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Critique de la légitimité de l'assimilation faite par la cour de cassation entre une déclaration de créance et une demande en justice

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par Anaà¯s PRADAL
Paris 1 Panthéon- Sorbonne - Master 2 de contentieux des affaires 2012
  

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B) Dérogations aux règles de la représentation en justice

222. Dans deux espèces, bien que la Cour de Cassation ait estimé qu'il y avait une équivalence entre la déclaration de créance et une demande en justice, la Cour a apporté une dérogation aux règles de la représentation en justice pour permettre une déclaration de créance.

223. Dans la première affaire113(*), la Cour de Cassation a estimé qu'une délégation donnée par le Conseil d'Administration d'une société à un préposé dans le but de déclarer les créances était valable alors que les statuts de cette société attribuaient exclusivement au Président du conseil le pouvoir de représenter la société en justice, tant en demande qu'en défense.

224. Le fondement juridique de cet arrêt est fragile114(*). En effet, le code de commerce115(*) prévoit que la déclaration de créance peut être faite par tout préposé choisi par le créancier, mais cette disposition ne déroge nullement, lorsque le créancier est une personne morale, aux règles qui gouverne sa représentation en justice.

225. Or, la déclaration de créance étant assimilée à une demande en justice, il faut que le déclarant ait la qualité au sens de l'article 31 du code de procédure civile, c'est-à-dire que la personne qui élève une prétention au nom d'une personne morale doit justifier de sa qualité de représentant de celle-ci. Par conséquent le délégant de la délégation de pouvoir doit être l'organe qui a la qualité de représenter la personne morale en justice ou le délégataire de cette qualité qui la tient de l'organe représentatif et qui subdélègue cette qualité.

226. En l'espèce, le conseil d'administration n'était investi ni par la loi, ni par les statuts du pouvoir de représenter la société, d'ailleurs les statuts réservaient ce pouvoir au seul président du conseil. Dès lors, toute autre désignation d'un représentant devenait irrégulière, même si elle prenait la forme d'une délégation.

227. Dans la seconde affaire116(*), il s'agissait de deux établissements financiers liés entre eux par une convention d'indivision, habilitant l'une des sociétés à représenter l'indivision. Ces établissements avaient conclu avec une SCI un contrat de crédit-bail immobilier pour l'acquisition d'un terrain et la construction d'un hôtel-restaurant. La SCI fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire et la crédit-bailleresse effectue une déclaration de créance en se prévalant d'une procuration confiée à un préposé par l'un des cogérants de la société habilité à représenter la société et, en principe, l'indivision.

228. Certes, ici la délégation de pouvoir émanait d'une personne qui avait qualité pour représenter la société mais le noeud du problème résidait dans le régime légal de l'indivision117(*). En effet, la Cour de Cassation retient que tout indivisaire - et donc tout délégataire de cet indivisaire - peut déclarer une créance de l'indivision à la procédure collective du débiteur de l'indivision, considérant dès lors qu'il s'agirait seulement d'une mesure conservatoire.

229. Mais une demande en justice constitue-t-elle une simple mesure conservatoire ?118(*) En présence d'action en paiement, la Cour de Cassation avait estimé que le consentement de tous les indivisaires était requis.

230. La déclaration de créance est-elle un acte conservatoire permettant donc à un seul indivisaire de la déclarer ou s'agit-il d'une demande en justice qui nécessite l'unanimité des indivisaires ?

La dérogation à la représentation en justice accordée par la Cour de Cassation contredit encore une fois sa jurisprudence constante qui assimile déclaration de créance et demande en justice.

* 113 Cass, Com., 15 avril 2008 - N°07-10.535

* 114 François BARBIERI, « La déclaration de créance déroge à la représentation en justice des personnes morales », Petites Affiches, 1er août 2008, n°154, p 18

* 115 Art L622-24 C.Comm

* 116 Cass, Com., 11 juin 2003 - N°00-11.913

* 117 Art 815 et suivants du C.Civ

* 118 Jean-Jacques BARBIERI, « Cascade de représentations et déclaration de créance au passif (dissonances dans le conservatoire) », Bull. Joly Sté., 1er octobre 2003, n°10, p 1024

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