B- Ciblage des problèmes spécifiques
à résoudre et présentation
du thème
Le ciblage des problèmes spécifiques permettront
de dégager la problématique générale et de
présenter le thème en exposant son fondement.
? Ciblage des problèmes
spécifiques :
A partir de la synthèse de la pratique de la
coopération décentralisée dans les départements du
Mono et du Couffo, des problèmes se dégagent. Ceux retenus sont
pour l'essentiel au nombre de trois. Pour favoriser la compréhension du
sujet, la justification ou la pertinence de chaque problème
dégagé et retenu sera démontrée.
1°) Problème spécifique
n°1
Le premier problème spécifique retenu est
relatif aux difficultés dans la recherche de partenaires en
coopération décentralisée. Comme l'indique
le tableau ci-dessus, il existe des communes au niveau des deux
départements qui ne sont pas en relation avec des villes
étrangères. Le développement est un élément
essentiel dans le processus de la décentralisation. Non seulement il en
est le but ultime, mais il a un coût. Les acteurs locaux doivent, non
seulement avoir une vision pour leur territoire, mais aussi, être en
mesure de mobiliser les ressources nécessaires pour financer les projets
traduisant cette vision ; ce qui ne se traduit toujours pas dans la
réalité. La loi leur offre l'opportunité de se tourner
vers l'extérieur, de mener des relations sur le plan international en
respectant les engagements diplomatiques du Bénin, pour rechercher des
ressources complémentaires dans le but de financer leurs projets de
développement. Ils ont l'initiative et la conduite de ces relations mais
n'en profitent pas, bien qu'ils en aient la volonté. Cette situation
s'explique par le fait qu'elles ont de difficultés pour aller à
la recherche de partenaires27 et notamment par le fait que leurs
responsables ne maîtrisent pas les stratégies de recherche de
partenaires. Une chose est d'avoir la volonté et une autre, la
capacité de prendre l'initiative, de tenir et de bien aboutir. Pour eux,
élaborer
27 Souligné par les élus
locaux questionnés.
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
une fiche de projet et démontrer sa pertinence
auprès d'un inconnu n'est pas chose aisée28. Ces
difficultés qu'elles éprouvent pour chercher de partenaires sont
considérées ici comme étant un problème
spécifique de la problématique générale qu'il
faudra résoudre.
2°) Problème spécifique
n°2
Le deuxième problème auquel il conviendra de
trouver de solution(s) est la faible prise en compte de
l'intercommunalité dans la coopération
décentralisée pour faire face aux problèmes de
développement29. En effet, l'ACMC
étant en quelque sorte un prolongement de l'Association Nationale des
Communes du Bénin (ANCB) au niveau des deux départements, il
reste la CCC30 , le GI-Mono31, l'ACC, le CIED-Lagunes
côtières. Mais, ces regroupements qui existent orientent
faiblement ou pas du tout leurs réflexions vers la création
d'EPCI par exemple qu'elles peuvent impliquer dans les actions de
coopération décentralisée afin de résoudre les
problèmes de développement qu'elles ont en commun. Aucun
établissement intercommunal n'existe à ce jour (avril 2012). Or,
« les communes à elles seules ne peuvent pas se développer,
compte tenue des moyens et des ressources dont elles disposent.
»32 Les compétences transférées au
groupement intercommunal permettront aux communes à faibles revenus de
couvrir tant soit peu leurs besoins sans grand effort. Par exemple, la commune
qui n'a pas les moyens de commettre un ingénieur en génie civil
pour ses propres besoins peut solliciter celui du groupement si celui-ci en
dispose dans son personnel. Elle peut aussi solliciter les tracteurs, les
niveleuses, les bulldozers du groupement pour ses travaux si celui-ci en
dispose. Par ailleurs, la gestion des déchets solides et ordures
ménagères pour la protection de l'écosystème est un
problème autour duquel les acteurs locaux peuvent se regrouper pour la
sollicitation d'apports extérieurs.
L'autre paramètre à prendre en compte est que
certains partenaires du Nord s'assurent d'abord de ce que possèdent
leurs partenaires du Sud, de leurs forces et de leurs potentialités pour
savoir ce que les communes du Sud peuvent leur apporter en retour avant
d'entrer en relation avec elles. Dans ce cas se mettre ensemble et rassembler
les efforts serait un atout.
Par ailleurs, la mise en commun des efforts démontre la
pertinence et l'envergure du ou des projets de développement
élaborés et présentés à l'éventuel
partenaire. Parfois, la conviction de ce partenaire dépend de cette
pertinence et de cette envergure (sociales soient-elles). Avec la
création des
28 Ibidem
29 L'identification de ce problème ne
signifie pas que les communes ont l'obligation d'appartenir à une
intercommunalité (cf. note de bas de page n°24).
30 Communauté des Communes du Couffo
31 Groupement Intercommunal du Mono
32 Cf. Félicité N. HOUTA, «
Développement communautaire et renforcement de l'administration
communale : Apport de la coopération décentralisée
à la commune de Bohicon. », Mémoire, AGT, Cycle I, ENAM,
2010, P.26
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
groupements intercommunaux, les élus ont l'occasion
d'insérer leur projet de territoire dans un cadre plus vaste, en lien
avec l'environnement national et international. Or, il n'en est pas
suffisamment ainsi pour ces communes en étude.
Ce problème mérite d'être résolu
pour donner de nouvelles orientations aux acteurs concernés en la
matière en vue de favoriser le développement de leur milieu.
3°) Problème spécifique
n°3
Le dernier problème qui sous-tend cette étude
est relatif à l'absence de soumission de certaines
conventions de coopération décentralisée à
l'approbation de l'autorité de tutelle. Normalement, tout
accord de partenariat doit être soumis à l'autorité de
tutelle qui a la stricte obligation de viser les clauses de la convention pour
les comparer aux normes légales béninoises et déclarer
leur conformité ou non à ces normes. Or, dans la pratique, il y a
des autorités communales de ces deux départements qui se
permettent de contourner cette disposition légale.
Cela constitue un problème qui mérite une
sérieuse attention en ce sens qu'il porte atteinte non seulement au
principe de la souveraineté de l'État béninois, mais aussi
à la sécurité juridique. Aujourd'hui, le problème
est moins perçu mais à l'avenir, les implications peuvent
être hors de portée. Le principe de l'indivisibilité de
l'État, corollaire de la souveraineté, sera violé dans la
mesure où ces collectivités pourraient en arriver à signer
des conventions pouvant porter atteinte à l'unité nationale.
Elles pourraient outrepasser les compétences qui sont les leurs et en
arriver à violer les grands principes de l'exercice de la
coopération décentralisée (voir supra). Ainsi,
pourraient-elles par exemple entrer en relation avec des partenaires dont le
pays n'est pas ou plus en relations diplomatiques avec le Bénin. Or, si
les clauses des conventions sont chaque fois et toutes les fois
contrôlées, cette marge de manoeuvre serait inévitablement
réduite. Le fait de ne pas contrôler et de ne pas sanctionner
amène à persister dans la violation de la légalité
et, de jour en jour, la situation aboutira à des conséquences
fâcheuses, voire contentieuses entre l'État et les communes.
Il convient de résoudre ce problème pour
garantir l'inviolabilité des lois de la République, surtout en
coopération décentralisée.
Résoudre ces trois problèmes spécifiques
contribuerait à améliorer les efforts fournis par les élus
locaux de ces 12 communes pour promouvoir le développement de leur
localité.
Ces problèmes spécifiques, regroupés,
font appel aux enjeux liés à la pratique de la coopération
décentralisée dans les douze communes des départements du
Mono et du Couffo. Partant, la présentation du thème
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
s'avère indispensable pour la compréhension des
idées exposées tout au long de ce document.
? Justification et présentation du
thème :
Pendant de longues années au Bénin, les
questions de développement ont été beaucoup plus la
préoccupation de l'État central, depuis l'accession du pays
à la souveraineté nationale et internationale en 1960. Les grands
axes de développement étaient élaborés par les
dirigeants centraux de l'État qui assuraient la répartition des
richesses sur l'ensemble du territoire national. Ces dirigeants centraux
prenaient entre autres pour critères de répartition, les
préoccupations purement politiques. Cet état de choses ne
favorisait pas une politique de développement judicieuse et constituait
un handicap au plein épanouissement de la majorité des villes et
campagnes. La majorité des plans de développement locaux
était élaborée sans la participation effective des
populations bénéficiaires et ce, dans un cadre ne
répondant pas toujours à leurs préoccupations
réelles33.
Pour tourner dos à ce tableau peu reluisant qui ne
permet pas d'avancer véritablement, la Conférence des Forces
Vives de la Nation de février 1990 a préconisé de
conférer de larges pouvoirs de décisions et d'actions aux
populations à la base. La logique dans laquelle s'inscrivait la vision
des acteurs politiques d'alors était que cette nouvelle manière
de concevoir le développement permettra aux populations locales de
gérer au mieux leurs propres affaires et d'être, par la même
occasion, les principaux acteurs de développement de leurs
localités.
La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 a
pris en compte cette recommandation de la conférence en ses articles 150
à 153. Mais cette recommandation ne sera partiellement traduite dans la
réalité que neuf (09) ans plus tard, avec le vote des 476
articles contenus dans les cinq principales lois sur la
décentralisation34. Ce n'est qu'en décembre 2002
à janvier 2003 que cette décentralisation s'est
concrétisée au Bénin avec la tenue effective des
élections locales.
La coopération décentralisée qui renvoie
à l'action extérieure des collectivités et
autorités territoriales fait partie des grands piliers de cette
décentralisation naissante. Elle est une modalité d'exercice des
compétences, une possibilité offerte à la libre initiative
de la collectivité de décider de façon libre et autonome
de s'engager ou non dans une démarche de coopération pour le
développement de son territoire. Aux côtés des actions
bilatérales et
33 Cf. ALAPINI Marina 0. F. (2005-2006) : «
Contribution de la Direction de la Coopération
Décentralisée et de l'Action Humanitaire à la mise en
oeuvre de la Coopération Décentralisée au Bénin
» ; mémoire du Diplôme d'Études Supérieures
Spécialisées (DESS).
34 En l'occurrence la loi n°97-028 du 15
janvier 1999 portant organisation de l'administration territoriale en
République du Bénin, la loi n°97-029 du 15 janvier 1999
portant organisation des communes en République du Bénin, la loi
n°98-005 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes à
statut particulier, la loi n°98-006 du 09 mars 2000 portant régime
électoral communal et municipal en République du Bénin et
la loi n°98-007 du 15 janvier 1999 portant régime financier des
communes en République du Bénin.
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
multilatérales des États, la coopération
décentralisée permet une action de proximité dans la
durée et tisse des liens entre communautés locales du nord et du
sud. C'est une coopération orientée vers le développement
au profit des populations à la base.
Depuis le vote des lois sur la décentralisation, il y a
de cela plus d'une dizaine d'années (1999), et depuis la
concrétisation de la décentralisation il y aura bientôt dix
ans (2003), les communes du Bénin en général et celles des
départements du Mono et du Couffo en particulier ont amorcé et
développent des relations de coopération avec leurs homologues et
partenaires étrangers. En effet, dans bien de cas, les
collectivités locales de ces deux départements ne disposent pas
de ressources suffisantes pour assurer leurs charges de fonctionnement et
d'investissement. Ainsi, de nombreux programmes et projets de partenariat sont
élaborés et financés au profit de ces collectivités
locales35.
Mais, cette coopération laisse à désirer.
Des difficultés se profilent à son horizon et suscitent des
interrogations sur son avenir, surtout en considérant
particulièrement les communes des départements du Mono et du
Couffo dans leur ensemble. D'une part, ce sont les difficultés de
recherche de partenaires internationaux qui sont constatées. D'autre
part, ces difficultés s'élargissent à la faible prise en
compte de l'intercommunalité dans les actions de coopération
décentralisée. Plus loin, ce sont les conventions, loi des
parties contractantes, de coopération décentralisée qui ne
sont pas transmises pour approbation.
Et pourtant, l'État béninois affiche clairement
et théoriquement sa bonne volonté36 d'accompagner les
collectivités locales dans toutes leurs actions, surtout celles ayant
trait à la coopération décentralisée.
Cet état de choses ne permet pas à ces
collectivités locales de prendre véritablement appui sur la
coopération décentralisée pour effectivement
répondre à leurs besoins de développement et pour garantir
la sécurité et la souveraineté de l'État
béninois.
La présente étude se propose alors de
réfléchir sur ces questions cruciales conjointement pour la
décentralisation, pour le développement des communes du Mono et
du Couffo et pour la sécurité juridique37 du
Bénin tout entier. Pour
35 Les acteurs des collectivités locales
étudiées font état de ce qu'ils ont pu
bénéficier de leurs relations en coopération
décentralisée, que ce soit de territoire à territoire ou
pas. Ce travail n'intégrant pas le bilan de la coopération
décentralisée et étant limité par le temps et par
le volume du document, nous nous excusons de ne pouvoir en faire cas et
rassurons qu'il peut être intégré dans de travaux de
recherche ultérieurs.
36 Les différents textes relatifs à la
coopération décentralisée démontrent bien cette
volonté du pouvoir central, en l'occurrence les articles 8 et 9 du
décret n°2005-765 du 09 décembre 2005 portant
définition et modalités de la coopération
décentralisée en République du Bénin. En effet, ces
articles disposent :
-article 8 : L'Etat exerce dans le cadre de la
coopération décentralisée, son rôle de garant de la
légalité
- article 9 : L'Etat apporte son conseil et son assistance
aux communes pour l'aboutissement et le développement de leurs
initiatives relatives à la coopération
décentralisée. A ce titre, il leur apporte un appui par la
promotion des activités de formation, d'information et de recherche de
partenariat.
37 Pour le moment, il n'y a pas péril en
la demeure mais lorsqu'une collectivité locale viole les textes en
vigueur sur un aspect donné, le risque que d'autres communes lui
emboitent le pas n'est pas négligeable. L'analyse faite à ce
niveau pour aboutir à l'atteinte d la sécurité juridique
du Bénin est une analyse projective.
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
cette raison, les cogitations portent sur la
problématique de la pratique de la coopération
décentralisée dans les départements du Mono et du
Couffo.
Cette problématique révèle une importance
capitale pour cette étude non seulement parce que ses composantes
(problèmes spécifiques) sont complexes, mais aussi, parce que le
domaine n'a jamais fait l'objet d'une étude au niveau des douze communes
considérées.
Pour mieux circonscrire cette problématique et
répondre aux attentes soulevées par l'étude et qui doivent
être comblées par les axes de réflexions, les travaux de
recherche portent sur la thématique : « La
coopération décentralisée dans les communes des
départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et perspectives
». En effet, l'étude porte sur toutes les
communes du Mono et du Couffo dans leur généralité pour
détecter les problèmes qu'elles ont de commun en la
matière ou qui risquent de se généraliser avec le
temps.
Tel est le fondement (la justification) et la
présentation du thème. Étant ainsi au coeur du sujet, les
différentes séquences devant permettre de résoudre les
problèmes spécifiques et donc le problème
général sont :
o la proposition de causes, la formulation des
hypothèses, la fixation des objectifs, le choix de la
méthodologie adoptée et la revue de littérature d'une part
;
o la collecte et la présentation des données,
l'analyse de ces données, l'établissement du diagnostic, les
perspectives possibles et leurs conditions de mise en oeuvre d'autre part.
Dans la perspective de mieux apporter de solutions aux
problèmes identifiés, il convient d'abord d'en rechercher les
causes et de se fixer des objectifs à atteindre afin de pouvoir faire un
diagnostic qui permettra de trouver des solutions adéquates. En effet,
il est difficile de résoudre un problème en recherche-diagnostic
lorsque les mobiles sont inconnus.
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