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Analyse du déséquilibre économique au Rwanda.

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par Jean Paul NIYONILINGIYE
Université libre de Kigali Rwanda - Licence en économie 2006
  

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CHAPITRE III : IMPACT DE DESEQUILIBRE BUDGETAIRE SUR LA CROISSANCE ECONOMIQUE AU RWANDA

L'incapacité de l'Etat Rwandais de relever à court terme les recettes publiques et dans une moindre mesure l'insuffisance des réductions des dépenses de l'administration a entraîné une explosion des déficits budgétaires. Pour combler ces déficits, les pouvoirs publics font recours aux avances de la Banque centrale, à l'émission des titres soit auprès de la BNR, soit auprès des banques commerciales ou du secteur privé non bancaire , ou soit procédé à l'endettement extérieur . Le Gouvernement Rwandais peut financer une augmentation de besoins d'emprunt du secteur public par vente des titres à la banque centrale ou au recours direct aux avances de cette dernière via son compte à la dite banque, ce qui lui évite de placer un montant équivalent des titres sur le marché financier. Dans ce cas, la masse monétaire au sens large, augmente d'un montant, aux taux d'intérêts pratiqués au montant considéré. De cette politique de financement du déficit budgétaire par l'intervention directe de la banque centrale, résultent trois conséquences :

1) La masse monétaire supplémentaire peut trouver sa contrepartie dans une augmentation rapide de la production. Dans ce cas, il y a peu ou pas d'effets inflationnistes, parce que l'offre supplémentaire répondra à l'accroissement de la demande ;

2) La masse monétaire supplémentaire peut être thésaurisée ou épargnée. Dans ce cas, il n'y aura non plus d'effets inflationnistes, puisque la demande n'augmente pas ;

3) En effet, si la masse monétaire supplémentaire est distribuée sous la forme de revenu, elle entraîne une augmentation de besoin de consommation sans augmentation correspondante de la production ; il en résulte une accélération de la hausse des prix, donc de l'inflation.

Cette création entraîne une hausse des dépenses en valeur nominale qui a un caractère inflationniste, sauf si elle a pour contrepartie une augmentation de l'offre intérieur ou des importations. De façon générale, l'emprunt public intérieur réduit d'autant le crédit disponible par le secteur privé, ce qui suscite les pressions sur le taux d'intérêt intérieur. Ces derniers créent une espèce de concurrence entre l'endettement public intérieur et les investissements privés, concurrence dont les effets prévisibles sont sûrement la diminution des crédits disponibles à l'économie. Selon la théorie économique, l'éviction des investissements privés, qui sont supposés être plus rentables que les investissements publics, implique le ralentissement de l'activité économique qui mène à son tour à l'accroissement du taux de chômage.

Et lorsque l'Etat Rwandais ne trouve pas ou ne se met pas en situation de trouver sur le marché intérieur de quoi se financer, il a recours à des financements externes. L'afflux des capitaux étrangers pour financer le déficit budgétaire n'a pas d'effet direct sur la création monétaire dans la mesure où ces capitaux servent à l'équilibre de la balance des paiements.

Par contre, si l'Etat cède des devises à la banque centrale en contrepartie de la monnaie nationale pour effectuer les achats à l'intérieur du pays , l'effet inflationniste est évident . C'est ainsi que le Rwanda devant la faiblesse de l'épargne interne et les perspectives de croissance faibles, l'emprunt extérieur s'est imposé comme une donnée indispensable pour le financement des plans d'investissement. L'intervention de la dette dans le processus de croissance est conçue comme devant se traduire par une complémentarité entre les flux d'emprunts et l'épargne interne , et cette croissance doit être telle qu'elle substitue au fur et à mesure à la dette , jusqu'à ce que cette dernière soit nulle .

D'une manière générale, l'emprunt extérieur direct a tendance, comme l'utilisation des réserves, à provoquer une appréciation du taux de change, portant ainsi préjudice aux exportations et encourageant les importations. Ce qui contribue, avec l'amortissement de la dette extérieure et les paiements des intérêts, au déséquilibre extérieur du Rwanda. Les effets pervers du remboursement de la dette extérieure se situent à deux niveaux à savoir le niveau des recettes budgétaires et celui des réserves de change. Les prélèvements des sommes nécessaires au remboursement des prêts exercent des effets de ponction des recettes budgétaires. Lorsque les prêts sont assortis des taux d'intérêt fixes , les montants à rembourser sont connus d'avance, ce qui n'est pas le cas quand s'il s'agit des taux d'intérêt flottants. Aussi toute appréciation de la devise dans laquelle les remboursements sont effectués conduit à la majoration des prélèvements sur les recettes budgétaires. Le retard dans le paiement du service de la dette peut aussi être à la base de l'alourdissement du poids de la dette et de la pression exercée sur le budget de l'Etat, dans la mesure où le bailleur pénalise l'emprunteur en élevant les taux d'intérêt contractuels. Bref, la hausse du taux d'intérêt, du taux de change de la monnaie dans la quelle le remboursement doit s'effectuer ainsi que le retard dans le remboursement de la dette sont autant des facteurs qui exercent un effet négatif sur l'économie du pays débiteur.

Au Rwanda comme dans d'autres pays en développement, le déficit budgétaire est structurel et est lié à la structure même de l'économie nationale. Le point saillant est la grande dépendance de notre pays vis-à-vis de l'extérieur, traduite par les dons extérieurs en termes d'appuis budgétaire depuis la chute des cours mondiaux du café dès 1985. La chute des cours de ces produits en 1985, et au delà, ont entraîné une stagnation, la diminution des recettes (impôts sur le commerce extérieur) et une forte augmentation des dépenses à travers des fonds d'égalisation et par là un accroissement du déficit budgétaire. il est encore de remarquer également que la persistance des déficits budgétaires depuis les années 85 trouve son origine dans les investissements publics financés en grande partie par des crédits extérieurs et s'est aggravé avec la guerre de 1990 et le génocide de 1994 . Ici on peut préciser que le déficit budgétaire est devenu plus en plus élevé alors que les moyens de financement ne suivent pas ce rythme d'accroissement.

III.1. Structure du déficit budgétaire au Rwanda.

Tableau 13: La structure du déficit budgétaire de 1985 à 1989(en milliards de Frw).

Rubriques

1985

1986

1987

1988

1989

Recettes totales

20.8

23.5

23.2

25.1

24.4

Dépenses totales

23.4

25.5

29.9

30.4

26.7

Déficit global

- 2.6

-2.0

- 6.7

- 5.3

- 2.3

Source : MINIPLAN, Exécution du budget de l'Etat 1989.

Graphique 8: Evolution du déficit budgétaire de 1985 à 1989 (en milliards de Frw).

Source : nous-même à partir des données du tableau 13.

Il est à constater que l'Etat a commencé d'avoir des déficits budgétaires des années 80 par le fait que les recettes ne parviennent pas à couvrir la totalité des dépenses, le déficit global est de 2.6 milliards de Frw en 1985 pour rechuter à 2.0 milliards de Frw en 1986, suite au maîtrise des dépenses et une forte augmentation des recettes dont les dons occupent une place non négligeable. Il est passé de 2.0 milliards de Frw en 1986 pour remonter à 6.7 milliards de Frw en 1987, et encore rechuter jusqu'à 2.3 milliards de Frw en 1989.

Tableau 14: Structure du déficit budgétaire de 1990 à 1994. (en milliards de Frw).

Rubriques

1990

1991

1992

1993

1994

Recette propre

21,6

25,0

27,6

25,9

5,9

Dépenses courantes

30,3

35,9

45,8

43,5

22,2

Déficit courant

- 8,7

- 10,9

- 18,2

- 17,6

- 16,3

Dépenses en capital

12,7

16,8

20,0

23,6

4,4

Déficit global

- 1,4

- 27,7

- 38,3

- 41,2

- 20,7

Source : BNR, rapport sur évolution économique et financière 1996

Graphique 9: Evolution du déficit budgétaire de 1990 à 1994(en milliards de Frw).

Source : nous- même à partir des données du tableau 14.

Durant la période de 1990 à 1994, les recettes propres de l'Etat n'ont pas suffi pour couvrir les dépenses courantes et d'investissement. Le déficit des opérations financières de l'Etat était chronique en raison de l'augmentation rapide des dépenses courantes par rapport aux recettes propres de l'Etat. En 1990, les recettes propres de l'Etat s'élevaient à 21,6 milliards de Frw contre 43,0 milliards des dépenses dont 30,3 milliards des dépenses courantes, soit un déficit courant de 8,7 milliards. Ce déficit s'est creusé des années suivantes, passant à 10,9 milliards, 18,2 milliards et 17,6 milliards, respectivement en 1991, 1992,1993 et 1994. L'augmentation de dépenses en capital entre 1990 et 1994 à porté le déficit global à 4,2 milliards de Frw en 1993 entre 21,4 milliards de Frw en 1990 et 20,7 milliards en 1994.

La réduction de 20,5 milliards de Frw du déficit global observé en 1994 est liée au faible niveau de dépenses de développement (4 ,4 milliards de Frw suivant les rapports de la BNR de 1996).

Tableau 15: Structure du déficit budgétaire de 1995 à 2004 (en milliards de Frw).

Désignation

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

Recettes totales

23,1

39,4

58,1

66,0

63,6

68,7

86,2

101,2

122,3

147,0

Dépenses courantes

42,1

55,9

64,0

75,3

87,1

94,3

107,5

123,7

162,7

163,8

Déficit courant

- 19,0

- 16,5

- 5,9

- 9,3

- 23,5

- 25,6

- 21,3

- 22,5

- 40,4

- 16,8

Dépenses en capital

27,3

39,4

46,1

42,3

40,8

42,1

50,0

40,7

51,1

89,5

Déficit global

- 46,3

- 55,9

- 52,0

- 51,6

- 64,3

- 67,7

- 71,9

- 74,8

- 95,5

- 106,3

Source : BNR, rapport sur évolution économique et financière 2004.

Graphique 10: Evolution du déficit budgétaire de 1995 à 2004 en Milliards de Frw.

Source : nous - même à partir du tableau 15.

Compte tenu des résultats de l'exécution du budget de l'Etat et en se referant aux tableau et graphique ci-dessus on constate qu'en 1995, le déficit courant a été de 19,0 milliards de frw, le déficit global a été de 46,3 milliards de frw d'où la différence de 27,3 milliards est la totalité des dépenses d'investissement dont la reconstruction du pays dans tous les domaines après une période de génocide. En 1996, le déficit est passé de 46,3 milliards Frw à 55,9 milliards de Frw. Au cours de l'exercice 1996,1997 et 1998 les opérations financières de l'Etat sont clôturées avec un besoin de financement respectif de 55,9 milliards de Frw, 52,0 milliards de Frw et 51,6 milliards de Frw. En raison de l'augmentation des dépenses publiques le déficit courant est passé de 5,9 milliards de Frw en 1997 à 9,3 milliards de Frw en 1998.

On vient d'observer que le déficit global est resté plus ou moins stable entre 1997 et 1998. malgré la baisse des dépenses d'investissement en 1999 et en 2002, le déficit global n'a cessé d'augmenter passant de 64,3 milliards de Frw en 1999 à 74,8 milliards de Frw en 2002. En 2002 et 2003, le déficit courant a évolué par rapport aux années précédentes, il est passé de 22,5 milliards en 2002 pour revenir 40,4 milliards en 2003 ; de plus en raison d'augmentation de dépenses d'investissement le déficit global est passé de 51,1 milliards en 2003 pour atteindre 89,5 milliards en 2004.

En 2004 le déficit courant a diminué de 40,4 milliards de Frw en 2003 pour s'ajuster à 16,8 milliards de Frw en 2004. Ceci est du à une augmentation plus importante des recettes totales de l'Etat et les dépenses ont augmenté moins proportionnellement aux recettes totales. Dès 2002 et 2004, le déficit global a été plus important qu'en avant, s'établissant 74,8 milliards de Frw en 2002 ; 95,5 milliards de Frw en 2003 et 106,3 milliards de Frw en 2004.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius