5- CADRE CONCEPTUEL ET APPROCHE ADOPTEE
Ozer (2001) présente de manière succincte les
travaux de Dubois (2000). En fait, il s'agit pour cet auteur de faire le point
sur le phénomène des lithométéores comme indicateur
climatique synthétique de la désertification. Reprenant les
définitions du Recueil des Codes Météorologiques, souligne
que la brume sèche dont la définition reste imprécise
diffère de la brume de poussière par l'absence de
dépôt de poussière au sol. En fait la brume de
poussière se définit comme la suspension de poussières
dans l'air d'une manière généralisée, non
soulevées par le vent au point d'observation ou à ses alentours
au moment de l'observation avec présence de dépôt de
poussière au sol. La brume sèche est en réalité un
phénomène atmosphérique dont la composition est complexe.
Elle désigne selon l'angle d'approche, un lithométéore. Ce
dernier est compris comme étant des particules terrigènes issues
de l'activité érosive du vent et qui se trouve en suspension dans
l'air. En tant que tel, le lithométéore intéresse beaucoup
plus la météorologie. Au quatrième chapitre, il
étudie les variations spatio-temporelles des lithométéores
; en déduit une typologie des lithométéores et indique
leurs conséquences sur l'homme et ses activités. Dans ce dernier
cas il affirme que les activités humaines, en accélérant
la dégradation des sols, provoquent ou favorisent le
développement de certaines maladies dont la méningite.
Entre le 8e et le 16e degré de
latitude Nord, de l'Atlantique à la Corne de l'Afrique, sévit la
méningite cérébro-spinale, avec un centre
géographique qui est situé au Tchad, pays voisin de
l'Extrême-Nord Cameroun. Cette ceinture décrite pour la
première fois par Lapeyssonnie en 1962 (Aubry 2004 : 2) et qui au
départ, regroupait les régions sémi-désertiques de
l'Afrique subsaharienne, est en nette extension aujourd'hui. D'une
manière générale, les méningites correspondent
à une infection des enveloppes entourant le cerveau, les
méninges, causée par plusieurs types de virus, de champignons et
de bactéries (Institut Pasteur 2005 :1). Parmi ces vecteurs, les
méningocoques (Neisseria meningitidis) décrits pour la
première fois par Weichselbaum en 1887, constituent l'une des causes
majeures de méningites aiguës (Institut Pasteur 2005 : 1). La
méningite cérébro-spinale désigne en
médecine, une inflammation aiguë des méninges ou des
membranes qui couvrent l'encéphale, le bulbe rachidien et la moelle
épinière. Elle est causée par le Neisseria
meningitidis, une bactérie diplocoque à Gram négatif,
de réservoir strictement humain. C'est aussi une maladie infectieuse qui
évolue sous forme endémo-épidémique et
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dont la délimitation géographique en Afrique
correspond à la ceinture de Lapeyssonnie qui va de l'Ethiopie à
la Gambie; ce qui représente en terme d'effectifs de population 260
millions d'habitants (OMS). Par leur contagiosité élevée,
les méningocoques peuvent être source d'épidémies de
méningite cérébro-spinale dans le monde, notamment dans
les régions sémi-désertiques d'Afrique subsaharienne.
Des tests de laboratoire faits par Singleton et Sainsbury
(1988), ont montré d'une manière générale les
conditions idéales du développement du méningocoque
à savoir :
- une atmosphère humide ou enrichie en eau ;
- un enrichissement indispensable de cette atmosphère
de 5 à 10% de CO2 ;
- une température élevée de l'ordre de
36° C.
Cet optimum correspond aux conditions idéales de
développement du méningocoque qui sont : 75% d'eau, 80% de CO2
atmosphérique et 36° de température. En effet, ce germe
bactérien à gram négatif, est strictement humain,
commensal des muqueuses du rhino-pharynx. Au microscope, il a une forme
encapsulée, en grain de café, groupé par deux
(diplocoque). Il est par ailleurs très fragile en milieu
extérieur.
La transmission du méningocoque se fait par voie
aérienne, directe, interhumaine, d'un rhino-pharynx à l'autre :
c'est la transmission pflüggienne. Elle peut se faire également par
contact direct avec les sécrétions respiratoires du malade ou du
porteur sain, ce dernier qualifié de porteur asymptomatique. On
reconnaît la méningite à travers ses manifestations les
plus communes qui associent un syndrome infectieux et un syndrome
méningé, se résumant en une forte fièvre, une
raideur de la nuque, de violents maux de tête, des vomissements. Chez
l'enfant on note un bombement de la fontanelle, une irritation et un
plafonnement du regard, auxquels s'ajoute une perte d'appétit avec
souvent des diarrhées. Les conséquences de cette pathologie sont
presque toujours désastreuses tant pour l'individu atteint que pour la
famille. Non seulement celle-ci tue, mais elle est aussi à l'origine
d'autres complications : malvoyance, surdité, handicap physique ou
mental, etc. Au sein de la famille, elle peut être source de
déséquilibre économique et cause de frustrations. Le
traitement contre la méningite est basé sur deux familles
d'antibiotique : les béta-lactamines constituées de
pénicilline G, d'aminopénicilline, (ampicilline, amoxicilline) et
des céphalosporines de troisième génération
(cépfotaxine, céphriaxone) ; et le chloramphénicol.
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Selon l'encyclopédie Bordas (1990 : 317), une
épidémie est un
« développement subit et une propagation
rapide d'une maladie transmissible ou non qui atteint simultanément un
grand nombre d'individus pendant une période limitée, dans un
territoire ou une collectivité déterminée. Elle se
manifeste par l'apparition inhabituelle d'un grand nombre de cas, là
où cette maladie n'existe pas ou par une augmentation
considérable du nombre de cas lorsque la maladie sévit à
l'état endémique dans la région ou la population
concernée. »
L'OMS définit classiquement une épidémie,
en zone endémo-épidémique, par un taux d'incidence
supérieur ou égal à 100 cas pour 100 000 habitants par an.
Lorsque le taux d'incidence est supérieur ou égal à 15 cas
pour 100 000 habitants par semaine en moyenne sur deux semaines
consécutives dans une circonscription couvrant une population comprise
entre 30 000 et 100 000 habitants, on peut suspecter le début d'une
épidémie. Cependant, pour une population de moins de 30 000
personnes, un doublement du nombre de cas par semaine durant 3 semaines
consécutives peut être considéré comme seuil
d'alerte. Toutefois, pour une zone contiguë au premier foyer
épidémique le seuil d'alerte est abaissé à 5 cas
pour 100 000 habitants par semaine.
Aujourd'hui on connaît le développement de
souches résistantes à ces antibiotiques, ce qui serait selon le
Centre National de Référence des Méningocoques, dramatique
pour la lutte contre les épidémies qui surviennent dans la
«ceinture de la méningite». En effet, 13 groupes de N.
meningitidis sont actuellement décrits avec les sérogroupes
A, B, C, Y et W 135 qui sont à l'origine de 99% des cas. Lors d'une
épidémie, une même souche dans la plupart des cas, se
répand par dissémination dite clonale. En mars 2000 cependant, un
clone de N. meningitidis de sérogroupe W135 a été
mis en évidence chez 326 pèlerins revenant de la Mecque en Arabie
Saoudite. Il s'est répandu en Europe, en Asie, aux Etats-Unis et en
Afrique. Depuis 2001, est apparu lors d'épidémies au Burkina Faso
et au Niger, un clone W135 apparenté mais distinct de celui venu
d'Arabie Saoudite. Il sévit désormais durant la saison
sèche, de novembre à mai, avec le sérogroupe A, au Burkina
Faso, au Niger, au Tchad et au Nord Cameroun, tous situés entre les
300mm et 1100mm de précipitations. C'est pourquoi il parait important de
voir l'influence du climat en général et de la brume sèche
en particulier, sur l'éclosion de la méningite. Il est donc
question de voir
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si la brume sèche est évidemment la cause
première de la survenue de la méningite. Car «
L'éclosion et l'extension des maladies est sous la dépendance des
facteurs multiples qui réagissent les uns sur les autres et
déterminent un « climat » plus ou moins propice »
(Harant et Delage 1984 : 15). C'est d'ailleurs à la suite de telles
considérations que Max Sorre a ressorti la notion de complexe
pathogène qui est en géographie une unité biologique
d'ordre supérieur.
L'expression complexe pathogène a
été créée par Max Sorre (Georges et Verge 2000)
pour domicilier géographiquement les grandes aires d'endémies et
de récurrence des épidémies. Un complexe pathogène
selon lui, comporte une chaîne de transmission par l'intermédiaire
d'agents destructeurs de l'équilibre biologique humain. La
variabilité de l'agressivité des complexes pathogènes
suivant les lieux est observée non seulement à l'échelle
des régions, mais aussi localement selon les comportements et les
conditions d'existence et de sensibilité à la contagion des
populations. C'est d'ailleurs ce contexte que l'épidémiologie
moderne cherche à éclairer, en s'inspirant justement de la
théorie du complexe pathogène.
Actuellement, la plupart des études portant sur
l'épidémiologie de la méningite se focalisent sur les
formes résistantes de N. meningitidis et l'extension
de la ceinture méningitique dont l'origine est à rechercher dans
le réchauffement climatique en général et
l'intensification des périodes de brumes sèche dans l'espace
sahélien, et parfois au-delà. L'analyse spatiale des
lithométéores quant à elle, cherche à
déterminer les multiples conséquences de la diffusion et
l'expansion des particules terrigènes sur le climat, la navigation, la
santé et l'environnement. Il s'agit de faire de la brume sèche,
un indicateur climatique de la désertification et de la
sécheresse. L'étude de l'incidence de la brume sèche sur
la méningite est en définitive du ressort de l'analyse
systémique. Il s'agit pour nous de déterminer le régime de
brume sèche, en vue de faire de ce lithométéore, un
indicateur climatique de la méningite, partant, de bon nombre d'autres
pathologies. C'est dans cette approche que se situe le présent
travail.
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