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La question de la décroissance chez les verts français

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par Damien ZAVRSNIK
Université Aix- Marseille  - Diplôme d'études politiques 2012
  

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... objectivé en clivage marché/nature

Pour mieux rendre compte de cette contradiction sociale, Daniel-Louis Seiler réactualise le vieux clivage rural/urbain en un clivage marché/nature. Le clivage garde son ancrage historique et son caractère structural mais il est mis à jour pour tenir compte de l'évolution des systèmes de partis notamment avec l'apparition des écologistes. Deux types de partis émergent du versant « nature » : les partis agrariens en réaction à l'exploitation marchande de la nature dans les économies où le marché est peu développé ; les partis Verts promouvant un développement humain respectueux de l'environnement dans les pays plus avancés économiquement. Le clivage marché/nature est en effet fortement lié au contexte culturel et économique du pays dans lequel il s'inscrit. Agrariens et écologistes se situent donc sur le même versant du clivage rural/urbain réactivé sous la forme marché/nature. Toutefois ils s'inscrivent dans deux périodes historiques différentes et leurs intérêts ne sont pas les mêmes (les agrariens défendent surtout des intérêts matériels quand ceux des Verts sont postmatérialistes).

Pour tenir compte de ces différences, D-L. Seiler établit une typologie de sous clivages192(*). Les partis agrariens sont renvoyés dans un sous clivage industrie/monde rural tandis que les écologistes sont opposés aux productivistes. Les écologistes seraient alors une déclinaison du versant « Nature » du clivage marché/nature, spécifiquement dans les sociétés occidentales développées. Ils s'opposeraient en cela aux partisans du libéralisme débridé qui ne prêteraient pas attention aux impacts environnementaux de leurs propositions. Cette catégorie de partis productivistes serait notamment incarnée en Suisse par le Parti des Libertés (ancien Parti des automobilistes).

Le clivage actualisé marché/nature et son sous clivage écologistes/productivistes a l'avantage de donner un cadre d'analyse des partis Verts fidèle au paradigme de Rokkan. Les partis écologistes s'inscrivent dans le droit fil de la réaction à l'effondrement du mode de production agricole au profit de l'économie de marché. Ce conflit social s'exprime aujourd'hui encore par la dénonciation de l'industrie agro-alimentaire et plus largement du libéralisme qui met à mal les ressources physiques de la planète.

La décroissance, un réalignement des partis écologistes ?

La question est ici de savoir si les idées de la décroissance telles que décrites au chapitre premier engendrent un changement dans le positionnement politique des écologistes. Pour rester dans le cadre de la théorie des clivages, la décroissance marque-t-elle une réorientation du parti écologiste vers un autre clivage ? Les partis n'étant pas voués éternellement à leur clivage originel, ils peuvent se réaligner sur un autre clivage lorsqu'il y a mutation de leur base sociale193(*). Cette rupture de clivage a été remarquée en Allemagne par exemple où la CDU s'est transformée en parti patrimonial (libéral) alors qu'elle avait toujours représenté la démocratie chrétienne (parti clérical).

Sur la base des éléments de définition donnés plus haut, force est de constater que la décroissance en tant qu'écologie radicale renforce la position des écologistes sur le versant « Nature ». La pensée de la décroissance est nimbée d'un antilibéralisme qui exacerbe l'opposition des écologistes aux tenants du versant « marché ». Nous verrons plus tard selon quelles modalités le parti écologiste français intègre la critique décroissante dans son référenciel identitaire. Mais notons déjà ici que la décroissance confirme l'existence d'un clivage marché/nature. Elle se traduit par une certaine réactivation identitaire sous la forme d'un retour aux racines du clivage originel donnant lieu à l'écologie politique. On retrouve avec la décroissance une remise en cause profonde du « libéralisme comme philosophie de l'illimité »194(*). Le marché est stigmatisé comme prédateur des équilibres naturels et responsable d'une fuite en avant productiviste mortifère pour l'humanité. L'économie de marché développée à partir de la révolution industrielle est vilipendée comme le substrat économique, philosophique et culturel de la société de croissance. Il est en rupture avec la sobriété du mode de vie décroissant qui prône d'ailleurs un retour à la terre (on retrouve la filiation avec l'ancien versant « rural »). Nous envisageons ici la décroissance comme mouvement de pensée influençant le parti écologiste français. En tant que parti, la décroissance serait l'expression extrémiste de la contradiction sociale marché/nature se situant aux cotés des Verts sur le versant « Nature » du clivage. En fonction de ces indications il est possible d'avancer que la décroissance entrainerait plus un recentrage du parti Vert sur le conflit social originel dont il est l'expression qu'un réalignement sur un autre clivage.

Toutefois la représentation des partis Verts sur le clivage rural/urbain, même réactualisé en marché/nature, n'est pas exempt de tout reproche. Certes elle a l'avantage d'expliquer l'émergence des Verts dans une approche de long terme mais ne prend pas entièrement en compte la logique du projet écologiste telle que définie dans la première partie. Nous avons vu que le parti écologiste était structuré depuis l'origine par un invariant antiproductiviste que l'on retrouve poussé à l'extrême dans la décroissance. L'analyse des Verts par un clivage productivistes/antiproductivistes mérite alors d'être examinée.

* 192 SEILER, Daniel-Louis, Les Partis Politiques, op.cit., p. 142-148

* 193 Ibid, p.81

* 194 MICHEA, Jean-Claude, « Le libéralisme comme philosophie de l'illimité », in La Décroissance, n°85, décembre 2011, p. 3

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