L'impact de la dette extérieure sur la balance des paiements( Télécharger le fichier original )par Barwani KIKUNI Université de Kinshasa RDC - Licence 2011 |
CHAPITRE ICONSIDERATIONS D'ORDRE GENERAL SUR LA DETTE EXTERIEURE ET LA BALANCE DES PAIEMENTSI.1. Aperçu historique de la dette extérieure congolaisEn effet, de 1887 à 1949, la quasi-totalité des emprunts émis par le Congo belge s'est effectuée sur le marché financier belge, ceci pour une simple raison que les belges jouissaient de privilège d'être à la fois créanciers et gestionnaires de fonds de leurs débiteur. Selon la charte coloniale, c'est la métropole qui détient les comptes de la colonie et gère sa dette. Avec le plan décennal colonial belge , le Congo Belge va connaitre la diversification des sources d'emprunts (emprunts à la banque mondiale, emprunts suisses, emprunts Morgan,...) parce que la réalisation du plan exigeait un investissement de plus ou moins vingt milliards de francs belges ou francs congolais , les deux monnaies entrainait la confiance ou la méfiance de préteurs, ce qui nous fait croire que la politique n'est pas exclue des opérations financières surtout lorsque le comportement bancaire et les mouvements de capitaux pendant la colonisation ont eu pour objet inavoué mais direct de placer la colonie dans une situation financière difficile, voire déficitaire. Il faut noter que ce plan décennal a eu un impact considérable sur le volume et la croissance de la dette extérieure du Congo belge, car il a été l'occasion pour ce dernier d'aller chercher des ressources financières en dehors de la zone franco belge. En 1955, sur une dette extérieure directe de plus au moins 24 milliards de francs, 51,3% soit 12.305 millions de francs ont fait l'objet d'une émission publique en Belgique et en francs belges, l'économie congolaise est totalement sous contrôle de la Belgique : les grandes banques belges, société Générale de Belgique en tête. Les colons belges en place au Congo pouvaient opter pour le placement dans une banque congolaise ou dans une banque métropolitaine, et leur choix allait naturellement vers la seconde. Les détenteurs des capitaux préféraient donc avoir des liquidités en francs belges plutôt qu'en francs congolais malgré la parité officielle de ces monnaies et le fait que le Congo de l'époque faisait partie de la zone monétaire métropolitaine. A cette époque, la dette vis-à-vis des Etats-Unis était à 5.632 millions de francs auxquels il faut ajouter deux emprunts relevant du plan Marshall, il s'agissait de « emprunts mutuel Security » dont le plus important de 15,5millions de USD fut contracté en 1951 et de crédit de 20 millions de USD octroyé par la firme Morgan Stanley en 1959. Au 31 décembre 1959, la dette publique de la colonie atteignait 43.720 milliards de francs congolais soit 874,4 millions de USD au taux de 1 USD=50FC. Il faut signaler que tous ces emprunts ont été garantis par l'Etat belge sauf un qu'il importe de signaler l'emprunt Dillon Read de 15 millions de USD émis en 119584(*). Une crise monétaire était savamment entretenue en l'encontre du franc congolais par une méfiance prônée en son égard, mais surtout par une sorte de transfert occulte favorisé par les liens de parenté entre les banques belges et congolaises. A cet effet, nous retenons les propos de Mr NDOKO qui dit : « il est difficile de se rendre compte de l'importance de stock monétaire à la disposition de l'économie de la colonie, car les avoirs placés par les colonies en Belgique disparaissaient du bilan des banques de la colonie et entraient dans le circuit métropolitain alors qu'ils devraient figurer au passif : l'expropriation des fonds se traduisant simplement par l'augmentation de l'Actif sous rubrique « avoir en banque à l'étranger »5(*). Il s'agissait ni moins d'une fuite des capitaux qu'on appellerait aujourd'hui « le blanchiment de l'argent » en provenance du trafic de la colonisation. C'est une colonie d'exploitation car pour la Belgique, l'économie congolaise ne doit pas générer des recettes pour le budget national, ni de profit pour les personnes privées, mais occasionner des charges que les Africains doivent ressentir comme telle. C'est un handicap de taille que le Congo ressentira au moment de l'indépendance car non seulement l'économie dans sa globalité est extravertie, mais aussi et surtout le peuple congolais n'est pas formé, ni associé aux décisions de mise en valeur de son pays à quelque niveau que ce soit. Ceci explique en partie les bouleversements, les émeutes, les révoltes et les sécessions des années soixante. I.1.1. La période après l'indépendanceLorsque le Congo accède à l'indépendance le 30 juin 1960, quasiment toutes les dettes congolaises étaient garanties par l'Etat belge et les deux tiers avaient des emprunteurs belges. La situation de la dette publique à partir de 1960 sera caractérisée par une stagnation relative de l'encours et ce, jusqu'à 1965. Aucun emprunt ne fut contracté au cours de cette période à l'exception d'un emprunt USAID de 29 millions d'USD obtenus en février 1965. Le désordre tant politique qu'économique dans lequel se trouvait le pays n'était pas de nature à favoriser le recours au marché extérieur des capitaux. Le crédit du pays avait été complètement ébranlé. L'arrivée du président MOBUTU au pouvoir, la stabilité politique et la paix retrouvée, les énormes potentialités de la RDC (1er producteur mondial du cobalt et 2ème producteur mondial du cuivre,...) sont autant des facteurs qui intéressent les financiers et attirent les hommes. L'année 1967 ayant été celle de la réforme monétaire, l'activité économique connait une expansion très remarquable pendant l'époque qui suivait la reforme monétaire .Il y a une stabilité monétaire et financière , une reprise des activités dans les secteurs primaire et tertiaire de l'économie et un essor du commerce international, notamment avec la hausse de cours des matières premières des années 1971-1973, ayant permis à la RDC d'encaisser d'énormes recettes d'exploitation et par conséquent d'accroitre ses réserves de change. S'agissant de la dette, nous avons constaté paradoxalement qu'il y a eu, au cours de cette période, un gonflement extraordinaire du volume de l'encours et service de la dette publique extérieure. Etant donné le manque de fonds des particuliers et des entreprises, le Congo n'avait pas émis d'emprunts dans le public. Au début des années soixante-dix, les banques misaient sur les richesses minières du Congo et le président MOBUTU, lui, misait sur les banques, c'est ce facteur principal qui déclenchera le processus de l'endettement massif. Les capitaux provenant de l'USAID (43 milliard d'USD en 1971) que de la banque Mondiale. La dette était à la fois directe notamment financière et commerciale, mais aussi indirecte dans la mesure o ù elle était contractée avec garantie de l'Etat par les entreprises publiques ou semi- publiques : - AIR ZAIRE, - GECAMINES, - ONATRA, - CMZ, etc. Le Congo se devait de trouver des fonds à l'extérieur à des taux souvent élevés. A titre indicatif, en 1971, les prêts financiers étaient accordés à 4,1% et représentaient 45% de l'encours global de la dette extérieure du Congo, les prêts commerciaux avaient une moyenne pondérée de 4,5%, mais variable suivant les conditions de crédit fournisseur et représentaient 14% de l'encours global, et pour la dette indirecte, les taux tournaient autour de 6,7%. Elle représentait 41% de l'encours global. Toutefois, une détérioration de la situation de la dette prend corps lentement mais surement de 1970 à 1974, les dépenses publiques au titre de remboursement des dettes extérieures ne faisaient qu'augmenter, le financement extérieur du déficit budgétaire passa de 2 % à 29% des recettes budgétaires globales. La dette extérieure s'alourdit entre 3 à 4 milliards de USD et la crise éclata en 1975 avec l'effondrement du cours du cuivre qui passa de 118 francs belges par tonne en décembre 1974 à 47 francs belges en 1975, alors que ce produit représentait 75%des recettes d'exportations et 30% du produit National Brut. En même temps, la guerre civile congolaise entrainant la fermeture du chemin de fer Katanga-Benguela dangereusement le délai de livraison du cuivre. La baisse des dépenses publiques congolaises au titre de service de la dette, la banque centrale n'ayant pas pu réunir les devises nécessaires pour assurer ce service. C'est ici que naitra l'idée de négocier le rééchelonnement avec les principaux créanciers regroupés au sein du club de paris. Les arriérés s'accumulent de 10,9 millions d'USD en 2008 ?, ils passent à 22.6 millions d'USD une année plus tard. Du point de vue économique, on connait un renversement de la tendance des cours de matières premières et l'essor économique s'estompe en 1974. Le déclin tient à la fois au fléchissement des cours du cuivre, aux retombées de la crise économique mondiale et à la persistance de déséquilibre interne favorisé par la mauvaise application des masures de la zaïrianisation de 1973 et de la radicalisation de 1974. En effet, la loi du 5 janvier 1973 a conduit à la zaïrianisation des entreprises. C'est l'exclusion de tous les étrangers et notamment des belges. Les congolais n'étant pas formés à la gestion des grandes sociétés, le président MOBUTU annonce la rétrocession qui rétablit, dans leurs droits, certains entrepreneurs étrangers sans diverses conditions. De plus, un comité de stabilisation était crée afin d'atténuer les effets pervers des fluctuations de prix des matières premières. Cependant, le système minier productif s'effondra avec une diminution de 25% de la production du cuivre et de transport, marque de fourniture, des pièces détachées et des techniciens. La régression ainsi amorcée poursuivra son cours jusqu'en 1976 malgré la mise sur pied d'un programme de stabilisation par le gouvernement avec le concours de Fonds Monétaire International. Entre-temps, l'argent des banques était utilisé à la construction d'un aéroport moderne à Lisala, à l'achat des denrées alimentaires subventionnées en partie par le département américain d'agriculture et à l'achat d'armement pour lequel le département américain de la défense se porte garant. En dépit de la mauvaise conjoncture internationale qui persiste depuis 1974 et qui contribue à la baisse des recettes d'exportation du Congo, celui-ci continue à s'endetter. L'illustration la plus frappante est le financement du projet hydroélectrique INGA-KATANGA et surtout d'une ligne de haute tension, la plus longue du monde, soit 1800 Km à travers les obstacles naturels impressionnants. Les études et les devis établis en oeuvre en 1973 donnaient un cout de 450millions d'USD avec une mise en oeuvre en 1976 et un financement extérieur de diverses banques. La ligne à haute tensions n'est terminée qu'en 1981 avec un dépassement de cout de 500millions d'USD toujours financé par les banques étrangères. Au cours de l'année 1978, le Congo enregistra un taux de croissance négatif. A la fin de l'année 1986, la dette globale du Congo atteindra 5,8 milliard d'USD et la Banque Mondiale a estimé à environ 1,7 milliard d'USD l'aide nécessaire pour les années 1987 et 1988 fin d'accroitre le Produit Intérieur Brut de 3% par an et de rétablir les comptes extérieurs de l'Etat. Ces sommes ont été octroyées. De 1977 à 1977 à 1987, la RDC avait consacré au payement des intérêts soit en moyenne 236millions d'USD par an. Par contre, les rentrées en capitaux ne sont élevées qu'à 230 millions de USD en moyenne entre 1980 et 1987. L'effort déployé par le Congo pour honorer ses engagements extérieurs se caractérise par le fait que les paiements effectués dans le cadre des accords de rééchelonnement représentent entre 10 à 19 % de plus de ses recettes d'exportation. L'endettement extérieur à moyen et long terme de la RDC est détenu à plus ou moins 70% par les créanciers du Club de paris. Dans ce cadre toujours, la RDC a recouru dix fois au rééchelonnement dont le dernier était fait le 13 septembre 2002. Par le jeu de la capitalisation des intérêts, les rééchelonnements ont alourdi de beaucoup le fardeau de la dette de la RDC. En outre, la suspension de la coopération bilatérale avec les principaux bailleurs de fonds, l'instabilité politique, l'absence d'un programme de stabilisation et /ou de relance économique ont conduit à l'incapacité de remboursement de la RDC et la faiblesse de la capacité de remboursement a conduit l'absence de paiements et donc à l'accumulation d'arrières importants. * 4 KAWATA, T.B., Formation du capital d'origine belge- dette publique et stratégie du développement du zaïre. 1978. P.91 * 5 NDOKO MULOPO-NKU., Le développement économique du Zaïre : rôle du crédit « perspectives et stratégies », thèse de doctorat des sciences économiques, Neuchâtel, Avril 1985, p.110. |
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