Justice politique et prévention des conflits dans les sociétés pluriethniques: cas de la politique de l'équilibre régional au Cameroun.( Télécharger le fichier original )par Alain Patrick YODOU SIBEUDEU Université catholique d'Afrique centrale - Master II en sciences sociales, option: gouvernance et actions publiques 2011 |
VI. PROBLÉMATIQUELe mouvement de l'histoire politique contemporaine du monde permet de percevoir les enjeux fondamentaux de la problématique des sociétés pluriethniques. L'universalisme libéral qui a été longtemps perçu comme l'essence même du progrès de la civilisation est en effet contredit par un second phénomène d'une ampleur comparable : c'est le retour en force des "valeurs" identitaires, perçues comme un recours contre le désespoir engendré par l'état des rapports sociaux. C'est ce qui motive cette recherche qui consiste à comprendre comment prévenir les affrontements interethniques au sein des sociétés pluriethniques. Et ce, en analysant les mesures institutionnelles érigées à cet effet (La PER) au sein du Cameroun qui représente un cas typique des sociétés pluriethniques. Au Cameroun, ainsi que partout ailleurs sur le continent africain, la problématique de la répartition des ressources sociales est d'une importance capitale. Ce pays d'Afrique centrale, est non seulement traversé par des clivages d'ordres divers, mais fait également face à un manque criard des ressources auxquelles aspirent ses citoyens. Dans ce contexte où les circonstances de la justice pour reprendre Hume, c'est-à-dire la rareté (circonstance objective) et la pluralité (circonstance subjective)15(*) ne sont plus à démontrer, la question de la justice se pose désormais en terme de redistribution des ressources sociales entre les différentes communautés ethniques qui peuplent cet État. En outre, la diversité ethnique de la société camerounaise impose des difficultés que sont notamment la répartition des ressources sociales dans un contexte politique marquée par la prépondérance des allégeances ethnico-régionales, et celle de la garantie de la paix sociale lors de la confrontation des idées nécessaire à la redistribution des biens et charges sociaux à quantité restreinte16(*) qui prend très souvent une dimension identitaire et se transforme en des différents interethniques. D'où l'exigence d'une investigation adéquate pour parvenir à notre finalité qui est celle de comprendre la capacité de la PER à prévenir les guerres interethniques au sein de la société camerounaise. La préoccupation dès lors est celle de comprendre si la stratégie élaborée par l'autorité politique camerounaise en vue de permettre l'accès aux ressources sociales à l'ensemble des communautés ethniques peut contribuer à éviter une implosion sociale ? Autrement dit, les mesures politico-juridiques érigées par le système politique camerounais afin de réaliser la juste répartition les ressources sociales entre les différentes communautés ethniques peut-elle concourir à maintenir la paix sociale au Cameroun ? Mieux encore, la politique de l'« équilibre régional » est-elle une justice politique à même d'éviter que les velléités revendicatives qui émanent des groupes ethniques aboutissent à un conflit interethnique au Cameroun ? * 15 (Cf.) Walzer, Traité sur la tolérance, 2, 2, Paris, Gallimard, 1998, p. 87. * 16 Selon Mbonda, Même quand, grâce à la science et à la technique, il y a une certaine démultiplication des biens consommables, il restera toujours des formes de biens dont la quantité ne peut qu'être restreinte. C'est par exemple le domaine du pouvoir où certaines positions sont condamnées à être rares (un seul fauteuil présidentiel, quelques postes pour les ministres et autres hautes personnalités de l'État, un nombre limité de sièges à l'assemblée nationale et dans les parlements, quelques places seulement pour l'accès à la fonction publique, etc.). |
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