
~ST6 PAUL ce?
Institut d'Urbanisme et d'Aménagement Régional ~j
Université Paul Cézanne Aix-Marseille
III

MARSE0-'t
2, avenue Henri Poncet 13628 Aix-en-Provence Cedex 01
Adresse postale : 3 ay. Robert Schuman 13628 Aix-en-Provence
Tél. 04 42 64 61 94 / Fax. 04 42 64 61 91.
http://www.iar.u-3mrs.fr
Analyse du développement
de la zone commerciale
de périphérie Avignon Nord
Etude de la stratégie des acteurs
privés et du rôle des pouvoirs publics. Pistes de
réflexion pour son avenir dans un contexte de développement
durable.
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GIRARD Laurent
|
Mémoire soutenu le 20 octobre 2011
|
Master 2 Urbanisme et
Aménagement Spécialité Urbanisme durable et projet
territorial Option Projet d'urbanisme et action
opérationnelle
Année universitaire : 2010-2011
|
Directeur de mémoire : M. Bernard
PLANQUE
Président du jury :
M. Denis BERTHELOT
|
1
Remerciements
Je tiens tout d'abord à remercier M. Lionel CHAMPEY
et Mme Caroline LOUVET de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Marseille
Provence qui, au cours d'un précédent stage, ont su
éveiller chez moi l'intérêt que je porte aujourd'hui au
commerce dans l'urbanisme.
Je remercie également l'ensemble de l'équipe
de l'Agence d'Urbanisme de l'Aire Avignonnaise, et plus particulièrement
Mme Ingrid HAUTEFEUILLE, qui m'a accompagné pendant les quatre mois de
stage qui ont précédé la rédaction de ce
travail.
Au cours de l'élaboration de ce mémoire, un
certain nombre de personnes m'ont aidé, guidé et soutenu. Je
tiens particulièrement à remercier M. Bernard PLANQUE, mon
directeur de mémoire, pour sa disponibilité et ses conseils
avisés. Je remercie également M. Denis BERTHELOT, qui a
accepté de lire mon travail et de participer au jury de ma
soutenance.
Je souhaite également adresser mes sincères
remerciements à l'ensemble des professionnels qui ont bien voulu me
recevoir et qui m'ont apporté leur aide. Je pense
particulièrement à M. Jérôme GOURMELON, Mme Julie
GUIROY, et M. Jean-Louis PERRIN de la Communauté d'Agglomération
du Grand Avignon mais également à Mme Sara SHERIFF du groupe
Immochan et à M. Michel LACROZE, architecte-urbaniste.
Enfin, je souhaite saluer le soutien dont on fait preuve
mes proches et ma famille, tout au long de l'élaboration de ce
mémoire.
2
Sommaire
Sommaire 2
Introduction 4
1. Présentation de la zone commerciale et des
problèmes urbains qui lui sont
|
associés
|
6
|
1.1
|
La zone commerciale et son contexte urbain
|
6
|
1.2
|
Un poids économique incontestable
|
13
|
1.3
|
Un espace dominé par l'automobile
|
18
|
1.4
|
Des paysages transformés par ces nouveaux usages
|
26
|
2 Les stratégies d'implantation et
d'évolution du commerce de périphérie 31
2.1 Les critères nécessaires à
l'implantation commerciale 31
2.2 La diversification des activités sur la zone
commerciale 47
3 Le rôle des pouvoirs publics dans le
développement de cette zone
commerciale de périphérie
55
3.1 Des élus locaux séduits par les
ressources fiscales et le développement de l'emploi
sur leur commune 55
3.2 Le rôle des acteurs du développement routier
et autoroutier 62
3.3 L'échec des lois visant à limiter le
développement commercial de périphérie 70
4 La zone commerciale Avignon Nord peut-elle
s'inscrire dans un projet de
ville durable ? 79
4.1 Construire un projet urbain pour freiner le
développement commercial de
périphérie 79
4.2 La mobilité durable et son impact sur la
compétitivité du pôle 84
4.3 Avignon Nord peut-elle muter sur des initiatives
privées ? 92
Conclusion 102
Bibliographie 105
Table des matières 112
3
Liste des abréviations
A.U.R.A. : Agence d'Urbanisme de l'aiRe Avignonnaise
C.C.I. : Chambre de Commerce et d'Industrie
C.D.A.C. : Commission Départementale
d'Aménagement Commercial
C.D.E.C. : Commission Départementale d'Equipement
Commercial
C.D.U.C. : Commission Départementale d'Urbanisme
Commercial
C.E.R.T.U. : Centre d'Etudes sur les Réseaux, les
Transports, l'Urbanisme et les constructions
publiques
C.E.T.E. : Centre d'Études Techniques de
l'Équipement
C.N.C.C. : Conseil National des Centres Commerciaux
C.R.E.D.O.C. : Centre de Recherche pour l'Étude et
l'Observation des Conditions de Vie
D.A.C. : Document d'Aménagement Commercial
E.P.C.I. : Etablissement Public de Coopération
Intercommunale
G.S.D. : Grande Surface Déspécialisée
G.S.S. : Grande Surface Spécialisée
I.C.E. : Indice de Concentration d'Emploi
I.D.C. : Indice de Disparité de Consommation
I.N.S.E.E. : Institut National de la Statistique et des Etudes
Economiques
I.R.I.S. : Ilot Regroupé pour des Indicateurs
Statistiques
M.S.S. : Moyenne Surface Spécialisée
P.A.D.D. : Projet d'Aménagement et de
Développement Durable
P.LU. : Plan Local d'Urbanisme
P.O.S. : Plan d'Occupation des Sols
S.C.o.T. : Schéma de Cohérence Territoriale
S.D.e.C. : Schéma de Développement Commercial
S.H.O.N. : Surface Hors OEuvre Nette
S.N.C.F. : Société Nationale des Chemins de
Fer
S.R.U. : Solidarité et Renouvellement Urbain (loi)
T.C.S.P. : Transports en Commun en Site Propre
4
INTRODUCTION
Le développement durable est aujourd'hui au coeur de
toutes les problématiques urbaines. Dans ce modèle d'urbanisme
respectueux du territoire, le commerce occupe une place de premier choix. Il
est un élément fondateur de la ville et il permet de
répondre à des besoins de consommation vitaux pour la population.
En cela, il doit être accessible par tous. Les zones commerciales de
périphérie semblent être en décalage par rapport
à l'idéal du commerce dans le développement durable. Elles
sont associées au déclin commercial des centres-villes, à
la séparation des fonctions urbaines, à l'étalement des
villes et à la dépendance automobile. Ainsi, elles apparaissent
comme des « verrues » au sein des terres agricoles et naturelles.
Les promoteurs de projets commerciaux et les élus
locaux sont souvent critiqués et jugés responsables de ces
problèmes. Ce mémoire propose de faire la part des choses en
analysant précisément la stratégie de chacun des acteurs.
Chaque décision doit en effet être étudiée dans son
contexte, notamment lorsqu'elle concerne un sujet économique aussi
sensible que le commerce. Nous allons voir comment les
périphéries sont devenues des espaces à fort potentiel
commercial, alors que quelques dizaines d'années auparavant, elles ne
pouvaient avoir que des usages agricoles.
Cette analyse devra nous permettre de comprendre pourquoi le
plancher commercial de périphérie ne cesse de croître,
alors que de multiples réformes législatives tentent de le
freiner. A l'échelle nationale, le sujet fait plus que jamais
débat et le Parlement prépare une énième
réforme de l'urbanisme commercial.
Pour comprendre le fonctionnement du commerce de
périphérie, nous allons étudier l'exemple de la zone
commerciale Avignon Nord. Ce pôle d'influence régionale illustre
particulièrement bien les problèmes urbains engendrés par
la nouvelle concentration du commerce. Il nous éclairera
également sur la position des élus locaux vis-à-vis de
l'essor des périphéries. Ce site est particulièrement
stratégique à l'échelle locale et il fait l'objet d'une
étude de l'Agence d'Urbanisme de l'Aire Avignonnaise (AURA). L'objectif
est de restructurer Avignon Nord pour l'intégrer dans un projet de ville
durable.
Le pôle Avignon Nord est une zone commerciale.
C'est-à-dire qu'il se compose d'une multitude de bâtiments
disposés sous la forme d'un lotissement commercial. Il comporte en son
sein des activités non commerciales, comme des bureaux ou des
entreprises logistiques,
5
mais elles restent très minoritaires. Ces entreprises
annexes existent dans toutes les zones commerciales.
Une zone commerciale ne doit pas être confondue avec un
centre commercial qui lui regroupe un ensemble d'enseignes sous un même
bâtiment. Avignon Nord est une zone commerciale structurée autour
d'un centre commercial Auchan. Ce dernier est la locomotive du pôle. Ce
terme signifie que c'est l'élément le plus attractif et que c'est
lui qui génère l'essentiel de la clientèle.
Comprendre ce type de principes de fonctionnement est
essentiel dans l'étude d'une zone commerciale. Le commerce occupe une
place importante dans le système économique local. Il crée
de l'emploi et génère des ressources fiscales auxquelles les
élus sont particulièrement sensibles. Les réalités
économiques sont donc au coeur des problématiques de ce
mémoire. Par sa taille et son poids économique, la zone
commerciale Avignon Nord illustre parfaitement les enjeux qui existent autour
du commerce de périphérie.
Pour comprendre son développement, nous allons
confronter les stratégies des acteurs publics et privés. Cette
analyse nous montrera comment les différents objectifs
économiques ont convergé vers cette nouvelle forme de commerce,
pourtant opposée au concept de développement durable. Nous
chercherons également à comprendre comment les zones commerciales
périphériques sont devenues de nouvelles centralités.
L'objectif de ce mémoire est également de
montrer que l'ensemble des politiques d'urbanisme, et notamment les projets
liés aux transports, influencent le développement commercial.
L'urbaniste doit donc connaître le comportement des acteurs privés
pour anticiper leurs réactions face à tout nouveau projet
urbain.
Le rôle des pouvoirs publics est alors crucial. Entre
régulation, désinvolture et soutien, pourquoi ont-ils eu des
comportements contradictoires vis-à-vis du commerce de
périphérie ?
Pour construire cette démonstration, nous allons tout
d'abord mettre en évidence les problèmes d'urbanisme liés
à cette zone commerciale (partie 1). Pour comprendre comment sont
apparus ces disfonctionnements, nous analyserons la stratégie des
acteurs privés du développement commercial de
périphérie (partie 2). Nous confronterons ces méthodes
avec les différentes actions des pouvoirs publics qui ont pu avoir un
impact sur la zone commerciale (partie 3). Après avoir cerné
l'ensemble du jeu d'acteurs, nous verrons dans quelle mesure Avignon Nord peut
s'inscrire dans un projet de ville durable (partie 4).
6
1. Présentation de la zone commerciale et des
problèmes urbains qui lui sont associés
Cette partie va nous permettre d'analyser la zone commerciale
Avignon Nord et ses conséquences sur le territoire. Mais elle a aussi
pour objectif de montrer les intérêts économiques qu'elle
peut représenter.
Au sein de la zone commerciale, il convient de dissocier les
commerces en fonction de leur taille et des produits qu'ils proposent. Les
points de vente de plus de 2500 m2 sont appelés grandes
surfaces. Si plus d'un tiers du chiffre d'affaires d'une grande surface repose
sur la vente de produits alimentaires, on parlera d'hypermarché ou de
grande surface déspécialisée (GSD). Ce terme s'oppose aux
grandes surfaces spécialisées (GSS), du type Leroy-Merlin ou
Décathlon, qui ne vendent qu'un seul type de produits. De la même
manière, on distingue, au sein des moyennes surfaces (de 400 à
2500m2 de surface de vente), les supermarchés et les moyennes
surfaces spécialisées1. Le terme de grande
distribution va permettre de regrouper l'ensemble des grandes et moyennes
surfaces. Toutefois, le commerce de périphérie comporte
également des commerces de petite taille, principalement situés
en galerie marchande.
1.1 La zone commerciale et son contexte urbain
1.1.1 Une zone commerciale régionale qui
s'affranchit des limites administratives
La zone commerciale d'Avignon Nord est née en 1974 avec
l'arrivée de l'enseigne Auchan et de quelques commerces annexes. Depuis,
elle s'est considérablement développée jusqu'à
devenir un pôle commercial régional.
L'agglomération d'Avignon bénéficie d'une situation
privilégiée. Elle se situe au carrefour de deux flux
économiques majeurs : l'axe rhodanien Paris-Lyon-Marseille et l'arc
méditerranéen reliant l'Espagne et l'Italie (cf. figure 1).
1 Insee - définitions
Figure 1 : Une agglomération située sur des
flux économiques européens. (Source : SCoT du Bassin de Vie
d'Avignon, PADD, p.9)

7
A une échelle plus fine, la situation est tout aussi
stratégique. La zone commerciale est située sur l'une des
rares entrées de ville de l'agglomération, au carrefour
des flux provenant de Carpentras et d'Orange (cf. figure 2). Le
développement de la ville d'Avignon est, en effet, historiquement
contraint par deux cours d'eau majeurs : le Rhône à l'Ouest, et la
Durance au Sud. L'urbanisation s'est donc principalement
développée vers l'Est. Le Pontet a été la
première commune concernée par cette croissance
démographique. Ensuite, le phénomène de
périurbanisation s'est développé en direction de
Carpentras, puis de son arrière pays.

Figure 2 : L'Aire avignonnaise : un développement
tourné vers l'Est (Conception : Girard, 2011. Fond de carte :
Géoportail.fr)
8
Si le contexte urbain d'entrée de ville est facile
à cerner, le découpage administratif est, quand
à lui, beaucoup plus complexe. La zone commerciale
occupe une surface d'environ un kilomètre carré, répartie
pour 60% sur la commune du Pontet, 30% sur la commune de Sorgues et 10% sur la
commune de Vedène (cf. figure 3). La partie la plus ancienne se trouve
au nord de la route de Carpentras, sur les communes du Pontet et de Sorgues.
Les secteurs au Sud de cette route départementale sont des extensions
récentes. Celle située sur la commune du Pontet s'est
développée à partir de 2003, sur le lieu-dit de la Tour
Blanche, et comporte trois grandes surfaces spécialisées. La part
de zone commerciale sur Vedène est en totalité occupée par
l'enseigne Ikéa, ouverte en 2010. L'enseigne est en train de
développer une vaste galerie commerciale qui devrait ouvrir fin 2011.

Figure 3 : Une zone commerciale qui s'affranchit des limites
administratives (Conception : Girard, 2011. Fond de carte :
geoportail.fr)
9
On remarque donc que le développement
commercial s'est affranchi des limites administratives. Le
phénomène le plus révélateur est de voir que le
bâtiment du centre commercial Auchan est implanté sur une limite
communale. Il est donc en partie sur la commune du Pontet et en partie sur
celle de Sorgues. Cela pose des problèmes pour la gestion du site et la
collecte des diverses taxes car, si le Pontet et Vedène appartiennent
à la Communauté d'Agglomération du Grand Avignon, Sorgues
fait partie de la Communauté de Communes des Pays de Rhône et
d'Ouvèze. Le SCoT du bassin de vie d'Avignon (cf. figure 4), en cours
d'approbation, devra permettre une meilleure coordination des ces deux
intercommunalités.

Figure 4 : Un SCoT qui permet de rassembler les
intercommunalités concernées (Source : SCoT du Bassin de vie
d'Avignon, Rapport de présentation, p. 63)
10
1.1.2 Un commerce de centre-ville
déstabilisé
Avignon Nord est, de loin, la plus importante des zones
commerciales de l'agglomération en termes de chiffre d'affaires.
Cependant, elle n'est pas la seule. Il existe quatre autres zones commerciales
de périphérie (cf. figure 5) disposées pour la plupart en
entrée de ville. La particularité du commerce de
l'agglomération tient au fait que le centre-ville d'Avignon est
le quatrième pôle commercial en termes de chiffre
d'affaires2. Le bureau d'études AID-Observatoire
estime que dans les agglomérations de taille similaire, la ville centre
est généralement en première ou seconde position. Dans le
cas présent, Avignon est un pôle secondaire qui ne réalise
que 7% du chiffre d'affaires de l'agglomération (contre 34% pour Avignon
Nord).

Figure 5 : Avignon Nord, premier pôle commercial de
l'agglomération (Source : AID-Observatoire, 2011. Etude Avignon Nord
p.18)
2 Groupement Interland, AID-Observatoire, Transitec, i pour le
compte du Syndicat Mixte du SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2011),
Stratégie d'évolution du « pôle régional
Avignon Nord » phase diagnostic, 85p.
11
Cette particularité avignonnaise n'est pas
récente. En 1975, un article de presse affirmait que le Vaucluse
était le troisième département le plus
équipé en grandes surfaces (derrière Paris et les
Yvelines) avec 181m2 de surface de vente pour 1000
habitants3. L'ouverture de l'hypermarché Auchan Avignon Nord
en 1974 a, bien entendu, largement contribué à l'augmentation de
ce ratio. Aujourd'hui, le Vaucluse compte 191 m2 de plancher
commercial en grande surface pour 1 000 habitants, contre une
moyenne de 143 m2 au niveau national4.
L'impact du développement de la grande distribution sur
le commerce de centre-ville est important. En 1987, une étude
universitaire5 s'inquiétait de la disparition de 41
unités alimentaires sur la commune d'Avignon et de 27 autres sur le
reste de l'agglomération entre 1972 et 1987. Cette étude pointait
déjà les problèmes d'accessibilité du centre-ville
d'Avignon aussi bien pour les automobilistes que pour les piétons.
L'étroitesse des trottoirs reste aujourd'hui encore une source de
conflit entre ces deux modes de déplacements à l'intérieur
de la vieille ville.
Avignon n'est pas la seule ville concernée. Les
communes de plus petite taille sont également touchées. Le
commerce de centre-ville du Pontet, de Sorgues et de Vedène correspond
à celui de villes de 5 000 à 7 000 habitants6, alors
qu'elles en comportent respectivement 17 000, 18 000 et 10 0007. Ces
centres-villes conservent principalement des commerces de proximité et
notamment des commerces de bouche de qualité qui s'inscrivent en
complémentarité de l'offre présente à Avignon
Nord.
3 Le Méridional (8 octobre 1975), A propos de grandes
surfaces
4 Op. cit. Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
5 BERNARD F. (1987), le commerce avignonnais face au
développement de l'agglomération, in Etudes vauclusiennes
n°38 p.23-26, Edité par le département d'Histoire et de
géographie de la faculté d'Avignon.
6 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
7
www.insee.fr, Recensement de la
population 2008
1.1.3 Une zone commerciale décomposée en
plusieurs sites
La zone commerciale Avignon Nord a longtemps été
contenue au Nord de la route de Carpentras (D225 et D942). Le principal site
reste le pôle historique où est situé le centre commercial
Auchan (cf. figure 6). Il est entouré d'une multitude de surfaces
spécialisées en habillement, bricolage, ... Plus à
l'Ouest, un pôle de loisirs et de services s'est développé.
On y retrouve notamment le complexe cinématographique implanté en
2008. La délimitation Ouest de la zone commerciale n'est pas très
franche car les commerces s'y mêlent à d'autres activités
liées à l'industrie et à la logistique.
Deux sites ont été
développés plus récemment au Sud de la route de
Carpentras. Le premier a été la zone de la Tour Blanche
qui a accueilli trois grandes surfaces spécialisées dont
l'enseigne Décathlon. Le deuxième est très récent
car il s'agit du pôle Ikéa. L'enseigne suédoise a ouvert en
2011 et sa galerie marchande est en construction. Les ensembles commerciaux de
la Tour Blanche et d'Ikéa ne se sont pas développés face
au centre commercial historique car le Domaine de Roberty est un site
classé.
La figure 6 nous montre que des espaces d'habitat jouxtent la
zone commerciale. Pour autant ces différentes entités ne
communiquent pas entre-elles. Le pôle commercial est divisé par la
route de Carpentras, qui est un axe à deux fois deux voies. Les
échanges entre les trois sites ne peuvent donc se faire qu'en
voiture.
12
Figure 6: Une zone commerciale multipolaire (Conception
Girard, 2011. Fond de carte :
geoportail.fr)
13
1.2 Un poids économique incontestable
Même si nous verrons que la zone commerciale Avignon
Nord est liée à de graves problèmes urbains, il faut
comprendre qu'elle occupe une place importante dans l'économie
locale.
1.2.1 Un pôle d'emploi pour
l'agglomération
Les trois communes du Pontet, de Sorgues et de Vedène
regroupent 2 765 établissements, soit 15% de ceux du SCoT8.
Le dynamisme des zones d'activités, situées le
long de l'ancienne nationale 7 et de la route de Carpentras, est encore
notable. En 2009, on a recensé 119 créations
d'établissements sur les IRIS contenant ces zones9. Parmi
elles, 29 appartiennent à la catégorie commerce de l'Insee.
Même si une part de ces créations peut provenir de transferts
d'activités, on peut affirmer que la zone commerciale Avignon Nord
continue d'attirer de nouveaux établissements.
Les grandes enseignes présentes contribuent à
développer l'emploi. En 1975, l'enseigne Auchan embauchait 280
personnes. En 1982, on recensait 520 employés 10 .
Aujourd'hui, l'entreprise Auchan Le Pontet est considérée comme
le plus gros employeur du registre du commerce et des sociétés du
Vaucluse11. Cette donnée intègre l'hypermarché,
mais également les bureaux de la direction d'Auchan «
Rhône-Alpes Midi », situés à Avignon Nord. La
création du pôle commercial Ikéa et de sa galerie marchande
doit également permettre de créer 600 emplois12.
Il est important de comprendre que les emplois du commerce, et
notamment ceux de la grande distribution, répondent à un besoin
de la population. La part des personnes de plus de 15 ans sans diplôme
est de 22,6% sur la communauté d'agglomération du Grand Avignon
contre 18,7% en France métropolitaine13. Une étude de
l'INSEE14 avait montré que la grande distribution employait
plus d'un tiers de jeunes de moins de 25 ans. Les employés peu
qualifiés sont également nombreux.
8 Insee - Connaissance locale de l'appareil productif
(2006), in SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2010)
9 Insee - Répertoire des entreprises et des
établissements (2009)
10 Le Provençal (11 juin 1982), 8 ans après
son ouverture, Auchan le Pontet est devenu le 2è hypermarché du
groupe sur 31 existants.
11
http://economie.vaucluse.cci.fr,
Registre du commerce et des sociétés (2010)
12 Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse
concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, 15p.
13 Insee - Recensement de la population (2008) exploitations
principales
14 Publication Sud Insee n°8 (1998) Grande
distribution : la croissance de l'emploi s'accompagne d'un recours accru au
personnel masculin, 4p.
14
Il faut toutefois noter que ces emplois sont
généralement précaires. Cette même étude
affirme que 52% des employés de la grande distribution ont des contrats
saisonniers. Cela permet aux enseignes de s'adapter aux variations
d'activité saisonnières, en lien notamment avec le tourisme. Sur
la part des emplois à l'année, on recense 40% de contrats
à temps partiel. Somme toute, seulement 29% des employés
de la grande distribution travaillent à temps complet toute
l'année.
A une échelle plus large, il est également
important de relativiser le nombre d'emplois créés. En effet,
comme nous l'avons vu précédemment, le développement de la
grande distribution provoque le déclin du commerce
traditionnel. Il est donc difficile de dire si la perte d'emplois
liée à ce déclin est plus importante que la dynamique
engendrée par le commerce de périphérie. Toutefois, on
peut affirmer que la création d'emplois est positive sur les communes
d'implantations, mais qu'elle est négative sur les communes de la zone
de chalandise qui connaissent une très forte évasion
commerciale15 vers Avignon Nord. Ce constat assez simple est
important pour comprendre les objectifs des différents élus
locaux. Certains auront intérêt à favoriser l'essor de la
zone, tandis que d'autres plaideront pour limiter son développement.
1.2.2 Un pôle commercial d'influence
régionale
La zone de chalandise d'Avignon Nord est estimée
à 575 000 habitants sans prendre en compte le projet
Ikéa16. L'arrivée du groupe suédois et de sa
galerie marchande devrait la porter à 778 000 habitants17. A
titre de comparaison, la communauté d'agglomération du Grand
Avignon compte 176 000 habitants et le territoire du SCoT 250 00018.
Au niveau de l'agglomération, le rapport entre le chiffre d'affaires du
commerce et les dépenses commercialisables est de 162 %. Cela signifie
que les ventes sont supérieures de 62% à la consommation
des ménages de l'agglomération. La zone commerciale
Avignon Nord joue un rôle majeur dans l'attractivité
commerciale de l'agglomération. Le bureau d'études AID
Observatoire estime que 18% du chiffre d'affaires de la zone commerciale
provient des départements voisins et 10% du tourisme.
15 L'évasion commerciale représente
la part des dépenses des ménages qui n'est pas
dépensée dans la zone étudiée. Elle peut se
calculer à l'échelle de la commune, de l'agglomération, du
département, ...
16 Sauf indication contraire,
l'intégralité des chiffres qui suivent proviennent de
l'étude du Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011),
déjà citée auparavant.
17Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse
concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, 15p.
18Insee - Recensement de la population (2008)
exploitations principales
15
En 2009, Avignon Nord possédait 129 000 m2
de plancher commercial. Le magasin Ikéa de 17 300 m2,
inauguré en 2010, et sa galerie marchande de 23 600 m2, qui
devrait être livrée fin 2011, vont porter la surface de vente
totale du site à 170 000 m2. La zone commerciale est donc de
taille similaire à Plan de Campagne, qui totalisait 145 000
m2 en 2009 mais qui connait, elle aussi des extensions. Le
gigantisme de la zone commerciale Avignon Nord lui permet de développer
le chiffre d'affaires colossal de 518 millions d'euros. A
titre de comparaison, le chiffre d'affaires du tourisme dans le Vaucluse est de
610 millions d'euros19.
Le développement de la zone commerciale a fait
émerger les communes du Pontet, de Sorgues et de Vedène qui sont
aujourd'hui de nouvelles centralités à
l'échelle de l'agglomération. Le cas de la commune du Pontet est
intéressant. Jusqu'en 1925, elle n'était qu'un quartier de la
commune d'Avignon. Elle est ensuite devenue une commune indépendante qui
s'est affirmée comme un pôle industriel, puis commercial
grâce au développement des zones d'activités.
1.2.3 La présence de grands groupes nationaux et
multinationaux
L'essor de la zone commerciale Avignon Nord est lié
à la présence de plusieurs groupes nationaux et multinationaux.
Ces groupes exercent un lobbying20 et possèdent des moyens
techniques et financiers importants, notamment par rapport aux moyens d'actions
des modestes communes sur lesquelles ils sont implantés.
L'arrivée de l'enseigne Ikéa est importante,
mais le groupe le plus influent de la zone reste le moteur historique d'Avignon
Nord : Auchan. Avec 581 hypermarchés et 2384 supermarchés et
supérettes répartis en France et dans le monde, le groupe a
réalisé un chiffre d'affaires TTC de 53 milliards d'euros en
201021. Cette somme représente quasiment le budget de
l'Education Nationale (60,8 milliards en 2010), qui est le plus gros poste de
dépense de l'Etat. L'enseigne du Pontet occupe une place importante dans
le groupe car, déjà en 1982, elle était le deuxième
hypermarché du groupe en termes de chiffre d'affaires22.
Aujourd'hui, ce magasin serait devenu le premier du groupe23.
19
www.vaucluse.fr
20 Lobbying : terme utilisé pour caractériser
l'ensemble des actions d'influence et de pression que peut exercer le groupe
pour défendre ses intérêts
21
www.groupe-auchan.com
22 Le Provençal (11 juin 1982), 8 ans après
son ouverture, Auchan le Pontet est devenu le 2è hypermarché du
groupe sur 31 existants
23 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
16
Le groupe Auchan a été créé dans
les années 1960 par Gérard Mulliez. Il n'a jamais
été coté en bourse mais la famille Mulliez a
créé un groupement d'intérêt économique
appelé « Association familiale Mulliez ». Depuis longtemps,
cette organisation possédait, plus ou moins officieusement, des parts
importantes du capital de grands groupes de la distribution. Une récente
décision de l'Autorité de la Concurrence a officiellement reconnu
que l'Association Familiale Mulliez détient des participations
conséquentes dans certaines enseignes dont les plus importantes
sont : Auchan, Leroy-Merlin, Décathlon, Kiabi, Pimkie, Flunch, Atac,
Norauto, Kiloutou, Cultura, Brice, Jules, Xanaka, Top Office, Picwic, Phildar,
Grain de Malice, GrosBill, etc.24 Cette association montre
l'importance du groupe et du lobby qu'il peut exercer.
Grâce à ses importantes ressources
financières, le groupe Auchan possède également
des moyens techniques considérables. Il a notamment
développé depuis 1976 sa propre filiale foncière :
Immochan. Pour comprendre le fonctionnement de cette
société, il faut analyser le processus de construction des
centres commerciaux25. Le promoteur est le premier maillon de la
chaîne. C'est lui qui assure la conception du centre. Pour cela, il
réalise une étude de marché qui prend en compte les
critères de localisation que nous détaillerons dans la partie
2.1. Une fois l'emplacement trouvé, il construit les bâtiments et
vend l'ensemble à des investisseurs. Un certain nombre de groupes
bancaires comme le Crédit Lyonnais investissent ainsi dans des centres
commerciaux. Les différents investisseurs se regroupent alors pour
assurer la gestion du centre commercial. Le but de cette action est de
créer une ambiance entre les différentes boutiques. Les
investisseurs doivent donc sélectionner les différentes enseignes
qui loueront les emplacements en s'assurant de leur
complémentarité. Ils peuvent par exemple refuser des
commerçants qui donneraient une mauvaise image au centre (sex-shop, bar,
bazar, ...). Le principe de cohésion est très important dans un
centre commercial. L'adhésion à l'association des
commerçants du centre est bien souvent imposée par le bail
commercial. Ces baux ont généralement une durée de 9
à 18 ans et ils ne peuvent être résiliés que par le
locataire, tous les trois ans.
Ce processus de développement fait intervenir de
nombreux acteurs. La particularité du groupe Immochan est qu'il regroupe
les fonctions de promoteur, d'investisseur et de gestionnaire. Sur la
zone commerciale d'Avignon Nord, le groupe possède une partie importante
du foncier commercial bâti et il a acquis certaines
réserves foncières (cf. figure 7). Il gère le
développement de la zone et loue les différents emplacements
commerciaux.
24 Liste établie par l'Autorité de la
Concurrence (Décision n° 11-DCC-87 du 10 juin 2011)
25 Ce processus est abondamment décrit dans
l'ouvrage de Jean Luc Koehl (1990), Les centres commerciaux.
17
Dans le périmètre proche du centre commercial,
seuls Alinéa et Leroy-Merlin sont propriétaires de leurs murs. Si
l'omniprésence du groupe sur le site peut sembler
hégémonique, elle offre tout de même un avantage : dans le
cadre d'un projet urbain pour réorganiser la zone, il est toujours plus
facile de travailler avec un seul propriétaire foncier qui
fédère l'ensemble des acteurs privés.

Figure 7 : Immochan, un propriétaire foncier
incontournable
(Conception Girard, 2011. Cartographie approximative
d'après un entretien avec les services d'Immochan)
18
1.3 Un espace dominé par l'automobile
La voiture individuelle est très présente aussi
bien à l'intérieur de la zone commerciale que sur les voies
routières environnantes. Nous allons maintenant étudier les
effets liés à ce développement par le «
tout-automobile ».
1.3.1 Des infrastructures lourdes qui séparent les
différentes fonctions urbaines
Le site d'implantation de la zone commerciale Avignon Nord est
un carrefour routier depuis des décennies. L'arrivée de
l'autoroute a contribué à augmenter encore le trafic sur la zone
et Avignon Nord est aujourd'hui entouré par des axes à
fort trafic (cf. figure 8). L'axe le plus important vis-à-vis
du site étudié est la route départementale 942 (D942), qui
devient la route départementale 225 (D225) au niveau de la zone
commerciale en direction d'Avignon. Cet axe supporte un trafic journalier de 37
000 véhicules avant l'échangeur autoroutier et 46 000
après ce dernier26. C'est un des flux les plus
importants qui entre dans l'agglomération avignonnaise et il
est saturé par le trafic, notamment aux heures de pointe. La
départementale 225 devient un axe très congestionné
lorsqu'elle absorbe les flux de la D907 en provenance de Sorgues. Les services
du Conseil Général estiment que le trafic augmente de 8% par an
sur cette entrée de ville27. Cette situation montre les
limites du système « tout-voiture » qui aboutit à de
graves problèmes d'accessibilité pour la commune d'Avignon. Pour
éviter la jonction entre la RD907 et la RD225, certains automobilistes
qui se déplacent entre Sorgues et Carpentras empruntent la RD6. Cette
route, qui ne comporte qu'une voie dans chaque sens de circulation, est
surchargée. Des projets du Conseil Général envisagent de
construire un axe à deux fois deux voies entre Sorgues et la route de
Carpentras. Cette nouvelle voirie traverserait la zone commerciale. Elle
viendrait encore y ajouter du trafic supplémentaire.
26 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
27 Conseil Général du Vaucluse (2004),
Diagnostic territorial sur les transports et les déplacements,
12p.
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19
Figure 8 : Un territoire cloisonné par les
infrastructures routières (Conception Girard, 2011. Flux estimés
par le bureau d'études Transitec en 2010)
20
Les axes à fort trafic que nous venons de
présenter ont façonné les trois communes environnantes. Le
Pontet et Sorgues ont connu un fort développement industriel le long de
l'ancienne Nationale 7 reliant Paris à Marseille. Les autres zones
d'activités, et notamment celle de la Lorraine à Vedène,
se sont développées plus récemment, privilégiant la
proximité de l'échangeur autoroutier. Nous verrons dans la partie
2.1 pourquoi la zone commerciale a, elle aussi, été
implantée en bordure d'un des axes les plus fréquenté. Ces
différentes zones industrielles et commerciales n'entretiennent pas de
relations urbaines avec les centres-villes. Le centre-ville du Pontet est
séparé de ces zones d'activités par la route de
Carpentras. La D907 isole également Sorgues de la zone
d'activités et il en est de même avec Vedène, où
l'Autoroute marque la frontière entre l'habitat et les entreprises. Les
terres agricoles à l'interstice entre les centres-villes et les zones
d'activités ont largement été urbanisées par des
lotissements pavillonnaires. C'est d'autant plus le cas lorsqu'elles sont en
retrait des infrastructures routières. La séparation des
fonctions urbaines est donc très tranchée au sein des 3 communes
présentées. Les infrastructures routières ont
contribué à l'absence de perméabilité entre ces
différentes fonctions.
L'accès à la zone commerciale se faisant
principalement en voiture, cela crée des problèmes de congestion
à l'intérieur du site. La zone commerciale accueillait, en 2009,
65 000 véhicules par jour en semaine et 80 000 le samedi28.
Après l'ouverture du complexe commercial Ikéa, la
fréquentation devrait atteindre 80 000 véhicules par jour en
semaine et près de 100 000 le samedi. Malgré les trois
échangeurs qui desservent la partie de la zone commerciale au nord de la
route de Carpentras, des difficultés de circulation apparaissent sur le
site. Elles sont principalement liées à l'affluence automobile,
mais aussi à la configuration des accès. En effet, il est souvent
compliqué d'atteindre le coeur de la zone commerciale. Cela vient du
fait que les différents plans de circulation ont été
réalisés à postériori des implantations
commerciales29. Avec l'arrivée d'Ikéa, les services de
l'Etat ont craint que la congestion autour du giratoire en sortie de
l'autoroute ne provoque des embouteillages jusque sur les voies de l'A7. Ils
ont alors décidé de bloquer l'ensemble des dossiers des
Commissions Départementales d'Aménagement Commercial, tant qu'une
solution n'aurait pas été trouvée. Les services du Conseil
Général ont dû réaliser un nouveau pont au dessus de
la route de Carpentras afin de fluidifier le trafic.
28 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
29 Entretien avec Michel LACROZE (2011), directeur de
l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents
d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.
1.3.2 Des milliers de places de stationnement en
surface
Pour absorber le flux de visiteurs, des milliers de places de
stationnement ont été créées. Chaque enseigne
dispose de son propre parking, hormis pour le centre commercial Auchan
où la galerie marchande et l'hypermarché utilisent le même
espace de stationnement. A lui seul, ce centre commercial accueille 8 600 000
personnes par an avec des journées d'affluence record allant
jusqu'à 55 000 visiteurs. Il détient le record de
fréquentation du groupe Auchan30. Les 3800 places qui lui
sont dédiées sont saturées les jours de grande affluence,
mais elles sont en grande partie vacantes le reste du temps.
Le Cinéma Capitole Studios possède des horaires
de fréquentation relativement différents des autres commerces.
C'est en effet un des rares commerces ouvert le dimanche et ses pics de
fréquentation sont en soirée. Pour autant, son parking n'est pas
mutualisé avec un autre commerce et les espaces de stationnement qui lui
sont exclusivement dédié sont vides sur une grande partie de la
semaine.
21
30 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)

22
Figure 9 : Une offre de stationnement
démesurée
(Conception : Girard 2011. D'après les estimations
citées ci-dessous)
Vu que chaque enseigne possède son propre parking, le
nombre de places de stationnement est démesuré. Sur le site, on
dénombre environ 8 400 places sur la partie située au nord de la
route de Carpentras31, 1 500 places autour de
Décathlon32 et 1 800 places pour le projet
Ikéa33. Au total, ce sont donc 11 500 places gratuites qui
sont dédiées au commerce (cf. figure 9). A titre de comparaison,
le centre-ville d'Avignon possède 10 000 places de stationnement en
incluant les deux parcs relais de 1 000 places chacun et les 6 600 places
payantes34. La quantité de parkings présents sur la
zone commerciale joue un rôle d' « aspirateur à voitures
». Les clients effectuent des distances relativement importantes. Les
conséquences sur le trafic routier et sur les émissions de gaz
à effet de serre sont donc considérables.
31 Id., complété par estimation à
partir de l'Orthophotographie de 2005.
32 Estimation à partir de l'Orthophotographie
de 2005
33 Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse
concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, 15p.
34 Grand Avignon (janvier 2010), Etude de faisabilité
du projet TCSP, réalisée par Egis et Transitec.
23
A l'intérieur de la zone commerciale Avignon Nord,
l'espace dédié à l'automobile est donc
prédominant. En effet, l'espace lié au stationnement est
estimé à 275 000 m2 et la voirie occupe, quant
à elle, 60 000m2. Environ deux tiers de la zone sont donc
consacrés à l'automobile et seulement un tiers au bâti. Les
espaces verts peuvent être considérés comme nuls (cf.
figure 10).

Voirie 60 000 m2
11%
Bâti
200 000 m2
37%
Stationnement 275 000 m2
52%
Espaces verts 0 m2
0%
Figure 10 : Occupation du Sol sur la zone commerciale
(Conception : Girard ,2011. D'après Interland, 2011 et
diverses estimations)
Cette occupation du sol pose des problèmes urbains
majeurs. En effet, entre les espaces de stationnement, la voirie et les
bâtiments, la quasi-totalité de l'espace est
imperméabilisé, ce qui pose notamment des problèmes pour
l'infiltration des eaux de pluie. Les parkings de surface et les
bâtiments de plain-pied ont fortement contribué à la faible
densité du site. La zone commerciale a donc dû s'étendre
sur les terres agricoles afin de pouvoir développer l'offre de
stationnement présente aujourd'hui.
24
1.3.3 Des transports collectifs et des modes doux quasiment
inutilisés
Pour l'accès à la zone commerciale, la part
modale des transports en commun est de 0,5%, et celle des modes doux peut
être considérée comme nulle. En effet 99,5% des clients
accèdent à Avignon Nord en voiture individuelle35. La
faible utilisation des transports collectifs et des modes doux est liée
à une carence de l'offre, mais également à la faible
densité et à la superficie du site.
L'offre en transports en commun est faible. La desserte
départementale ne se fait que par une seule ligne qui ne dessert qu'un
arrêt situé à 200 mètres du centre commercial
Auchan. La desserte urbaine par la ligne 7 du réseau TCRA (Transports en
Commun de la Région d'Avignon) est légèrement meilleure.
Cette ligne de bus dessert six points de la zone commerciale avec une
fréquence de 15 à 20 minutes en semaine et 20 à 30 minutes
le samedi36. La desserte n'est donc pas adaptée à la
fréquentation de la zone commerciale qui atteint son maximum le samedi.
De plus, les temps de parcours sont beaucoup plus longs en bus qu'en voiture.
Depuis Avignon, le temps de déplacement est de 14 minutes en voiture et
de 30 minutes en bus.
La sous-utilisation des transports en commun s'explique
également par le manque de cheminements doux à l'intérieur
du site. La ligne 7 suit les mêmes voies que les automobiles à
l'intérieur du site. Les arrêts de bus sont donc
généralement situés à 200 ou 300 mètres des
enseignes. L'usager doit alors traverser les espaces de stationnement pour
accéder aux commerces. Les cheminements doux n'apparaissent qu'à
proximité directe de l'entrée des magasins. Ils sont
également inexistants entre les différentes enseignes.
Les accès en modes doux depuis l'extérieur du
site sont également mal développés. Une piste cyclable a
récemment été mise en place entre le centre-ville de
Sorgues et Avignon Nord. Mais aucun cheminement doux n'existe depuis les
centres-villes du Pontet et de Vedène. Ces deux communes sont quasiment
inaccessibles depuis le centre commercial car la Route de Carpentras et
l'Autoroute A7 sont infranchissables. La mise en place d'ouvrages d'art pour
les relier au site serait extrêmement coûteuse. Ce manque de
perméabilité pose des problèmes. En effet, les
élèves du lycée professionnel de Vedène
n'hésitent pas à emprunter, à pied, le pont routier qui
franchit l'autoroute pour accéder au centre commercial (cf. figure 11).
Cette pratique est très dangereuse.
35 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
36
www.tcra.fr, Transports en Commun de la
Région d'Avignon

25
Figure 11 : Un lycéen franchissant l'autoroute par le
pont de la D942 (Girard, 2011)
La faible densité de la zone commerciale explique, en
partie, la faible desserte en transports en commun et le manque de cheminements
doux. Avignon Nord s'étend sur plus de 50 hectares répartis sur
les trois entités (la zone commerciale historique, le complexe autour
d'Ikéa et le lieu dit la Tour Blanche autour de Décathlon). La
principale partie de la zone commerciale, située au Nord de la route de
Carpentras, mesure 1 800 mètres de long. Sur une telle distance, l'usage
de la voiture individuelle est plus intuitif, notamment vis-à-vis de la
quantité de stationnement disponible. L'automobile est donc
utilisée même pour les déplacements internes.
La voiture individuelle semble donc quasiment indispensable
pour se rendre sur la zone commerciale et pour s'y déplacer. Cela pose
un problème social. Les ménages non motorisés
(14 % des ménages du Vaucluse en 200837) sont
fortement pénalisés dans l'accès aux commerces s'ils
ne peuvent accéder à cette zone commerciale
extrêmement complète38. Les personnes les plus
touchées sont les plus pauvres, mais également les plus
âgées. Des difficultés d'accès existent aussi, si le
membre du ménage chargé des achats n'a pas de voiture à
disposition. Cela est souvent le cas si elle est utilisée par le membre
actif du ménage. De plus, nous avons vu que le commerce de centre-ville
est en déclin et qu'il propose une offre de plus en plus
réduite.
37 Insee - Recensement de la population (2008) exploitations
principales
38 Une étude de l'Université
d'Avignon développe ces problèmes d'accessibilité au
commerce : GENRE-GRANDPIERRE C. (2007), l'accessibilité aux commerces
dans l'aire de vie avignonnaise, in Espace, populations et
sociétés, n°2-3 p.421-432, Edité par
l'Université de Lille 1.
26
1.4 Des paysages transformés par ces nouveaux
usages
L'implantation des activités commerciales a
occulté les richesses patrimoniales dont disposait le site. Les usages
agricoles ont quasiment disparu et l'entrée de ville s'est
dégradée.
1.4.1 Une terre historiquement agricole qui dispose d'un
patrimoine important
Avant l'arrivée de l'enseigne Auchan, les terres du
Nord de la commune du Pontet et du Sud de la commune de Sorgues étaient
exploitées pour produire les célèbres foins de Montfavet.
Ces foins, qui servaient notamment à l'alimentation des chevaux,
étaient exportés en France et à
l'international39. On estime que la surface dédiée
à la production de ces foins est passée de 2300 hectares,
après la seconde guerre mondiale, à 600 aujourd'hui40.
Ce déclin est lié au développement de la zone commerciale
Avignon Nord mais aussi au mitage créé par les lotissements de
maisons individuelles.
La culture des foins avait été
rendue possible par la construction de nombreux canaux. Ils
avaient pour fonction d'irriguer la terre pour augmenter la qualité des
foins et la productivité des terres. Ces canaux ne sont absolument pas
valorisés aujourd'hui. La qualité paysagère de ces cours
d'eau aurait notamment pu être mise en valeur comme fil conducteur de
cheminements doux. Ils ont plutôt été vus comme des
contraintes pour le développement de la zone commerciale. L'un d'eux a
notamment été enterré pour permettre l'extension de la
galerie marchande d'Auchan.
Si la présence de l'eau était favorable à
l'agriculture, elle ne l'est pas pour le commerce. La nappe phréatique
est affleurante, l'imperméabilisation des sols est importante et le
climat méditerranéen provoque des pluies importantes. Le risque
d'inondation est donc relativement élevé. Il est
géré par de vastes bassins de rétention qui sont
généralement entourés de grillages. Leur usage est
strictement fonctionnel et ils ne sont pas exploités pour des fonctions
récréatives.
Cette ancienne plaine agricole possède également
un patrimoine bâti important et pourtant peu mis en valeur (cf. figure
12).
39 Entretien avec Michel LACROZE (3 août 2011), directeur
de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les
documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.
40 La Provence (25 août 2011), Le foin, on en fait
toute une histoire à Montfavet !

27
Figure 12 : Des espaces patrimoniaux méconnus
(Conception : Girard ,2011)
L'élément le plus menacé par le
développement de la zone commerciale est le Monastère de la
Visitation. Cet ancien château est en effet situé à
proximité directe des enseignes de la commune de Sorgues. Il est
totalement invisible depuis la zone commerciale car il est entouré d'un
mur et de plusieurs haies d'arbres. Aujourd'hui, la commune de Sorgues envisage
de déclasser une partie des terrains appartenant au monastère
pour y développer des activités paramédicales et
commerciales. Pour l'instant, le SCoT interdit la construction sur ces
terrains. Mais ce document n'étant pas approuvé, il peut encore
être modifié au terme de l'enquête publique.
28
La Colline Sainte Anne, située sur la commune de
Vedène, est elle aussi un élément patrimonial important.
Elle est plus soumise aux pressions du développement de l'habitat que du
commerce. En effet, elle est séparée de la zone commerciale par
l'autoroute et par la route de Carpentras. Sa possible mise en valeur semble
moins évidente, du moins en ce qui concerne le lien avec
l'activité commerciale.
Le plus vaste et le plus reconnu des éléments
patrimoniaux du site est, sans aucun doute, le Domaine de Roberty. Ce parc de
168 hectares est un site naturel classé. Au XIXème siècle,
il était un des grands domaines agro-industriels de
l'agglomération. Une partie de ce site est occupé par un
hippodrome. Les écuries, la tribune mais également le
château du parc sont classés comme monuments
historiques41. Malheureusement, les abords de ce site ne sont ni
entretenus et ni mis en valeur. La communauté d'agglomération
envisage d'acheter ce site qui appartient aujourd'hui à un
propriétaire privé. L'enjeu serait de l'ouvrir au public pour en
faire un grand espace vert pour l'agglomération. Il pourrait
éventuellement servir de support pour les cheminements doux entre le
centre-ville du Pontet et sa zone commerciale. Pour cela, il faudrait encore
construire un ouvrage pour franchir la route de Carpentras.
1.4.2 Une entrée de ville dégradée
Malgré le patrimoine architectural et paysager
présent sur le site, cette entrée de ville Nord de
l'agglomération d'Avignon est extrêmement banale. La route de
Carpentras est bordée d'une multitude d'enseignes qui ne laissent aucune
place aux paysages vauclusiens et à la mise en valeur du patrimoine. La
photo de l'entrée de ville (cf. figure 13) pourrait en effet avoir
été prise dans n'importe quelle ville, aucune
particularité architecturale n'y apparaît. Les quelques
perspectives sur le Mont Ventoux, figure emblématique du Vaucluse, sont
masquées par une multitude d'enseignes (cf. figure 14).
Ce problème d'entrée de ville
dégradée remonte plus en amont sur la route de Carpentras sur dix
kilomètres environ. Les panneaux publicitaires et les enseignes
sont non seulement de grande taille mais elles ont également des
couleurs vives. Parmi les exemples de « boîtes commerciales
» non intégrées, on peut citer les cas les plus frappants
comme Ikéa et son magasin bleu et jaune (cf. figure 15), ou encore
Diamantor avec sa façade rouge et pourpre ainsi que son écran
publicitaire LCD qui contrastent avec le Mont Ventoux en arrière plan
(cf. figure 14).
41
www.paca.culture.gouv.fr

Figure 13 : Une entrée de ville de ville
banalisée (Girard, 2011)
29
Figure 14 : Contraste entre les enseignes et la
perspective sur le Mont Ventoux (Girard, 2011)

Figure 15 : Le magasin Ikéa, une « boîte
commerciale » qui s'intègre difficilement dans le paysage (Girard,
2011)
Conclusion de la première partie :
Présentation de la zone commerciale et des
problèmes urbains qui lui sont associés
La zone commerciale s'inscrit dans un territoire
dominé par la voiture individuelle. Les grands axes routiers ont
façonné le territoire. Les différentes fonctions urbaines
sont séparées et les zones d'activités et de commerce ne
communiquent pas avec les zones d'habitat. Dans ce contexte, l'usage de
l'automobile est indispensable et l'accès au commerce est difficile pour
les ménages non motorisés.
La zone commerciale est également
associée à l'étalement urbain et à la
dégradation des entrées de villes. Pourtant, malgré sa
faible qualité urbaine, le site n'est pas obsolète. Il fait
partie des moteurs économiques de l'agglomération, aussi bien au
niveau du nombre d'emplois que du chiffre d'affaires réalisé.
Cette composante est très importante car il est extrêmement
délicat de réaménager une zone commerciale qui fonctionne
d'un point de vue économique.
|
30
31
2 Les stratégies d'implantation et
d'évolution du commerce de périphérie
Les zones commerciales de périphérie sont
souvent qualifiées d' « anarchiques ». En étudiant les
stratégies acteurs privés, cette partie va montrer qu'au
contraire, elles suivent une logique extrêmement
précise. Cette analyse permettra également de comprendre
pourquoi le commerce de périphérie s'est implanté sur des
noeuds routiers et pourquoi les entrées de villes ont été
dégradées.
2.1 Les critères nécessaires à
l'implantation commerciale
Les professionnels du commerce aiment à dire que les
trois clés de la réussite commerciale sont : «
l'emplacement, l'emplacement et encore l'emplacement ».
Cette sous-partie a pour but de déterminer ce qui fait qu'un site est
stratégique ou non pour l'implantation commerciale. Elle s'inspire des
travaux de David Mangin42, de l'ouvrage de Philippe Moati et Laurent
Pouquet43 et d'un entretien avec Lionel Champey, ancien directeur
régional de Décathlon44. Il se trouve que ces
différents acteurs identifient tous les mêmes critères
d'implantation commerciale, à savoir :
- un bassin de consommation important qui représente le
marché potentiel,
- un site facilement accessible et visible,
- un environnement commercial et non commercial
renforçant l'attractivité du site.
Nous verrons alors que la question du prix du foncier apparait
comme secondaire par rapport à ces trois exigences.
Les critères d'implantation sont semblables pour tous
les commerces, qu'ils soient de périphérie ou de centre-ville.
Toutefois, cette sous-partie approfondira les particularités du commerce
de périphérie afin de comprendre le fonctionnement du centre
commercial Avignon Nord.
42 MANGIN D. (2004), La ville franchisée : formes
et structures de la ville contemporaine, Editions de la Villette, 396p.
43 MOATI P. et POUQUET L. (1998), Stratégies de
localisation de la grande distribution et impact sur la mobilité des
consommateurs, CREDOC, 115p
44 Entretien d'août 2010 avec Lionel Champey
directeur du pôle TPE-Commerce à la CCI de Marseille-Provence et
ancien directeur général de Décathlon
Sud-Méditerranée.
32
2.1.1 Evaluer le marché potentiel
Les zones commerciales coûtent extrêmement cher
à la construction. Si les investisseurs sont attirés par ces
placements financiers, c'est parce qu'ils en attendent de forts retours sur
investissement. Pour cela, la zone commerciale doit produire un chiffre
d'affaires qui rentabilise sa construction et qui produit des
bénéfices. Avant d'implanter une zone commerciale, il est donc
primordial d'estimer le chiffre d'affaires qu'elle va produire via une
étude de marché.
2.1.1.1 Déterminer la zone d'influence
La première étape consiste à
déterminer le rayon d'influence de la future zone
commerciale. Les travaux de Zahavi45 ont été
les premiers à aborder la notion de « budget-temps ». En
effet, les individus accordent un certain temps pour accéder à
chacune de leurs activités (travail, loisirs, ...). La distance à
parcourir apparaît comme secondaire par rapport à la durée
du trajet. Avec l'essor de l'automobile et le développement du
réseau routier rapide, les vitesses de déplacement ont
augmenté. Pour autant, le temps accordé aux déplacements
n'a pas diminué. Ce sont les distances parcourues qui ont
augmenté. Le commerce n'échappe pas à cette
règle46 et les acteurs du commerce de
périphérie l'ont compris depuis longtemps. Pour les promoteurs,
l'important est donc de calculer le temps d'accès au futur pôle
commercial, plus que les distances à parcourir. L'aire d'influence sera
donc estimée en traçant des courbes isochrones,
qui relient les points situés à un temps de parcours
égal.
Déterminer le temps de parcours que sera
prêt à accorder le futur client est relativement
complexe. 75 % des consommateurs déclarent mettre, en moyenne, moins
d'un quart d'heure pour se rendre sur le lieu de leurs achats47.
Toutefois, ce temps de parcours peut être nettement plus long selon le
type d'achats. Une moyenne surface spécialisée comme Boulanger
recherche par exemple des emplacements où 100 000 habitants se trouvent
à moins de 30 minutes48. Un magasin plus grand possède
un pouvoir d'attraction plus fort. Ainsi, Ikéa recherche des
emplacements où un million de personnes vivent à moins de 60
minutes. A titre
45 ENAULT C. (2008), Comment la vitesse agit-elle sur
l'étalement urbain ?, Laboratoire LVMT,
http://thema.univ-fcomte.fr/IMG/pdf/articlerelationvitesseetalementCEnault.pdf
et DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce urbain, p.23-25
46 Les Enquêtes Ménages Déplacements (EMD)
traitent des trajets effectués du lundi au vendredi. Cela suffit pour
analyser les déplacements domicile-travail mais pas pour étudier
le commerce, les conclusions sont beaucoup plus floues. En effet, un part
importante des déplacements pour le motif « achats » se font
le samedi. Les conclusions sur le commerce sont donc très floues dans
les EMD.
47 Etude CREDOC (1994) in MOATI P. et POUQUET L. (1998),
48 MOATI P. et POUQUET L. (1998), p. 71
33
d'exemple, la figure 16 montre les courbes isochrones à
60 minutes autour du pôle Avignon Nord. On remarque que l'autoroute joue
un rôle prépondérant sur la taille du territoire accessible
en moins d'une heure.

Figure 16 : Courbes isochrones à 60 minutes autour du
pôle Avignon Nord (Conception : Girard, 2011. D'après
maps.google.fr. Fond de
carte :
geoportail.fr)
Nb. : cette figure ne représente pas la zone de
chalandise car elle ne prend pas en compte la concurrence. En effet, pour
l'enseigne Ikéa par exemple, la zone de chalandise est beaucoup moins
étendue au sud, notamment à cause de la présence d'un
autre magasin Ikéa à Vitrolles.
La méthode des courbes isochrones nous montre que
les infrastructures routières jouent un rôle important
dans le développement du commerce de périphérie.
Cela explique pourquoi la firme suédoise a choisi de s'implanter
à proximité immédiate de l'échangeur autoroutier
d'Avignon Nord. D'un point de vue général, l'ensemble de la zone
commerciale a bénéficié des grandes infrastructures
routières. Le fait que la route de Carpentras possède deux voies
pour chaque sens de circulation et qu'elle soit en partie limitée
à 110 km/h ont permis d'étendre la zone de chalandise du
pôle commercial.
2.1.1.2 Estimer les dépenses des ménages
Une fois que la clientèle potentielle est
identifiée, l'étude de marché doit déterminer le
potentiel de consommation. Pour estimer les dépenses des ménages,
les acteurs du commerce se basent sur de nombreux indices statistiques. Tout
d'abord, il faut connaître le nombre d'habitants dans la
zone d'influence. Le revenu des ménages et les
catégories socioprofessionnelles sont également importants. Des
indices de dépense par foyer sont également publiés par
l'INSEE et le CREDOC. Toutefois, selon le territoire, les besoins ne sont pas
les mêmes. En effet, les dépenses de jardinage sont moins
élevées à Paris qu'en province par exemple. Pour tenir
compte de cela, les données sur les dépenses des ménages
sont pondérées par les Indices de Disparité de
Consommation (IDC). L'IDC est calculé et vendu par l'Assemblée
des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie49. Il se
base sur plusieurs enquêtes de consommation et prend en compte divers
éléments comme l'âge de la population ou encore le type
d'habitation. L'échelle de précision de cet indice est l'IRIS de
l'INSEE. Il peut se calquer sur n'importe quel territoire d'influence
préalablement calculé par le promoteur.
34
49
www.cci.fr
Le chiffre d'affaires potentiel de la zone d'influence se
calcule ensuite par la formule suivante :
Chiffre d'affaires potentiel de la zone
d'influence
|
=
|
Nombre de ménages
|
Dépenses
* théoriques par
ménage
|
-
|
Evasion commerciale
|
+
|
Attraction commerciale
|
L'évasion commerciale correspond aux
dépenses effectuées par les ménages de la zone d'influence
en dehors de cette zone. L'attraction commerciale correspond au chiffre
d'affaires réalisé grâce à des ménages qui ne
sont pas dans la zone d'influence (les gens de passage). Ces deux chiffres sont
très délicats à calculer car l'implantation de l'enseigne
va modifier les comportements d'achat.
Pour enfin obtenir le chiffre d'affaires de la future zone
commerciale, il faut ensuite tenir compte des concurrents présents dans
la zone d'influence :
Chiffre d'affaires potentiel de la future zone
commerciale
|
=
|
Chiffre d'affaires potentiel de la zone
d'influence
|
-
|
Chiffre d'affaires de la
concurrence
|
Ce calcul permet d'estimer les parts de marché
restantes pour les enseignes qui vont s'implanter. Toutefois, la future
implantation va également modifier les chiffres d'affaires de des
établissements déjà présents. En ce qui concerne la
concurrence, Avignon Nord a longtemps bénéficié du faible
développement de la grande distribution dans l'agglomération
d'Orange. En effet, un projet d'hypermarché au Sud d'Orange a longtemps
été bloqué50 et l'essor de la grande
distribution n'a été que très récent sur ce
territoire.
35
50 Le Dauphiné libéré, articles du 17
octobre 1982, du 21 janvier 1983 et du 25 février 1984.
Dans le vocabulaire de la grande distribution, on appelle taux
de pénétration le rapport entre le chiffre d'affaires de
l'enseigne et le chiffre d'affaires de la zone d'influence. En 1996, le taux de
pénétration des grandes et moyennes surfaces était de
60,5% dans le marché alimentaire, dont 33% pour les
hypermarchés51. David Mangin explique que si la grande
distribution a si bien fonctionné en France, c'est grâce au
développement des lotissements pavillonnaires52. En effet, le
fait de construire des maisons sur des parcelles de plusieurs milliers de
mètres carrés a éloigné les lieux d'habitation des
centres-villes. Les ménages ont donc dû utiliser leur voiture pour
faire leurs achats et c'est la grande distribution qui s'est le mieux
adaptée à ce nouveau moyen de transport. Dans le cas d'Avignon
Nord, la périurbanisation a augmenté la population de sa zone de
chalandise. En effet, la figure 17 nous montre que l'arrondissement de
Carpentras, qui compte de nombreuses communes périurbaines, a connu un
très fort accroissement démographique. En 1962, la population de
la ville d'Avignon était supérieure à celle de
l'arrondissement de Carpentras. Aujourd'hui, la situation s'est totalement
inversée avec un écart de 36 000 habitants. La figure 17bis nous
montre que la situation de la zone commerciale était très
stratégique pour bénéficier de cet élan
démographique. De plus, le revenu médian par unité de
consommation est de 13 900 euros à Avignon contre 16 400 euros sur le
Vaucluse53. En ce situant en périphérie, la zone
commerciale a donc pu satisfaire des ménages plus aisés.
36
51 Op. cit., MOATI P. et POUQUET L. (1998), p.4
52 Op. cit., MANGIN D. (2004) p.112
53 Insee, Revenus fiscaux localisés des ménages
(2008)
140000

120000
Nombre d'habitants
100000
80000
60000
40000
20000
0
Ville d'Avignon
Arrondissement de Carpentras
1962
|
1968
|
1975
|
1982
|
1990
|
1999
|
2008
|
72700
|
86100
|
90800
|
89100
|
86900
|
85900
|
90100
|
67800
|
75700
|
84000
|
93400
|
101000
|
113200
|
126000
|

37
Figure 17 et 17bis: Un accroissement démographique
plus rapide dans les territoires périurbains (graphique et carte de
localisation)
(Conception : Girard, 2011. D'après Insee
Recensements de la population. Fond de carte :
geoportail.fr)
38
2.1.2 La visibilité et l'accessibilité
2.1.2.1 La visibilité
Une fois que le promoteur a identifié un marché
porteur, il doit s'assurer que la clientèle viendra dans le pôle
commercial qu'il va développer. La visibilité est alors un
critère important pour juger de la qualité d'un emplacement.
Un point de vente doit être « visible, repérable et
identifiable de loin »54 pour être connu des
futurs acheteurs.
L'enjeu est de taille pour une implantation nouvelle, mais
également pour une zone commerciale existante. En effet, toute enseigne
doit, en permanence, prospecter de nouveaux consommateurs pour compenser la
perte de ses clients, qui déménagent ou qui vont aller consommer
chez des concurrents.
Les carrefours routiers sont des points stratégiques
pour capter l'attention des automobilistes. En effet, le croisement de deux
axes à fort trafic, comme l'Autoroute A7 et la route de Carpentras, est
le lieu où les flux seront les plus importants. Depuis ces routes,
l'usager doit pouvoir identifier le nom des commerces et comprendre quels types
de produits sont vendus. Le marketing des grands groupes est là pour
faciliter cette identification. En effet, une inscription « BUT »
dans un carré rouge n'est pas très parlante en soi. Mais la
publicité permet au consommateur d'identifier que, dans n'importe quelle
ville de France, cette enseigne est celle d'un marchand de meubles. Le groupe a
donc tout intérêt à avoir la même enseigne sur
l'ensemble de ses succursales et franchises.
Pour être visible, l'enseigne doit
également contraster avec son environnement. L'objectif est
donc de ne pas s'intégrer au paysage afin d'être remarqué.
L'utilisation de couleurs vives sert ainsi à se démarquer pour
que les clients se repèrent facilement. Certains magasins vont
jusqu'à peindre leur façade en rouge (SFR) ou en bleu
(Ikéa). Le critère de visibilité est indispensable pour
comprendre la dégradation des entrées de villes.
A une échelle plus fine, on remarque que les commerces
se sont implantés au plus près de la route de Carpentras pour
bénéficier de l' « effet vitrine ». Les rares
emplacements vacants sur Avignon Nord sont au contraire ceux situés plus
en retrait.
Le foisonnement d'enseignes et d'annonces publicitaires est
beaucoup plus encadré en centre-ville. Pour les distributeurs, la
périphérie a toujours offert beaucoup plus de liberté.
Hormis les règles d'urbanisme et d'affichage publicitaire, la seule
limite des distributeurs est
54 Op. cit., MOATI P. et POUQUET L. (1998)
39
l'acceptabilité sociale. David Mangin explique que,
pour cette raison, Mac Donald's a diminué la taille du mât qui
porte son enseigne.55
2.1.2.2 L'accessibilité :
Pour être attractif vis-à-vis de sa concurrence,
un commerce doit être accessible. En effet, les achats sont
considérés comme une tâche pénible qu'il faut
réaliser rapidement. Les enseignes vont donc choisir de
s'implanter à proximité des échangeurs et des giratoires
pour être immédiatement desservies depuis les axes à fort
trafic. Lorsque ces infrastructures n'existent pas, les pouvoirs
publics vont les développer afin de ne pas créer de congestion
sur les voies routières. Dans la partie 3.2, nous verrons les limites de
ce raisonnement.
La facilité d'accès pour les clients
est le premier résultat attendu de ces équipements
routiers. Mais ils permettent également la gestion des
marchandises en flux tendus56. La logistique en flux tendus
vise à augmenter le nombre de livraisons par semaine afin de
réduire les espaces de stockage sur le site. Les enseignes peuvent alors
s'adapter à la demande des clients et proposer un grand nombre de
références tout en minimisant leur stock. Ce mode de
fonctionnement n'est possible que grâce à la bonne desserte
routière et autoroutière et à l'utilisation de camions. Il
a pour conséquence de fortement augmenter le trafic poids lourds car les
petites livraisons sont nombreuses. En ce qui concerne l'étalement
urbain, il permet de limiter les espaces de stockage et donc la surface
bâtie sur le site. Mais en contrepartie, de vastes espaces logistiques
sont développés par les enseignes à proximité des
échangeurs autoroutiers. Ces entrepôts logistiques aux dimensions
démesurées assurent la desserte des magasins de plusieurs
départements. Les conséquences sur l'étalement urbain et
le trafic routier sont donc importantes.
55 Op. cit., MANGIN D. (2004) p.126-127, la hauteur du mât
aurait été réduite de 28 à 6,5 mètres.
56 L'intérêt de ce mode de
fonctionnement est détaillé dans l'ouvrage de MOATI P. et POUQUET
L. (1998) p.42-43 et 58
40
La figure 18 nous montre que le site est
particulièrement bien desservi. En effet, on compte trois
échangeurs principaux depuis Avignon et deux depuis Carpentras.
Malgré ces infrastructures performantes et nombreuses, la très
forte affluence sur la zone commerciale peut saturer ces accès.

Figure 18 : Les échangeurs, éléments
clés de l'accessibilité (Conception : Girard, 2011)
Pour bénéficier d'une telle desserte, les
distributeurs sont prêts à financer une partie des infrastructures
routières. Ikéa a notamment versé une participation de 4,6
millions d'euros pour le réaménagement de l'accès à
son site57. Cette somme ne couvre pas l'ensemble des travaux mais
elle montre l'importance accordée par les enseignes à leur
desserte. En aucun cas le groupe Ikéa n'aurait participé au
financement de ce carrefour routier s'il n'y trouvait pas un
intérêt au niveau de son chiffre d'affaires.
Le réaménagement de ce carrefour fait suite
à l'inquiétude de la société des Autoroutes du Sud
de la France, qui craignait que l'arrivée de la firme suédoise ne
crée de la congestion au niveau du giratoire en sortie de l'autoroute
A7. En effet, l'ensemble des clients d'Ikéa auraient dû emprunter
ce carrefour, quelque soit leur provenance (cf. figure 19). Ce giratoire,
57 Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse
concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène.
41
qui était déjà problématique
aurait été saturé et il aurait pu provoquer de la
congestion jusque sur les voies autoroutières. Pour éviter cela,
le carrefour a été modifié afin que les flux en provenance
d'Avignon et du centre commercial ne transitent pas par le giratoire.

Figure 19 : L'aménagement de l'accès au
pôle Ikéa (Conception : Girard, 2011. Fond de carte : SIG
AURA)
L'accessibilité passe aussi par une offre en
stationnement important. Les professionnels sont très
attachés à ce point et particulièrement en
périphérie où l'immense majorité des clients
utilisent l'automobile pour accéder à la zone commerciale. Le
célèbre concept de Bernardo Trujillo58 « No
Parking, No Business » prend tout son sens sur la zone commerciale Avignon
Nord. La quantité de stationnement est dimensionnée selon le
nombre de véhicules attendus le samedi, jour le plus
fréquenté de la semaine59. Si les distributeurs sont
prêts à investir abondamment dans la construction de parkings,
c'est que ce sont eux qui vont limiter la capacité d'accueil du site.
Leur dimensionnement repose sur des ratios qui sont en moyenne de 7,1 places
pour 100m2 de surface de vente à Avignon Nord60.
Pour chaque nouvelle implantation, le nombre de places de stationnement est
donc augmenté. Cela explique le fait que l'on retrouve plus de 10 000
places sur l'ensemble du site.
58 Bernardo Trujillo est considéré comme le
concepteur de la grande distribution. Ses conférences ont inspiré
les précurseurs de la grande distribution française.
59 Entretien avec Sara Sheriff (2011), responsable montage
d'opérations de la société Immochan région Midi
60 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i
(2011)
42
L'accessibilité et la visibilité sont
très importantes pour des achats impulsifs, ou pour des secteurs
d'activités où la concurrence est rude. En revanche, ces
critères peuvent être moins indispensables pour une enseigne
à forte notoriété. Un établissement reconnu peut en
effet se permettre un relatif éloignement par rapport aux principaux
flux. La FNAC a, par exemple, longtemps délaissé ces
critères afin d'élargir ses sites potentiels d'implantation, qui
nécessitaient généralement un grand plancher commercial en
centre-ville. On peut remarquer que cette stratégie a changé. La
FNAC a en effet ouvert un deuxième point de vente, hors du centre-ville,
au sein de la galerie marchande d'Auchan Le Pontet. Le centre-ville d'Avignon
est moins stratégique qu'Avignon Nord en termes de visibilité
mais surtout en termes d'accessibilité. Le coeur de la cité des
Papes ne dispose ni de transports en communs performants, ni d'espaces de
stationnement suffisants pour pouvoir atteindre la même capacité
d'accueil que la zone commerciale61. Si la réalisation de
nouveaux parkings en centre-ville semble inopportune et irréaliste, la
mise en place d'un réseau de transports en commun peut permettre de
faciliter l'accès au centre62.
2.1.3 L'environnement commercial et non commercial
Le dynamisme commercial peut également être
lié à la co-présence d'activités, commerciales ou
non.
2.1.3.1 L'environnement commercial
Une enseigne peut être amenée à choisir un
site où d'autres enseignes sont déjà présentes ou
projettent de s'installer. Ce choix se fait, soit parce que les autres
enseignes sont complémentaires à l'activité du futur
magasin, soit parce que la présence de nombreuses enseignes du
même secteur côte à côte va renforcer
l'attractivité du site.
La complémentarité entre plusieurs
enseignes est facile à comprendre. Par exemple, un magasin de
fournitures de bureaux va être complémentaire d'un magasin de
meubles et d'un magasin d'informatique dans le but de créer un univers
« équipement du bureau ». Le
61 Ce constat n'est pas nouveau et il était
déjà mis en avant dans une étude de l'Université
d'Avignon : BERNARD F. (1987), le commerce avignonnais face au
développement de l'agglomération, in Etudes vauclusiennes
n°38 p.23-26
62 L'objet de ce mémoire n'est pas
d'approfondir la question du commerce en centre-ville. Pour plus
d'informations, l'accessibilité automobile des espaces centraux est
traitée dans l'ouvrage de René Paul DESSE (2001), le nouveau
commerce urbain.
43
consommateur sait alors qu'il trouvera tous ce dont il a
besoin pour aménager un bureau dans cette zone commerciale.
L'impact de la présence d'enseignes concurrentes sur le
même site est moins évident. Tout d'abord, la concurrence va
réduire la part de marché de chacun. Mais elle peut
également créer un pouvoir d'attraction. Un pôle de
plusieurs magasins a une plus grande zone de chalandise qu'un commerce
isolé. La concurrence a des effets différents selon le type de
biens vendus63. Si la fréquence d'achat des produits est
quotidienne ou hebdomadaire, le client n'est prêt à faire que
quelques kilomètres et il ne va pas comparer différentes
enseignes avant d'acheter. Le consommateur est relativement captif dans le
domaine de l'alimentaire, par exemple. Dans ce cas, la concurrence sera
négative pour les commerces. C'est pour cela qu'on ne retrouve jamais
deux hypermarchés côte à côte. La stratégie de
ces magasins est au contraire de mailler le territoire avant que la concurrence
ne s'installe.
Dans le cas d'achats plus occasionnels, le consommateur peut
avoir besoin de comparer les offres des diverses enseignes. Pour proposer un
choix le plus complet possible, la stratégie peut être de
s'implanter sur un pôle où l'offre est déjà
importante. Dans ce cas, le client sera prêt à venir de plus loin
pour être sûr de trouver ce qui l'intéresse. Le
marché potentiel est alors agrandi. Les secteurs d'activités les
plus concernés par cette effervescence liée à la
concurrence sont l'automobile et les magasins d'équipement du foyer. Ces
deux types de commerces sont d'ailleurs relativement regroupés sur la
zone commerciale Avignon Nord. Pour permettre cette synergie, la
société Immochan loue aussi des emplacements à des
sociétés qui ne font pas partie du groupe Auchan-Mulliez.
L'exemple des magasins d'usines de Troyes montre
particulièrement bien cet intérêt du regroupement
de certaines activités. La ville reçoit chaque
année plus d'un million de visiteurs, venus spécialement de la
région parisienne ou d'ailleurs pour ces magasins d'usine.
Sans qu'il n'y ait ni complémentarité, ni
concurrence, la co-présence d'enseignes peut également être
bénéfique. C'est le cas si une « locomotive
commerciale » génère des flux de clientèle
importants. La locomotive commerciale d'Avignon Nord est
l'hypermarché Auchan. Cette enseigne accueille jusqu'à 55 000
chalands par jour. De ce fait, elle engendre des flux piétons
importants. C'est le fondement même de la galerie marchande. Des
enseignes choisissent le centre commercial parce que les flux de chalands y
sont plus importants qu'en centre-ville. En effet, les petites boutiques misent
sur les piétons qui engendrent des achats impulsifs.
63 MOATI P. et POUQUET L. (1998) p.74-77
44
2.1.3.2 L'environnement non commercial
Certaines activités non commerciales peuvent participer
à l'essor de la zone commerciale. C'est le cas de toutes les
activités qui génèrent des flux. Tout comme la
locomotive commerciale, elles vont permettre d'accroître le nombre de
clients potentiels de certains magasins. Les pôles d'emplois vont par
exemple créer des flux bénéfiques aux commerces de
restauration. Avignon Nord bénéficie notamment des emplois
situés à proximité.
L'hypermarché Auchan a également misé sur
différents services qui peuvent inciter des personnes à entrer
dans le centre commercial. On y retrouve, par exemple, un bureau de Poste, un
distributeur de titres de transports SNCF et un distributeur de billets. Tous
ces services sont intéressants tant qu'ils ne cassent pas les
linéaires commerciaux.
Les enseignes peuvent également rechercher un
environnement qui soit en lien avec les produits vendus. On peut citer
l'exemple de Décathlon qui a implanté un établissement
à proximité du Stade de France.
2.1.4 L'offre foncière
Dans la logique commerciale, la périphérie offre
des espaces, non seulement stratégiques, mais également
disponibles. Contrairement aux centres-villes qui possèdent des
contraintes liées à l'existant, les périphéries ont
souvent été considérées comme des espaces vides.
Dans les années 1970, les terres agricoles se sont
présentées comme des réserves à l'urbanisation sans
véritable projet urbain. Une partie d'entre elles ont servi au
développement de lotissements pavillonnaires. Mais celles situées
à proximité des grands axes routiers souffraient du syndrome
NIMBY (Not In My Back Yard64). Mais comme nous l'avons vu
précédemment elles possédaient un très fort
potentiel commercial. La disponibilité foncière en
périphérie a été un critère de
faisabilité essentiel dans la réalisation des zones
commerciales.
64 NIMBY est un acronyme signifiant littéralement
« pas dans mon jardin ». Ici, il signifie que les habitants ont
besoin des grands axes routiers pour pouvoir se déplacer mais qu'ils ne
veulent pas vivre à côté pour ne pas en subir les
désagréments (bruit, pollution, ...)
45
Les terrains constructibles étaient non seulement
abondants en périphérie, mais ils étaient aussi bon
marché. Le prix du foncier n'est pas un critère d'implantation
important. Il est plus judicieux de parler du rapport entre le prix du foncier
et le chiffre d'affaires. En effet, les exemples prouvent que les distributeurs
vont privilégier les emplacements « numéro 1 »65
même s'ils sont plus chers que des emplacements moins
stratégiques. L'exemple le plus frappant est l'avenue des
Champs-Elysées. Cette dernière est l'artère
commerçante la plus chère d'Europe et la cinquième
mondiale avec des loyers commerciaux de 7364€/m2/an en
moyenne.66 Malgré ces loyers commerciaux extrêmement
lourds, le taux de vacance est quasi-nul. La vacance va, au contraire, toucher
les emplacements moins stratégiques, quel que soit leurs loyers.
La véritable force de la périphérie est
liée au fait que, non seulement le foncier est moins cher qu'en
centre-ville, mais les chiffres d'affaires sont aussi plus
élevés. Le rapport Charié sur l'urbanisme commercial
affirme qu'un « restaurant rapide de 100 places réalise 4 millions
de Chiffre d'Affaires en périphérie et 2 millions en centre ville
» ... « Et pourtant les loyers en centre-ville sont beaucoup plus
élevés»67. Il est donc beaucoup plus rentable de
s'installer en périphérie, mais c'est avant tout une question de
chiffre d'affaires.
Le faible coût du foncier permet toutefois d'expliquer
l'étalement urbain des zones commerciales. Nous avons vu que pour des
questions d'accessibilité, le commerce de périphérie avait
besoin de grandes quantités de parkings. Le faible coût du foncier
en périphérie permet d'expliquer pourquoi les opérateurs
ont choisi de développer le stationnement de surface.
65Terme technique désignant les meilleurs
emplacements commerciaux. Ces derniers respectent les règles
précédemment énoncées : marché potentiel
important, visibilité, accessibilité, ...
66
www.cushwake.com, Cushman &
Wakefield, société de conseil en immobilier (1er
septembre 2011)
67 Rapport Charié sur l'urbanisme commercial
(2009), p.12
46
La figure 20 compare le coût d'un parking de surface et
d'un parking silo de 1 000 places chacun68. La surface
nécessaire à la création d'une place de stationnement et
de ses accès est estimée à 25m2.
|
Coût du foncier
|
Coût des travaux
|
Coût total
|
Méthode de calcul
|
Surface de terrain
nécessaire * prix du terrain au mètre
carré
|
Nombre de places * coût des travaux par place
|
Coût du foncier
+ coût des travaux
|
Parking de surface
|
25 000m2 * 70€/m2
= 1 750 000 €
|
1 000 places * 4000€/pl.
= 4 000 000 €
|
5 750 000 €
|
Parking silo (R+3)
|
6 250m2 * 70€/m2
= 437 500 €
|
1 000 places * 11 000€/pl.
= 11 000 000 €
|
11 437 500 €
|
Figure 20 : Le coût prohibitif des parkings
aériens
(Conception : Girard, 2011)
Le tableau ci-dessus montre qu'avec un foncier à 70
euros par mètre carré, le coût des travaux est beaucoup
plus important que l'achat du terrain dans les deux cas de figure.
L'économie de foncier réalisée grâce à la
construction sur plusieurs niveaux ne permet pas de compenser le prix des
travaux. Un parking de surface à donc un coût presque deux fois
inférieur à un parking silo. Pour que le parking aérien
devienne rentable, il faudrait un foncier à plus de 370 euros par
mètre carré. De tels prix ne sont constatés que dans les
centres-villes ou sur la Côte d'Azur.
Les enseignes peuvent toutefois être amenées
à construire, de leur propre initiative, un parking silo. C'est le cas
si un point de vente veut s'agrandir mais qu'il n'a ni de réserves
foncières à proximité, ni de possibilités de se
délocaliser sur un site aussi stratégique. Il peut choisir
d'augmenter sa surface de vente en construisant sur son espace de
stationnement. Pour compenser les places perdues, le parking aérien est
alors la seule solution. En 2004, l'enseigne Carrefour d'Aix en Provence, qui
n'avait pas de possibilité d'acquisitions foncières a ainsi
choisi le parking silo pour augmenter son nombre de places.
Immochan conçoit actuellement un projet d'extension de
la galerie marchande d'Auchan dans lequel il construit un parking silo. Le but
étant de rester dans le même ratio de stationnement par
mètre carré de surface de vente.
68 Les références du prix du foncier sont issues
d'un entretien avec Sara Shériff de la société
Immochan.
Le ratio du prix des parkings silo proviennent de l'article du
Moniteur du 19 juin 2009 Les parkings véhiculent une nouvelle
image, p.60-63 sur les parkings de Mérignac et Sucy-en-Brie
Le ratio du prix des parkings de surface provient du parking
relais route des Alpes à Aix en Provence (
www.agglo-paysdaix.fr)
47
2.2 La diversification des activités sur la zone
commerciale
Pour attirer et pour satisfaire toujours plus un client qui
cherche à faire tous ses achats au même endroit afin de gagner du
temps, les acteurs du commerce de périphérie ont progressivement
diversifié leur offre. Nous allons étudier l'évolution de
la zone commerciale Avignon Nord depuis sa création jusqu'à
aujourd'hui. Nous nous baserons sur l'analyse de David Mangin, qui a
étudié les différentes générations de zones
commerciales centrées sur un hypermarché.
2.2.1 Au commencement : l'hypermarché et sa galerie
marchande
Le concept de l'hypermarché se résume par son
principal slogan : « tout sous le même toit, au prix le plus bas
». Le principe est de proposer une offre extrêmement
complète et d'utiliser les denrées alimentaires comme produits
d'appel. L'achat en grandes quantités a permis aux
hypermarchés de baisser leur prix de vente afin de conquérir
rapidement les marchés.
Le premier hypermarché de France a été
créé en 1963 en région parisienne avec 2500 mètres
carrés de surface de vente. Il nait dans un contexte où les modes
de vie changent. Les loisirs se développent et chacun veut y consacrer
du temps. Les femmes accèdent progressivement à
l'emploi69. Dans ces conditions, l'achat devient une tâche
pénible, pour laquelle les ménages veulent consacrer le moins de
temps possible. La grande surface déspécialisée
répond à cette demande en proposant de faire tous les achats
hebdomadaires en une seule fois.
69 En 1960, un quart des femmes de 25 à 49 ans vivant en
couple avec deux enfants travaillaient. En 1990, les trois quarts
étaient dans ce cas. In DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce
urbain, p.24
48
Les premiers hypermarchés se sont
développés sans aucun autre magasin autour. Mais rapidement,
ils se sont dotés de galeries marchandes pour former la
deuxième génération d'hypermarché. C'est le cas
pour Auchan Le Pontet qui a été construit en 1974. A cette
époque, les distributeurs ont déjà compris que la grande
surface à dominante alimentaire génère des flux qui lui
permettent de jouer le rôle de locomotive commerciale (cf. partie 2.1).
Le centre commercial Avignon Nord naît alors avec une surface de vente de
8 400 mètres carrés pour l'hypermarché et 3 100
mètres carrés pour la galerie marchande70.
Progressivement, le plancher commercial s'est agrandi.
Aujourd'hui, l'hypermarché a diversifié toujours plus son offre
et sa surface de vente atteint 17 500 mètres carrés. Dans un
même temps sa clientèle s'est développée, engendrant
de nouveaux flux. De nombreuses enseignes présentes en centre-ville
viennent dans le centre commercial pour y implanter un deuxième point de
vente ou se délocaliser. Ce choix est motivé par une
accessibilité et une visibilité meilleure dans le centre
commercial qu'en centre-ville. C'est ainsi que la galerie marchande s'est
agrandie jusqu'à atteindre les 11 500 mètres carrés de
surface de vente. Comme nous l'avons dit précédemment, le
développement du centre s'est fait jusque sur la commune de Sorgues. Le
centre commercial mesure aujourd'hui 370 mètres de long. Cela
représente environ la longueur du cours Mirabeau à
Aix-en-Provence ou de la rue de République à Avignon (cf. figure
21).
70 Le Provençal (1974), Auchan J-2 : des milliers de
porte-monnaie attendent le top départ pour se lancer à l'assaut
d'Auchan le Pontet

49
Figure 21: Le centre commercial Auchan,
élément central et fondateur de la zone commerciale
(Conception : Girard, 2011. Fonds de carte :
geoportail.fr)
50
2.2.2 Le développement des surfaces
spécialisées et des « discounters »
La taille démesurée de ce centre commercial peut
devenir une contrainte. Dans une quête de complémentarité
de l'offre, l'hypermarché s'est agrandi pour proposer toujours plus de
produits différents. L'équipement de la personne et
l'électroménager occupent des surfaces de vente de plus en plus
conséquentes et la dominante alimentaire est de moins en moins
marquée. Dans le gigantisme du centre commercial, le consommateur a de
plus en plus de mal à s'y retrouver et il lui faut de plus en plus de
temps pour faire ses achats.
Pour continuer à développer leur offre tout en
restant compétitifs sur les temps d'achat, les professionnels de
la grande distribution vont créer leurs propres enseignes
spécialisées. Le groupe Auchan va ainsi
développer des grandes et moyennes surfaces spécialisées
dans de multiples secteurs d'activités. On citera, par exemple, Kiabi
dans l'habillement, Leroy-Merlin dans le bricolage ou encore Décathlon
dans les articles de sport et de loisirs. Ces surfaces
spécialisées seront implantées à proximité
directe de l'hypermarché qui joue toujours le rôle de locomotive
commerciale (cf. figure 22). Le fait de développer des enseignes sous
des noms différents de celui de l'hypermarché rassure les
clients. En effet, la « concurrence » limite le sentiment
d'hégémonie de l'hypermarché sur la zone commerciale.
L'essor de surfaces spécialisées a eu lieu dans
les années 1980 en France71. Avignon Nord suit cette
tendance. La première arrivée massive de ces enseignes sur le
site date de 198672. Quinze moyennes et grandes surfaces se
développent alors dans le domaine de l'équipement de la personne
principalement, mais également dans la vente de meubles et le bricolage.
Des années 1990 à aujourd'hui, la croissance de ces enseignes a
été importante. Elle a notamment été soutenue par
le développement périurbain qui a, non seulement augmenté
la population de la zone de chalandise, mais également
généré de nouveaux besoins liés à la
possession de maisons individuelles (bricolage, jardinage, loisirs).
Faute de place, ces grandes et moyennes surfaces se sont
progressivement éloignées de l'hypermarché (cf. figure
22). L'exemple de Décathlon retrace l'évolution d'une surface
spécialisée73. En 1986, l'enseigne s'installe en
proche périphérie de l'hypermarché avec une surface de
vente inférieure à 2 500 mètres carrés. Sa
première extension a lieu en 1990. Pour pouvoir développer
à la fois son magasin et son parking, il se délocalise sur la
zone de la Tour
71 DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce urbain,
p.90-91
72BERNARD F. (1987), le commerce avignonnais
face au développement de l'agglomération, in Etudes
vauclusiennes n°38 p.25
73 Parcours établi d'après BERNARD F.
(1987), liste des CDEC (archives départementales), liste des CDAC (
www.vaucluse.gouv.fr/spip.php?article275)
51
Blanche, en se gardant une réserve foncière. En
2011, cette dernière lui a permis d'augmenter sa surface de vente de 2
300 mètres carrés, portant le plancher commercial à 8 200
mètres carrés. Si Décathlon a su conserver un site
stratégique, d'autres enseignes se sont, quant-à-elles
éloignées de la route de Carpentras. Ce sont sur ces emplacements
plus en retrait que la vacance est la plus importante.

Figure 22: L'implantation des surfaces
spécialisées autour de l'hypermarché, seconde phase du
développement de la zone commerciale
(Conception : Girard, 2011. Fond de carte :
geoportail.fr)
Dans les années 1990, la France voit arriver les
premiers magasins de « hard-discount ». Né en Allemagne, ce
concept repose sur des achats alimentaires rapides et peu coûteux. Un
seul de ces magasins est présent sur la zone commerciale Avignon Nord.
Les discounters préfèrent en effet se situer plus loin des
hypermarchés, qui proposent eux aussi des produits à bas
coût. Toutefois, ils captent une part importante de la clientèle
et les parts de marché des hypermarchés diminuent dans le secteur
alimentaire74.
74 La part de marché des hypermarchés sur les
produits alimentaires passe de 35,4 à 33,1% entre 1999 et 2005 (Insee,
2008, Fiche thématique : le commerce de détail)
52
2.2.3 L'essor des services et des loisirs
Les multiples atouts de la périphérie ont
ensuite conquis les secteurs des services et des loisirs. La figure 23 nous
montre la répartition de ces activités, qui se sont
développées sur la partie Ouest de la zone commerciale. Cette
partie du site n'est pas détenue par Immochan. Les propriétaires
sont donc nombreux et les opérations se sont faites sans planification.
Il n'y a pas de limite franche entre cette partie commerciale et les
activités industrielles et logistiques plus à l'Ouest.
Le secteur de l'automobile s'y est tout d'abord
développé. Les concessionnaires ont profité de la zone
commerciale pour se regrouper et ainsi augmenter leur potentiel d'attraction en
proposant un choix maximum. Des activités d'entretien et de
contrôle technique liés à l'automobile se sont alors
installées à proximité.
Sans aucun lien, un certain nombre de restaurants se sont
développé dans ce secteur. La présence de la restauration
n'est pas récente dans la zone commerciale car l'enseigne Flunch
était présente dès l'ouverture du centre commercial en
1974. Toutefois, ce secteur d'activités s'est fortement
développé au cours des années 1990 et 2000. La
restauration permet de capter une nouvelle catégorie de
clients-promeneurs, qui viennent dans la zone commerciale par plaisir.
Elle satisfait aussi les employés des zones d'activités, qui sont
de plus en plus nombreux sur le site.
Une nouvelle forme d'hôtellerie a
également été séduite par la situation des zones
commerciales de périphérie. David Mangin a étudié
le développement du groupe Formule 175. Cette chaîne
hôtelière est apparue en 1985 en France avec pour vocation de
loger les représentants et les cadres en déplacements sur les
zones d'activités. Grâce au faible coût du foncier, le prix
des chambres pouvait être inférieur aux indemnités
perçues par ces employés en transit. La question de
l'accessibilité est toute aussi importante que celle du prix dans la
stratégie de localisation de l'hôtellerie bon marché. En
effet, nous avons vu que, contrairement au centre-ville, la zone commerciale
offre une accessibilité idéale depuis tout point de
l'agglomération. Le développement hôtelier a
également été lié à la présence de la
restauration sur le site. Ces deux activités sont
complémentaires.
L'évolution la plus récente de la zone
commerciale concerne l'essor des loisirs. Ce secteur
d'activités s'est développé avec l'arrivée d'un
bowling en 2006 et du cinéma Capitole Studios en 2009. Avec les
restaurants, ces deux commerces sont parmi les rares à être ouvert
en soirée et le dimanche. Ces activités semblent relativement
isolées au sein de la zone
75 Op. cit., MANGIN D. (2004), p.127
53
commerciale. Toutefois, les multiplexes
cinématographiques peuvent devenir les moteurs d'un ensemble
d'activités nocturnes comprenant des services de restauration rapide et
une discothèque76. Il est trop tôt pour savoir si ce
cinéma jouera ce rôle à Avignon Nord.

Figure 23 : Un développement plus récent des
services et des loisirs (Conception : Girard, 2011. Fond de carte :
geoportail.fr et SIG
Grand Avignon)
76 DESSE R-P. (octobre-décembre 2002), Les centres
commerciaux français, futurs pôles de loisirs ? in Flux
n°50 p.10-11
54
Les hypermarchés ont aussi développé les
services et les activités de culture- loisirs. Dans les années
1990, la grande distribution ne bénéficie plus des élans
de consommation liés à la vente massive de
réfrigérateurs, congélateurs, lave-linges, ... car les
ménages sont déjà équipés77. Le
contexte économique est également incertain et il faut redonner
envie de consommer aux clients. Pour cela, les hypermarchés vont
encore diversifier leur offre. Tout d'abord en vendant des bijoux,
puis en prenant des parts de marché sur la culture avec la vente de
livres78. Dans la continuité du développement du
secteur culture-loisirs, la FNAC arrivera dans la galerie marchande en 2007. De
multiples services aux clients vont également être
développés : agence de voyages, bureau de Poste, distributeur de
titres de transports SNCF, distributeur de billets, ...
Conclusion de la deuxième partie :
Les stratégies d'implantation et
d'évolution du commerce de périphérie
Les critères d'implantation du commerce de
périphérie sont extrêmement précis. Un bon
emplacement doit être facilement accessible par sa clientèle
potentielle et visible. Pour cela, les carrefours routiers ont
été les lieux privilégiés de l'implantation de la
grande distribution. Ils ont été choisis car ils permettaient un
accès rapide depuis les espaces périurbains en
développement.
Même si le commerce génère de
nouveaux déplacements, il s'appuie surtout sur des flux
préexistants. Le commerce de périphérie a su tirer partie
du développement des infrastructures routières et de la
périurbanisation. Il représente une adaptation du commerce
à ces nouveaux modes de vie.
Les zones commerciales se sont diversifiées
pour satisfaire toujours plus les attentes de leurs clients. Pour capter ces
nouvelles parts de marchés, elles se sont étendues, repoussant
leurs limites toujours plus loin.
|
77 En 1960, 25% des ménages ont un
réfrigérateur. En 1975, 90% des ménages en ont un et 17%
ont un congélateur. En 1990, 95% des ménages ont un
réfrigérateur et 45% un congélateur. In DESSE R-P. (2001),
le nouveau commerce urbain, p.21
78 De 1991 à 2006, la part de marché des
hypermarchés sur la vente de livre aurait doublé,
dépassant ainsi celle de la FNAC. In GASNIER A. (2007), Dynamiques
et enjeux des pôles commerciaux périphériques à
partir de quelques cas français.
55
3 Le rôle des pouvoirs publics dans le
développement de cette zone commerciale de périphérie
Nous avons étudié les stratégies des
acteurs privés du commerce de périphérie afin de
comprendre leur fonctionnement. Nous allons maintenant étudier le
rôle ambigu des pouvoirs publics, entre régulation,
désinvolture et soutien envers le commerce de
périphérie.
3.1 Des élus locaux séduits par les
ressources fiscales et le développement de l'emploi sur leur commune
La grande distribution va amener un certain dynamisme
économique sur les communes d'implantation. Les élus locaux ont
ainsi été amenés à négliger les impacts du
commerce de périphérie sur l'urbanisme.
3.1.1 Le développement de l'emploi
En amont d'une importante implantation commerciale, des
négociations ont lieu entre les élus locaux et les enseignes. La
création d'emplois est un argument de poids pour convaincre un maire de
l'utilité du projet pour sa commune. Certaines municipalités y
sont particulièrement sensibles.
La commune du Pontet a cherché depuis longtemps
à développer l'emploi sur son territoire. Historiquement, elle a
soutenu le développement d'un grand nombre d'industries, le long de la
nationale 7 (devenue D907 aujourd'hui). Ainsi, la commune a vu le
développement commercial comme une opportunité de
diversifier son panel d'entreprises et de créer de nouveaux
emplois79. Dès son arrivée, Auchan avait
promis la création de 250 emplois. Aujourd'hui, le centre commercial
s'est développé et Auchan Le Pontet est considéré
comme le plus gros employeur au registre du commerce et des
sociétés du Vaucluse80.
Cette société est donc très importante
pour la commune. A tel point que, lorsque le centre commercial a
désiré s'étendre en 1982, le maire a accepté
d'enterrer 200 mètres du canal Crillon, qui sert de limite
séparative entre le Pontet et Sorgues, afin que le magasin puisse
s'agrandir au dessus. Cela explique la particularité de ce centre
commercial, dont le bâtiment est en partie sur le Pontet et en partie sur
Sorgues.
79 Entretien avec Michel LACROZE (2011), directeur de l'atelier
d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme
de la commune du Pontet depuis les années 1970.
80
http://economie.vaucluse.cci.fr,
Registre du commerce et des sociétés (2010)
56
Le développement de l'emploi par le commerce de
périphérie est discutable car il entraîne un
déclin de l'emploi en commerce traditionnel. A une
échelle large, il est très difficile de savoir si l'emploi en
périphérie remplace totalement les pertes d'emploi en
centre-ville. Mais à une échelle communale, le constat est sans
appel. La commune de Vedène vient par exemple d'accueillir le
géant du meuble Ikéa. Ce complexe devrait apporter environ 600
emplois. Pour autant, le commerce de centre-ville de Vedène, qui est
déjà très faible et à dominante alimentaire, a peu
de chances d'être impacté par le projet. On peut donc s'attendre
à un gain d'emplois net pour la commune.
Les communes du Pontet et de Sorgues ont soutenu ce type
d'implantations depuis des décennies. En 2008, leurs indices de
concentration d'emploi (ICE)81 étaient respectivement de 161
% et 113 %82. Ce taux est en constante augmentation sur la commune
du Pontet. En ce qui concerne Vedène, cet indice est passé de 72%
en 1999 à 65 % en 2008. L'arrivée de l'enseigne Ikéa et de
sa galerie marchande devrait lui permettre de compenser ce déclin en
ramenant le taux entre 70 et 80%.
Le commerce est donc un domaine créateur d'emplois qui
tient particulièrement à coeur aux élus. Le PADD du SCoT,
qui est actuellement en phase d'enquête publique avant son approbation,
met en avant que sur la période 1999-2006, le commerce a
généré en moyenne 155 emplois par an83. En
poursuivant cette tendance, les élus souhaitent créer 1700
emplois dans le domaine du commerce d'ici 2020. Cet objectif est relativement
ambitieux compte tenu du contexte économique actuel, où la
consommation des ménages stagne. Il prouve toutefois que le projet
politique est de conforter l'attraction commerciale, que ce soit en
centre-ville ou en périphérie.
3.1.2 Des recettes fiscales importantes
Jusqu'en 2009, la principale ressource fiscale
générée par les entreprises était la taxe
professionnelle. A l'origine, cet impôt était perçu
individuellement par les communes. Il est difficile d'avoir accès aux
données historiques de la taxe professionnelle. Nous nous baserons donc
sur des sommes récentes pour donner un ordre de grandeur de ce
qu'à pu représenter cet impôt pour la commune du Pontet,
avant la mise en place de la taxe professionnelle unique. En
2008, le produit de cet impôt s'est élevé à
12,7 millions d'euros pour les seules entreprises
81 L'Indice de concentration d'emploi est le rapport
entre le nombre d'habitants de la commune qui ont un emploi et le nombre
d'emplois sur la commune.
82 Insee, RP1999 et RP2008 exploitations principales du lieu de
résidence et du lieu de travail.
83 ASSEDIC (2006) in SCoT du Bassin de vie d'Avignon
(2010)
57
du Pontet84. Sur cette somme 3,8 millions
d'euros ont été versés par des
commerces85. Cette branche d'activités
représente donc un quart de la taxe professionnelle perçue par la
commune. On comprend alors pourquoi les élus locaux avaient tout
intérêt à favoriser le développement de la zone
commerciale. Le Pontet avait également besoin d'une taxe professionnelle
importante pour compenser le faible produit de sa taxe d'habitation. En effet,
l'assiette d'imposition de cette commune est le plus faible de toute la
communauté d'agglomération. Cela est notamment dû à
la forte concentration de logements anciens et en mauvais état. On
estime que le Pontet a perçu environ 230 000 € de taxe d'habitation
en 2009. Un tel écart entre le produit de la taxe professionnelle et
celui de la taxe d'habitation est atypique (cf. figure 24). Sur l'ensemble des
communes françaises, la taxe d'habitation représente environ 60 %
de la taxe professionnelle. Il y a donc une répartition de l'impôt
entre les ménages, qui payent également les taxes
foncières, et les entreprises. Sur la commune du Pontet, la taxe
d'habitation représente moins de 2 % du produit de la taxe
professionnelle. Les capacités financières de la commune
proviennent donc principalement des activités. Le Pontet a ainsi pu
être une commune dotée d'un fort pouvoir financier, tout en ayant
des ménages modestes.
|
|
|
|
Produit de la taxe
|
Produit de la taxe d'habitation
|
industrielle et commerciale)
|
professionnelle
par habitant (2009)
764 €
|
(part communale)
|
Villeneuve les Avignon (commune
|
|
|
par habitant (2009)
Le Pontet (commune à
dominante
16 886 habitants
14 €
de taille similaire sans dominante
industrielle et commerciale)
12 756 hab
164 €
23 €
Moyenne des communes
françaises
en 2006
251 €
149 €
Figure 24 : Un produit de la taxe professionnelle
prépondérant par rapport à celui de la taxe
d'habitation.
(Conception GIRARD, 2011, d'après données du
Grand Avignon et délibérations communales sur les taux de la taxe
d'habitation)
84 D'après les données du Grand Avignon
sur les ressources fiscales.
85 Idem.
58
A partir de 1995, une communauté des communes à
taxe professionnelle unique est créée, regroupant ainsi Avignon,
Le Pontet, Morières-lès-Avignon et
Saint-Saturnin-lès-Avignon 86 . La commune de Vedène
sera intégrée à cet EPCI, devenu communauté
d'agglomération, en 2001. Rappelons que la commune de Sorgues rejoindra
une autre intercommunalité : la Communauté de Communes des Pays
de Rhône et d'Ouvèze. Le regroupement de ces communes
industrielles en structure intercommunale va permettre d'utiliser le produit de
la taxe professionnelle pour des projets supra-communaux.
Toutefois, les activités de la zone commerciale restent
importantes pour la communauté d'agglomération. En 2009, le
commerce pontetien a fourni près de 4 % de son budget de fonctionnement
et l'ensemble de la taxe professionnelle, 46 % de ce même budget. On
comprend alors que le Grand Avignon ait financé des équipements,
notamment routiers, pour accueillir de nouvelles entreprises.
Le poids financier du Pontet continue à lui être
bénéfique au sein de l'agglomération. En effet, cette
commune produit une part importante des ressources du Grand Avignon, et son
maire y occupe donc des fonctions importantes. Ce dernier est également
président du SCoT du Bassin de Vie d'Avignon. Il est d'autant plus dur
de freiner le développement commercial du pôle d'Avignon Nord
lorsque le président du SCoT a un certain intérêt à
soutenir l'essor de cette zone commerciale.
Depuis 2009, la taxe professionnelle a été
supprimée. Les ressources de la communauté d'agglomération
liées aux cotisations des entreprises ont ainsi été
divisées par deux. Pour autant, cela ne supprime pas l'importance des
impôts des entreprises car de nouvelles taxes ont été mises
en place : cotisation foncière économique, cotisation sur la
valeur ajoutée des entreprises, taxe sur les surfaces commerciales, ...
De plus, elle perçoit la part de la taxe d'habitation autrefois
attribuée au conseil général.
En ce qui concerne les commerces, il est toutefois difficile
de dire comment leurs cotisations ont évolué. En effet,
auparavant, la taxe professionnelle se basait sur l'investissement alors
qu'aujourd'hui, ce sont la valeur ajoutée, le foncier et les surfaces
commerciales qui déterminent l'assiette des différents
impôts. La cotisation des grandes surfaces ne devrait donc pas diminuer,
voire peut-être même augmenter. Si cela se produit, cela
renforcerait la position de force de la grande distribution.
86 Arrêté préfectoral n°2719 du 12
décembre 1994, portant création de la communauté de
communes du Grand
Avignon.
59
3.1.3 La mise en concurrence des élus locaux
Le bassin de vie d'Avignon n'a jamais approuvé de
Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme, ni de
Schéma Directeur. Son premier Schéma de cohérence
Territorial (SCoT) a été arrêté en 2010, mais il
n'est pas approuvé. Dans ce contexte, les élus communaux
n'ont jamais été guidés par un projet commun. A
propos du commerce, un Schéma de Développement Commercial a
été élaboré à l'échelle du Vaucluse
afin de freiner le développement commercial de périphérie.
Mais les règles qu'il fixait ont été ignorées car
ce document n'a aucune valeur règlementaire.
Dans ce contexte où il n'existe pas de document
intercommunal de planification, refuser une implantation commerciale n'est pas
facile pour un élu. Il existe en effet de nombreux sites
stratégiques en périphérie et les maires savent que s'ils
refusent une implantation, l'enseigne ira s'installer sur la commune voisine.
Les conséquences pour le commerce traditionnel de sa commune seront les
mêmes que s'il avait accepté mais il ne bénéficiera
ni des emplois générés, ni des ressources fiscales. La
situation ne s'est que très peu améliorée avec la taxe
professionnelle unique. En effet, Avignon Nord possède la
particularité d'être sur deux intercommunalités. Selon le
lieu d'implantation, les ressources fiscales ne sont donc pas perçues
par la même structure. Il y a là une incohérence
dans le découpage des Etablissements Publics de Coopération
Intercommunale qui devrait être résolu par la
réforme de l'intercommunalité.
Aujourd'hui, Avignon Nord tire partie de cette situation
intercommunale. En effet, les maires du Pontet et de Sorgues n'ont pas les
mêmes projets vis-à-vis de la zone commerciale. Le maire du
Pontet, qui est également Président du SCoT, veut freiner le
développement commercial et promouvoir la mixité fonctionnelle
alors que son confrère veut poursuivre l'extension du site. La zone
commerciale pourrait donc continuer à se développer, en se
rapprochant toujours plus du monastère de la Visitation
(présenté en partie 1.4.1). Aujourd'hui, seul le SCoT peut
construire un projet d'ensemble capable d'harmoniser les différentes
politiques urbaines.
60
3.1.4 Un POS souple pour permettre le développement
économique
Pour les raisons énoncées
précédemment concernant l'emploi, les ressources fiscales et la
concurrence avec les autres communes, chaque commune avait intérêt
à développer ses propres zones d'activités. Pour cela, les
documents d'urbanisme ont été très permissifs envers les
entreprises. Le Plan d'Occupation des Sols (POS) du Pontet illustre bien cette
pratique.
A l'arrivée de l'enseigne Auchan en 1974, un Plan
Sommaire d'Urbanisme est en vigueur sur la commune. Il définit
l'emplacement de la future zone commerciale Avignon Nord comme une zone
à vocation économique87. Ce n'est qu'en 1985 que sera
approuvé le POS du Pontet. Il sera établi dans une logique de
séparation des fonctions urbaines suivant ainsi les théories de
Tony Garnier et de Le Corbusier88.
Dans ce document, la commune va en effet décider de
réserver le foncier disponible au Nord de la route de Carpentras pour
les activités économiques. Ce secteur est stratégique car
il permet aux entreprises d'être desservies par l'autoroute et par les
voies rapides. Le développement de l'habitat se fera sur le sud de la
commune sous forme de lotissements pavillonnaires.
La majeure partie du Nord du Pontet est donc incluse soit en
zone UE, à vocation industrielle et commerciale, soit en zone 2NA, zone
d'urbanisation future à court terme réservée aux
activités (cf. figure 25). Dans ces deux zones du POS, l'habitat est
interdit sauf si des logements sont nécessaires au fonctionnement d'une
entreprise. On retrouve donc près de 300 hectares
dédiés aux activités rien que sur la
commune du Pontet. Cette surabondance de terrains disponibles explique
le faible coût du foncier, qui est en partie responsable de
l'étalement urbain comme nous l'avons vu (cf. partie 2.1.4).
87 Entretien avec Michel LACROZE (2011), directeur de
l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents
d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.
88 Nous approfondirons ces théories dans la sous-partie
suivante (3.2).

61
Figure 25 : Une partie du territoire dédiée
à l'activité (Source : Plan d'Occupation des Sols du Pontet,
2009)
Les règles pour les autres constructions sont
extrêmement souples sur cette partie de la commune. Le coefficient
d'emprise au sol, limité à 70% de la surface du terrain, est une
des seules limites. Il est très peu contraignant pour les enseignes car
le stationnement n'est pas compris dans ce ratio et nous avons vu que les
parkings occupent généralement plus de 50% de la surface. La
quantité de stationnement présente sur le site a bien
été développée sur des initiatives privées
car le document d'urbanisme n'impose pas de ratios de stationnement. Il demande
juste à ce que le nombre de places corresponde aux besoins de
l'activité.
En ce qui concerne l'intégration architecturale des
bâtiments dans le paysage, des règles existent. Aussi bien en zone
UE qu'en zone 2NA, il est stipulé que les constructions « par
leur situation, leur architecture, leurs dimensions et leur aspect
extérieur ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à
l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels
ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales
». Toutefois, cette règle laisse le champ libre à
l'appréciation de l'instructeur du permis de construire. Si le projet
communal est de développer l'activité, elle peut être
délaissée. La zone commerciale a ainsi été
considérée comme un espace « perdu », sans
intérêt paysager car personne n'y habitait.
62
3.2 Le rôle des acteurs du développement
routier et autoroutier
La sous-partie 3.1 nous a montré que la commune
bénéficiait d'un développement économique lors de
l'arrivée d'activités commerciales sur son territoire.
Malgré les problèmes urbains engendrés, elle avait donc un
certain intérêt à profiter du potentiel que
représentait le commerce de périphérie.
Mais nous avons vu dans la partie 2 que ce potentiel
était lié aux infrastructures routières. Il nous faut donc
maintenant étudier la stratégie des acteurs publics du
développement routier, en France et dans le Vaucluse.
3.2.1 Des théories du Corbusier au maillage
routier
La théorie de la séparation des fonctions
urbaines apparaît en 1917 avec l'idée de la Cité
Industrielle de Tony Garnier. Ce zonage des fonctions nécessite un
réseau de transports performant entre les différents secteurs de
la ville. Le Corbusier poursuivra le raisonnement de Tony Garnier et publiera
la Charte d'Athènes89. Dans cet ouvrage, il indique qu'il
faut attribuer des secteurs à chacune des quatre fonctions de la ville :
« habiter, travailler, se récréer (dans les heures libres)
et circuler ». Les espaces de circulation occupent donc une fonction
circulatoire uniquement. Ils ne sont pas considérés comme des
lieux d'échanges et de rencontres. Dans les orientations de la Chartes
d'Athènes, Le Corbusier estime que chaque quartier d'habitation doit
contenir des espaces verts pour les loisirs (article 35) et que les zones
industrielles doivent êtres contigües aux routes, canaux et voies
ferrées. Entre ces deux zones, les espaces verts sont
considérés comme des espaces « tampons ». Ces
théories, formulées sur des villes importantes, prônaient
une densité relativement importante sur les espaces d'habitation, de
l'ordre de 300 habitants à l'hectare.
La séparation des fonctions urbaines a bien
été réalisée en France. Mais elle s'est faite dans
un contexte de rejet des grands ensembles construits dans les années
1960. Il n'y a donc pas eu de densité et les espaces verts prévus
dans les quartiers d'habitation ont été remplacés par les
jardins privatifs des lotissements pavillonnaires. Pour relier les secteurs
résidentiels et les secteurs d'activités, seul le mode routier a
été retenu. Le territoire a été
structuré par les autoroutes, voies rapides, rocades et
radiales qui ont formé des mailles de plusieurs centaines de
mètres de large. Ces mailles se sont substituées au traditionnel
îlot de cent mètres de côté90.
89 Les théories de Le CORBUSIER reprises dans MERLIN P.
(2007), L'urbanisme.
90MANGIN D. (2005), Pour une ville passante et
métisse, compte rendu du séminaire Vies collectives, 10p.
63
Le quadrillage du territoire français par le
réseau routier et autoroutier a été très rapide. Le
premier grand tronçon autoroutier a relié Paris au Nord de la
France dans les années 1960 et aujourd'hui on compte plus de 11 000
kilomètres d'autoroutes91. Il est complété par
près de 10 000 kilomètres de routes nationales, 378 000
kilomètres de routes départementales et 642 000 kilomètres
de voiries communales.
Conjointement à ce développement autoroutier, le
taux de motorisation des ménages augmente rapidement. En effet, la
figure 26 nous montre que le nombre de ménages a fortement
augmenté durant les années 196092. Il continue de
croître plus légèrement depuis les années 1980.

10%
1980
69%
Taux de motorisation des ménages
1953
20%
1960
30%
40%
1964
1967
50%
58,60%
1971
1985
1990
76%
73%
0%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
1995
78%
2000
80%
2007
82%
1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010
Figure 26 : Des ménages qui s'équipent
rapidement en automobile
(Conception Girard, 201.D'après Villeneuve A., 1971
pour les données de 1953 à 1971, INSEE de 1980 à 1990 et
SOFRES de 1995 à 2007)
91 Insee, service d'études techniques des routes et
autoroutes (SETRA) au 1er janvier 2010.
92 VILLENEUVE A. (1971), L'accoutumance à
l'automobile, in Economie et statistique n°23,
p.3-20. www.persee.fr
64
Il est difficile de dire si c'est l'importance du
réseau routier qui a provoqué l'essor de l'automobile et qui l'a
rendue indispensable ou l'inverse. Une chose est sûre, le
développement routier s'est fait au détriment des autres modes de
transports traditionnels. Les cheminements doux, qui existaient à
l'intérieur des villes et des campagnes, ont été
fragmentés par ce nouveau maillage à la fonction purement
circulatoire. L'usage de la voiture est ainsi devenu de plus en plus
indispensable.
L'Etat a longtemps encouragé le développement
des infrastructures routières et autoroutières. Les
schémas directeurs routiers nationaux étaient chargés de
planifier et de hiérarchiser l'ensemble de ces grandes voies de liaison.
La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire du 4 février 1995, dite loi Pasqua, imposait même qu'en
2015, tout point du territoire se trouve à moins de 45 minutes en
voiture, soit d'une autoroute, soit d'une route express à deux fois deux
voies reliée au réseau national, soit d'une gare desservie par le
réseau ferroviaire à grande vitesse. L'objectif
énoncé était d'assurer une « desserte
équilibrée et un désenclavement de l'ensemble du
territoire, quels que soient les trafics constatés »93.
Même si cette partie de la loi a été abrogée en
1999, elle montre le volontarisme de l'Etat en matière de
développement routier.
A une échelle plus locale, les pouvoirs publics ont
également investi pour améliorer la fluidité du trafic
routier. L'exemple le plus frappant est celui du développement des
carrefours giratoires. Le premier giratoire avec priorité aux personnes
à l'intérieur de l'anneau est apparu en France en
198494. Ce système, qui permettait d'écouler plus
rapidement le trafic qu'un système de feux tricolores, s'est rapidement
développé. Le Certu estime qu'en 1984, le nombre de giratoires en
France était probablement inférieur à 500. On en
dénombrait plus de 12 000 en 1995 et environ 30 000 en
200595.
L'ensemble de ces dispositions pour favoriser le
développement routier a eu un impact fort sur l'appareil commercial.
Tout d'abord, l'évolution rapide des taux de motorisation a permis de
développer un commerce basé sur l'accessibilité
automobile. Comme nous l'avons vu, le temps d'accès est primordial dans
le calcul de la zone de chalandise de la grande distribution. Les axes routiers
associés à des échangeurs performants et à des
systèmes de desserte fine, de type giratoires, ont permis de
développer des magasins disposant d'une zone de chalandise
étendue : les hypermarchés. David Mangin a constaté que le
développement des
93www.legifrance.gouv.fr,
Loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire.
94 Le premier giratoire daterait de 1906 avec
l'aménagement de la place de l'Etoile à Paris, mais la
priorité était donnée aux personnes venant de la
droite.
www.technicites.fr
95 GUICHET B. (2009), Les accidents dans les carrefours
giratoires urbains, étude statistique de 1993 à 2005, Certu,
38p.
hypermarchés est concomitant avec la construction du
réseau routier (cf. figure 27)96. Dans ce travail, il ne faut
pas comprendre que les clients se rendent à l'hypermarché via
l'autoroute, mais qu'il y a une corrélation entre la
volonté politique de développer des transports routiers rapides
et l'essor de la grande distribution.

Figure 27: Le développement simultané des
hypermarchés et des autoroutes (Source : MANGIN D., 2004, La ville
franchisée, p.76)
65
96 Op. cit., MANGIN D. (2004)
66
3.2.2 Le développement du réseau routier
vauclusien comme catalyseur de la zone commerciale
Pour illustrer les liens entre le développement routier
et l'essor du commerce de périphérie, nous allons étudier
de l'évolution du réseau routier à l'échelle du
bassin de vie d'Avignon. La figure 28 schématise le développement
routier de 1946 à aujourd'hui97.
En 1946, le Pontet est un carrefour routier difficile
où se rejoignent les flux en provenance de la Nationale 7 et ceux de la
route de Carpentras. La congestion est particulièrement importante lors
des congés d'été, car la Nationale 7 relie les plages de
la Méditerranée aux villes de Paris, Lyon, ...98. La
route de Carpentras traverse les communes d'Entraigues-sur-Sorgues, de Monteux
et de Carpentras. L'ensemble des flux en direction d'Avignon arrivent
directement sur les remparts de la ville.
En 1960, on constate que pour faciliter les échanges
entre le Pontet et Avignon, une deuxième route est créée,
en parallèle de l'existante, sur les bords du Rhône. Un pont est
également construit au Pontet pour passer au dessus de la voie
ferrée et ainsi éviter un passage à niveau qui
générait de la congestion. Les flux sont en augmentation sur le
secteur car l'Autoroute A7 vient d'être mise en service et qu'un
échangeur débouche sur la route de Carpentras.
En 1972, on constate que la situation a peu
évoluée. Toutefois, Avignon amorce son projet de rocade en
construisant la partie Sud-est de celle-ci. L'hypermarché arrive en
1974. Cette implantation concorde avec la période où de nombreux
projets routiers apparaissent.
On constate en effet qu'en 1982, la départementale 942
a été déviée et qu'elle contourne la commune
d'Entraigues-sur-Sorgues. Un projet de contournement est également en
cours de réalisation à Monteux. Ces nouveaux projets permettent
d'élargir la route de Carpentras, du Pontet jusqu'à Monteux.
L'accès au centre commercial depuis le bassin Est de
l'agglomération s'en trouve grandement facilité. Par ailleurs, la
partie Ouest de la rocade avignonnaise permet de rejoindre le Gard via un
nouveau pont sur le Rhône.
En 2001, le contournement de Monteux est également
terminé et il permet de rejoindre Carpentras et Avignon sans traverser
un seul bourg. Le barreau Est de la rocade finalise la liaison entre le Gard et
Carpentras. Dans une lutte sans fin contre la congestion automobile, le Conseil
Général réalise aujourd'hui le contournement de
Carpentras.
97 D'après un ensemble de cartes
consultées aux archives départementales du Vaucluse (cartes
routière de 1946 et 1960, carte IGN de 1972, carte routière de
1989, carte IGN de 2001) et la cartographie actuelle (
géoportail.fr)
98 LACROZE M. (2011), directeur de l'atelier d'urbanisme
et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la
commune du Pontet depuis les années 1970.

Figure 28 : L'évolution rapide du réseau
routier sur le bassin de vie d'Avignon
(Conception Girard, 2011. D'après cartes
d'archives)
L'ensemble de ces infrastructures routières a permis
d'améliorer l'accessibilité à la zone commerciale depuis
Avignon, depuis l'Est du département et même depuis le Gard.
Auparavant, les limitations de vitesse alternaient entre 50km/h dans les bourgs
et 90 km/h entre les différentes communes. Aujourd'hui, l'ensemble du
trajet entre Avignon et Carpentras se fait par voies express limités
à 90 ou 110km/h.
Dans ces conditions, les enseignes ont
bénéficié de la croissance des flux qui a
augmenté leur visibilité. La zone de chalandise du pôle
commercial Avignon Nord s'est également étendue. Dans un
même temps, le développement du réseau routier a
favorisé la périurbanisation. La figure 29 montre l'exemple
d'Aubignan, une ville périurbaine de l'arrière-pays de Carpentras
qui a connu une forte croissance démographique à partir de 1982.
Cela a augmenté le nombre de clients potentiels de la zone
commerciale.
Ce graphique représente l'évolution de la
population dans trois communes-types entre 1962 et 2008. La population de
référence est celle de 1962.

Essor des villes de banlieue
Essor des villes périurbaines
250%
200%
150%
100%
50%
1962 1968 1975 1982 1990 1999 2008
0%
68
Avignon Le Pontet Aubignan
Figure 29 : Une démographie influencée par le
développement routier (Conception : Girard, 2011. D'après
Recensements de la population, Insee)
Le potentiel commercial s'est donc fortement
développé. Les nouveaux axes routiers permettaient
d'acheminer un flux de clientèle et les immenses parkings
réceptionnaient ces flux. Mais l'afflux de voitures nécessitait
un système de desserte locale performant pour relier la route principale
à l'enseigne. Pour cela, les communes et les intercommunalités
ont créé de multiples giratoires pour permettre un trafic fluide.
Le dernier en date a été construit en 2009 pour desservir le
cinéma Capitole Studios. Il a couté 400 000 euros à la
communauté d'agglomération99.
Pour se développer, le commerce de
périphérie a eu besoin des trois maillons de la «
chaîne de l'accessibilité » : des axes routiers performants,
un parking important et entre les deux un système d'échangeurs et
de giratoires. Sans l'un de ces trois maillons, le commerce est
lésé dans son accessibilité et donc dans sa
compétitivité. Le développement des infrastructures
routières par les pouvoirs publics a ainsi joué un rôle
majeur dans le développement du commerce de périphérie.
Sans le vouloir, l'Etat, acteur du développement
routier, a donc créé un potentiel pour le commerce de
périphérie. Dans un même temps, nous allons voir qu'il a
tenté de freiner la croissance des zones commerciales en votant un
certain nombre de lois.
69
99
www.grandavignon.fr
70
3.3 L'échec des lois visant à limiter le
développement commercial de périphérie
Dans un souci de maintien du commerce de proximité,
l'Etat a vite compris qu'il fallait freiner l'essor de la grande distribution.
Nous allons présenter ici l'évolution des différents
textes de lois qui ont tenté de régir le commerce de
périphérie100.
3.3.1 La loi Royer et la mise en place des
procédures d'autorisation
Le développement du commerce de
périphérie a rapidement suscité de vives critiques de la
part des commerçants traditionnels. La loi Royer, dite loi d'orientation
du commerce et de l'artisanat, a été votée en 1973 avec
pour objectif de préserver le petit commerce. Pour cela, le
législateur a créé un système d'autorisation
indépendant du permis de construire : les Commissions
Départementales d'Urbanisme Commercial (CDUC). Cette procédure
devient obligatoire en préalable de toute implantation d'un commerce de
plus de 1 500 mètres carrés de surface de vente dans une commune
de plus de 40 000 habitants. Dans une commune de moins de 40 000 habitants, ce
seuil est abaissé à 1 000 mètres carrés. La CDUC
avait trois mois pour prendre sa décision. En cas de refus, le
pétitionnaire avait une possibilité de recours auprès de
la Commission Nationale d'Urbanisme Commercial (CNUC).
Les CDUC sont composées de neuf professionnels du
commerce et de l'artisanat, de neuf élus locaux et de deux
représentants des associations de consommateurs. Parmi les
professionnels, on retrouve six délégués du commerce
traditionnel, deux représentants des grandes surfaces et un
représentant des artisans. Ces commissions ne comportent donc pas de
technicien de l'urbanisme. Cela s'explique par le fait que les critères
étudiés dans les CDUC sont plus de nature économique. La
loi est d'ailleurs inscrite au code du Commerce et non pas au code de
l'Urbanisme. Pour évaluer l'impact de la future implantation sur le
commerce traditionnel, les commissions allaient réaliser une
pseudo-étude de marché. Elles se basaient sur le calcul du taux
d'équipement en grandes surfaces par rapport à la population de
la zone de chalandise. Ce calcul était contestable car la zone de
chalandise considérée était celle fournie par le
pétitionnaire. De plus, nous avons vu dans la partie 2.1 de ce
mémoire qu'une étude de marché est beaucoup plus complexe.
Les membres des CDUC n'avaient pas les compétences techniques pour
réaliser une telle analyse.
100 Cette partie s'inspire des textes successifs
consultés sur
legifrance.fr, des rapports
législatifs du Sénat et des analyses de différentes
chambres de commerce sur l'évolution législative.
La loi Royer a subordonné les autorisations au
respect de critères économiques, mais en contrepartie,
les critères d'urbanisme ne sont pas étudiés. Ces derniers
ne seront étudiés que lors de la procédure de
dépôt du permis de construire, qui est totalement
indépendant des CDUC et qui relèvent exclusivement de la
compétence communale. C'est un des grands défauts de ce
système d'autorisations séparées.
Face à la loi Royer, les enseignes vont tenter, dans la
mesure du possible, de réaliser des projets qui ne sont pas soumis
à l'autorisation des CDUC. Pour cela, elles ne vont pas
développer de cellules mitoyennes dont la surface dépasserait le
seuil à partir duquel l'autorisation est requise. Elles vont donc
privilégier l'implantation de multiples « boîtes commerciales
» de moins de 1 000 mètres carrés de surface de vente. Ce
développement sous forme de « lotissements commerciaux » est
une particularité française qui a pour seul but de contourner les
procédures d'autorisations commerciales. En effet, on ne retrouve pas ce
type de formes urbaines dans les pays anglo-saxons par exemple. La figure 30
est une prise de vue aérienne du « Retail Park » Meadowhall
situé en périphérie de Sheffield, en Angleterre. Le
concept du Retail Park se rapproche de celui de centre commercial avec un
ensemble de cellules mitoyennes mais la surface de vente est plus importante et
certaines vitrines donnent sur l'extérieur. Celui de Meadowhall est
construit autour d'un hypermarché Sainsbury qui joue le rôle de
locomotive commerciale. L'ensemble du Retail Park possède une surface de
vente de près de 140 000 mètres carrés101. Dans
un seul bâtiment, on retrouve donc un plancher commercial plus important
que celui de l'ensemble de la zone commerciale Avignon Nord.
71
101
en.wikipedia.org

72
Figure 30 : Meadowhall, un « Retail Park »
composé de cellules mitoyennes (Source :
en.wikipedia.org)
Pour éviter le contournement des
procédures d'autorisations, le législateur a
réformé la loi Royer par la loi Doubin du 31 décembre
1989. Elle permet de soumettre au passage devant la CDUC, tout commerce
s'implantant dans un ensemble commercial de plus de 1 500 mètres
carrés. Par ailleurs, elle a pour but d'apporter plus de transparence
dans les décisions. Auparavant, le vote se faisait à bulletin
secret et les CDUC ont souvent été accusées d'alimenter la
corruption des élus locaux. A partir de la loi Doubin, le vote est
devenu public.
La loi du 29 janvier 1993 relative à la
prévention de la corruption et à la transparence de la vie
économique et des procédures publiques, dite loi Sapin, poursuit
le même objectif. Elle met en place les Commissions
Départementales d'Equipement Commercial (CDEC) qui remplacent les CDUC.
Ces nouvelles instances ne comportent plus que sept membres contre vingt
auparavant. Sont représentés les maires de la commune
d'implantation et des deux communes les plus peuplées de
l'arrondissement, le conseiller général du canton, le
président de la Chambre de Commerce et d'Industrie et celui de la
Chambre des Métiers et une association de consommateurs. Le fait de
réduire le nombre de membres était censé rendre plus
difficile l'obtention des autorisations. Le nombre d'ouvertures a en effet
diminué depuis la mise en application de la loi (cf. figure 31) mais
d'autres phénomènes rentrent en jeu. Premièrement, le
territoire commence à être maillé par le réseau des
hypermarchés et les
73
nouvelles implantations ont des parts de marché plus
faibles. On compte en effet 862 hypermarchés en France en 1991
102 . Deuxièmement, une nouvelle forme de vente
s'affirme : les hard-discounts. La surface de vente de ces enseignes
est comprise entre 300 et 1 200 mètres carrés, mais la
majorité se situe entre 600 et 800 mètres carrés. Ce type
de magasin propose des prix attractifs en réduisant au minimum son
personnel. En 1989, les hard-discounts ne représentaient que 7 % des
supermarchés. En 1990, cette part était de 22%, puis de 75% en
1993 et 82% en 1994103. Il y a ici une recrudescence de ce type
d'enseignes qui, de par leur surface de vente, sont dispensées
d'autorisations préalables. Leur part de marché augmente et les
nouvelles implantations d'hypermarchés sont rares. Les autorisations
accordées dans les années 1990 concernent donc principalement des
commerces non alimentaires.

Nombre d'ouvertures de magasins de plus de 1 000
mètres carrés entre 1986 et 1994.
Figure 31: une légère diminution du nombre
d'implantations de grandes surfaces au début des années
1990
(Source :
www.senat.fr, Avis
n° 272 de M. Alain PLUCHET)
Si le hard discount capte des parts de marché aux
hypermarchés, il affaiblit également les commerces traditionnels.
Le législateur a donc fait en sorte que les hard-discounts soient
également soumis à autorisation, en créant la loi Raffarin
du 5 juillet 1996, relative au développement et à la promotion du
commerce et de l'artisanat. Ce texte abaisse le seuil des autorisations
à 300 mètres carrés pour toute création ou
extension. En ce qui concerne les changements d'activités, ils sont
soumis à autorisation à partir de 300 mètres carrés
si
102 Insee, comptes du commerce (1991)
103 PLUCHET A. (1995-1996), Avis n° 272 fait au nom de la
commission des affaires économiques, au sujet du Projet de loi
portant diverses dispositions d'ordre économique et financier,
www.senat.fr
74
l'activité du repreneur est à dominante
alimentaire, et à partir de 2 000 mètres carrés dans les
autres cas. Cette réforme ne laisse que trois élus au sein des
commissions, à savoir : le maire de la commune d'implantation, le
président de l'intercommunalité et le maire de la commune la plus
peuplée. Le délai d'instruction des dossiers est rallongé
à quatre mois et les projets de 6 000 mètres carrés sont
soumis à enquête publique.
La loi Raffarin est la première réforme qui va
réellement renforcer les procédures d'autorisations
préalables. Pour autant, le commerce de périphérie va
continuer de se développer. Le Schéma de Développement
Commercial (SDeC) du Vaucluse estimait que 20% du plancher commercial existant
en 2003 avait été développé dans les 5
dernières années. Malgré l'abaissement du seuil des
autorisations préalables, la croissance des périphéries
reste forte. Cela est lié au fait que sur la période 1998-2003,
63% des surfaces commerciales qui ont fait l'objet d'une procédure de
CDEC ont été acceptées104. Lorsqu'une
autorisation est refusée, l'enseigne peut exercer un recours
auprès de la Commission Nationale d'Equipement Commercial, mais si son
projet est également refusé, rien ne l'empêche de
représenter un autre dossier plus tard. Certains promoteurs vont ainsi
réviser leur projet plusieurs fois jusqu'à ce qu'il soit
adopté. Les CDEC ont ainsi été qualifiées
de « machines à dire oui ... lentement
»105.
Malgré leur faible capacité à freiner le
développement commercial de périphérie, les CDEC ont
été vivement critiquées car elles étaient
contraires à la liberté d'entreprendre,
protégée par le droit européen. L'article 43 du
Traité instituant la Communauté européenne stipule en
effet que « les restrictions à la liberté
d'établissement ... sont interdites »106. Ainsi, en
2001, l'enseigne de hard-discount Aldi a déposé une plainte
devant la Cour Européenne concernant les lois Royer et
Raffarin107. Par un avis motivé du 12 décembre 2006,
la Commission Européenne a demandé à la France de faire le
nécessaire pour se mettre en conformité avec le droit
communautaire.
104 Préfecture du Vaucluse (2004), Schéma de
Développement Commercial du Vaucluse, AID-Observatoire, p.26
105 Assemblée Nationale (2010), Rapport
d'information de la commission des affaires économiques sur la mise en
application de la Loi de Modernisation de l'Economie, 63p.
106
eur-lex.europa.eu,
Traité instituant la Communauté Européenne
107
www.lyon.cci.fr, Fiche pratique
concernant la directive n° L 376/36 publiée au Journal Officiel de
l'UE le 27.12.2006, à propos de la liberté d'entreprendre,
3p.
75
3.3.2 La loi de modernisation de l'économie et
l'intégration du commerce dans l'urbanisme de droit commun
Afin de prendre en compte les exigences de l'Union
Européenne, le parlement a voté la Loi de Modernisation de
l'Economie, le 4 août 2008. Cette dernière n'a pas supprimé
les CDEC, mais les a modifiées en les renommant Commissions
Départementales d'Aménagement Commercial (CDAC). L'objectif est
de progressivement supprimer le système des autorisations
préalables et d'intégrer l'urbanisme commercial dans
l'urbanisme de droit commun. Les CDAC ne s'appliquent plus à
partir de 300 mètres carrés de surface de vente mais à
partir de 1 000 mètres carrés. Les hôtels et les commerces
liés à l'automobile ne sont plus soumis à autorisation.
La composition des commissions a également
été modifiée. La Commission Européenne reprochait
à la France de faire intervenir des professionnels du commerce pour
favoriser le protectionnisme. Les Chambres de Commerce étaient
principalement visées. En effet, leurs dirigeants sont élus par
les commerçants et le fait d'accorder un vote à cette chambre
consulaire pouvait être un moyen de limiter la concurrence. Les Chambres
de Commerce et les Chambres des Métiers ont donc été
retirées de la composition des CDAC. En contrepartie, les élus
locaux ont pris de l'importance car ils occupent désormais cinq
sièges sur huit. En effet, le président du Conseil
Général et le président du SCoT sont devenus membres des
CDAC. Ces deux élus locaux travaillent à des échelles
proches de la zone de chalandise des commerces de la grande distribution. Leur
incorporation semble donc pertinente.
En dehors des cinq élus locaux, on retrouve «
trois personnes qualifiées en matière de consommation, de
développement durable et d'aménagement du territoire ». Ces
professionnels seront chargés d'apporter des connaissances techniques
pour juger des nouveaux critères d'évaluation. Ces derniers ne
portent plus sur des indices économiques tels que l'offre et la demande
ou la concurrence entre les différentes formes de commerces, mais bien
sur des thèmes d'urbanisme. Les éléments pris en compte se
réfèrent en effet à l'animation sur la vie urbaine, les
effets sur les flux de transports, l'insertion dans le réseau de
transports collectifs et la qualité environnementale. Même si
d'autres thèmes comme l'impact sur l'étalement urbain ou la
mixité fonctionnelle ne sont pas pris en compte, on assiste à une
transformation des autorisations préalables qui ne font plus une
étude de marché mais qui posent de réelles questions
d'urbanisme.
76
Pour autant, ces autorisations restent souples et un rapport
de l'Assemblée Nationale les décrit comme des « machines
à dire oui ... rapidement »108 pour évoquer que
les décisions sont encore plus rapides qu'avec les CDEC. Pour freiner le
développement anarchique du commerce, il faut donc un document
d'urbanisme qui fixe des règles applicables sur les permis de
construire. Pour cela, la Loi de Modernisation de l'Economie a
créé les Documents d'Aménagement Commercial
(DAC). Ce nouvel outil de planification intercommunal
a pour objectif de fixer les orientations sur le commerce
qui s'imposeront aux Plans Locaux d'Urbanisme (PLU). A terme, le but
est de supprimer le système de double autorisation entre les CDAC et les
permis de construire pour ne laisser que les permis de construire.
Le DAC tire les leçons de l'échec des
Schémas de Développement Commercial (SDeC). Ces derniers
étaient des documents plus souples, qui ne s'imposaient pas aux
documents d'urbanisme et qui s'appuyaient sur des critères
économiques. Les règles décrites par les SDeC devaient
guider les CDEC mais elles n'ont jamais été appliquées. Un
SDeC avait été réalisé sur le département du
Vaucluse en 2004. Il prévoyait de limiter la croissance de la grande
distribution à 102 000 mètres carrés
supplémentaires sur la période 2004-2010. Ce chiffre colossal
permettait à la grande distribution d'accroitre son plancher commercial
de 12% et d'augmenter ses parts de marché. Pourtant, la CCI du Vaucluse
a constaté que ce plafond allait être atteint en trois ans, au
lieu de six comme le prévoyait le SDeC109. Pour ne pas
reproduire les mêmes erreurs, le DAC sera quand à lui opposable
aux PLU car il sera intégré au SCoT. Une de ses principales
fonctions sera de définir les zones d'aménagement commercial,
secteurs dans lesquels pourront s'implanter les commerces de plus de 1 000
mètres carrés. Ces zones pourront être
délimitées à la parcelle. La loi interdit de reposer les
prescriptions du DAC sur l'analyse de l'offre commerciale existante.
Les critères doivent être liés à
l'aménagement du territoire, tout comme les critères des
CDAC.
Seulement quatre DAC ont été mis en place
à ce jour, dans les agglomérations de Besançon, Brest,
Saint Etienne et Toulouse. Dans chaque cas, le DAC a été
établi sur des territoires où un SCoT était en cours
d'élaboration. Le but des élus locaux était de
réaliser, en quelques mois, un document encadrant le
commerce110. En effet, le temps d'élaboration du SCoT
était jugé trop long pour pouvoir empêcher le
développement anarchique du commerce.
108 Assemblée Nationale (2010), Rapport
d'information de la commission des affaires économiques sur la mise en
application de la Loi de Modernisation de l'Economie, 63p.
109 Chambre de Commerce et d'Industrie du Vaucluse (mai 2006),
L'équilibre commercial en danger, in Dynamique n°43
p.18-20
110 RAUDIN E. (2010), Les documents d'aménagement
commercial (DAC) issus de la Loi de modernisation de l'économie, in Les
notes de l'agence de développement et d'urbanisme de Lille, 4p.
77
Une fois le DAC approuvé, il doit faire l'objet d'une
enquête publique afin d'être intégré au SCoT.
Ces quatre expériences ont déjà
montré les lacunes du DAC. En effet, la loi LME est très
imprécise sur les critères d'aménagement du territoire qui
pourront être pris en compte. Ainsi, les DAC existants y ont très
peu recours et les critères d'analyse restent économiques. Le DAC
de Brest va ainsi choisir les secteurs d'activités qui pourront
s'implanter dans ses différents pôles commerciaux. Pour chacun de
ses secteurs, il va définir une surface de vente maximale par point de
vente et par pôle commercial. Il va également interdire toute
nouvelle galerie marchande, pour éviter de concurrencer les boutiques de
centre-ville, en imposant une surface de vente minimale. Ce type de
prescriptions réglementant à l'extrême les implantations et
laissant très peu de liberté au marché semble aller trop
loin par rapport à ce qu'autorise la loi.
Le DAC de Toulouse a lui aussi proposé des seuils
plafonds de Surface Hors OEuvre Nette (SHON) sur chacun de ces pôles
commerciaux. Ces plafonds sont bonifiés si l'ensemble commercial est
desservi par un Transport en Commun en Site Propre (TCSP). Les principes
d'aménagement du territoire sont donc ici plus avancés. Mais pour
autant, les commissaires enquêteurs ont jugé que les plafonds
n'étaient pas prévus par la loi et que le DAC manquait de
cohérence avec le SCoT111. Au terme de l'enquête
publique, le DAC n'a donc pas pu être intégré au SCoT.
Le DAC Sud Loire qui englobe l'agglomération de Saint
Etienne a utilisé une autre méthode. Il a délimité
les Zones d'Aménagement Commercial à la parcelle. L'objectif
était d'empêcher tout nouveau pôle commercial et de limiter
l'étalement urbain des zones commerciales existantes. Toutefois, ce
document est actuellement attaqué par la Société Immochan.
Cette société remet en cause la cartographie non
actualisée et la cohérence entre le SCoT et le DAC. Rappelons que
les groupes comme Immochan possèdent des services juridiques très
compétents et qu'ils sont en mesure d'attaquer le projet dès lors
qu'il va à l'encontre de leurs intérêts. Le risque de voir
le DAC tomber est important vu que la loi est très imprécise sur
son contenu.
La proposition de loi Ollier, relative à l'Urbanisme
commercial a pour but de clarifier le contenu du DAC. Elle a été
adoptée par l'Assemblée nationale le 15 juin 2010. Elle a ensuite
été modifiée par le Sénat le 31 mars 2011. La
deuxième lecture du texte par
111 Entretien avec Yann CABROL (2011), Chargé de
mission à l'agence d'urbanisme de Toulouse ayant réalisé
le DAC de la grande agglomération de toulousaine
78
l'Assemblée Nationale n'est pas prévue pour le
moment et l'adoption du texte ne semble plus être une priorité
parlementaire.
Toutefois, avant même que cette loi soit votée,
elle suscite déjà des critiques112. Le pouvoir de
décision des maires va être renforcé car, à terme,
seul le permis de construire règlementera les implantations. Et nous
avons vu que ces élus locaux pouvaient avoir un intérêt
à laisser une certaine liberté aux enseignes. Dans ces
conditions, on peut se demander si le marché n'est pas toujours plus
fort que la réglementation, car malgré les multiples
réformes législatives, le développement du commerce de
périphérie reste toujours aussi important.
Conclusion de la troisième partie :
Le rôle des pouvoirs publics dans le
développement de cette zone commerciale de périphérie
Pour freiner le développement commercial de
périphérie, la règlementation a longtemps essayé de
contraindre le marché. Elle a tenté de fournir aux élus
locaux les moyens d'interdire les implantations, même s'il y avait un
potentiel commercial. Toutefois, avec le recul, on s'aperçoit que le
marché a été plus fort que la règlementation. En
effet, le commerce de périphérie n'a eu de cesse de se
développer, malgré les différentes évolutions
législatives.
Cette difficulté à contraindre les
enseignes est liée au fait que, les élus locaux trouvent un
certain intérêt au développement commercial de
périphérie. Les ressources fiscales et les emplois
créés ont convaincu un certain nombre de maires qui ont alors
laissé libre cours aux implantations. Dans un même temps, les
acteurs du développement routier ont construit des axes rapides qui ont
permis d'augmenter la zone de chalandise des pôles de
périphérie et d'améliorer leur accessibilité. Ce
sont ces infrastructures qui ont créé, puis amplifié, le
potentiel commercial en périphérie.
Il est alors important de mettre en cohérence
les politiques de transports avec le projet de développement commercial.
Seul un projet global peut permettre d'harmoniser ces deux composantes du
territoire.
112 HACHACHE N. (octobre/novembre 2010),
Développement Commercial, à l'aube de l'insertion
urbaine, in Traits Urbains n°42, p.18-29
79
4 La zone commerciale Avignon Nord peut-elle s'inscrire
dans un projet de ville durable ?
Cette partie s'interroge sur l'avenir de la zone commerciale.
D'après différents exemples, nous allons voir comment les zones
commerciales peuvent intégrer le développement durable. Cette
évolution peut passer par la mutation du site ou par des restrictions au
développement commercial sur la zone.
4.1 Construire un projet urbain pour freiner le
développement commercial de périphérie
Le développement des zones commerciales ne ralentit pas
et les centres-villes sont de plus en plus fragiles. Pour remédier
à cette situation, deux solutions complémentaires doivent
être envisagées :
- Revitaliser les centres-villes en recréant des
espaces publics de qualité, en améliorant l'accessibilité
et en favorisant l'implantation de locomotives commerciales.
- Freiner le développement commercial de
périphérie, notamment en construisant un projet urbain sur ses
périphéries délaissées.
Ce mémoire n'a pas vocation à traiter de la
redynamisation des centres-villes. Nous allons donc étudier la seconde
solution.
L'exemple de la commune du Pontet (cf. 3.1.3.), nous a
montré qu'un document d'urbanisme souple pouvait permettre un
développement incontrôlé des zones commerciales. Nous
allons voir comment les documents de planification, et en particulier les SCoT,
peuvent limiter le développement commercial en
périphérie.
80
4.1.1 Intégrer le commerce dans le projet urbain
Nous avons vu que le commerce était principalement
règlementé par le Code du Commerce. On assiste aujourd'hui
à un renversement de la tendance et le commerce commence à
prendre sa place dans l'urbanisme et dans ses projets urbains. La
première réforme législative à avoir impulsé
ce mouvement est la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU).
Grâce à la mise en place des Schémas de Cohérence
Territoriaux, le projet commercial n'est plus considéré comme une
annexe mais bien comme une composante à part entière. En effet,
le commerce est source de déplacements qu'il faut planifier dans une
ville durable. Il peut également être considéré
comme un équipement qui doit être accessible à tous.
Toutefois, on remarque que les SCoT traitent moins du commerce que de
l'habitat et des transports par exemple. Seuls les territoires
déjà dotés de Schémas de développement et
d'urbanisme commercial, comme Lyon, ou de Chartes de développement
commercial, comme Rennes, ont développé ce thème. Mais en
réalité, ces territoires se servent des conclusions de ces
documents sectoriels et les insèrent dans le projet de SCoT. L'approche
systémique est rarement utilisée, hormis dans le SCoT de
Lens-Liévin qui articule le développement commercial autour du
projet de TCSP113.
Pourtant ce type d'approche devrait être plus couramment
utilisé pour asseoir la solidité du projet. D'après la loi
SRU, le SCoT ne peut définir que les localisations «
préférentielles » des commerces. A ce titre, il ne peut pas
interdire d'implantation. La jurisprudence nous le montre avec le SCoT de
l'agglomération Chartraine, qui a été annulé pour
son volet commercial114. Ce document avait interdit l'implantation
commerciale à l'extérieur de la rocade mais le tribunal a
jugé cette mesure illégale.
La proposition de loi Ollier a pourtant pour objectif de faire
du SCoT le principal outil de la planification commerciale. Elle prend en effet
appui sur les dispositions de la loi Engagement National pour l'Environnement
qui impose que toutes les communes devront être couvertes par un SCoT
doté d'un volet commercial en 2017. Dans ces conditions, pour
préserver les terres agricoles et naturelles de l'étalement des
zones commerciales, il faut élaborer un projet urbain sur ces espaces.
Il est en effet beaucoup plus difficile pour un
113 CERTU et FNAU (2011), L'aménagement commercial
dans les SCOT, retour d'expériences et pistes de réflexion,
Certu, 96p.
114
www.fedescot.org, Contribution
du Club des SCoT aux réflexions actuelles sur la modernisation de
l'urbanisme commercial, relatant la décision du 19 juin 2009 du
tribunal administratif d'Orléans d'annuler le SCoT de
l'agglomération chartraine.
81
promoteur, d'attaquer un SCoT qui valorise des espaces
naturels ou agricoles, plutôt qu'un document qui prône simplement
une interdiction de construire.
Valoriser les espaces agricoles et naturels autour des zones
commerciales va permettre de les contenir dans une enveloppe foncière.
Si les possibilités d'extension sont limitées, le foncier va
prendre de la valeur et la zone aura alors tendance à se densifier.
4.1.2 Réfléchir à la bonne
échelle ...
Le SCoT est un outil qui peut permettre d'encadrer le commerce
de périphérie mais encore faut-il qu'il soit conçu
à la bonne échelle.
Le centre commercial Auchan - Avignon Nord appartient à
la catégorie des centres régionaux dans le barème du
Conseil National des Centres Commerciaux 115. La zone commerciale
exerce, elle aussi, une influence régionale car sa zone de chalandise de
575 000 habitants 116 atteint les départements du Gard, de la
Drôme et des Bouches-du-Rhône. L'ensemble des enjeux liés
à ce pôle ne peuvent donc pas être considérés
à l'échelle de la commune ou même de
l'agglomération.
Le SCoT du Bassin de Vie d'Avignon souffre,
comme beaucoup d'autres, de sa taille trop
réduite. Il rassemble 26 communes pour un total d'environ 250
000 habitants, soit moins de la moitié de la taille de la zone de
chalandise. Ce bassin de vie est donc très restreint par rapport au
bassin d'emploi et au bassin de consommation. A cette échelle, les
communes qui souffrent de l'évasion commerciale vers Avignon Nord et du
déclin du commerce traditionnel ne sont pas associées. Ce sont
pourtant des territoires touchés par la perte d'emplois dans le commerce
de centre-ville.
Comme nous l'avons vu précédemment, à
l'échelle du SCoT du Bassin de Vie d'Avignon, la zone commerciale est
plutôt créatrice d'emplois et de ressources fiscales. Ainsi, le
PADD décrit qu'il veut « élaborer une stratégie
d'aménagement pour Avignon Nord qui permette de conforter son
attractivité économique sur le long terme »117.
Les territoires environnants désirent au contraire réduire
l'évasion commerciale vers l'agglomération avignonnaise et
notamment vers Avignon Nord. La commune d'Orange déclare ainsi
vouloir
115 Les centres commerciaux régionaux justifient d'une
surface de vente et de réserve comprise entre
40 000 et 79 999 mètres carrés et/ou totalisent au
moins 80 magasins et services. D'après
www.cncc.com
116 Op. cit., INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)
117 Syndicat Mixte du SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2010),
SCoT du Bassin de Vie d'Avignon, version arrêtée, PADD
p.29
82
« réduire l'évasion non alimentaire
»118. L'agglomération de Carpentras a également
réalisé une étude de potentiel commercial, via son
Schéma de développement commercial119, et elle
projette de développer son offre alimentaire ainsi que les commerces de
bricolage et de jardinage. Le manque de concertation entre les
différents élus locaux risque de créer une surproduction
de surfaces commerciales qui pourrait conduire à la naissance de friches
commerciales.
Le SCoT de Métropole Savoie a lui réussi
à trouver la bonne échelle pour gérer la
répartition du commerce120. Son territoire associe 103
communes pour 250 000 habitants. Il recouvre ainsi la zone de chalandise des
deux pôles commerciaux d'agglomération situés sur les
entrées nord et sud de la ville de Chambéry. En associant les
communes concernées par l'évasion commerciale, le SCoT a pu
élaborer un projet qui vise à redistribuer l'offre
commerciale.
L'exemple allemand est également intéressant. La
planification est basée sur le consensus des différentes
collectivités et les Lander, qui ont la taille des régions
françaises, occupent une place importante 121 . Ces
collectivités définissent les plans régionaux
d'aménagement du territoire qui sont chargés de préserver
l'équilibre entre les zones d'habitation, les zones commerciales et
industrielles, et les espaces naturels. Le système comporte des failles,
mais il a quand même prouvé une certaine efficacité. En
Allemagne, 33% du chiffre d'affaires est réalisé en
périphérie contre 66% en France122.
Pour construire un projet urbain autour de la zone commerciale
Avignon Nord, il faut donc, au minimum, une échelle de réflexion
qui englobe le Vaucluse et une partie des départements limitrophes. Un
périmètre intéressant pourra peut-être
émerger de la réforme de l'intercommunalité, qui va
modifier les contours du SCoT, mais plus vraisemblablement, il faudra attendre
le travail d'Inter-SCoT pour avoir une réflexion globale sur le
commerce.
118 Mairie d'Orange (2007), Etude stratégique sur
le développement commercial de la ville d'Orange, Chambre de
Commerce et d'Industrie du Vaucluse, p.6
119Communauté d'Agglomération Ventoux
Comtat Venaissin (2010), Schéma Directeur de Développement
Commercial, AID-Observatoire, p.21
120 CERTU et FNAU (2011), L'aménagement commercial
dans les SCOT, retour d'expériences et pistes de réflexion,
Certu, 96p.
121 CERTU (2000), Les réglementations et les
pratiques de l'urbanisme commercial en Allemagne, Belgique, Grande-Bretagne,
Italie et Suisse, p.20-21
122 SCHMIT P. coordonateur (juin 2009), Dossier Urbanisme
commercial, in Intercommunalités n°135, p.4
83
4.1.3 Développer de la mixité fonctionnelle
au sein de la zone commerciale
Nous avons évoqué que le développement
incontrôlé du commerce de périphérie pourrait
entraîner la naissance de friches commerciales. Dans ce cas, il faut
prévoir une éventuelle opération de rénovation
urbaine pour Avignon Nord. L'introduction d'une mixité fonctionnelle au
sein de cette zone commerciale semble opportune car il y a un potentiel
pour développer de l'habitat. Le SCoT du Bassin de Vie
d'Avignon estime que la zone commerciale est située dans le Coeur urbain
de l'agglomération car l'urbanisation a rattrapé le site. Le
Grand Avignon travaille également sur un projet de tramway qui pourrait,
à terme, desservir Avignon Nord. La construction de logements sur cet
espace est plus pertinente que sur les communes périurbaines car elle
permettrait de rapprocher les habitants de leurs lieux de consommation et
d'emploi, et de valoriser l'utilisation des transports collectifs.
La création de logements peut permettre
d'intégrer la zone commerciale au reste du tissu
urbain. Elle mettrait en valeur les espaces naturels présents
comme le Domaine de Roberty ou le Monastère de la Visitation (cf. partie
1.4.1) et justifierait le développement des modes doux au sein du site.
Les canaux pourraient alors servir de « trame bleue ». Les logements
permettent également la rénovation urbaine des friches
commerciales qui pourraient apparaître. D'un point de vue financier, les
promoteurs sont prêts à vendre leurs terrains non bâtis pour
développer l'habitat car le prix d'un terrain destiné au logement
est plus élevé que celui d'une parcelle à vocation
commerciale.
Des projets de parcs commerciaux importants ont
intégré la mixité fonctionnelle. Le Carré
Sénart sera par exemple le coeur de la ville nouvelle de Sénart,
située dans le sud de l'Ile de France. Mais, même sur des projets
contemporains, la mixité reste horizontale et non verticale. En effet,
nous avons vu qu'une zone commerciale régionale pouvait recevoir
plusieurs dizaines de milliers de visiteurs par jour. Même si les
transports en commun sont développés, une part importante de ces
clients vient en voiture. Ces flux automobiles sont difficilement conciliables
avec un habitat de qualité. Les exemples de mixité fonctionnelle
verticale sont donc plutôt réservés à des centres
commerciaux de centre-ville.
84
4.2 La mobilité durable et son impact sur la
compétitivité du pôle
Comme nous l'avons vu en partie 2.1, le commerce et la
mobilité entretiennent des liens très forts. Le commerce se base
sur une logique de flux et la compétitivité d'un site
dépend de son accessibilité. Une politique de transport qui
améliore l'accessibilité d'un site aura tendance à le
vitaliser alors qu'une politique contraignant la mobilité pourra
l'affaiblir. Les projets concernant les infrastructures de transports doivent
donc être différents selon si l'on envisage de restreindre ou de
développer Avignon Nord.
4.2.1 La mise en place de transports collectifs performants
de type tramway
La communauté d'Agglomération du Grand Avignon
travaille actuellement sur la mise en place d'un tramway qui desservirait la
commune du Pontet. Il est envisagé que, dans la deuxième phase du
projet, le TCSP desserve la zone commerciale. La configuration actuelle du site
permettrait que la ligne de tramway se situe à moins de 600
mètres de l'ensemble des commerces. Il existe un certain potentiel de
report modal car, selon Immochan, 40% des clients du centre commercial Auchan
ne fréquentent que la galerie marchande123. Cela signifie
qu'ils achètent des objets de petite taille, transportables dans les
transports en commun.
Il est cependant intéressant de se demander si le
tramway doit rattraper la zone commerciale ou si c'est au commerce de
s'implanter à proximité du tramway. Le DAC de la métropole
de Nantes-Saint Nazaire, qui est en cours d'élaboration, veut
préconiser la seconde solution. Il subordonnerait les implantations
commerciales à la desserte par un TCSP124. Mais ce genre de
politique nécessite que certains pôles commerciaux soient
déjà desservis. Dans le cas avignonnais, seul le pôle
d'Avignon Nord serait éventuellement connecté au réseau de
TCSP.
L'impact d'un tramway sur cette zone commerciale n'est pas
évident à prévoir. En effet, Avignon Nord a
été conçue pour l'automobile et, hormis le centre
commercial, elle ne possède pas une densité
autour de quelques points, qui pourraient devenir des futurs
arrêts de tramway. Le TCSP risque donc d'avoir du mal à proposer
un service satisfaisant pour les usagers.
123 Op. cit., INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)
124 Entretien avec Laurent SEGURA (2011), chef de projet
Urbanisme Commercial à l'agence d'urbanisme de la région
nantaise
85
La situation est différente dans les parcs commerciaux.
Ce nouveau concept propose les mêmes enseignes que les zones commerciales
mais sous la forme de cellules mitoyennes. Le site est donc plus compact et il
est plus facile de le desservir par les transports en commun. A Montpellier,
Odysseum est un parc commercial sur deux niveaux qui illustre bien cette notion
de densité. Il a été conçu en intégrant
l'arrivée du tramway, qui dessert le coeur du site (cf. figure 32).

Figure 32 : Odysseum, un site compact permettant la desserte
par le tramway. (Source :
www.centre-commercial-odysseum.com)
Si le tramway vient desservir la zone commerciale Avignon
Nord, l'impact sera différent selon le type de
commerces. Les effets sur l'hypermarché seront probablement
mineurs125 mais les commerces d'équipement de la personne,
les cafés et les restaurants pourront être dynamisés. En
effet, le tramway crée des flux piétons qui
bénéficient plus aux achats liés aux loisirs et au
plaisir, qu'aux achats de première nécessité. Les
associations de commerçants craignent que les boutiques du centre-ville
souffrent de cette montée en puissance des achats-plaisir en
périphérie. Les commerçants avignonnais sont farouchement
opposés à l'arrivée du tramway sur le site d'Avignon
Nord.
125 Les hypermarchés situés en bout de ligne
d'un TCSP ne semblent pas bénéficier d'une clientèle
supplémentaire d'après DESSE R-P. (2001), Le nouveau commerce
urbain p.48
86
Le commerce de périphérie se tourne
progressivement vers les achats-plaisir mais il ne renonce pas pour autant
à ses parts de marchés dans les achats pratiques et rapides,
notamment dans le secteur alimentaire. De ce fait, les distributeurs
accueillent volontiers un projet de tramway mais sans renoncer
pour autant à l'accessibilité par
l'automobile. L'encombrement des produits vendus rend d'ailleurs
impossible l'abandon de l'automobile. De plus, ce mode de transports
amène des clients qui consomment en masse et qu'il est important de
préserver. Dans un contexte où le client « zappe »
entre les différentes enseignes, il est important qu'il achète le
plus possible lors de se venue dans la zone commerciale.
Si le tramway n'est pas attendu avec une certaine
indifférence, c'est également parce qu'il ne peut pas couvrir une
zone de chalandise aussi importante que l'automobile. En effet, le tramway ne
peut amener que des clients qui se situent dans le corridor de son
tracé. Qui plus est, on remarque que même dans les
agglomérations où le réseau de tramway est
développé, la part modale des transports en commun pour le motif
achat est faible. Elle est de 11% à Lyon et à Grenoble et de 6%
à Strasbourg126.
Si ces parts modales venaient à augmenter du fait de la
volonté politique en faveur des transports en commun, le commerce
pourrait en être modifié. En effet, nous avons vu que, jadis, la
grande distribution s'était implantée sur les carrefours routiers
car ce sont eux qui concentraient les flux. Mais, si demain les flux majeurs
provenaient des transports en commun, il est possible que le commerce se
repositionne de lui-même sur les carrefours des lignes les plus
importantes, en adoptant de nouvelles formes de vente. A
Paris, où la part modale des transports en commun est importante, les
distributeurs ne négligent pas leur desserte. Le centre commercial
Italie 2, qui se décrit comme le deuxième espace shopping de la
capitale127, est implanté au croisement de deux lignes de
métros.
En attendant cet éventuel repositionnement du commerce,
une solution de transition peut être développée. L'exemple
du centre commercial Odysseum montre qu'un site peut, à la fois,
être desservi par un tramway et disposer d'un accès rapide depuis
les grands axes routiers. Cette accessibilité performante par les deux
modes de transports garantie la compétitivité du site.
126 CETE de l'Ouest (2004), Ville accessible à tous
et Activités commerciales, actes de la journée d'échanges
du 21 mai 2003, p.45
127
www.hammerson.fr,
société foncière possédant le centre commercial
Italie 2.
87
4.2.2 La difficulté de créer des cheminements
doux
Pour que la desserte en tramway soit efficace, il faut que les
modes doux soient agréables et sécurisés.
Nous avons vu que la zone commerciale est divisée en
trois parties. Le site historique comprenant le centre commercial Auchan est
séparé du pôle Ikéa et du pôle de la Tour
Blanche par la route de Carpentras. Cette dernière est un
axe à deux fois deux voies limité à
110 km/h au niveau de la zone commerciale (cf. photo A, figure
33). Son franchissement par des modes doux n'a pas été
prévu dans la construction des ponts routiers, même les plus

Figure 33 : Des infrastructures routières lourdes qui
compliquent le développement des modes doux (Conception Girard,
2011)
récents (cf. photo B, figure 33). Il faudrait alors soit
élargir les ouvrages d'art existants soit en créer de nouveaux.
La création d'un tel ouvrage coûterait au minimum 800 000 euros.
C'est en effet le prix qu'a couté la passerelle qui relie le
Zénith de Nantes au parking du centre commercial Atlantis 128
. L'ouvrage d'art est extrêmement basique car il comporte des escaliers
et il n'est donc pas accessible aux personnes à mobilité
réduite.
Dans le cas d'Avignon Nord, le tissu urbain dense est
relativement éloigné du pôle commercial (cf. figure 33).
Les quelques quartiers situés autour sont constitués de
lotissements pavillonnaires qui ont du mal à justifier l'investissement
dans un ouvrage d'art. Les centres-villes du Pontet et de Sorgues sont,
quant-à-eux, à plus de deux kilomètres de l'enseigne
Auchan. La commune de Vedène, qui à est moins deux
kilomètres, est séparée par la route de Carpentras et par
l'Autoroute.
128
www.20minutes.fr/nantes/152387-Nantes-Une-passerelle-pietonne-pour-le-Zenith.php
88
Les investissements qu'il faudrait réaliser
sont lourds et les distances à parcourir sont importantes. Il
semble indispensable de réaliser au moins un ouvrage de franchissement
pour éviter que les lycéens de Vedène ne franchissent
l'Autoroute par le pont routier de la route de Carpentras. Mais sur le
principe, il est difficile de dire si la collectivité doit investir dans
des cheminements doux pour qu'une zone commerciale devienne un espace de
promenade et de loisirs ...
Si des cheminements doux sont réalisés depuis
les communes environnantes, ils vont se heurter à l'absence de modes
doux à l'intérieur du site. En effet, l'espace est dominé
par la voiture et les flux automobiles y sont très importants. Il sera
donc difficile de développer des cheminements agréables et
sécurisés.
Il faut également rappeler que la partie située
au Nord de la route de Carpentras s'étend sur 1 800 mètres de
long. Le développement sous forme de lotissement commercial a
créé une densité très faible et la
difficulté pour implanter les modes doux est la même que la
desserte par un TCSP : le site manque de compacité.
Les promoteurs peuvent toutefois être amenés
à réaliser des cheminements doux entre les différentes
enseignes. Immochan souhaite par exemple créer un mail piéton
pour développer des activités de restauration.
89
4.2.3 Peut-on diminuer les espaces de stationnement ?
L'immense quantité de stationnement présent sur
le site provoque de graves problèmes urbains. On peut notamment citer
l'augmentation du trafic automobile, l'imperméabilisation des sols et
l'étalement urbain. Il est extrêmement difficile pour les pouvoirs
publics de contrôler ces espaces de stationnement car ils sont
entièrement réalisés sur des financements
privés et sur des terrains privés.
Comme nous l'avons vu dans la partie 2.1, le commerce de
périphérie a besoin d'une excellente accessibilité. C'est
entre autre grâce à cela qu'il capte des parts de marché au
commerce traditionnel. A l'heure où 99,5% des clients d'Avignon Nord
accèdent au site en voiture129, il semble impossible que les
enseignes réduisent le nombre de leurs places de stationnement. Les
enseignes calculent leur besoin en parkings en fonction de la
fréquentation du samedi, jour où les clients sont le plus
nombreux. Diminuer le nombre de places reviendrait à brider leur
capacité d'accueil et donc leur chiffre d'affaires.
La collectivité pourrait fixer des ratios plafonnant la
quantité de parkings en fonction de la surface de vente, notamment
à travers le DAC. Toutefois, cela pourrait entrainer un
développement du stationnement anarchique et des parkings sauvages
pourraient se constituer. Il semble préférable de favoriser
d'autres formes de parkings plutôt que d'en limiter le nombre. Les
parkings silos permettent par exemple de limiter l'étalement urbain et
l'imperméabilisation des sols. Nous avons déjà
évoqué que leur coût est prohibitif pour les promoteurs,
mais on remarque qu'ils commencent à se développer sur les zones
commerciales. En effet, pour agrandir leur surface de vente tout en conservant
le même ratio de places de stationnement, les acteurs privés
peuvent décider eux-mêmes de construire des parkings silos. Dans
le projet d'extension de la galerie marchande d'Auchan, Immochan compte ainsi
réaliser un parking en superstructure.
Pour limiter l'imperméabilisation des sols, il existe
des revêtements perméables remplaçant l'asphalte.
Toutefois, leur création et surtout leur entretien sont beaucoup plus
onéreux. Ces revêtements sont plus utilisés par les
collectivités, même s'il existe quelques exemples dans le
commerce, comme l'enseigne Gigastore à Coignières
(78)130.
Pour limiter le nombre de places de stationnement, il est
possible de favoriser le taux de rotation et le report modal sur les transports
en commun en faisant payer le parking. Cette pratique est très rare pour
les zones commerciales de périphérie car la gratuité du
parking est
129 Op. cit., INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)
130 Ce magasin est le seul à être cité dans
les réalisations de l'entreprise Ecovégétal,
www.ecovegetal.fr
90
un des éléments qui augmente leur
attractivité. Le parc commercial Odysseum a adopté ce
système de fonctionnement où le stationnement est
géré par une société. Le ratio de stationnement par
rapport à la surface de vente a ainsi pu être minimisé sur
le site. Mais ce système est décrié par les
commerçants qui doivent verser une somme au gérant pour que les
deux premières heures de stationnement soient gratuites pour leurs
clients. Il semble donc peu probable de mettre en place un stationnement payant
sur Avignon Nord.
Ces différentes pistes nous montrent qu'il est
difficile de réduire les problèmes liés au stationnement
sur le site. Toutefois, le taux de remplissage des parkings n'approche les 100%
que le samedi et il est possible de mutualiser ces espaces sur les autres jours
de la semaine. Dans le cas où ils sont desservis par un TCSP, de
nombreux centres commerciaux accueillent ainsi des parcs relais. On peut citer
par exemple le parc relais d'Orvault-Morlières, dans
l'agglomération de Nantes, qui est mutualisé avec celui de
l'enseigne Castorama, ou encore le parking Odysseum. A Montpellier, on constate
que les deux principaux parcs relais, Occitanie et Euromédecine, ont un
taux de remplissage de plus de 80% la semaine et de moins de 40% le
samedi131. Le fait de mutualiser le parking du parc commercial
Odysseum permet d'avoir un taux de remplissage important tout au long de la
semaine. Tout comme les commerces, les parcs relais ont besoin d'être
visibles et accessibles. Les implanter auprès de la zone commerciale est
donc judicieux.
Les pistes présentées ici pour résoudre
les problèmes liés à la quantité de stationnement
sur le site semblent très limitées. En effet, l'offre en
stationnement dépend de des flux de clientèle et pour la
réduire, il faudrait que la fréquentation commerciale diminue.
131 PRADY. G (2004), Tramway de Montpellier : le
succès des parcs relais, in Cahiers transport aménagement en
Languedoc-Roussillon. Source bibliographique n°10, p.5-9.
91
4.2.4 Contraindre l'usage de la voiture pour modifier
l'influence d'Avignon Nord
Nous avons vu que la zone commerciale s'était
adaptée au développement de l'automobile et que pour cette
raison, elle s'était localisée sur un carrefour routier. Les
pouvoirs publics lui ont permis d'étendre sa zone de chalandise en
développant des axes routiers rapides et en aménageant des
échangeurs et des giratoires avec pour objectif de limiter la
congestion.
Mais aujourd'hui, dans un objectif de développement
durable, il semble nécessaire de décentraliser le commerce. Pour
cela, le projet urbain peut consister à supprimer
l'hégémonie d'Avignon Nord et à favoriser les lieux de
consommation proches des lieux d'habitation. Dans ce cas, il faut appliquer la
logique inverse. Il faut ralentir les axes routiers pour
resserrer les courbes isochrones et ainsi restreindre la zone
de chalandise. Il faut accepter la congestion et ne plus multiplier
les échangeurs et les giratoires qui améliorent
l'accessibilité à la zone commerciale.
Cette thèse qui peut sembler invraisemblable
coïncide pourtant avec les réflexions grenobloises sur le
Chronoaménagement. Ces études menées par
l'Agence d'Urbanisme de la Région Grenobloise montrent que nous
évaluons nos déplacements en temps plutôt qu'en
distance132. Pour rapprocher les lieux d'habitation des lieux
d'emplois, et ainsi limiter l'étalement urbain, les conclusions de ces
travaux préconisent d'abaisser la vitesse des voies rapides à 70
km/h. Les études de marchés de la grande distribution, qui
résonnent à partir de courbes isochrones, montre que ces
réflexions s'appliquent aussi au commerce. En réduisant la
vitesse sur la route de Carpentras par exemple, on limiterait l'influence
d'Avignon Nord sur Carpentras et son arrière pays.
Dans le cadre d'un projet global pour un territoire durable,
un dispositif de Chronoaménagement pourrait à la fois
améliorer la répartition du commerce, limiter la
périurbanisation et de ce fait réduire les flux automobiles. Une
telle décision nécessite un travail partenarial important,
notamment avec les services du Conseil Général en charge du
réseau routier. Elle demande également beaucoup de
pédagogie envers la population.
132 Agence d'Urbanisme de la Région Grenobloise (2009),
Chronoaménagement et autoroute autrement, la proximité au
secours du territoire, Certu, 200p.
92
4.3 Avignon Nord peut-elle muter sur des initiatives
privées ?
Aujourd'hui, la grande distribution a maillé l'ensemble
du territoire français et les possibilités de nouvelles
implantations sont limitées. Les grandes infrastructures
routières ont favorisé la superposition des zones de chalandises
et le consommateur est de plus en plus volatile. Le client est aussi devenu
méfiant vis-à-vis du marketing et de la communication. Les
magasins doivent aujourd'hui trouver comment le rassurer et lui redonner
l'envie d'acheter133.
4.3.1 Des efforts dans la conception des pôles
commerciaux
Le Conseil National des Centres Commerciaux (CNCC) est un
organisme qui regroupe les différents acteurs privés du
développement commercial : promoteurs, propriétaires,
gestionnaires, enseignes, ... Il recense les professionnels des pôles
commerciaux de centre-ville et de périphérie. Depuis 2006, il a
créé le label Valorpark qui « a pour objectif de revaloriser
l'image de l'immobilier de périphérie et des entrées de
ville, notamment auprès des enseignes, des consommateurs et des pouvoirs
publics»134. Onze sites ont ainsi été
labellisés.
La tendance est de créer des parcs commerciaux
inspirés des « Retail Parks » anglo-saxon. Le label Valorpark
va ainsi favoriser les cellules mitoyennes reliées entre-elles
par des circulations douces, comme le montre l'exemple du pôle
AriaParc du Vivier 2 à Allonnes (72) (cf. figure 34). Ce nouveau concept
permet notamment d'éviter un recours à l'automobile pour les
déplacements internes. Les cheminements doux sont agréables et
sécurisés et ils permettent l'accès aux personnes à
mobilité réduite. Pour améliorer la convivialité,
les promoteurs font également des efforts sur
l'architecture. Ils développent des ensembles de
bâtiments plus homogènes, conçus avec des matériaux
de qualité. Le mobilier urbain est plus soigné qu'auparavant et
l'accent est mis sur l'éclairage des cheminements et des parkings. La
signalétique des différentes enseignes fait preuve
d'uniformité, ce qui permet à la fois leur lisibilité et
leur discrétion. D'après une étude de la
133 MOATI P. et POUQUET L. (1998), Stratégies de
localisation de la grande distribution et impact sur la mobilité des
consommateurs, CREDOC, p.66
134
www.valorpark.com
93
CCI de Bordeaux, les clients sont sensibles à
l'ambiance chaleureuse des centres commerciaux et à leur
architecture135.

Figure 34 : Des sites privilégiant la
convivialité
(Source :
www.valorpark.com)
Le CNCC travaille également avec le Comité
National des Entrées de Ville créé en 1995, par le
Sénateur Ambroise Dupont. Dans cette optique, il anime des
réunions associant des élus, des acteurs privés et des
urbanistes autour du thème « Entrée de ville et Ambitions
Urbaines ». Les nouveaux parcs commerciaux essayent donc de
s'intégrer au paysage. Les espaces de stationnement sont arborés
et au moins 10% du parc commercial est consacré aux espaces verts.
Pour compléter leur apparence écologique,
certains sites se sont dotés de panneaux photovoltaïques et de
systèmes de récupération des eaux de pluie. Le complexe
commercial Atoll, dans l'agglomération d'Angers, sera ainsi
labellisé Haute Qualité Environnementale et Bâtiment Basse
Consommation136.
135 Chambre de Commerce et d'Industrie de la Gironde (2010),
Les pratiques de consommation et la perception des pôles
commerciaux, p.19
136
www.certivea.fr, organisme de
certification
94
Les efforts réalisés par les acteurs du commerce
de périphérie méritent d'être salués. Sur une
initiative privée, les promoteurs se sont orientés vers des zones
commerciales où le cadre de vie est meilleur. Le fait de
développer le parc commercial sous forme de cellules mitoyennes limite
notamment le trafic automobile interne et favorise les modes doux.
4.3.2 Des zones commerciales qui restent fidèles
aux principes de développement du commerce de périphérie
Les efforts consentis par les promoteurs sont notables, mais
ils ne constituent pas une réponse complète aux problèmes
générés par les zones commerciales. Tout d'abord sur les
onze sites labellisés, dix ont été créés
ex-nihilo. Ces sites ont donc contribué à l'étalement
urbain et ils ont été implantés selon les mêmes
principes de localisation que les zones commerciales, à savoir à
proximité des grands axes routiers. Seul le centre commercial de
Noyelles-Godault a été labellisé suite à une
restructuration. Mais c'est de loin le parc commercial le moins abouti car les
cellules ne sont pas mitoyennes et les aménagements sont principalement
paysagers. Le nombre de parcs commerciaux, non labellisés pour la
plupart, a fortement augmenté ces dernières années (cf.
figure 35), toujours dans une logique d'étalement
urbain.

(Nombre de projets de parcs d'activités commerciales PAC
par année) Figure 35 : Un développement rapide des parcs
commerciaux
(Source : PAZOUMIAN M. (février 2005), La lettre
PROCOS n°2, 4p.)
95
Selon les critères du label Valorpark,
l'accessibilité et la visibilité sont particulièrement
importantes. La desserte en transports en commun est prise en compte mais elle
ne semble pas prépondérante car sur l'ensemble des sites, aucun
n'est desservi en site propre. La logique reste donc
routière et la quantité de places de
stationnement est plus importante que jamais. On remarque d'ailleurs que sur de
nombreux projets, le parking est situé comme un espace central (cf.
figure 36).

Figure 36 : Le futur complexe commercial Atoll, construit
autour d'un gigantesque parking
(Source :
www.lemoniteur.fr)
Le parc commercial doit également justifier d'une zone
de chalandise minimum de 50 000 personnes à moins de 20 minutes pour
être labellisé. L'objectif reste d'attirer une clientèle
toujours plus éloignée. Pour cela, les promoteurs misent sur la
qualité du site qui permet des achats basés sur le plaisir. Les
multiplexes sont même devenus les locomotives de certains parcs
commerciaux. Toutefois, les hypermarchés restent des valeurs sûres
qui apportent des flux plus récurrents et plus constants137.
Pour ne pas perdre les clients entre les achats-plaisir et les achats rapides,
les parcs commerciaux s'organisent en « univers » selon le type de
commerce.
137 ROBISCHON C. (novembre 2009), Commerces : la bonne
taille, in Traits urbains n°34, p.18
96
Le processus d' « auto-labellisation » initié
par le CNCC n'a donc pas pour vocation de limiter les problèmes
liés aux zones commerciales. Il ne résout ni la dépendance
automobile, ni l'étalement urbain et les projets récents
concurrencent toujours plus les centres-villes. Il s'apparente plus à un
argument publicitaire utilisé pour rassurer les élus et les
consommateurs. Lors de son implantation à Vedène, Ikéa a
valorisé cet aspect « écologique » en évoquant
qu'il envisageait de se doter de panneaux
photovoltaïques138.
Le propriétaire d'un pôle commercial ne le
rénove que si cela accroît la rentabilité de son
investissement. Une opération de rénovation n'est
lancée par un propriétaire que si son taux de vacance est
important. Le centre commercial régional Rosny 2 avait, par exemple, du
mal à attirer les distributeurs. L'enseigne Zara avait refusé de
s'y installer à cause de la vétusté des
bâtiments139. Le centre a donc été
entièrement rénové pour permettre d'attirer à
nouveau les enseignes et ainsi permettre une rentabilité pour
l'investisseur.
Les propriétaires ont toutefois du mal à lancer
des opérations de renouvellement car un ensemble commercial n'est jamais
complètement vacant. Il y a toujours des enseignes qui ont un bail et un
fond de commerce. Comme nous l'avons vu dans la partie 1.2.3, ces baux ne sont
pas résiliables par le propriétaire avant un période
minimale de 9 ans. L'enseigne peut le résilier mais si le bâtiment
est détruit, elle perd son fond de commerce, qui peut valoir plusieurs
dizaines voire plusieurs centaines de milliers d'euros140.
138 Ikéa (2009), Dossier de presse concernant
l'ouverture d'Ikéa Vedène, p.12
139 MOATI P. et POUQUET L. (1998), Stratégies de
localisation de la grande distribution et impact sur la mobilité des
consommateurs, CREDOC, p.86
140 Le fond de commerce nait avec l'ouverture d'un magasin. Il
est composé de biens corporels comme la marchandise ou
l'équipement du point de vente, mais également de biens
incorporels comme la clientèle et le droit au bail. Ce sont ces
éléments qui ne sont pas déplaçables.
97
4.3.3 Des fonctions qui s'apparentent de plus en plus
à celles des centres-villes
Historiquement, les zones commerciales se distinguaient
clairement des centres-villes. Elles représentaient le lieu des achats
rapides et pratiques. Aujourd'hui, cette frontière est moins franche car
les achats-plaisirs se développent en
périphérie. Outre les boutiques d'équipement de
la personne, on assiste à l'arrivée de la culture et des loisirs
avec les implantations de restaurants et des multiplexes. Ce concept de «
Fun Shopping » fonctionne depuis longtemps aux Etats-Unis141.
Ils se développent en France grâce à la mise en valeur des
modes doux et de l'architecture dans le commerce de
périphérie.
Au carrefour des grands axes routiers et au coeur des
nouvelles populations périurbaines, les espaces
périphériques étaient déjà devenus des
centralités économiques et commerciales. Ils émergent
aujourd'hui comme des centralités dans les activités de
détente et de promenade. Le centre-ville perd le monopole qu'il a
longtemps détenu en possédant les activités de culture. Il
y a donc un risque d'aggraver encore un peu plus la dévitalisation des
coeurs des communes en promouvant la qualité urbaine au sein des zones
commerciales.
L'intérêt des habitants pour les zones
commerciales vient également du fait qu'elles proposent un certain
nombre de services. David Mangin expliquait que Mac Donald's répondait
à des besoins que les villes n'assument pas, comme les salles
d'études, les cafés du soir, ...142 En effet, les
centres commerciaux offrent une multitude de services qui se raréfient
en centre-ville. Ils disposent de toilettes publiques propres et gratuites. La
sécurité est assurée aussi bien à
l'intérieur des magasins que sur les parkings. Les bâtiments sont
de plain-pied et les allées sont larges pour permettre la circulation
des caddies et l'ensemble du centre commercial est donc accessible aux
personnes à mobilité réduite143. Le
centre-ville a du mal à proposer les mêmes atouts car ils
souffrent d'une configuration historique peu malléable.
Nous avons vu que certains services publics, comme les
guichets SNCF ou les bureaux de Poste, se développent au sein du centre
commercial Avignon Nord. Certains parcs commerciaux vont plus loin encore.
Carré Sénart, ouvert en 2007, mise particulièrement sur
les services et les loisirs. Il doit devenir le coeur de la ville nouvelle de
Sénart. Il dispose d'un cabinet médical et propose une multitude
d'activités destinées aux enfants : poney-club, spectacles pour
enfants et même un service de prêt de poussettes pour les
mères de familles
141 DESSE R-P. (Octobre - Décembre 2002), Les
centres commerciaux français, futurs pôles de loisirs ? in
Flux n°50, p.8
142 Op. cit., MANGIN (2004), p.126
143 CETE de l'Ouest (2004), Ville accessible à tous
et Activités commerciales, actes de la journée d'échanges
du 21 mai 2003, Certu, p.23
98
qui viennent faire leurs achats144. Ce parc
commercial est particulier car il fait partie d'une Opération
d'Intérêt National et il est réalisé par un
Etablissement Public d'Aménagement. Il y a donc une étroite
coopération entre les opérateurs privés et les pouvoirs
publics.
Mais d'autres parcs commerciaux ont investi dans les services
et ont créé des espaces « pseudo-publics ». A Tours, le
centre commercial L'Heure Tranquille est construit autour d'une grande fontaine
à ciel ouvert (cf. figure 37). Il y a ici une réelle intention de
reproduire un élément central de la ville pour capter les
fonctions récréatives qui lui étaient historiquement
réservées.

Figure 37 : Un exemple d'espace « pseudo-public »
au sein du centre commercial l'Heure Tranquille
(Source :
www.lheuretranquille.com)
Un parc commercial ne pourra toutefois jamais recréer
la « vie » d'un centre-ville145. Il est soumis à
des contraintes comme les horaires d'ouverture et il ne bénéficie
pas d'une mixité fonctionnelle qui lui apporterait une vitalité
permanente. Le centre-ville possède également une valeur
culturelle qui ne peut être reproduite. La ville d'Avignon dispose d'un
patrimoine sur lequel elle peut miser pour conserver la vitalité de ses
commerces liés aux loisirs et à la restauration.
Toutefois les pouvoir publics doivent s'assurer de
l'équilibre entre le commerce de périphérie et celui de
centre-ville. Pour cela ils doivent veiller à ce que le
développement commercial s'inscrive dans leur vision du territoire.
144
www.carre-senart.com
145 Op. cit., MOATI P. et POUQUET L. (1998), p.87
99
4.3.4 L'insertion des initiatives privées dans
le projet urbain
Les projets privés ont tout intérêt
à ne pas être en contradiction avec la volonté politique.
En effet, même si les CDAC venaient à disparaître, les
promoteurs auraient toujours besoin de l'accord des élus lors du permis
de construire et pour la viabilisation de leurs terrains. Au-delà des
éventuelles oppositions, les promoteurs ont besoin de connaître le
projet urbain. En effet, nous avons vu que les politiques de
déplacements modifiaient la répartition du commerce et que le
développement de l'habitat sur un territoire pouvait transformer le
marché en présence.
Pour ces raisons, le commerce a besoin de règles
claires et stables146. Si le projet est précisément
défini, les promoteurs pourront prévoir les décisions des
CDAC et adapter leur programme en fonction des objectifs des
collectivités. Les acteurs du commerce souffrent souvent de la lenteur
de la planification. Un PLU s'élabore en quatre ans minimum et un SCoT
en six ans147. Ce temps n'est pas en adéquation avec les
décisions rapides des foncières, comme Immochan, qui jonglent
entre des charges importantes et la recherche de profits.
Dans un même temps, les collectivités sont
dépassées par la rapidité des évolutions
commerciales. On voit sur Avignon Nord qu'il est difficile d'avoir un projet
d'ensemble qui regroupe tous les acteurs publics. L'agence d'urbanisme
mène actuellement une étude pour établir une
stratégie d'évolution de la zone commerciale mais elle se heurte
à plusieurs projets divergents. La commune de Sorgues souhaite continuer
le développement du commerce alors que celle du Pontet a des projets de
mixité fonctionnelle. Le futur quartier du Pontet devrait être
intégré au tissu urbain par des cheminements doux mais le Conseil
Général souhaite construire une nouvelle voie express entre les
habitations et la zone commerciale... Les acteurs privés regrettent
l'indécision des pouvoirs publics, qui ne parviennent pas à
mettre leurs projets en cohérence148.
146 BONNEVILLE M. et BOURDIN V. (Décembre 1997),
Planification urbaine et développement commercial, de la
réglementation à la concertation, in Les annales de la
recherche urbaine n° 78, p.18
147 SCHMIT P. (15 février 2010), Commerce : la faim
des gros, la fin des petits, in La Lettre du cadre territorial n°395,
p.15
148 Entretien avec Sara SHERIFF (2011), responsable
montage d'opérations de la société Immochan région
Midi.
100
Pourtant, les promoteurs de zones commerciales se sont
dotés de moyens techniques pour s'intégrer dans les projets
urbains. Depuis 2008, Immochan a développé une filiale, Citania,
qui est en charge des opérations de renouvellement urbain. Contrairement
à Immochan, c'est une structure qui est en mesure de réaliser des
opérations mixtes comprenant des logements et des bureaux. A ce jour, la
société n'a pas encore réalisé d'opération.
Mais, dans le cadre d'un projet urbain porté par l'ensemble des
partenaires publics, elle pourrait être amenée à
restructurer le pôle commercial Avignon Nord.
Le projet urbain pourra toutefois se heurter à des
problèmes de coût, en ce qui concerne le renouvellement urbain. En
effet, nous avons vu qu'une restructuration coûte cher, notamment
à cause de la perte des fonds de commerce. Le renouvellement urbain est
donc difficilement envisageable par les propriétaires si les
bâtiments ne sont pas vacants.
Pour mettre en relation le projet des pouvoirs publics et les
intérêts économiques des acteurs privés, la
concertation semble être indispensable. Les élus locaux peuvent
par exemple accepter un accroissement de la surface de vente en échange
d'une restructuration. Les négociations ont toujours existé.
Auparavant, elles abordaient surtout les thèmes de l'emploi, des taxes
et des contributions. Aujourd'hui, les réflexions entre les
investisseurs et la collectivité traitent également de
l'étalement urbain, de l'insertion dans les réseaux de
transports, des polarités économiques et résidentielles,
...149
Le rapport ministériel Rochefort estime que le commerce
ne peut pas être traité par une planification rigide, comme on
pourrait le faire avec la voirie. Il nécessite beaucoup plus de
compromis pour respecter à la fois les règles d'urbanisme et la
liberté d'établissement. Il faut selon lui : « interdire
parfois, inciter souvent, accompagner et favoriser toujours
»150.
149 Interview de Bertrand Julien-Laferrière, membre du
directoire d'Unibail-Rodamco dans : SCHMIT P. coordonateur (juin 2009),
Dossier Urbanisme commercial, in Intercommunalités n°135,
p.12
150 ROCHEFORT R. (2008), Un commerce pour la ville,
Rapport au Ministre du Logement et de la Ville, p.19. Robert Rochefort est le
directeur du CREDOC.
101
Conclusion de la quatrième partie :
La zone commerciale peut-elle s'inscrire dans un
projet de ville durable ?
Les activités commerciales sont
dépendantes de leurs conditions d'accessibilité. De ce fait, les
politiques de déplacements peuvent modifier la
compétitivité des différents pôles. Elles doivent
donc s'inscrire dans un projet global qui fédère l'ensemble des
partenaires publics. Les acteurs privés ont les capacités de
s'adapter à un tel projet, malgré certaines
réalités économiques. Mais pour cela, il doit y avoir un
certain consensus entres les différentes structures
publiques.
102
CONCLUSION GENERALE
L'étude de la stratégie des acteurs
privés nous a montré qu'ils ont su créer de nouvelles
formes de commerce pour s'adapter aux nouveaux modes de vie des consommateurs.
Le fonctionnement du commerce de périphérie s'est ainsi
appuyé sur l'essor de la voiture individuelle. Il a ainsi largement
bénéficié du développement du réseau routier
engagé par l'Etat.
En effet, la mise en place des rocades et autres
contournements a permis d'accroître la zone de chalandise du pôle
commercial Avignon Nord. Les espaces périurbains se sont
également développés, augmentant ainsi son potentiel de
clientèle. Les flux routiers ont progressivement augmenté et les
enseignes en ont profité pour se faire connaître, en utilisant la
visibilité depuis les voies rapides. Il y a ainsi eu une montée
en puissance de l'affichage publicitaire toujours plus grand et toujours plus
voyant. Ce phénomène a entrainé la banalisation et la
dégradation des entrées de ville.
Au fur et à mesure que les flux augmentaient et que les
temps de parcours en voiture diminuaient, le potentiel commercial s'est
trouvé valorisé. Il y a donc eu un développement de la
surface de vente de la zone commerciale. Son poids économique s'est
renforcé car le nombre d'emplois et le montant des divers impôts
ont augmenté.
Les collectivités locales sont ainsi devenues
dépendantes du commerce de périphérie. Le
législateur a tenté de limiter cet essor de la grande
distribution qui affaiblissait les centres-villes, mais en vain. Le commerce
traditionnel s'en est trouvé très affecté aussi bien dans
les communes rurales que dans les villes centres. Le pouvoir donné aux
élus locaux de contrôler les implantations grâce à un
système d'autorisations préalables a échoué. En
effet, les maires ont été séduits par l'essor
économique et par les ressources fiscales liées au commerce
périphérique.
Le commerce a longtemps été régi
indépendamment des autres politiques urbaines et les réflexions
intercommunales ont été mineures. Les élus
n'étaient donc pas guidés par un projet urbain d'ensemble et la
zone commerciale Avignon Nord s'est développée sans réel
contrôle.
103
La situation est aujourd'hui compliquée car le site est
devenu un espace dominé par l'automobile. Les habitants se retrouvent
dans une situation de dépendance automobile, même pour
réaliser leurs achats les plus basiques. Les différentes
fonctions urbaines sont séparées par des voies routières
à grande vitesse qui rendent difficiles la mise en place de cheminements
doux. Les lotissements commerciaux de périphérie ne sont pas
adaptés à la desserte en transports en commun et en modes doux
car ils manquent de densité et que les produits vendus sont souvent
encombrants. La mobilité durable doit donc s'accompagner d'un changement
de la forme de commerce.
Il est difficile pour les collectivités locales
d'impulser un tel bouleversement des pratiques dans un système
économique qui fonctionne et sur des terrains qui sont
entièrement privatisés. Aujourd'hui, il semble que la
volonté générale ne soit plus de promouvoir des politiques
drastiques mais plutôt de développer la concertation. Les acteurs
publics doivent définir un projet urbain clair et stable et le
marché doit avoir une certaine liberté du moment qu'il respecte
les règles fixées par la collectivité.
A long terme, les politiques de transports pourraient
entraîner un repositionnement du commerce, si elles arrivent à
modifier les flux. Pour cela, il faut à la fois favoriser l'utilisation
des transports en commun et restreindre l'usage de la voiture individuelle. De
telles mesures ne peuvent être prises que s'il y a une volonté
simultanée de limiter le commerce de périphérie, la
périurbanisation et le trafic automobile. Plus que jamais, le commerce
doit donc être intégré dans un projet urbain global, qui
fédère l'ensemble des thématiques et des acteurs.
104
Table des figures
Figure 1 : Une agglomération située sur des flux
économiques européens. 7
Figure 2 : L'Aire avignonnaise : un développement
tourné vers l'Est 7
Figure 3 : Une zone commerciale qui s'affranchit des limites
administratives 8
Figure 4 : Un SCoT qui permet de rassembler les
intercommunalités concernées 9
Figure 5 : Avignon Nord, premier pôle commercial de
l'agglomération 10
Figure 6 : Une zone commerciale multipolaire 12
Figure 7 : Immochan, un propriétaire foncier
incontournable 17
Figure 8 : Un territoire cloisonné par les
infrastructures routières 19
Figure 9 : Une offre de stationnement démesurée
22
Figure 10 : Occupation du Sol sur la zone commerciale 23
Figure 11 : Un lycéen franchissant l'autoroute par le
pont de la D942 25
Figure 12 : Des espaces patrimoniaux méconnus 27
Figure 13 : Une entrée de ville de ville
banalisée 29
Figure 14 : Contraste entre les enseignes et la perspective
sur le Mont Ventoux 29
Figure 15 : Le magasin Ikéa, une boîte
commerciale qui s'intègre difficilement dans le paysage 29
Figure 16 : Courbes isochrones à 60 minutes autour du
pôle Avignon Nord 33
Figure 17 et 17bis : Un accroissement démographique
plus rapide dans les territoires périurbains 37
Figure 18 : Les échangeurs, éléments
clés de l'accessibilité 40
Figure 19 : L'aménagement de l'accès au
pôle Ikéa 41
Figure 20 : Le coût prohibitif des parkings
aériens 46
Figure 21 : Le centre commercial Auchan, élément
central et fondateur de la zone commerciale 49
Figure 22 : L'implantation des surfaces
spécialisées autour de l'hypermarché, seconde phase du
développement de la zone commerciale 51
Figure 23 : Un développement plus récent des
services et des loisirs 53
Figure 24 : Un produit de la taxe professionnelle
prépondérant par rapport à celui de la taxe
d'habitation. 57
Figure 25 : Une partie du territoire dédiée
à l'activité 61
Figure 26 : Des ménages qui s'équipent
rapidement en automobile 63
Figure 27 : Le développement simultané des
hypermarchés et des autoroutes 65
Figure 28 : L'évolution rapide du réseau routier
sur le bassin de vie d'Avignon 67
Figure 29 : Une démographie influencée par le
développement routier 68
Figure 30 : Meadowhall, un « Retail Park »
composé de cellules mitoyennes 72
Figure 31 : Une légère diminution du nombre
d'implantations de grandes surfaces au début des
années 1990 73
Figure 32 : Odysseum, un site compact permettant la desserte
par le tramway. 85
Figure 33 : Des infrastructures routières lourdes qui
compliquent le développement des modes doux
87
Figure 34 : Des sites privilégiant la
convivialité 93
Figure 35 : Un développement rapide des parcs
commerciaux 94
Figure 36 : Le futur complexe commercial Atoll, construit
autour d'un gigantesque parking 95
Figure 37 : Un exemple d'espace « pseudo-public » au
sein du centre commercial l'Heure
Tranquille 98
105
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· Connaissance locale de l'appareil productif (2006),
· Fiche thématique : le commerce de détail
(2008),
· Recensement de la population (2008),
· Répertoire des entreprises et des
établissements (2009),
· Revenus fiscaux localisés des ménages
(2008)
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centre commercial l'Heure Tranquille.
110
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l'UE le 27.12.2006, à propos de la liberté d'entreprendre,
3p.
www.paca.culture.gouv.fr,
Direction régionale des affaires culturelles de la région
Provence-Alpes-Côte d'Azur.
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giratoire (dossier du 31 octobre 2010).
www.tcra.fr, Transports en Commun de la
Région d'
Avignon.
www.valorpark.com, label Valorpark.
www.vaucluse.fr, Conseil
Général du Vaucluse.
111
Entretiens
CABROL Y. (13 juin 2011), Chargé de mission à
l'agence d'urbanisme de Toulouse ayant réalisé le DAC de la
grande agglomération de toulousaine (entretien
téléphonique).
CHAMPEY L. (27 août 2010), directeur du pôle
Très Petites Entreprises - Commerce à la CCI de
Marseille-Provence et ancien directeur général de
Décathlon Sud-Méditerranée.
GUIROY J. (20 juillet et 15 septembre 2011), chargée
d'études à la Communauté d'Agglomération du Grand
Avignon.
LACROZE M. (3 août 2011), directeur de l'atelier
d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme
de la commune du Pontet depuis les années 1970.
SEGURA L. (25 mars 2011), chef de projet Urbanisme
Commercial à l'agence d'urbanisme de la région nantaise.
SHERIFF S. (14 juin et 15 septembre 2011), responsable
montage d'opérations de la société Immochan région
Midi.
112
Table des matières
Remerciements 1
Sommaire 2
Liste des abréviations 3
Introduction 4
1 Présentation de la zone commerciale et
des problèmes urbains qui lui sont
associés 6
1.1 La zone commerciale et son contexte urbain
6
1.1.1 Une zone commerciale régionale qui
s'affranchit des limites administratives 6
1.1.2 Un commerce de centre-ville
déstabilisé 10
1.1.3 Une zone commerciale décomposée en
plusieurs sites 12
1.2 Un poids économique incontestable
13
1.2.1 Un pôle d'emploi pour l'agglomération
13
1.2.2 Un pôle commercial d'influence
régionale 14
1.2.3 La présence de grands groupes nationaux et
multinationaux 15
1.3 Un espace dominé par l'automobile
18
1.3.1 Des infrastructures lourdes qui séparent les
différentes fonctions urbaines 18
1.3.2 Des milliers de places de stationnement en surface
21
1.3.3 Des transports collectifs et des modes doux
quasiment inutilisés 24
1.4 Des paysages transformés par ces
nouveaux usages 26
1.4.1 Une terre historiquement agricole qui dispose d'un
patrimoine important 26
1.4.2 Une entrée de ville dégradée
28
2 Les stratégies d'implantation et
d'évolution du commerce de périphérie
....
31
2.1 Les critères nécessaires
à l'implantation commerciale 31
2.1.1 Evaluer le marché potentiel 32
2.1.2 La visibilité et l'accessibilité
38
2.1.3 L'environnement commercial et non commercial
42
2.1.4 L'offre foncière 44
2.2 La diversification des activités sur
la zone commerciale 47
2.2.1 Au commencement : l'hypermarché et sa
galerie marchande 47
2.2.2 Le développement des surfaces
spécialisées et des « discounters » 50
2.2.3 L'essor des services et des loisirs 52
113
3
3.1
|
Le rôle des pouvoirs publics dans le
développement de cette zone
commerciale de périphérie
55
Des élus locaux séduits par les
ressources fiscales et le développement de l'emploi
|
|
sur leur commune
|
55
|
|
3.1.1
|
Le développement de l'emploi
|
55
|
|
3.1.2
|
Des recettes fiscales importantes
|
56
|
|
3.1.3
|
La mise en concurrence des élus locaux
|
59
|
|
3.1.4
|
Un POS souple pour permettre le développement
économique
|
60
|
3.2
|
Le rôle des acteurs du développement
routier et autoroutier
|
62
|
|
3.2.1
|
Des théories du Corbusier au maillage routier
|
62
|
|
3.2.2
|
Le développement du réseau routier vauclusien
comme catalyseur de la zone commerciale
|
66
|
3.3
|
L'échec des lois visant à limiter le
développement commercial de périphérie
|
70
|
|
3.3.1
|
La loi Royer et la mise en place des procédures
d'autorisation
|
70
|
|
3.3.2
|
La loi de modernisation de l'économie et
l'intégration du commerce dans l'urbanisme de droit
|
|
|
commun 75
|
|
4 La zone commerciale Avignon Nord peut-elle
s'inscrire dans un projet de
ville durable ? 79
4.1 Construire un projet urbain pour freiner le
développement commercial de
périphérie 79
4.1.1 Intégrer le commerce dans le projet urbain
80
4.1.2 Réfléchir à la bonne
échelle 81
4.1.3 Développer de la mixité fonctionnelle au
sein de la zone commerciale 83
4.2 La mobilité durable et son impact sur la
compétitivité du pôle 84
4.2.1 La mise en place de transports collectifs performants
de type tramway 84
4.2.2 La difficulté de créer des cheminements
doux 87
4.2.3 Peut-on diminuer les espaces de stationnement ?
89
4.2.4 Contraindre l'usage de la voiture pour modifier
l'influence d'Avignon Nord 91
4.3 Avignon Nord peut-elle muter sur des initiatives
privées ? 92
4.3.1 Des efforts dans la conception des pôles
commerciaux 92
4.3.2 Des zones commerciales qui restent fidèles aux
principes de développement du commerce de
périphérie 94
4.3.3 Des fonctions qui s'apparentent de plus en plus
à celles des centres-villes 97
4.3.4 L'insertion des initiatives privées dans le
projet urbain 99
Conclusion générale
102
Table des figures 104
Bibliographie 105
Sitographie 109
Entretiens 111
Table des matières 112
PRESENTATION DE L'AUTEUR
Expérience professionnelle
·
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Laurent GIRARD
CONNAISSANCES GENERALES
Maîtrise de : Adobe Illustrator,
Mapinfo,
Word, Excel, Powerpoint.
· Langues : Anglais, Espagnol.
CENTRES D'INTERETS
· Muay thaï, Course à pied.
· Sapeur Pompier Volontaire au centre de secours de Luynes
(13).
Octobre 2011 - Juin 2012 : CDD de 8 mois au Syndicat Mixte pour
le SCOT du Bassin de Vie d'Avignon.
Poste de chargé d'études Urbanisme
- Analyse de la compatibilité des documents communaux avec
les orientations du SCoT.
- Présentation des PLU et des modifications devant les
élus du Syndicat Mixte.
- Représentation du Syndicat Mixte aux réunions des
Personnes Publiques Associées.
- Diverses tâches administratives.
Directeur : Alain FARJON
· Mars - Juillet 2011 : stage de 4 mois à l'Agence
d'Urbanisme de l'aire Avignonnaise. - Travail préparatif à
l'élaboration d'un SDeC puis d'un DAC sur le bassin de vie d'Avignon. -
Réflexions sur la mise en place d'un observatoire économique des
effets du tramway. - Mission de conseil sur la création d'un pôle
d'échanges multimodal au Pontet (84).
Maître de stage : Ingrid HAUTEFEUILLE ; directeur :
Jean-Louis PERRIN
· Eté 2010 : stage de 9 semaines à la Chambre
de Commerce et d'Industrie de Marseille Provence au service
Urbanisme Commercial (pôle TPE - Commerces),
prolongé par une semaine d'intérim.
- Etude pour la redynamisation du commerce en centre-ville de
Port de Bouc (13) dans le cadre du FISAC. - Diagnostic du tissu commercial de
la Canebière à Marseille (13).
Maître de stage : Caroline LOUVET ; directeur de
pôle : Lionel CHAMPEY
· Mars - avril 2010 : emploi à mi-temps en bureau
d'études de SIG (logiciel Mapinfo). - Travaux sur les sites
classés du Concors et de la Côte Bleue (13).
Directeur : Jean-Michel MEYER
· Mai - octobre 2009 : animateur dans deux galeries
d'expositions scientifiques de Chambéry.
· Etés 2008 et 2009 : sapeur pompier saisonnier
à Chambéry.
· Juin 2008 : stage d'un mois à la Direction
Départementale de l'Equipement de la Savoie. Maître de stage :
David PUPPATO
· Etés de 2004 à 2007 : divers emplois
saisonniers en manutention.
Diplômes
· 2011: Master Urbanisme et Aménagement parcours
Projet d'urbanisme et action opérationnelle mention B. Institut
d'Urbanisme et d'Aménagement Régional d'Aix en Provence
(13).
- Mémoire : Analyse du développement de la zone
commerciale de périphérie Avignon Nord. (Étude de la
stratégie des acteurs privés et du rôle des pouvoirs
publics dans le développement de ce pôle commercial).
- Atelier pédagogique : Projet urbain autour de la
réouverture de la gare du Pontet (84).
Thèmes: intermodalité, lien urbanisme /
déplacements, renouvellement urbain. Commande du conseil régional
PACA.
http://pas.regionpaca.fr/fileadmin/PAS/IAR/Oral
Final versioncompressee.pdf
· 2010 : Maîtrise Urbanisme et Aménagement
Institut d'Urbanisme et d'Aménagement Régional
d'Aix en Provence (13).
- Diagnostic territorial sur la ZAC St Louis (Marseille
XVème).
- Dossier sur l'action foncière communale.
- Etude de design urbain sur la commune de Cassis (13).
· 2009 : Licence de Géographie
spécialité Aménagement Université de Savoie au
Bourget du Lac (73).
· 2007 : D.E.U.G. Mathématiques Appliquées et
Sciences Sociales Université de Savoie au Bourget du Lac
(73).
· 2005 : Baccalauréat Scientifique Lycée
F. Buisson à Voiron (38).
|