alors
été édictée.
Ce constat est révélateur d'une
méconnaissance grave des textes de la part des praticiens du droit. Il
convient de noter que l'absence de spécialisation des magistrats
concernés est à l'origine de la marginalisation de la Justice des
mineurs et par voie de conséquence de la méconnaissance des
textes applicables en la matière. Cette méconnaissance applicable
est d'autant plus inquiétante qu'elle conduise presque
systématiquement à la délivrance de mandats de
dépôts à l'égard d'un mineur de 13 ans. Mieux, la
combinaison des articles 52 et 53 du code pénal avec l'article 567 du
code de procédure pénale révèle que le mineur de
moins de 13 ans ne peut faire l'objet d'une condamnation pénale.
Malgré ces dispositions, l'Inspecteur général de
l'Administration de la Justice avait noté dans un certain nombre de
juridictions visitées au Sénégal que des mineurs de moins
de 13 ans avaient fait l'objet d'un mandat de dépôt ou d'une
ordonnance de garde provisoire au régisseur de la maison d'arrêt.
Pourquoi décerner alors un mandat de dépôt contre un mineur
de 13 ans d'autant que l'article 576 du CPP pose comme condition à la
délivrance d'un tel mandat de dépôt une prévention
de crime et la motivation de l'ordonnance le plaçant sous mandat de
dépôt ? Ce qui dénoté une méconnaissance
des textes sinon leur violation de la part de ceux-là même qui,
professionnels du droit, devraient les appliquer et les promouvoir
auprès de leur partenaires. Peut-être, l'incohérence des
textes serait-elle à l'origine de leur mauvaise application ?
Parag.2 - Les facteurs d'ordre juridique
S'il existe un baromètre de la faveur accordée
à la protection des droits fondamentaux des détenus dans un Etat
de droit, çà doit être la façon dont ils sont
textuellement consacrés.
Cependant, on s'irritera du silence des textes sur des
questions sensibles à la protection des détenus, une irritation
de plus parmi bien d'autres puisque la cohérence de certaines normes
n'obéit pas toujours à un régime harmonieux.
En tout état de cause, ces facteurs d'ordre juridique
résultent d'une part d'un vide juridique (A) et d'autre part des lacunes
de la législation pénale sénégalaise (B).
A - Le vide juridique
Le silence des textes sur des questions aussi sensibles que le
délai de la détention provisoire en matière criminelle et
la sanction contre la torture dans le code pénal constituent une
dangereuse « déprotection » du détenu.
1 - L'absence de garantie temporaire pour les
accusés en matière criminelle dans le CPP
Un fait marquant de la violation des droits des détenus
au Sénégal reste l'absence de garantie temporaire pour les
accusés en matière criminelle dans le CPP. La législation
nationale a ignoré la détention provisoire en matière
criminelle dans ses développements. Pourtant la gravité des
délits et des crimes, n'étant pas la même, il est
souhaitable de prévoir une durée de détention viable eu
égard à la gravité des infractions délictuelles et
criminelles comme le prévoit d'autres législations.82(*)
Il faut noter que l'absence de garantie temporaire aux
détenus provisoires en matière criminelle peut-être source
d'abus quand on pense à la situation des présumés
innocents qu'on met directement en prison avant jugement avec des
condamnés. Aussi, du point de vue de la politique criminelle, il y a
urgence à fixer un délai raisonnable quant on pense à
l'effet délétère de la promiscuité dans les
prisons qu'on considère aujourd'hui comme une école du crime.
Le justiciable ne saurait être comptable des fautes de
l'Administration ni des silences ces textes. S'il est vrai que la Justice doit
rechercher sereinement la vérité, il n'en demeure pas moins que
la conservation des inculpés en matière criminelle, pendant une
période déraisonnable sous prétexte des silences de la loi
n'est ni plus ni moins qu'une atteinte au principe tutélaire de la
présomption d'innocence et de la liberté individuelle.
Par ailleurs, la non intégration des sanctions contre
la torture dans le code pénale participe aussi directement à la
déprotection du détenu et consécutivement à la
culture de l'impunité.
2 - La non intégration des sanctions contre
la torture dans le CP
L'absence de sanctions contre la torture dans le code
pénal favorise l'impunité dont jouissent les tortionnaires. En
effet, le Sénégal a ratifié la convention contre la
torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants mais s'est gardé d'intégrer la torture comme
délit ou crime dans le code pénal.
Si on voit que la convention contre la torture protége
les droits du détenu en précisant qu'aucune violence, aucun
traitement inhumain ou dégradant ne doivent être infligé
à un détenu. Si on voit que le personnel pénitentiaire est
souvent responsable d'actes de violence contre les détenus. Si on voit
les bastonnades, les mauvais traitements, les humiliations qui sont
fréquemment dénoncés par d'anciens détenus. Mieux
quand on a à l'esprit les excès de zèle et de tracasseries
des officiers de police judiciaire au cours des enquêtes
préliminaires, on ne peut manquer de regretter la non intégration
de la torture comme délit ou crime dans le code pénal. Même
si le législateur a prévu des sanctions à l'encontre des
auteurs d'abus de droit, il n'en demeure pas moins que l'intégration de
la torture dans le code pénal pourrait encore plus dissuader les
tortionnaires.
En tout état de cause, l'inexistence de garantie quant
à la durée de la détention provisoire en matière
criminelle et quand aux sanctions contre la torture dans le code pénal
dénotent dans une certaine mesure les lacunes des textes existants.
B - Les lacunes de la législation pénale
nationale
Les lacunes de la législation pénale nationale
peuvent être identifiées à travers d'une part par le
régime de la garde à vue et d'autre part , le régime de
l'incarcération.
1 - Au niveau du régime de la garde
à vue
Décidée par l'officier de politique judiciaire,
limitée dans le temps, la garde à vue est entourée d'un
certain nombre de garanties reposant sur le contenu des droits de la personne
gardée à vue. En effet, il résulte des dispositions du
code de procédure pénale que toute personne gardée
à vue peut faire prévenir un proche, obtenir un examen
médical, avoir un entretien avec avocat, ... Parmi ces garanties, le
droit d'être examiné par un médecin et le droit d'avoir un
entretien avec un avocat retient particulièrement l'attention.
S'agissant du droit de s'entretenir avec un avocat, il est
d'une part tardif car il s'exerce lorsque 24 heures se sont
écoulées depuis le début de la garde à vue, d'autre
part, il est de courte durée car ne pouvant pas excéder 30
minutes.83(*)
Cet entretien n'apporte à l'intéressé
qu'une garantie purement formelle. En effet, s'il est informé par
l'officier de police judiciaire de la nature de l'infraction recherchée
l'avocat ne peut ni consulter le dossier ni assister aux actes de
l'enquête.84(*) Ne
pouvant de surcroît faire état de cet entretien auprès de
quiconque pendant la durée de la garde à vue, la seule
possibilité qu'ait l'avocat de se faire entendre est de présenter
des observations écrites qui seront jointes au dossier. Ainsi, le droit
de s'entretenir avec un avocat lors de la garde à vue n'est plus dans
ces conditions qu'un droit théorique et illusoire. De même,
l'examen des dispositions relatives au contrôle médical
accordé à la personne gardée à vue montre une fois
de plus les lacunes de la législation pénale.
En effet, aux termes de l'article 56 « si le
Procureur de la République ou son délégué l'estime
nécessaire, il peut faire examiner la personne gardée à
vue par un médecin qu'il désigne, à n'importe quel moment
des délais prévus par l'article précédent. Il peut
également être saisi aux mêmes fins et dans les mêmes
délais par la personne gardée à vue sous le couvert de
l'officier de police judiciaire par toute personne ou par son conseil
... ».
La lecture de cet article montre qu'il ne s'agit pas d'une
obligation car ce texte prévoit que l'examen médical est fait
à la demande de l'intéressé où à la
requête d'un membre de sa famille ou de son conseil. Cependant, quant on
connaît les problèmes auxquels sont exposés ceux à
qui s'adresse le contrôle médical lors de leur contrat avec la
politique, on ne peut qu'être compréhensif de
l'inefficacité de ce texte.
Par ailleurs, l'introduction du médecin à ce
stade de la procédure n'a pas pour but de s'immiscer dans
l'interrogatoire ni à formuler des injonctions. C'est au pouvoir
judiciaire seul puisque l'intervention du médecin telle qu'elle est
prévue par l'article 56 du CPP n'a lieu qu'une fois le détenu
déféré devant le magistrat compétent. Cela traduit
l'inopportunité de ce contrôle médical dont l'objectif
était de prévenir la brutalité de la police et de la
gendarmerie.
Les lacunes de la législation pénale nationale
sont aussi perceptible au niveau du régime de détention des
condamnés.
2 - Au niveau du régime de détention
des condamnés
Le législateur sénégalais s'est fortement
inspiré des règles minima de traitement des détenus et de
la législation humanitaire et idéaliste de la France, ancienne
métropole dans la détermination du régime de
détention des condamnés.
En effet, l'ensemble des règles minima est une
législation taillée sur mesure pour l'occident. Il est donc
quasi-impossible pour un pays sous-développé. Même en
Occident ces règles semblent délicates à appliquer
à fortiori en Afrique où les préoccupation des
gouvernements sont essentiellement tournées vers la satisfaction des
besoins fondamentaux des populations. Ils y arrivent avec peines si l'on sait
que les difficultés économiques sont cruciales.
L'impossibilité d'appliquer le régime progressif en est une
illustration. Ce régime est très long. Son application requiert
une surveillance stricte pour aboutir à l'ultime phase (la
libération conditionnelle) qui nécessite une confiance par
rapport au détenu. De plus, le respect effectif de ces dispositions
transformerait les prisons sénégalaises en « Paradis
terrestres » car les conditions de vie en prison telles que
définies par ces règles correspondent au niveau de vie de la
minorité des Sénégalais les plus nantis et constituent un
« rêve » pour la grande majorité. Par
conséquent, le respect de ces principes par un Etat
sous-développé comme le Sénégal pourrait encourager
l'aggravation de la criminalité car les prisons ne désempliraient
pas. Ainsi, les règles minima de traitement des détenus reprises
dans la législation pénale sénégalaise sont
inadaptées aux réalités locales. Ce qui semble se dessiner
à travers les atteintes portées aux normes établies en
matière de détention au Sénégal.
Section II - Les atteintes aux normes établies
en matière de détention au Sénégal
Si la définition précise des infractions et des
peines qui leur sont applicables est un principe très ancien et
généralement intangibles, les modalités d'exécution
des peines ainsi prononcées n'ont pas toujours fait l'objet des
mêmes préoccupations.
En effet, il faut rappeler que le droit de punir dans son
fondement est une violation légitime des droits de l'homme car visant la
protection de la société et le reclassement du délinquant.
A cet égard, il implique aussi la manière dont les peines seront
subies. Pourtant, cette dernière peut à elle seule
profondément modifier le caractère de la sanction, de sorte que
les normes établies en matière de détention seraint
aisément tournées.
Ainsi, il convient d'apprécier les atteintes aux normes
établies en matière de détention au Sénégal
en se fondant d'une part sur les conditions d'existence des détenus
(parag.1 ) et d'autre part sur l'ineffectivité des mécanismes de
protection des détenus (parag.2 ).
Parag.1 - Les atteintes aux conditions d'existence des
détenus
Les conditions d'existence des détenus au
Sénégal, que ce soit au niveau des prisons ou des lieux de garde
à vue, ne sont pas des plus reluisantes. En effet, les différents
lieux de détention au Sénégal sont non seulement
surpeuplées mais aussi et surtout les conditions d'hygiène et de
sécurité de leurs pensionnaires sont
« difficiles ».
En plus de l'enferment, du manque à vivre, du manque
à être et à aimer, il y aurait aussi cette absence de
dérivatif à l'ennui des détenus, faute d'activités
en prison. Ainsi,, ces atteintes revêtent une dimension
matérielle : la précarité des conditions
matérielles de détention (A) et une dimension
psychologique : l'absence de dérivatif à l'ennui (B).
A - La précarité des conditions
matérielles de détention
Cette précarité est apparente aussi bien au
niveau des établissements pénitentiaires qu'au niveau des lieux
de garde à vue.
1 - Au niveau des établissements
pénitentiaires
Les difficultés auxquelles sont confrontées les
détenus au niveau des établissements pénitentiaires
concernent la santé et la nourriture.
La santé des détenus doit être prise en
compte. Elle passe par divers facteurs qui influent sur son état :
le logement, l'hygiène, l'examen médical, l'habillement et le
couchage.
Concernant l'hygiène et la literie, le
Sénégal est loin de répondre aux dispositions de l'article
12 et 19 des règles minima pour le traitement des détenus (RMT)
qui disposent respectivement : « les installations
sanitaires doivent permettre au détenu de satisfaire aux besoins
naturels au moment voulu, d'une manière propre et
descente » (art. 12) et : « chaque
détenu doit disposer d'un lit individuel » (art. 19). Au
Sénégal, tout le monde s'accorde à reconnaître le
haut degré d'insalubrité des sanitaires qui s'expliquent par la
vétusté des locaux des canalisations qui sont tout le temps
bouchées et un budget d'assainissement dérisoire. Le
résultat est que la prison se caractérise par la mauvaise odeur.
La prison pue. A Rebeuss, un prisonnier surnommé Pif était
très célèbre à cause de l'audace qu'il manifeste
à déboucher les canalisations à mains nues,
n'hésitant pas à plonger entièrement dans la fosse si
c'est nécessaire. Dans certaines cellules à Rebeuss, les
détenus sont obligés de mettre des pots en fer pour faire leurs
besoins. Inutile dans ces conditions de parler d'intimité : l'odeur
et le bruit des gaz lâchés indisposent tous les détenus.
Cela est valable également à la prison des femmes de Rufisque qui
n'a ni douche, ni sanitaire.
La literie des prisons est loin de satisfaire aux conditions
édictées par l'ensemble des règles minima. On trouve dans
certaines prisons des lits en fer, des lits en béton, des matelas
mousses tellement minces qu'on peut parler de nattes.
A ce titre, le document rendu le 02 avril 2004 lors de
l'ouverture du séminaire sur le programme sectoriel justice (PSJ)
indique, en moyenne, que plus de cinq détenus se partagent un
matelas ; il y a aussi un lit pour 17 prisonniers, un lit
d'hospitalisation pour 249 détenus.
Le surpeuplement des cellules est également une des
sources d'insalubrité et rend pratiquement vains les rares efforts
d'assainissement des prisons. Le surpeuple-ment et corollairement la
promiscuité permanente génèrent des déviances
sexuelles.85(*)
Dans cet univers de promiscuité et de surpeuplement
règnent la plupart du temps la loi du plus fort. Et les caïds, quoi
qu'on dise l'administration, sèment la terreur dans certaines prisons
pour asseoir leur leadership. La surpopulation carcérale a pour
conséquence la violation d'un certain nombre de principes
réglementaires tels que la séparation des mineurs et des adultes,
des condamnés et des détenus provisoires. S'il fallait citer les
facteurs qui violent avec une rare cruauté la dignité de l'homme
dans les prisons, qui placent le détenu à la lisière de
l'humanité, on signalerait immédiatement l'insalubrité qui
est la conséquence cette de la surpopulation. Cette dernière
accouche de la gale, de la tuberculeuse et même du Sida. Les prisons
sénégalaises comptent un nombre assez significatif de
sidéens.
Pour ce qui est des soins médicaux, le
Sénégal est loin de répondre aux règles minima qui
exigent un médecin qualifié. A la tête de tous les
établissements pénitentiaires du Sénégal se trouve
un seul médecin, c'est un militaire qui a le grade de commandant. Il est
célèbre pour sa générosité et sa
disponibilité, sinon le personnel se compose d'un infirmier major et de
plusieurs autres agents sanitaires. En ce qui concerne les médicaments,
la règle c'est la « pénurie » dans
toutes les prisons du Sénégal. Pour y pallier, on a recours
à la collecte de médicaments auprès des Pharmacie de la
place, d'ONG caritatives et de mécènes. La
précarité caractérise particulièrement les soins au
Sénégal. On meurt souvent dans les prisons
sénégalaises, même si c'est entouré du plus grand
secret.
Un autre fait marquant de la précarité des
conditions matérielles de détention au Sénégal
reste la qualité du régime alimentaire. Cette dernière est
sans commune mesure avec celle indiquée à l'article 53 de
l'arrêté n° 007117/DAP abrogeant et remplaçant
l'arrêté n° 8683/M/NT/DAP abrogeant et remplaçant
l'arrêt n° 8683/MINT.CAB.CT du 29 juin 1967 modifié portant
règlement intérieur des établissements
pénitentiaires.
Cependant, dans les prisons sénégalaises, la
nourriture laisse à désirer au plan qualitatif et quantitatif. Le
petit déjeuner est composé de quinquéliba avec du pain. Le
repas de midi, le riz avec du poisson sec (kéthiax) ou hareng (yaay
booy), les prisonniers l'appellent le « Diagan ». Le soir,
c'est de la semoule ou du cous-cous mélangé de la sauce
prélevée au Diagan de midi. Le repas du soir, les prisonniers
l'appellent le « younko » à Rebeuss. La
quantité est souvent insuffisante, dans certains établissements,
les prisonniers prennent deux ou trois cuillérées et vident leur
gamelle. Les prisonniers politiques et certains qui sont plus riches,
reçoivent la nourriture de leur famille. Cependant, les repas sont pas
toujours fouillés avant livraison, par des gardes pour des raisons de
sécurité.
Certes, nos prisons sont fort différentes des prisons
mouroirs tristement célèbres du camp Boiro (Guinée), de
Tazmamart (Maroc), de Walata (Mauritanie) mais la réalité est
qu'elles ne correspondent pas aux normes établies en matière de
détention. Il faut rappeler que ces mauvaises conditions commencent
depuis les lieux de garde à vue.
2 - Au niveau des lieux de garde à
vue
Les lieux de garde à vue doivent être assez
convenables et se situer dans un emplacement discrets pour sauvegarder la
dignité d'une personne dont la justice n'a pas encore
décidé du sort. Malheureusement dans la plupart des pays en voie
de développement notamment le Sénégal les gardés
à vue sont dénudés puis jetés dans des lieux
insalubres, infestes et très dégradant pour un humain.
Généralement, ils sont mis dans de petits cellules situées
dans les commissariats de police, parfois même dans les toilettes de ces
commissariats.
Malgré la faiblesse des moyens économiques et
matériels, rien ne justifie de telles pratiques qui constituent,
à nos yeux, un traitement dégradant et inhumain.
La garde à vue qui est un simple maintien à
disposition des services de police pour les besoins de l'enquête et
reposant sur la recherche de la preuve ne doit pas compromettre la
dignité de la personne poursuivie et de l'exposé aux pires abus.
Cependant, on voit que les conditions de la garde à vue
présentent une certaine dissemblance par rapport à celle des
condamnés au niveau des établissements pénitentiaires.
En tout état de cause, la précarité des
conditions d'existence des détenus, le fait qu'elle touche l'individu
dans ce qu'il a de plus cher, de plus précieux, en l'occurrence son
honneur, sa dignité, son patrimoine, voire sa vie, construit un
sentiment de honte chez les détenus. Cela, allié à l'ennui
au sein de l'univers carcéral, construit la haine pour chaque
année passée en prison. Cette dimension psychologique de la
détention découle plus ou moins de l'absence de dérivatif
à l'ennui des détenus.
B - L'absence de dérivatif à l'ennui
Il y a lieu de voir les raisons de cette absence avant de voir
ses conséquences.
1 - Les raisons de cette absence
De par sa configuration architecturale, la prison est un
univers ennuyeux. C'est pourquoi les autorités ont prévu un
certain nombre d'activités carcérales lesquelles constituent un
palliatif significatif à l'ennui des détenus. Cependant les
dispositions réglementant ces activités sont vidées de
leur sens faute de moyens. Il en est ainsi du travail et de la formation
professionnelle mais aussi des loisirs ou moments de détente.
Le décret n° 86-1466 du 28 novembre 1986
réglemente le travail dans les prisons au Sénégal en
définissant les catégories des détenus qui peuvent en
bénéficier et en précisant les modalités de
rémunération, la durée du travail et ceux qui sont les
travaux disponibles dans les prisons, etc. Les détenus ont la
possibilité de travailler aussi bien à l'intérieur
qu'à l'extérieur de la prison.
Les prisons sénégalaises abritent plusieurs
types d'activités telles que la vannerie, le tissage, la menuiserie, la
cordonnerie, la teinture, la peinture etc. Mais la grande majorité des
prisonniers reste à l'écart de ces activités faute de
moyens, ce qui vide le décret susmentionné de son contenu. Il
n'est pas rare de voir des établissements pénitentiaires
où ces activités fonctionnement au ralenti. Les matières
premières, l'espace, les équipements et l'encadrement font
cruellement défaut.
A l'extérieur de la prison, non seulement, il ne
s'effectue pas dans les conditions de sécurité minimales, mais le
travail pénitentiaire est également mal
rémunéré. Les chiffres de 50 f l'heure et 40 heures sont
avancées pour les travaux en régie et chez les
particuliers.86(*)
Par ailleurs, une politique d'éducation, de formation
et d'alphabétisation bien pensée et bien exécutée
n'existe ^pratiquement pas malgré l'article 690 alinéa 2 du code
de procédure pénale qui prévoit « un
enseignement scolaire et professionnel pour les condamnés dont la peine
doit expirer avant qu'ils aient atteint l'âge de vingt huit
ans ». L'expérience a montré qu'une
éducation solide exerçait une influence positive sur les
criminels. L'alphabétisation jouerait un rôle fondamental dans
l'éducation et la formation des prisonniers en les aidant à
maîtriser leur environnement pour une meilleure resocialisation.
Aussi, la loi a-t-elle prévu des moments de
détente. Parmi les activités de loisir figurent le Foot-ball, la
lutte traditionnelle, les jeux de société et la lecture.
Toutes ces activités contribuent à
l'équilibre mental des détenus et constituent des facteurs
dérivatifs à l'ennui et atténuent en voie de
conséquence la violence en milieu carcéral. Cependant, leur
ineffectivité comme on vient de le voir n'est pas sans
conséquence sur l'équilibre psychique des détenus.
2 - Les conséquences de cette
absence
Le confinement dans un espace restreint et reclus est source
d'agressivité, de déprime et de troubles psychiques.
L'oisiveté et la claustration favorisent des comportements
déviant et pervers.
Ainsi, les conséquences du défaut
d'activités dans les prisons sont double : d'une part, elles se
manifestent par des troubles psychiques et d'autre part par des comportements
déviant et pervers.
En effet, l'oisiveté des détenus construit tout
d'abord la chaîne qui se manifeste par la plainte qui a pour premier lieu
d'expression le corps. Ainsi, les détenus somatisent, tombent malades,
connaissent des troubles alimentaires ou digestifs. A Rufisque, il y a des
femmes détenues qui n'ont même plus de règles, parfois
durant toute leur détention. Les états de protestation ou de
dépression grave, les taux de suicide ou d'automutilation sont plus ou
moins élevés.
L'oisiveté entraîne aussi des comportements
déviants. En effet, des pratiques parfois forcées
d'homosexualité sont fréquentes. Les gardiens de prison sont
parfois victimes d'acte de violence. Ils sont perçus couvent comme les
responsables directs de la situation des détenus.
Les atteintes aux conditions d'existence des détenus
ainsi exposées ne fait que confirmer les inquiétudes des
organisations des droits de l'homme qui ne cessent de tirer la sonnette
d'alarme à ce propos. Mieux, la cause de ces atteintes découle
dans une certaine mesure de l'ineffectivité des mécanismes de
protection des détenus.
Parag. 2 - L'ineffectivité des mécanismes de
protection des détenus
Le législateur a accordé un certain nombre de
garanties aux détenus parallèlement à leur
« droit à un traitement juste » et à
l'interdiction de toute action ou punition arbitraire. Pour ce faire, il a
dégagé des mécanismes de protection des détenus
pour les assister en cas de besoin et pour contrôler la conformité
de leurs conditions d'existence par rapport aux normes établies à
cette fin. Mais en réalité l'application largement ineffective de
ces mécanismes de protection n'est plus à démontrer.
Ce qui nous amène à voir l'ineffectivité
de l'assistance juridique et sociale (A) avant de voir l'ineffectivité
du contrôle des établissements pénitentiaires (B).
A - L'ineffectivité de l'assistance juridique et
sociale aux détenus
Nous allons voir successivement la faiblesse de l'assistance
juridique et la faiblesse de l'assistance sociale aux détenus.
1 - La faiblesse de l'assistance
juridique
L'assistance juridique est la matérialisation de l'Etat
providence en matière de justice. Elle est d'ailleurs au coeur du
mouvement pour l'accès à la justice. Elle se définit comme
un concours apporté aux personnes dont les ressources sont insuffisantes
pour faire valoir leurs droits en justice, en les dispensant totalement ou
partiellement des frais occasionnés par l'instance.87(*) Elle a une valeur
constitutionnelle et est garantie par différents instruments
internationaux.
Ainsi, l'assistance juridique qui est un droit fondamental
existe théoriquement pour tous les détenus, la justice lui en
fournit un d'office. Mais, la réalité est malheureusement tout
autre. Ceux qui se défendent bien sont justement ceux qui payent les
services d'une assistance juridique qui veille au suivi du dossier et au
respect de la procédure judiciaire.
Le constat récurrent est que, ceux qui voient souvent
leurs intérêts lésés, qui sont victimes d'injustices
caractérisées, qui sont détenus arbitrairement, qui font
l'objet de détention préventive dont les délais sont
anormalement longs, sont justement ceux qui n'ont pas d'avocats.
Dans ce même ordre d'idées, il convient de
souligner que même si la justice fournit d'office des avocats aux
détenus qui n'ont pas les moyens d'en avoir, le constat est que
l'assistance juridique profite souvent aux détenus les plus nantis.
Parallèlement à l'assistance juridique,
l'assistance sociale des détenus reste aussi très faible.
2 - La faiblesse de l'assistance
sociale
L'assistance sociale aux prisonniers est très faible au
Sénégal. Du fait des préjugés tenace liés
à la forte péjoration de l'univers carcéral par al
société. Un juge fait remarquer à ces propos qu'au
Sénégal, quand un détenu sort de prison, il va d'abord se
jeter dans la mer pour se purifier.
Le problème est que le détenu souffre d'une
double réclusion : carcérale et sociale. Dans ces
conditions, parler de l'existence d'une assistance sociale des détenus
au Sénégal serait à la limite de la diffamation.
Pourtant du côté de l'administration
pénitentiaire, l'assistance sociale existe, à travers l'agent
dévolu à cette tâche ou le faisant fonction. Mais elle
reste faible par rapport à la demande et pratiquement quasi-inexistant
dans certaines régions.
En outre, si l'agent chargé de l'assistance sociale
existe aussi dans certains établissements pénitentiaires, il
souffre tout de même d'un manque criard de moyens pour satisfaire la
forte demande des détenus. Ce qui fait que l'assistance sociale des
détenus existe théoriquement au Sénégal. Le recours
des détenus reste les organisations non gouvernementales qui
interviennent en milieu carcéral à travers des actions
caritatives de soutien aux détenus les plus démunies.
Peut-être l'ineffectivité des contrôles que devraient
exercées les autorités administratives, compétentes sur
les établissements pénitentiaires est à l'origine des
atteintes portées sur les droits des détenus.
B- L'ineffectivité des contrôles
exercées sur les établissements pénitentiaires au
Sénégal
La prison est nécessairement une institution dont le
fonctionnement, à l'abri de ses mûrs, n'est pas aisé
à contrôler tant par les gouvernants que par les citoyens. Pour
éviter qu'elle ne devienne le lien privilégié du
« non droit », il importe que les détenus qui sont
appelés à y vivre soient protégés contre les
contraintes de la précarité et contre l'insécurité
juridique qui l'animent. Pour ce faire, le législateur a prévu
à la fois un contrôle périodique des autorités
judiciaires et un contrôle permanent de la commission de surveillance des
prisons. Mais en réalité, si le contrôle des
autorités judiciaires est considéré somme toute
inopérant le contrôle de la commission de surveillance est quant
à lui inapproprié.
1 - Le contrôle inopérant des
autorités judiciaires
Les textes prévoient l'intervention largement
ineffective et inefficace de nombreuses autorités judiciaires : le
Procureur de la République, le Procureur général pour les
prévenus, le juge d'instruction, le juge des enfants et le
président de la Chambre d'accusation.
Mais avec la loi n° 2000-38 du 29 décembre 2000
modifiant certaines dispositions du code pénal, le législateur a
introduit le juge de l'application des peines afin de renforcer le
contrôle de l'exécution des peines. Assurément, beaucoup se
réjouissaient de cette institution dont l'absence avait
été unanimement regrettée par tous les défenseurs
des droits de l'homme. Mais l'absence de cette institution de protection des
détenus vaut mieux que son existence sans effet. En effet, l'obligation
de contrôle des établissements pénitentiaires par les
différentes autorités juridiciaires précitées
existe théoriquement pour ne pas dire qu'elle est quasi-inexistente dans
les faits. En fait, lors de notre visite à la maison d'arrêt et de
correction de Diourbel, le secrétaire du Régisseur nous a
confirmé que depuis son instauration, le juge de l'application des
peines n'est jamais venu à la prison. Pourtant, il pouvait avoir une
influence grandissante dans l'amélioration de la situation des
détenus.
Par ailleurs, il y a aussi les commissions de surveillance des
prisons qui exercent un contrôle permanent sur les établissements
pénitentiaires. Mais ce contrôle est à la limite
inapproprié car ces commissions de surveillance ne peuvent prendre
directement aucune mesure sanctionnant les atteintes portées aux droits
des détenus.
2 - Le contrôle inapproprié des
commissions de surveillance
Le rôle des commissions chargées de la
surveillance des prisons est encore plus formel et inefficace que celui des
autorités judiciaires. Attachées à chaque
établissement pénitentiaire et étant sous la direction de
la Division nationale des contrôles et des enquêtes, les
commissions de surveillance comme l'on pouvait s'y attendre ne disposent
d'aucun acte d'autorité.
En effet, elles sont chargées simplement d'assurer la
surveillance intérieure des prisons en ce qui concerne la
salubrité, la sécurité, le régime alimentaire.
Il en est de même du rôle que joue la commission
pénitentiaire consultative de l'aménagement des peines. Cette
dernière qui est établie au niveau de chaque prison est
simplement chargé de contrôler la situation de chaque
condamnée d'en informer le juge de l'application des peines et de lui
donner son avis dans les mesures d'aménagement des peines. Ainsi, elle
n'a pas de pouvoir d'action directe et ne peut faire aucun acte
d'autorité. Pourtant ces commissions qui sont plus proches des
détenus que les autorités judiciaires devraient être
autorisées à prendre des mesures préventives en toute
circonstance.
Au terme de cette étude, nous pouvons dire qu'au
Sénégal comme ailleurs, il reste beaucoup à faire pour
que l'effectivité dans l'application des droits fondamentaux des
détenus soit une réalité et que les détenus qui
croupissent dans quartiers avec une violation courante et sévère
de leurs droits puissent retrouver leur dignité.
La dimension inhumaine de la détention ne
baisse pas le taux de la criminalité et son amélioration ne
l'augmente pas non plus. Les arguments qui militent en faveur d'une meilleure
protection de ces droits doivent être connus de tous. Les moyens d'y
parvenir aussi. Des réponses sont développées, pour
permettre au dernier axe de la réflexion, de proposer les efforts
nécessaires à faire pour une meilleure protection de ces
droits.
CHAPITRE II - POUR UNE MEILLEURE PROTECTION DES DROITS
FONDAMENTAUX DES DETENUS AUX SENEGAL
Avec le chapitre précédent, les droits
fondamentaux des détenus au Sénégal sont ainsi mieux
contextualisés pour comprendre d'avantage comment ils sont
étouffés de bien des côtés par des lacunes
diverses.
Ces dernières ont une multitudes de causes concurrentes
et ne pourront être rétablies que par une multitude de
remèdes concurrents. Pour tenter de résoudre ces lacunes
complexes, quelle qu'elles soient, nous devons faire entrer en ligne de compte
tous les facteurs significatifs, non pas un seul et unique. Ainsi, quelles sont
les conditions pour une meilleure protection des droits fondamentaux des
détenus au Sénégal ? Comment faire fructifier les
acquis déjà obtenus en la matière ?
Par ces questionnements, la réflexion est de plein-pied
dans la logique d'une vision prospective dans la protection de ces droits.
Cependant, il convient de souligner que l'efficacité
absolue de la protection est difficile dans un pays sous
développé comme le Sénégal surtout si l'on veut
appliquer l'ensemble des règles minima pour le traitement de
détenus. Mais les efforts qui conduisent à une meilleure
protection, les forces qui mènent à l'amélioration des
conditions de vie des détenus existent. Elles naissent par l'engagement
résolu de l'Etat à vaincre les inégalités
économiques. En effet, le Sénégal a connu une tendance
à la baisse de son PIB par tête d'habitant depuis un quart de
siècle. La crise économique perdure depuis la fin des
années 70. La dévaluation du franc CFA en début de 1994 a
été le couronnement logique des contre-performances
économiques enregistrées. Les données marquants depuis la
fin des années 70 au plan économique sont l'autorité et la
politique de désengagement de l'Etat des secteurs économiques et
même sociaux. Ce contexte économique sénégalais
n'est pas sans influence sur l'état des prisons et des prisonniers.
Ainsi, pour parvenir à réaliser un véritable
« marketing pénitentiaire » la lutte contre la
pauvreté doit, plus que jamais, retenir l'attention du gouvernement et
de tous les acteurs au développement.
Mais, il ne s'agit pas de nous focaliser uniquement dans cette
perspective que nous voyons à plus long terme. Il s'agit plutôt de
faire des efforts pour résoudre deux nécessités urgentes
que présenteront, à notre avis, la lutte contre l'impunité
(section 1) et la lutte contre les rigueurs carcérales (section 2).
C'est dans cette voie que la protection des droits
fondamentaux des détenus pourrait trouver davantage d'efficacité,
chaque jour, un peu plus.
Section I - La lute contre l'impunité
L'impunité est un concept relativement récent
pour un vieux phénomène d'injustice, à savoir le
non-respect des droits fondamentaux des détenus. « La
manière par laquelle l'homme par ses agents indique clairement dans
quelle mesure il est décidé à assurer une protection
efficace de ces droits »88(*). Bien souvent, l'engagement d'un Etat à
défendre ces droits est démenti dans la pratique par une
succession de violations et d'impunité. La majorité des
pays-africains dangerosité variables la culture de l'impunité.
Dans certains pays, l'impunité est garantie par une législation
qui met les responsables des violations à l'abri de poursuites
judiciaires. Dans d'autres pays comme le Sénégal, malgré
l'existence de dispositions juridiques visant à mettre en accusation les
responsables, l'impunité demeure la règle. D'où la
nécessité d'intensifier les efforts en vue de traduire les
coupables d'abus de droit devant la justice et de briser ainsi le cycle
d'impunité l'un des moyens les plus efficaces de combattre les
injustices graves à l'égard des détenus consiste à
veiller à ce que les auteurs soient punis pour les violations graves
commises dans ce domaine. Dans un pays où le système judiciaire
ne fonctionne pas de façon satisfaisante, il est nécessaire
d'instituer des réformes législatives allant dans le sens du
renforcement des mécanismes de contrôle de la détention
(Parag.I ) et la fermeté dans la répression des coupables
(parag.II ).
Parag. I - Le renforcement des mécanismes de
contrôle de la détention au Sénégal
Selon Maître Kaba « l'injustice de la justice
est insupportable comme l'est du reste la justice de l'injustice ».
Cette donnée philosophique nécessite pour être
réalisable l'existence d'un contrôle approfondi à toutes
les stades de la procédure de détention. Ce contrôle permet
de dissuader les agents pénitentiaires et les officiers de police
judiciaire de voire leur responsabilité engagée en cas d'abus de
droit. Il permet aussi d'engager plus facilement la responsabilité de
ceux qui ne respectent pas les droits qu'ils sont chargés de surveiller
ou de sanctionner. Dans cette perspective, un contrôle approfondi sur les
établissements pénitentiaires (A) et sur l'instruction par la
chambre d'accusations et son président (B) doit plus que jamais faire
l'objet de réformes législatives.
A - L'approfondissement du contrôle sur les
établissements pénitentiaires
L'approfondissement du contrôle sur les
établissements pénitentiaires passe par l'indépendance des
organes de contrôle et la création d'autres organes de
contrôle.
1 - L'indépendance des organes de
contrôle
L'indépendance des organes de contrôle par
rapport au pouvoir politique et à l'administration pénitentiaire
permet non seulement de dénoncer, sans risque, les auteurs d'acte de
violence ou de mauvais traitements à l'égard des détenus
mais aussi et surtout d'engager des poursuites judiciaires contre ces
mêmes auteurs. En effet, les agents des services pénitentiaires
commettent régulièrement des actes de tortures et des
sévices contre les détenus en toute impunité ou presque,
apparemment persuadés qu'in ne leur demandera jamais de répondre
de leur crime. En fait, la coordination de certains organes de contrôles
des prisons par le gouverneur, dans les établissements relevant de son
ressort, constitue une limite objective à l'indépendance de ces
organes. Emanations du pouvoir exécutif, le gouvernement peut faire
preuve de mauvaise foi dans la dénonciation et la sanction des
tortionnaires et cela pour des raisons d'opportunité politique. Il en
est de même du régisseur de chaque établissement qui fait
partie de certaines commissions de surveillance relevant de son ressort. Le
détenu conscient de cette vérité, n'accorde plus de
crédit à ces organes et à ceux qui sont chargés de
les conduire.
Ainsi, l'indépendance des organes de contrôle par
rapport au pouvoir politique et à l'administration pénitentiaire
présente de multiples avantages concourants tous à la lutte
contre l'impunité. En effet, il permet la publicité des rapports
de contrôle de façon régulière et permanente, ce qui
constitue un point de départ important dans la dénonciation et la
poursuite judiciaire des auteurs de certains actes de barbarie à
l'égard des détenus. Mieux, l'élargissement du
contrôle à d'autres organes est aussi une recommandation qu'il
nous paraît important de prendre en compte dans la lutte contre
l'impunité.
2 - L'élargissement des organes de
contrôle.
La recommandation la plus fondamentale forte implication de la
société civile. Cette dernière pourra, à travers
les comités locaux de solidarité avec les prisonniers (CLSP)
regroupant des ONG de défense des droits de l'homme et de
développement, des organisations caritatives, des associations et
syndicats d'enseignants, des médecins, des avocats, des travailleurs
sociaux et des religieux, battre en brèche la
déconsidération et le dédain dont sont paradoxalement
victimes les détenus et de briser en conséquence le cycle de
l'impunité. Ces structures de relais, d'appui et de soutien
s'assigneraient comme tâche de veiller au respect des droits fondamentaux
des détenus et d'engager des poursuites judiciaires pour la sanction des
agents coupables de mauvais traitements à l'égard d'un
détenu.
Par ailleurs, la création d'un corps de
« médiateurs des prisons » à l'échelon
des régions pénitentiaires avec les délégués
installés dans chaque établissement pénitentiaire et
principalement investis d'une fonction d'observation serait très
significative dans la lutte contre l'impunité.
De surcroît, il convient d'engager des réformes
législatives afin de permettre aux députés d'avoir un
droit de visite permanent dans les établissements relevant de leur
département.
Enfin, les inspecteurs du travail ou de l'inspection
général du travail et ses directions régionales, en
collaboration avec les autres organes de contrôle, doivent être
impliqués aussi dans la recherche de solutions aux problèmes de
la prison à travers des contrôles spéciaux ou
techniques.
Au-delà de ces contrôles sur les
établissements pénitentiaires, la chambre d'accusation doit aussi
s'impliquer davantage dans le contrôle de l'instruction.
B - L'approfondissement d'accusation
Ce contrôle trouvera sa portée sur deux
niveaux : - d'une part au niveau des demandes de libertés
provisoire et d'autre part au niveau du contrôle dans le fonctionnement
même des cabinets d'instruction.
1 - La réaffirmation du contrôle de
la chambre d'accusation sur les demandes de liberté
provisoire
La loi sénégalaise du 21 juillet 1965
inspiré du code Napoléonien qui fit du juge d'instruction
« le personnage le plus puissant du royaume » avait conduit
à beaucoup d'abus notamment par abstention les lois du 27 février
1985 et 29 janvier 1999 sont venus renforcer la protection des libertés
individuelles en transformant la détention préventive en
détention provisoire limitée et organisée, et en
permettant la présence de l'avocat dans toutes les phases de la
procédure.
Cependant, il convient de dégager de nouvelles
réformes pénales afin d'impliquer davantage la chambre
d'accusation et son président dans toutes les phases de l'instruction
surtout en ce qui concerne la procédure des
« référé-liberté ». La main
mise de cette procédure par les mêmes magistrats qui ont
prononcé le mandat d'arrêt présente de graves dangers pour
les citoyens. Au lieu d'être menée par un magistrat impartial et
sous le contrôle de la Chambre d'accusation, les demandes de
liberté provisoire passe entre les mains du ministère public plus
soucieux de l'efficacité de ses interventions que de protéger ces
libertés. En effet, aux termes de l'article 139 du code de
procédure pénale « la demande de mise en liberté
provisoire d'une personne détenue provisoirement pour l'un des crimes ou
délits spécifiés à l'alinéa
précédent sera déclarée irrecevable si le
Ministère public si oppose par réquisition dûment
motivée ». Le législateur doit apporter deux
séries de modifications à cet article :
- d'une part, il doit dessaisir le Ministère public de
cette procédure et renvoyer l'examen de l'appel à la Chambre
d'accusation.
- D'autre part, la mise en liberté de la personne mise
en examen ne doit plus être subordonnée uniquement au
caractère manifestement non fondé de la détention mais
devra intervenir si la chambre d'accusation juge qu'elle n'est pas
justifiée au regard des conditions prévues par la loi. Ainsi, la
chambre d'accusation pourra plus largement, pour des raisons juridiques,
statuer en faveur de la liberté et n'apparaîtra donc plus comme le
« santionnateur » d'un juge d'instruction
« irresponsable » parce qu'ayant pris une décision
manifestement excessive. Ce qui rendra son contrôle plus aisée. Ce
contrôle doit être poussé même jusqu'au fonctionnement
des cabinets d'instruction.
2 - Le contrôle de la chambre d'accusation
sur le fonctionnement des cabinets d'instruction
Le législation pénale sénégalaise
devrait renforcer la contrôle de l'instruction par la Chambre
d'accusation en complétant les lois y afférentes ou en instituant
de nouvelles lois sur deux niveaux :
Premièrement que le président de la chambre
d'accusation doit transmettre au moins une fois par an aux chefs de la Cour
d'Appel et aux chefs du tribunal de grande instance concerné ses
observations écrites sur le fonctionnement des cabinets
d'instruction.
En second lieu que les détenus pourront saisir la
Chambre d'Accusation si aucun acte n'a été accompli depuis trois
mois en cas de détention provisoire en matière correctionnelle et
un an en matière criminelle. Aussi qu'en cas d'inaction prolongée
du juge, la Chambre d'Accusation devant alors soit évoquer, soit
désigner un autre juge. Ce qui permet d'exiger une
« sur-motivation » des juges en cas de prolongation de la
détention provisoire en matière criminelle et de fixer des
délais raisonnable de détention en matière criminelle.
En somme, les mécanismes de contrôle de la
détention ainsi exposés permettent d'engager plus facilement la
responsabilité de ceux qui ne respectent pas les droits des
détenus.
Parag.2 - La fermeté dans la répression des
coupables
Le meilleur moyen de lutter contre l'impunité est de
renforcer la sanction des officiers de police judiciaire et des gardes
pénitentiaires violant les droits des détenus. Ainsi, des efforts
législatifs en vue de traduire les auteurs de ces actes devant la
justice doivent être menés à travers le relecture des
règles d'engagement de la responsabilité des coupables (A) et
l'adoption de nouvelles mesures sanctionnatrices (B).
A - La relecture des règles d'engagement de la
responsabilité des coupables
Le renforcement de la responsabilité des coupables ne
peut triompher que si les procédures d'engagement de leur
responsabilité sont allégées. Pour ce faire, il convient
de supprimer le privilège de juridiction des officiers de police
judiciaire et de réaffirmer le droit d'action des détenus.
1 - La suppression du privilège de
juridiction des officiers de police judiciaire
La reconnaissance de la responsabilité pénale
des officiers de police judiciaire n'est pas facile à obtenir. Certains
parlent même de complaisance, voire de complicité de la part de la
justice lorsqu'il s'agit de sanctionner les policiers qui utilisent, parfois
des moyens illégaux pour l'obtention des aveux. Le
bénéfice du privilège de juridiction garantie
l'impunité des officiers de police judiciaire et met les responsables
des violations à l'abri de poursuites judiciaires. En effet, les juges
de la Chambre d'accusation ne donnent pas souvent aucune suite aux plaintes
déposées par les victimes ou leurs familles. Dans d'autres cas,
les enquêtes sont compromises et débouchent sur une peine
légère pour l'officier de police judiciaire auteur du crime ou
délit.
Pourtant, le code pénal les sanctionne lorsqu'ils
commettent des actes arbitraires ou attentatoires à la liberté
individuelle.
Pour éviter que les magistrats de la Chambre
d'accusation se montrent indulgents à l'égard des officiers de
police judiciaire, il convient de faire disparaître leurs
privilèges, de juridiction en cas de violation des règles
établies en matière de garde à vue. Dans ce même
ordre d'idées, pour éviter que les magistrats du ressort
où l'officier de police exerce ses fonctions ne soient conduits à
se montrer indulgents à l'égard de l'un de leurs auxiliaires, le
législateur doit apporter aussi une dérogation relative à
la juridiction compétente ratione loci.
En d'autres termes, le législateur doit prévoir
aussi dans le code de procédure pénale que lorsqu'un officier de
police judiciaire est susceptible d'une inculpation, le procureur de la
République doit présenter sans délai une requête
à la cour suprême qui désigne la juridiction chargée
de l'instruction ou du jugement de l'affaire.
Une autre recommandation importante à souligner repose
sur la réaffirmation du droit d'action des détenus.
2 - La réaffirmation du droit d'action des
détenus
Nul doute doit être puni sans avoir eu la
possibilité de se défendre et avoir vu son cas
« munitieusement examiné » par une autorité
compétente. Le détenu a la possibilité de faire
réviser sa sanction par une autorité supérieure à
celle-ci. Ainsi, les détenus ne sont pas exclus de plaintes et des
requêtes. Mais, ce droit de porter plainte est ineffectif en
réalité en raison de sa faible utilisation par les
détenus. En fait, le personnel pénitentiaire est souvent
responsable d'actes de violence contre les détenus. Les bastonnades, les
mauvais traitements, les humiliations sont fréquemment
dénoncés par d'anciens détenus. Pourtant, les
détenus ont le droit de porter plainte et ce parallèlement
à leur « droit à un traitement juste et à
l'interdiction de toute action ou punition arbitraire.
Cependant, on essaie souvent d'intimider les victimes qui
craignent la plupart du temps des représailles de l'Administration
pénitentiaire ou de la censure de leur requête.
Partant de cette situation, il est donc recommandé la
« nomination d'inspecteurs externes indépendants »
pour traiter les plaintes des détenus afin d'éviter les censures
de l'Administration. Il est aussi recommandé que les détenus
puissent déposer plainte à l'extérieur auprès des
autorités judiciaires, des médis et de la police.
Enfin, il est recommandé que les détenus
puissent s'informer de procédures et de la transmission de leurs
plaintes auprès des mêmes autorités
précitées.
Le droit d'action détermine souvent l'étendue de
la protection d'une personne par al loi, ce qui s'avère
particulière dans le cas d'une personne privée de sa
liberté. C'est également l'un des moyens les plus sûrs de
lutter contre l'impunité en sanctionnant tous les cas
avérés conformément à l'article 90 du décret
n° 86-1466 du 28 novembre 1986. Cependant des efforts législatifs
doivent être menés afin de sanctionner davantage les coupables.
Ainsi, l'adoption de nouvelles mesures sanctionnatrices permettra de renforcer
la protection des détenus.
B - L'adoption de nouvelles mesures
sanctionnatrices
L'adoption de nouvelles mesures sanctionnatrices permettra de
donner plus de crédibilité à la protection des droits des
détenus. Ces mesures seraient nécessaires à l'égard
des officiers de police judiciaire et en cas de détention
illégale
1 - A l'égard des officiers de police
judiciaires
Indépendamment de la sanction des infractions grave
commises par la police, il est souhaitable que la justice sanctionne plus
souvent par exemple la pratique de certains officiers de police judiciaire
consistant à passer systématiquement les menottes à un
individu qui a fait l'objet d'une simple plainte pour l'amener de force au
commissariat de police. Une telle pratique est humiliante et constitue une
infraction pénale de violences et voies de fait volontaire, dès
lors que cet individu ne s'est pas rebellé et que l'officier de police
judiciaire ne peut se prévaloir d'un motif légitime. La mise en
oeuvre de la responsabilité pénale et civile étant
difficile en pratique, c'est très souvent à une sanction d'ordre
disciplinaire que le supérieur hiérarchique recourt.
Ce dernier a pourtant intérêt à être
particulièrement vigilant puisque sa propre responsabilité peut
être engagée comme doit l'être celle du magistrat
instructeur qui ordonne une détention provisoire que rien ne peut
justifier. Pour ce faire de nouvelles mesures sanctionnatrices doivent
être prises en cas de détention illégale.
2 - En cas de détention
illégale
S'il est nécessaire que la réglementation de la
détention provisoire soit adéquate, il faut aussi que l'Etat
répare autant que possible, le dommage causé à une
personne victime d'une détention illégale ou d'une
détention provisoire inopérante ou inutile. Autrement dit, un
droit de réparation doit être ouvert à toute personne qui a
été privée de sa liberté dans des conditions
incompatibles avec les dispositions de la législation pénale
sénégalaise. Il y a lieu de citer l'article 9-5 du pacte
international relatif aux droits civils et politiques, fait à New-York
le 19 décembre 1966 et approuvé par l'article 98 de la
Constitution sénégalaise qui consacre à « tout
individu victime d'arrestation ou de détention illégale un droit
de réparation ».
Ainsi, il serait souhaitable d'instaurer un régime
d'indemnisation financière au profit des personnes
« victimes » de ce genre de détention. Ce qui permet
de réparer la préjudice causé à une personne qui a
été privée de sa liberté sans respecter les
règles de procédures ou les causes prévues par la loi
interne.
L'action doit être portée devant les juridictions
ordinaires dans les formes prévues par le code de procédure
pénale et dirigée contre l'Etat du Sénégal en la
personne du Ministre de la Justice. Ce sera une matière de
conférer à la « victime » un
intérêt à obtenir réparation d'un dommage
exceptionnel causé par la fonctionnement de la justice pénale,
sans qu'une faute ait été commise. Ce qui permet
d'améliorer la position juridique du citoyen et qu'elle apporte aussi
une réponse à la question lancinante posée par ceux qui
ont subi une détention illégale ou inopérante.
L'instauration d'un régime d'indemnisation
financière au profit des personnes « victimes » de
détentions illégales peut pousser, dans une certaine mesure,
l'Etat à enclencher réellement la lutte contre les rigueurs
carcérales.
Section II - La lutte contre les rigueurs
carcérales au Sénégal
L'appréciation de la politique pénitentiaire
aboutit au constat selon lequel le Sénégal a mal avec ses
prisons. Grave, la maladie est également honteuse. Déjà
indécentes, les conditions continuent de se dégrader - l'univers
carcéral sénégalais se signale par son caractère de
gardiennage immonde, la modicité ou l'insuffisance des moyens
financiers, matériels, logistiques et le non-respect des plus
élémentaires droits de l'homme.
Il paraît alors autorisé de voir quel type
d'actions prioritaires faudrait-il engager pour renforcer la protection des
détenus et lutter contre ces rigueurs carcérales ?
Les problèmes auxquels sont confrontés les
détenus au Sénégal touchent tous les établissements
du pays. L'expérience montre qu'une amélioration décisive
de la situation pénitentiaire du Sénégal pourrait
être obtenue au moyen des deux trains de mesures suivantes :
- l'amélioration de la politique pénitentiaires
(parag.1) ;
- l'humanisation de l'univers carcéral (parag.2).
Parag.1 - L'amélioration de la politique
pénitentiaire
Les recommandations pourraient s'articuler autour de deux axes
que sont :
- l'amélioration des conditions d'incarcération
(A) ;
- l'amélioration des conditions de travail des
personnels judiciaires et pénitentiaires (B).
A - L'amélioration des conditions
d'incarcération
L'amélioration des conditions d'incarcérations
passe principalement par la lutte contre l'engorgement carcéral mais
aussi par l'encouragement de la communication entre détenus et
administration pénitentiaire.
1 - La lutte contre l'engorgement
carcéral
Aucune nouvelle prison n'a été construite au
Sénégal depuis l'indépendance. Les normes internationales
de détention prévoient un écroué pour une surface
de 3,5 m² et un volume de 5 m 3. Dans l'ensemble, les lieux de
détention sont estimés en volume à 3503,1 m3 et en surface
à 10 562,3 m². Au 31 décembre 2001, un nombre de 16 993
personnes ont été écroués dans l'ensemble des
établissements pénitentiaires pour diverses infractions à
la loi. Ainsi, en tenant compte de la surface d'occupation, il y aurait une
non-conformité avec les normes internationales. Cette situation traduit
l'engorgement des prisons. Il est évident que l'un des problèmes
de fond majeurs reste celui de la surpopulation, l'engorgement carcéral.
Pour le combattre ou le réduire significativement, il
serait souhaitable de recouvrer davantage à la formule des peines
alternatives, des mesures non privatives de liberté, de
libérations conditionnelles. Mais la recommandation la plus fondamentale
pour lutter contre l'engorgement carcéral reste la construction de
nouvelles prisons. Cette dernière emporte l'adhésion du plus
grand nombre.
Au-delà de la lutte contre l'engorgement
carcéral, il convient d'encourager aussi la communication entre les
détenus et l'administration pénitentiaire.
2 - L'encouragement de la communication entre les
détenus et l'Administration pénitentiaire
L'ensemble des dispositions réglementaires relatives
à la vie carcérale doivent être portées à la
connaissance des détenus, spécialement celles relatives à
la discipline, aux possibilités de communication avec la famille, avec
l'avocat et avec les autorités administratives ou judiciaires. Tout
détenus peut solliciter de prendre connaissance des textes. Mais il y a
souvent un écart assez important entre les dispositions textuelles, et
la communication réelle qu'ont les détenus de la
réglementation les concernant. Les manquements à la discipline
étant, le plus souvent enfouis dans d'obscurs règlements auxquels
les détenus n'ont pas toujours accès, ceux-ci doivent leur
être clairement expliqués, surtout aux illettrés qui
foisonnent dans les prisons sénégalaises. Ainsi, la communication
entre les détenus et l'administration pénitentiaire doit
être encouragée pour ne pas donner lieu au désarroi et
à la frustration. Mieux, cette communication trouve son importance sur
le fait qu'elle peut permettre dans une certaine mesure, de
« neutraliser l'étau dangereux » de certains
détenus qui n'hésitent pas à semer la terreur en prison.
Elle peut permettre aussi à modifier les « dispositions
criminelles » d'autres détenus car « la prison n'a
pas seulement pour mission de punir, elle a aussi une mission de
rédemption ».
La réalisation pratique de ces idées
généreuse est parfois entravée par la faiblesse des
conditions de travail du personnel. D'où la nécessaire
amélioration des conditions de travail du personnel
pénitentiaires.
B - L'amélioration des conditions de travail du
personnel pénitentiaire.
Nous devons nous interroger sur la capacité des agents
pénitentiaires à pouvoir s'acquitter convenablement de leur
lourde et délicate mission. Notre sentiment est que l'ancrage et l'envol
de l'Administration pénitentiaire sénégalaise comme
administration de référence en Afrique pour le triomphe des
droits fondamentaux des détenus ne se réalise que si elle est
dotée de réels moyens et que le personnel qui l'anime soit
revalorisé. Dans cette perspective, nous recommandons d'une part, la
modernisation des moyens de travail et d'autre part la revalorisation du
personnel pénitentiaire.
1 - La modernisation des moyens de
travail
Elle s'articule autour des moyens financiers, humains et
matériels.
S'agissant des moyens financiers, des efforts doivent
être faits en vue d'augmenter de façon significative le budget
alloué à l'administration pénitentiaire et édicter
des règles de contrôle et de gestion efficaces des ressources
financières disponibles. Aussi, des initiatives hardies doivent
être déployés dans le sens d'un auto-financement en
créant des unités de production à l'intérieur des
prisons. Pour ce faire, le concours des collectivités locales, des ONG
et des mécènes doit être sollicité.
S'agissant des moyens humains, la principale recommandation
est d'augmenter le nombre des agents pénitentiaires, tout corps
confondus.
Enfin, l'administration pénitentiaire doit être
dotée de matériels suffisants : voitures, matériel
informatique, locaux fonctionnels, fournitures, etc.
Pour que l'administration pénitentiaire accomplisse
aussi correctement la mission qui lui est confiée, il convient de
revaloriser ses agents.
2 - La revalorisation du personnel
pénitentiaire
Les surveillants sont des gardes républicains de
formation exclusivement militaire, qui ne les prédispose aucunement
à assumer de manière adaptée et satisfaisante la mission
qui leur est confiée. Les conditions statutaires laissent beaucoup
à désirer. Par exemple, ils sont affectés de façon
autoritaire voire contre leur gré à la surveillance
pénitentiaire sans aucune consultation préalable par leurs
supérieurs. Outre l'ambiance paramilitaire qui est de ce fait
imprimée aux établissements pénitentiaires, un des
conséquence de ce manque de motivation est que les agents sont
condamnés à plafonner dans la hiérarchie B. Ainsi, il y a
lieu de procéder à la revalorisation du personnel de
l'Administration pénitentiaire en créant tout d'abord une
filière de formation des agents avec un programme qui mettrait l'accent
sur les préoccupations liées à la prison et où la
question des droits de l'homme occuperait une place importante. Ce qui permet
de faire du gardien un agents social susceptible d'aider au reclassement social
du détenu.
Mieux, des réformes qui leur ouvriraient l'accès
à la hiérarchie A doivent être engagées. Il convient
de souligner que l'amélioration des conditions d'incarcérations
participe dans une certaine mesure à humaniser l'univers
carcéral.
Parag.2 - L'humanisation de l'univers carcéral
A travers les visées de l'Ecole de la Défense
Sociale Nouvelle89(*) , la
fonction d'intimidation de la prison devient secondaire, celle de
réadaptation et de réinsertion essentielle. C'est l'homme qui est
pris en considération dans son entité pour le
réintégrer dans la société.
« L'idée d'exclure à jamais un individu de la
société des hommes parce qu'il a eu des défaillances
répugne à la conscience moderne ».90(*) Ainsi, l'Ecole de la
Défense sociale met l'accent sur le malade mais contrairement à
l'Ecole positiviste91(*)
à laquelle elle a succédé, elle n'enlève pas
à celui-ci sa responsabilité. C'est pourquoi comme le
positivisme, elle met l'accent sur la prévention mais affirme que le
traitement nécessaire à la défense de la
société doit aussi permettre au délinquant d'y reprendre
sa place, de s'y « reclasser », c'est-à-dire d'y
retrouver ses droits et ses responsabilités car au-delà du
détenu, il y a l'homme dont la dignité est sacrée.
Deux moyens permettent de parvenir à ces fins : la
réadaptation des détenus (A) d'une part et l'ouverture des
prisons au monde extérieur (B).
A - La réadaptation et la réinsertion des
détenus
La réadaptation et la réinsertion des
détenus trouvent leur justification dans le renforcement des
activités carcérales et la relecture de la politique
post-pénale.
1 - Le renforcement des activités
carcérales
Le développement des activités carcérales
constitue un puissant moyen de réadaptation et de réinsertion des
détenus. L'expérience a montré que le travail et
l'éducation, la formation et la sensibilisation exerçaient une
influence positive sur les criminels.
Ainsi, il convient de développer, tout d'abord, le
travail carcéral en tant que puissant facteur de socialisme et doit
encourager la création et l'équipement de petites unités
productives telles que la menuiserie, l'imprimerie, la cordonnerie, les arts
plastiques, les formes agricoles et renforcer les activités de
maraîchage et d'artisanat d'art.
Ensuite, il convient de développer l'enseignement
scolaire et professionnel et l'alphabétisation. Pour ce faire, recourir
aux détenus justifiant d'un niveau d'instruction suffisant, aux amicales
et syndicats d'enseignants, aux ONG et organisations caritatives.
Il faut aussi encourager la collaboration entre les
ministères de tutelle et de l'Education Nationale en organisant des
cycles de conférences sur la drogue, la délinquance, le Sida et
la responsabilité de l'individu dans la société.92(*)
Cependant, le renforcement des activités
carcérale avec toutes les recommandations précitées serait
vidé de son sens s'il n'y a pas une relecture de la politique
post-pénale.
2 - La relecture de la politique
post-pénale
La prison peut, certes, demeurer un lieu de punition. Mai
celle-ci infligée au caractère afflictif très
marqué en Afrique noire devrait davantage viser à empêcher
les délinquants, une fois libérés, de commettre de
nouveaux crimes. Le taux de récidive, très élevé,
ne peut que conduire l'Administration pénitentiaire à
méditer cette réflexion de R. Merle et A. vitu :
« Ce n'est pas par la rigueur des supplices qu'on prévient
le plus sûrement le crime, c'est par la certitude de la punition.
L'âme s'endurcit par le spectacle renouvelé de la
cruauté »93(*).
Ainsi, il faudra refondre de fond en comble la politique
carcérale au Sénégal en faisant du lobbying auprès
des autorités pour des réformes post-pénales. Ces
réformes permettant de lutter contre le taux très
élevé de récidive.
Pour ce faire, nous recommandons trois séries de
mesures :
- Premièrement, l'Etat doit prendre des mesures pour
faciliter le retour des détenus dans leur famille ;
- Deuxièmement, l'Etat doit prendre des mesures pour
faire bénéficier les entreprises qui acceptent d'embaucher des
anciens détenus d'un abattement fiscal ;
- Troisièmement, l'Etat et les collectivités
locales doivent prendre des mesures pour aider les anciens détenus dans
la création des GIE.
C'est dans cette voie que la politique post-pénale
pourrait davantage être crédibilisée.
Il convient de rappeler que la prison est une institution dont
le fonctionnement, à l'abri de ses mûrs, n'est pas toujours
aisé à contrôler. Ainsi, pour humaniser cet univers tout
porte à croire qu'il est impératif de l'ouvrir au monde
extérieur.
B - L'ouverture de la prison au monde
extérieur
L'ouverture de la prison au monde extérieur passe par
un certain nombre de coopération techniques nécessaires et par la
sensibilisation de l'opinion publique sur la prison.
1 - Les coopérations techniques
nécessaires
L'humanisation de l'univers carcéral exige la mise sur
pied d'un réseau dynamique de partenariats entre l'administration
pénitentiaire et les ONG de défense des droits de l'homme. Aussi,
une synergie dynamique devrait-elle s'instaurer et s'exécuter entre les
administrations pénitentiaires et les sociétés civiles qui
sont les consciences du peuple.
La majorité des pays africains sont parmi les plus
pauvres du monde, ce qui n'est pas sans conséquence dans la protection
et la promotion des droits fondamentaux des détenus. Ainsi, la faiblesse
des moyens économiques est à l'origine de la violation d'un
certain nombre d'exigences comme la séparation des détenus
provisoires et les autres détenus. Elle est aussi à l'origine de
la non-réalisation d'un certain nombre d'activités dans les
prisons. Ce qui constitue un obstacle à l'humanisation de l'univers
carcéral. C'est pourquoi, l'ouverture de la prison au monde
extérieur à travers les coopérations de certains ONG est
plus que jamais nécessaire pour parvenir à cet fin. Dans cette
perspective, nous saluons la coopération du Bureau International
Catholique pour l'enfance. En effet, cette ONG a construit des quartiers de
Mineurs dans les établissements pénitentiaires de Tambacounda,
Kaolack et Diourbel. Elle a aussi cherché des moniteurs pour
alphabétiser les mineurs. Il en est de même à Diourbel pour
assister des détenus Femmes toute en leur aidant pour leur
réinsertion. C'est ainsi qu'en partenariat avec le Centre horticole de
la ville, elle organise à l'endroit de ces femmes détenus des
cours de maraîchages.
La force des organisations non gouvernementales vient de leur
capacité à mobiliser l'opinion publique mais aussi à
diffuser des informations aux populations. Ce qui participe dans une moindre
mesure à participer à la sensibilisation de l'opinion publique
sur la prison.
2 - La sensibilisation de l'opinion publique sur la
prison
La lente évolution des mentalités a pour
conséquence que jusqu'à nos jours, la prison demeure
fondamentalement un tabou, une honte et le prisonnier un exclu pour lequel la
société, dans sa grande majorité, demande un
châtiment. Cette perception du monde carcéral est à
l'origine de l'indifférence du public par rapport à la situation
de détenu. Dans cette perspective, les acteurs les plus proches du
système carcéral doivent participer à l'émergence
d'une nouvelle représentation de la prison, de sa fonction et de ses
objectifs. Celle-ci implique un renforcement notable de la protection du
détenu par la société avec comme conséquence
l'élimination progressive de la marginalité du système
carcéral.
L'occident a connu le même cheminement. On sait, en
effet, que les objectifs n'ont pas été les mêmes sous
l'Ancien régime qu'à la fin du XVIIème siècle
où les réformateurs des cahiers de doléances et les
parlementaires de la constituante ont conçu les prisons comme des
« réformatoires » avec comme objectifs corriger,
redresser, transformer le comportement et la conscience du détenu.
Aujourd'hui avec l'intervention d'experts, de médecins, de psychiatres
et de criminologues, la prison vise à guérir et à
normaliser.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, la mise en
place de la sanction pénale contribue à renforcer ce courant.
C'est avec elle que s'annoncent les premières tentatives d'humanisation
de la prison qui s'inspire du principe que « dans le pire des
assassins, une chose, au moins est à respecter quand on punit, son
humanité (...). L'homme est objecté à la barbarie des
supplices, mais comme limite de droit ; frontière légitime
du pouvoir de punir ».
v CONCLUSION
Notre société idéologiquement
égalitaire mais inégalitaire dans les faits propose à
chacun de ses membres les mêmes idéaux, mais refuse à
beaucoup la possibilité de les réaliser. La déviance, les
conduites délinquantes ou criminelles deviennent ainsi une des issues
possibles à une contradiction d'ordre général.
En effet, sur le plan législatif, le
Sénégal a fait des avancées significatives dans la
protection des droits fondamentaux des détenus si l'on compare à
d'autres pays qui sont dans les mêmes conditions de développement
historique. A ce niveau, il semble évident qu'on peut évoquer
l'adage : « Nihil Novi - Sub Sole » car pour
l'essentiel le cadre est trouvé et depuis fort longtemps.
Dans l'espace francophone qui est le nôtre, le droit
pénal français a été reprise dans nos
législations après l'accession à l'indépendance.
Au niveau externe, bien évidemment, d'importants
instruments ont été adoptés qui sont la synthèse
des différents systèmes générés par les
différentes aires culturelles et dont les plus importants ont pour
nom :
Ensemble de règles minima pour le traitement des
détenus ;
Déclaration universelle des droits de l'homme de
1948 ;
Principes relatifs à la présentation des
exécutions extra-judiciaires arbitraires et souverains (ONU
1990) ;
Convention contre la Torture et aux peines ou traitements
cruels et dégradants (résolution 39-46 de l'AG des Nations-Unies
du 10 décembre 1984) ;
Ensemble des principes pour la protection de toutes les
personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'un
emprisonnement (ONU, 1985, 1988).
Au niveau interne, il paraît essentiel de citer la
Constitution sénégalaise, le code pénal de
procédure pénale.
En effet, il demeure que la Constitution continue à
s'attacher à un certain nombre de principe qu'elle tient pour
imprescriptibles et que nul ne conteste, le respect de l'homme dans son
intégrité corporelle, dans sa dignité et dans ses
libertés vient en tête de ces principes dont la législation
pénale et la jurisprudence ne cessent d'affirmer le caractère
intangible.
Le code pénal et le code de procédure
pénale affirment des normes essentielles qui constituent l'un des
principaux fondements de la politique pénale, laquelle repose , en
outre, sur une appréciation présumée de
l'efficacité de le peine dans les diverses fonctions qui lui sont
attribuées (principalement l'intimidation ou le dissuasion et
l'amendement ou la resocialisation. Le législateur affirme à
travers ces codes le respect des règles juridiques fondamentales que
sont les principes de l'égalité, d'égalité et de
personnalité des peines. Enfin, depuis quelques années,
inspiré par le souci de différencier et d'élargir la gamme
des peines existantes, le législateur sénégalais s'est
lancé dans une progressive humanisation des peines de manière
à permettre aux tribunaux une meilleure individualisation de la
sanction, en fonction de la personnalité des délinquants et du
danger social qu'ils représentent.
A cet effet, nous retenons les dernières mesures
législatives instituant le juge de l'application des peines ainsi que de
nouvelles sanctions alternatives à l'emprisonnement et de nouveaux mode
d'aménagement des peines.
Le Sénégal a certes libéré des
initiatives et réalisés des progrès législatifs,
mais il faut ajouter que la protection demeure encore inachevée car la
durée de la détention provisoire en matière criminelle
n'est pas incluse dans le code de procédure pénale. Il y a aussi
la non-intégration de la torture comme délit dans le code
pénal contrairement à la ratification par le
Sénégal de la convention contre la torture. Il faudra donc
parachever les textes car il n'y a pas de protection sans de réelles
bases juridiques.
L'étude a également révélé
une discordance entre les réalités et les textes destinés
à protéger le détenu. Au nombre de ces
réalités figure la précarité des conditions
d'existence des détenus : engorgement et promiscuité,
vétusté des locaux, hygiène et alimentation de mauvaise
qualité, oisiveté et violence carcérales, etc. L'absence
de moyens malgré les efforts des Administrations pénitentiaires
et judiciaire est sans doute la principale cause, mais elle n'explique pas
tout. Une politique hardie, imaginatrice et capable de déployer des
initiatives génératrices de fonds reste encore à
inventer.
A cela s'ajoute une opinion publique très peu
réceptive à l'idée de protection et de promotion desdits
droits. En effet, pour la grande majorité de la population, le
délinquant doit être non seulement châtié mais
également exclu, à la limite, de la communauté. Ainsi,
d'énormes efforts restent à faire pour changer les
mentalités car au-delà du détenu, il y a
« l'homme dont la dignité est sacrée ».
L'étude a aussi montrer que l'absence d'une politique
post-pénale est à l'origine du taux assez élevé des
récidivistes.
C'est pourquoi, dans une vision dynamique, nous avons formuler
des recommandations qui pourraient rendre effectives les pistes d'une
pénologie sénégalaise pragmatique. Ces recommandations
n'ont pas l'ambition de décrire un système idéal-type.
Elles visent uniquement à encourager la prise en charge
effective des exigences de la détention, par le respect des droits de
l'homme. Ce dernier, sous toutes ces formes est une bataille de chaque jour
contre le cycle de l'impunité et les rigueurs carcérales. Pour
qu'un jour aucun détenu ne soit traîné dans les rues,
menottes aux poignets, pour aller répondre devant les tribunaux - pour
que plus jamais, des citoyens en difficultés avec la loi ne soient
dénudée puis jetés dans des lieux insalubres, infectes et
très dégradants pour un homme. Pour qu'aussi des initiatives
soient prises pour assurer la qualité de la restauration des
détenus.
Pour qu'enfin, ceux qui purgent des peines plus ou moins
longues, puissent bénéficier d'un minimum d'attention, quant
à leur prise en charge (alimentation, soins de santé,
habillement, lieu de couchage).
Le volet femme, mineurs et personnes âgées,
mérite une attention particulière et devrait faire l'objet d'une
étude spécifique.
Le changement de régime carcéral par
l'humanisation des prisons est une question d'actualité car l'on admet
de plus en plus que « l'humanisme pénitentiaire est compatible
avec le bon ordre et la sûreté des prisons et qu'en sauvant
l'avenir de ceux qu'elle punit, la société se protége
elle-même » et à moindre coup. La façon dont une
société traite tous ses membres les plus vulnérables est
un « reflet de sa santé et de sa conscience
sociale ». Au total, ici gît un enjeu démocratique.
C'est « à l'aune de ses prisons, en effet, que l'on juge une
démocratie » selon Alexis De Tocqueville, écrivain
politique français du 19ème siècle.
La protection des droits fondamentaux des détenus au
Sénégal fait l'objet d'un attention particulière de la
part des spécialistes et de certaines ONG de défense des droits
de l'homme. Ce qui incline à croire que dans un avenir pas très
lointain, des mesures correctives pourraient être prises. Mais
l'essentiel est de ne pas se décourager. La lutte contre les violations
des droits des détenus est une bataille constante contre le poids des
habitudes.
BIBLIOGRAPHIE
I - OUVRAGES
A - Droit pénal, procédure
pénale
1 - Traités
PINATEL (J.); BOUZAT (P.) : Traité de droit
pénal et de criminologie ; tome III, Paris, DALLOZ, 1975.
MERLE (R.) : VITU (A.) : Traité de droit
criminel, Paris, Cujas, 3 tome.
· Procédure pénale, 4ème
édition, 1979.
· Droit pénal spécial, 1982, 2 volumes.
DEJENEPPE (B.) : La détention préventive,
Larcier Bruxelles, 1992, 2 Manuels et monographies.
SOYER (J. C) : Droit pénal et procédure
pénale, 8ème ed, Paris, Cujas, 1994.
DELMAS-MARTY (M.) : Les grands systèmes de politique
criminelle, Paris, PUF, Thémis, Droit privé, 1992
ANCEL (M.) : La défense sociale nouvelle, Paris,
Cujas, 3ème éd., 1981.
B - Droits de l'homme
· Monographies
MBAYE (K.) : Les droits de l'homme en Afrique, Paris,
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ARDANT (P.) : Les textes sur les droits de l'homme,
Paris, PUF, 1993.
II - TEXTES
A - Textes nationaux
- La constitution du Sénégal, Dakar, EDJA,
2001.
- Code pénal, Dakar, EDJA, 1992.
- Recueil de textes réglementaires, Ministère de
la Justice, DAP, Dakar, 2001.
B - Textes internationaux
- Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples, OUA,
1981.
- Ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus, Genève, 1955.
- Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants, ONU, 1984.
III - DOCUMENTS
- Document rendu par le Ministère de la Justice lors de
l'ouverture du séminaire sur le programme sectoriel justice (PSJ),
avril 2004.
- La prison du Sénégal, RADDHO, Dakar, avril
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- Les droits de l'homme aujourd'hui, ONU, octobre 1998.
- Les nouveaux textes sur la sanction pénal, Dakar,
février 2001 ;
- La justice et les mineurs : Problématiques et
réponses judiciaires ;
- Ministère de la Justice, Centre de Formation
Judiciaire, Dakar, avril 1999.
IV - REVUES
- Journal Africain des droits humains (JADH),
2ème A. N° 4, ISSN - 0851 - 8041, janvier 2001.
- Réforme pénale et pénitentiaire en
Afrique, Bulletin d'information n° 18, janvier 2004.
- Le populaire, n° 1316, samedi 3 - dimanche 4 avril
2004.
- L'actualité juridique - Droit administratif, 20
décembre 2001, page 1066.
- Journal officiel de la République du
Sénégal, février 2001.
A
N N E X E S
TABLE DES MATIERES
Page
Introduction
.................................................................................
5
Première Partie : LE CADRE JURIDIQUE DE LA
PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX DES DÉTENUS AU
SÉNÉGAL
....................................................... 14
CHAPITRE I - LES INSTRUMENTS JURIDIQUES APPLICABLES
AU SÉNÉGAL
.......................................................... 16
Section I - les instruments juridiques
internationaux ...................... 16
Parag. 1 - Les normes internationales générales
................................. 17
A - Les déclarations de droits
...................................................... 17
1 - La déclaration des droits de l'homme et du citoyen
............... 17
2 - La déclaration universelle des droits de l'homme de
1948 ...... 18
B - Les conventions internationales
................................................. 20
1 - Les pactes des Nations-Unies
........................................ 20
2 - La Charte des droits de l'homme et des peuples
....................... 21
Parag.2 - Les normes internationales spécifiques
................................. 22
A - les normes internationales spécifiques au traitement
des détenus .......... 22
1 - La convention contre la torture
....................................... 23
2 - L'ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus ... 24
B - Les normes internationales spécifiques aux
détenus vulnérables ........... 25
1 - Les normes internationales spécifiques aux mineurs
..................26
2 - Les normes internationales spécifiques aux femmes
..................27
Section II - Les instruments juridiques
internes ................................. 27
Parag. 1 - Les instruments juridiques régissant les
établissements pénitentiaires au Sénégal
.................................................................. 28
A - Les normes juridiques relatives à l'organisation des
établissements pénitentiaires
...............................................................28
1 - Les catégories d'établissements
pénitentiaires au Sénégal ........ 28
2 - La répartition des détenus entre
établissements ................... 30
B - les normes juridiques relatives au fonctionnement des
établissements pénitentiaires
...........................................................................
31
1 - Les normes relatives au régime applicable au
Sénégal ............ 31
2 - Les normes relatives au règlement intérieur des
établissements pénitentiaires au Sénégal
............................................................. 33
Parag. 2 - Les textes garantissant les droits fondamentaux des
détenus au Sénégal
.................................................................................
33
A - Les normes juridiques constitutionnelles
.................................... 33
1 - Le préambule de la Constitution
....................................... 34
2 - Le corps constitutionnel
...................................................34 B - La législation
pénale nationale ...................................................
35
1 - Le domaine de la législation nationale
................................. 35
2 - Les limites de la législation pénale
nationale ........................ 36
CHAPITRE II - LES AVANCEES SIGNIFICATIVES DU SENEGAL
SUR LE PLAN LEGISLATIF
............................................. 38
Section I - L'affirmation législative des
garanties accordées
aux détenus
............................................................ 38
Parag.1 - Les garanties accordées aux détenus
avant jugement ............... 39
A - Les garanties accordées par la loi aux gardés
à vue .................. 39
1 - Les garanties résultant des exigences temporaires et
matérielles ... 40
2 - Les garanties résultant du contrôle
médical et judiciaire ............. 40
B - Les garanties accordées par la loi au détenus
provisoires ............42
1 - Les garanties relatives aux conditions et à la
durée de la détention provisoire
........................................................................42
2 - Les garanties relatives au régime de la
détention provisoire .........43
Parag.2 - Les garanties accordées au détenus
après jugement .................... 44
A - Les garanties relatives aux régimes spécial
de détention .......... 44
1 - Les garanties relatives aux conditions de vie des
détenus ............44
2 - Les garanties relatives au travail et à la
discipline pénitentiaire ..... 47
B - Les garanties accordées aux condamnés
bénéficiant du régime
spécial de détention
..................................................... 49
1 - Les catégories de détenus
bénéfiant du régime spécial
de détention
................................................................ 49
2 - Les modalités d'application du régime
spécial ........................ 50
Section 2 - La contribution significative du
législateur au renforcement
des garanties judiciaires accordées aux
détenus ............ 51
Parag.1 - Le renforcement du contrôle de
l'exécution de la peine ..... 52
A - l'instauration du juge de l'application des peines
.................... 52
1 - Le contrôle des condamnés concernés
par le milieu fermé .......... 53
2 - Le contrôle des condamnés concernés
par le milieu ouvert ......... 53
B - La création de nouveaux organes de contrôle
dans l'exécution
des peines
............................................................... 54
1 - Les organes chargés de l'aménagement des
peines ............... 54
2 - Le comité de suivi en milieu ouvert
..................................... 55
Parag.2 - La modification et l'enrichissement de la palette
des
sanctions pénales
.............................................56 A - L'introduction de nouvelles
sanctions pénales ........................ 56
1 - Les sanctions alternatives à l'incarcération
........................... 57
2 - Les peines complémentaires aux sanctions
alternatives ............ 58
B - La création de nouveaux modes d'exécution de
la sanction
Pénale
..................................................................... 58
1 - Les nouveaux modes d'aménagement des peines
..................... 58
2 - Le retrait de certaines condamnations du casier judiciaire
........... 59
DEUXIEME PARTIE : L'INEFFECTIVITE DE LA
PROTECTION
DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS
AU SENEGAL
................................................ 61
CHAPITRE I - LES MANQUEMENTS CONSTATES DANS LA
PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS ............ 62
Section I - les facteurs de blocage dans la recherche
de l'effectivité ...... 63
Parag.1 - Les facteurs d'ordre administratif
............................ 63
A - La faiblesse des moyens économiques
.............................. 64
1 - Au niveau de l'administration pénitentiaire
........................ 64
2 - Au niveau de l'administration judiciaire
.............................. 65 B - La faiblesse des ressources humaines
................................. 65
1 - L'insuffisance quantitative des ressources humaines
............... 66
2 - L'insuffisance qualitative des ressources humaines
................ 67
Parag. 2 - Les facteurs d'ordre juridique
....................................68
A - Le vide juridique
......................................................... 68
1 - L'absence de garantie temporaire pour les
accusés
en matière criminelle dans le CPP
.................................... 68
2 - La non-intégration des sanctions contre le torture
dans le CP ...... 69
B - Les lacunes de la législation pénale
nationale ........................ 70
1 - Au niveau du régime de la garde à vue
................................. 70
2 - Au niveau du régime de détention des
condamnés .................... 71
Section II - Les attentes aux normes établies
en matière de détention
au Sénégal
............................................................... 72
Parag.1 - Les atteintes aux conditions d'existence des
détenus ... 73
A - La précarité des conditions
matérielles de détention ............... 73
1 - Au niveau des établissements pénitentiaires
......................... 73
2 - Au niveau des lieux de garde à vue
.................................... 75
B - L'absence de dérivatif à l'ennui
........................................ 76
1 - Les raisons de cette absence
.............................................. 76
2 - Les conséquences de cette absence
.................................... 77
Parag.2 - L'ineffectivité des mécanismes
de protection
des détenus
...................................................... 78
A - L'ineffectivité de l'assistance juridique et
sociale aux détenus ... 78
1 - La faiblesse de l'assistance juridique
.................................. 79
2 - La faiblesse de l'assistance sociale
.................................... 79
B - L'ineffectivité des contrôles exercées
sur les établissements pénitentiaires au
Sénégal ................................................. 80
1 - Le contrôle inopérant des autorités
judiciaires ..................... 80
2 - Le contrôle inapproprié des commissions de
surveillance ......... 81
CHAPITRE II - POUR UNE MEILLEURE PROTECTION DES
DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS
AUX SENEGAL
...................................................... 83
Section I - La lute contre l'impunité
.......................................... 84
Parag. I - Le renforcement des mécanismes de
contrôle de la détention
au Sénégal
.................................................................
84
A - L'approfondissement du contrôle sur les
établissements pénitentiaires
............................................................ 85
1 - L'indépendance des organes de contrôle
.............................. 85
2 - L'élargissement des organes de contrôle
............................. 86
B - L'approfondissement de l'accusation
................................. 86
1 - La réaffirmation du contrôle de la chambre
d'accusation
sur les demandes de liberté provisoire
................................. 87
2 - Le contrôle de la chambre d'accusation sur le
fonctionnement
des cabinets d'instruction
.............................................. 88
Parag.2 - - La fermeté de la répression
des coupables ............ 88
A - La relecture des règles d'engagement de la
responsabilité
des coupables
............................................................ 88
1 - La suppression du privilège de juridiction des
officiers
de police judiciaire
....................................................... 89
2 - La réaffirmation du droit d'action des
détenus ..................... . 89
B - L'adoption de nouvelles mesures sanctionnatrices
............... 90
1 - A l'égard des officiers de police judiciaires
........................... 90
2 - En cas de détention illégale
............................................... 91
Section II - La lutte contre les rigueurs
carcérales au Sénégal ............ 92
Parag.1 - L'amélioration de la politique
pénitentiaire ............... 92
A - L'amélioration des conditions
d'incarcération ........................ 92
1 - La lutte contre l'engorgement carcéral
............................... 93
2 - L'encouragement de la communication entre les
détenus
et l'Administration pénitentiaire
.................................... 93
B - L'amélioration des conditions de travail du
personnel
pénitentiaire
............................................................... 94
1 - La modernisation des moyens de travail
.............................. 94
2 - La revalorisation du personnel pénitentiaire
........................... 95
Parag.2 - L'humanisation de l'univers
carcéral ..................... 95
A - La réadaptation et la réinsertion des
détenus ........................ 96
1 - Le renforcement des activités carcérales
.............................. 97
2 - La relecture de la politique post-pénale
............................... 97
B - L'ouverture de la prison au monde extérieur
......................... 98
1 - Les coopérations techniques nécessaires
.............................. 98
2 - La sensibilisation de l'opinion publique sur la prison
............. . 99
CONCLUSION
................................................................................
100
BIBLIOGRAPHIE
.............................................................................
104
ANNEXES.
......................................................................................
106
* 1 DEJEMEPPE ,
Benoît. - La détention préventive. - Maison Larcier, S.A
1000 Bruxelles 1992.
* 2 Article premier al. 3 de la
loi Belge du 20 juillet 1990.
* 3 MORANGE, Jean. - Les
libertés publiques, Que sais-je ? Sixième édition
corrigée : 1995 nov.
* 4 PONCELA, 1998.
* 5 ALDOUS, Huxley. - Le
meilleur des Mondes, suivi de Retour au Meilleur des Mondes, p. 355.
* 6 Journal africain des
Droits de l'Homme (JADH), janvier 2001, deuxième année
n°4.
* 7 Cf. rapport de la Rencontre
Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme, 1995.
* 8 Cf. article 7 de la
Constitution sénégalaise du 7 janvier 2001.
* 9 Cf. article 9 de la
Constitution sénégalaise du 7 janvier 2001.
* 10 Cf. article 26 du
décret n° 86-1466 du 28 novembre 1986.
* 11 Cf. ONU, 1990.
* 12 Cf. ONU 1955, 1977.
* 13 Cf. ONU 1990.
* 14 Cf. Résolution
39-46 de l'assemblée générale des Nations Unies du 10
décembre 1984.
* 15 Cf. Le Monde du
................ 1991.
* 16 Cf. Journal officiel de la
République du Sénégal du samedi 23 juin 2001,
146ème année, n° 5993.
* 17 Cf. rapport de la
Rencontre africaine pour la Défense des Droits de l'Homme, 1995,
chapitre IV : La direction de l'Administration pénitentiaire.
* 18 FAVOREU, Louis ;
GAIA, Patrick ; GHEVONTIAN, Richard ; MESTRE, Jean-Louis ; ROUX,
André ; PFERSMANN, Otto et SCOFFONI, Guy. - Droit constitutionnel.
- Dalloz, 3ème ed. 2000, p. 780.
* 19 PICARD, Etienne. -
L'émergence des droits fondamentaux en France. - AJDA, 1998, n°
spécial, p. 8.
* 20 Il faut signaler que
cette distinction rigide sur le plan organique peut être
relativisée au plan matériel en ce sens l'intégration des
règles issues d'expériences extérieures est
concrétisée par leur uniformisation avec les règles
d'origine interne.
* 21 La deuxième
République du Sénégal.
* 22 Article 2 de la
Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789.
* 23 Cela peut-être
justifié par la défiance manifeste par les rédacteurs de
la déclaration vis-à-vis de l'exécutif post
révolutionnaire.
* 24 Même si dans un
passé récent, la juridicité des dispositions de
préambule était mise en route, on peut estimer que depuis la
décision du Conseil constitutionnel sénégalais dans
l'affaire n° 36 du 16 déc. 1993 relative à l'harmonisation
du droit des affaires en Afrique de l'Ouest, le problème ne se pose
plus.
* 25 Les droits de l'homme
aujourd'hui, documents d'information des Nations Unies, annexe 2, p. 65.
* 26 Cf. Journal Africain des
Droits de l'Homme (JADH), janvier 2001, 2ème année,
n°4.
* 27 La déclaration
de 1948 n'a pas une valeur positive en France faute de ratification par cette
dernière de l'acte de Chaillot.
* 28 Ces deux pactes
internationaux sont entrés en vigueur en 1976.
* 29 Il s'agit ici de
redimensionner les droits de la 1ère et
2ème génération et de les adapter à la
réalité africaine.
* 30 Cf. DIAITE, Ibou.
« Les difficultés de l'application de la Charte africaine des
droits de l'homme et des peuples » In Revue Sénégalaise
de droit n°33, pp. 59 à 82.
* 31 Cf. Rabat d'arrêt
lex n° 274 - 275 - 276 - 278 et 279 (commentaire El-hadji Mbodj). Cette
décision s'inscrit dans le cadre de l'extension du bloc de
constitutionnalité et de l'élargissement des dispositions
externes ayant une valeur positive au Sénégal.
* 32 MERLE, (R.) et VITU (A.).
- Traité de droit criminel, tome 1, paris, Cujas, 6ème
edition, 1984, p. 98.
* 33 Ces règles ont
été adoptées par le premier congrès des
Nations-Unies pour la prévention du crime et le traitement des
délinquants, le 30 août 1955.
* 34 Résolution de
l'assemblée générale de l'ONU 45-111 du 14 décembre
1990, « Mettre les textes en actions », PRI, La Haye, nov.
1994, p. 14.
* 35 Règle 09 à
14.
* 36 Règle 15 à
16
* 37 Règle 17 à
19
* 38 Règle 20. 1 et 2
* 39 Règle 21. 1 et
2.
* 40 Règle 22 à
26
* 41 Règle 27 à
32
* 42 Règle 33 et 36
* 43 Règle 08.
* 44 En tout 191 Etats
signataires de la convention adoptée par l'assemblée
générale de la Déclaration des droits de l'enfant le 20
novembre 1989.
* 45 L'emprisonnement par
contravention de police ne pourra être moindre d'un jour, ni
excéder un mois.
* 46 La contrainte par corps
est une peine pour le paiement de l'amende.
* 47 L'incarnation du
condamné pendant un temps fixé par le juge dans les limites
prévues par la loi.
* 48 Personnes
soupçonnées d'une infraction pendant la période
d'instruction.
* 49 Personne contre
laquelle est exercée l'action publique devant les juridictions de
jugement en matière correctionnelle et contraventionnelle.
* 50 Personne
soupçonnée de crime et traduite pour ce fait, devant la Cour
d'Assise.
* 51 Encore appelé le
système philadelphien ou pensylvanien car d'origine nord
américaine.
* 52 Décrets n°
68-583 du 28 mai 1968 et n° 86-1466 du 28 novembre 1986 portant
organisation et régime des établissements
pénitentiaires.
* 53 Les garanties
accordées aux détenus après jugement (paragraphe II,
section I du chapitre II).
* 54 Loi de base n° 65-61
du 21 juillet 1965 portant code de procédure pénale
sénégalaise.
* 55 Loi de base n° 65-60
du 21 juillet 1965 portant code pénal sénégalais.
* 56 Hypothèses
d'arrestations de nature administrative.
* 57 Une exception concerne le
juge d'instruction lorsqu'il agit en flagrance.
* 58 Articles 127 et 127 bis du
CPP.
* 59 Cf. Art. 11 du
décret organisant le régime des établissements
pénitentiaires.
* 60 Art. 14 du CPP
* 61 Art. 16 du CPP.
* 62 Cf. Loi n° 2000-39 du
29 décembre 2000 modifiant le code de procédure pénale.
* 63 ANCEL (M.), op-cit,
voir aussi Soyer (J.C), Droit pénal et procédure pénale,
Paris, LGDJ, 9ème édition, 1992, p ....
* 64 DELMAS-MARTY, op-cit, p.
16.
* 65 « Mettre les
textes en action », PRI, op-cit, p. 161.
* 66 Arrêté
ministériel n° 7117 M. INT. DAP, en date 21 mai 1987 portant
règlement intérieur des établissements
pénitentiaires, annexe 3 du CPP.
* 67 Cf. art. 51, 52, 53 de
l'arrêté portant règlement intérieur des
établissements pénitentiaires.
* 68 MICHELET (E.), OP-cit,
RIPAS, p. 471.
* 69 Cf. art. 76, de
l'arrêté portant règlement intérieur des
établissements pénitentiaires, annexe 3 du CPP.
* 70 Cf. art. 85, 86, 89 de
l'arrêté portant règlement intérieur des
établissements pénitentiaires, annexe 3 chapitre IX.
* 71 FOUCAULT, op-cit, pp. 243
et s.
* 72 Cf. la loi n°
2000-38 du 29 décembre 2000 modifiant le code pénal et la loi
n° 2000-39 du 29 décembre 2000 modifiant le code de
procédure pénal, journal officiel de la République du
Sénégal, samedi 10 février 2001.
* 73 Art 683 bis du CPP (loi
n° 2000-39 du 29 décembre 2000).
* 74 Il est assisté
dans l'application de ces mesures par le comité de suivi en milieu
ouvert dont il est le chef du service.
* 75 Art. 707 -7 de la loi
n° 200-39 du 29 décembre 2000 modifiant le CPP.
* 76 Art. 683 bis de la
même loi modifiant le CPP.
* 77 Déclaration du 21
septembre 196 sur les conditions de détention en Afrique.
* 78 Cf. Journal officiel de la
République du Sénégal, samedi 10 février 2001.
* 79 Rapport de la RADDHO,
op-cit, p. 48.
* 80 Du riz avec du poisson sec
(kéthiax) ou hareng (yaay boy).
* 81 Cf. Journal le
Populaire, samedi 3 et dimanche 4 avril 2004, p. 5 (compte-rendu du document
rendu public le 2 avril lors de l'ouverture du séminaire sur le
programme sectoriel justice).
* 82 Par exemple en France ,
l'article 145-1 CPP, prévoit en matière correctionnelle un
délai de 04 mois, un délai d'un an voire deux ans est
prévu pour les personnes mises en examen criminelle (art. 145-2-CPP).
* 83 Art. 2 de la nouvelle loi
n° 99-06 du 29 janvier 1999 modifiant l'article 55 du CPP.
* 84 Art. 2 de la même
loi précitée.
* 85 L'homosexualité
comme réalité carcérale a d'ailleurs été
baptisé par les détenus : « Sararay
kaso » littéralement : le remède de la prison.
* 86 Cf. art. 53 du
décret précité sur la clé de répartition du
pécule.
* 87 Jeannette BOUGRAB, Docteur
en droit, ATER à l'Université Paris I.
* 88 Documents d'information
des Nations-Unies, les droits de l'homme aujourd'hui, DPI/ 1998, P.55.
* 89 ANCEL, (M.), Op-cit,
voir aussi Soyer (J.C), Droit pénal et procédure pénale,
Paris, LGDJ, 9ème ed. 1992, p. 36.
* 90 MICHELET (E.),
« Bilan d'une application du modèle occidental à la
prison sénégalaise », RIPAS, n° 14, 1985, p.
470.
* 91 Sur le positivisme, voir
Soyer (J. C), op-cit, p. 16.
* 92 Sur ces notions, se
référer à la chronique du Professeur Raymond Gassin,
« Les fondements juridiques de la réinsertion des
délinquants en droit positif français ». rsc, n°1,
janvier-mars 1996, pp. 155-182. Le Pr. Gassin note qu'avec l'expression
« réadaptation sociale », on entre dans un vaste
champ de synonymes de la « réinsertion » dont
l'inventaire est indispensable. On trouve outre « réadaptation
sociale », « réintégration dans la
société », « amendement »,
« rééducation ».
* 93 In traité de droit
criminel, Paris, 1984, p. 100.
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