Critique de la légitimité de l'assimilation faite par la cour de cassation entre une déclaration de créance et une demande en justice( Télécharger le fichier original )par Anaà¯s PRADAL Paris 1 Panthéon- Sorbonne - Master 2 de contentieux des affaires 2012 |
II / Autorité de la chose jugée de l'ordonnance d'admission des créances127. L'ordonnance d'admission ou de rejet des créances est une véritable décision de justice, et en tant que telle, elle est revêtue de l'autorité de la chose jugée. 128. L'autorité de la chose jugée interdit de remettre en cause un jugement, en dehors des voies de recours prévues à cet effet. Le code civil prévoit que l'autorité de la chose jugée est opposable dès lors que la nouvelle demande est « fondée sur la même cause (...) entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité »65(*), donc dès lors qu'il y a identité de parties, de cause et d'objet. 129. Ceci entraîne plusieurs conséquences, notamment sur l'effet que conserve l'ordonnance d'admission dès lors que la procédure collective fait l'objet d'une conversion en une autre procédure collective (A) ou encore lorsque le créancier dont la créance a été admis tente de faire considérer celle-ci comme postérieure (B). A) Dispense en raison de l'autorité de la chose jugée de procéder à une nouvelle déclaration de créance en cas de conversion de la procédure collective en une autre130. « Après résolution du plan et ouverture d'une nouvelle procédure, les créanciers soumis à ce plan sont dispensés de déclarer leurs créances et sûretés. Les créances inscrite à ce plan sont admises de plein droit, déduction faite des sommes perçues »66(*). Cette solution, de bon sens dès lors qu'on considère que la déclaration de créance équivaut à une demande en justice, n'allait cependant pas de soi. 131. Dans le régime antérieur à 2006, la jurisprudence67(*) considérait que « l'admission ou le rejet de la créance dans la première procédure n'avait pas autorité de la chose jugée dans la seconde procédure ouverte à l'encontre du même débiteur ». 132. La cour se fondait en effet sur l'absence d'identité de parties en estimant que le mandataire judiciaire et le liquidateur judiciaire, bien qu'étant une seule et même personne, agissait en des qualités différentes68(*). 133. Aujourd'hui, et grâce aux améliorations apportées par la loi de sauvegarde, le créancier admis dans une première procédure « n'est pas tenu de procéder à une nouvelle déclaration de créance lorsque, à l'issue de la période d'observation, la liquidation judiciaire est prononcée »69(*). 134. La solution posée depuis la loi de sauvegarde semble évidente. En effet, il semble contradictoire que la Cour de Cassation estime d'une part que la déclaration de créance équivaut à une demande en justice et qu'elle en tire toutes les conséquences afférentes, à savoir considérer que la décision d'admission du juge commissaire était revêtu de l'autorité de la chose jugée, et qu'en même temps, elle estime que lorsque « le même créancier se trouve face à son même débiteur dans une seconde procédure de vérification dont l'objet est identique, car tendant à l'admission de la même créance, il y ait lieu de reconsidérer le bien fondé de la demande, au motif que de nouveaux créanciers y sont intéressés et représentés », alors même que la modification des conditions de répartition en résultant est indifférente à l'examen du bien-fondé de la prétention du créancier déclarant70(*). 135. L'autorité de la chose jugée de la décision d'admission des créances du juge-commissaire aura donc été renforcée par la réforme de 2005. * 65 Art 1351 C.Civ * 66 Art L626-27 III C.Comm * 67 Cass, Ass. Plén., 10 avril 2009 - N°08-10.154 ; Cass, Com., 27 septembre 2011 - N°09-16.388 * 68 Jean-Pierre SORTAIS, « Déclaration de créance et procédures collectives successives », P.A., 30 janvier 2012, n°21, p 11 * 69 Cass, Com., 7 juillet 2009 - N°08-13.849 ; Marc SENECHAL, « La conversion en liquidation judiciaire n'implique pas une nouvelle déclaration de créance », Ess. D. Ent. Diff., 1er octobre 2009, n°6, p 2 * 70 Stéphane GORRIAS, V. Manie, « Absence d'autorité de chose jugée de l'admission d'une créance en cas d'ouverture d'une seconde procédure collective après résolution du plan de redressement », Revue des Procédures Collectives, n°1, janvier 2010, comm. 1 |
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