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Asile et réfugiés en droit international

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par Cherif Ly DIA
Université Gaston Berger de Saint-Louis, Sénégal - Mémoire de maitrise en droit public 2012
  

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Paragraphe 2 : La Procédure proprement dite

L'étude de la demande d'asile, ainsi que les conditions et règles selon lesquelles cet asile est accepté, et le statut de réfugié octroyé tiennent de la Convention de Genève de 1951, mais aussi et surtout de la législation nationale des Etats. C'est ainsi que, dans l'optique de l'analyse de la procédure y afférente, nous nous intéresserons de manière plus spécifique au cas de notre pays, le Sénégal, tout en n'omettant pas les considérations plus ou moins générales relatives à cette procédure. Ainsi, nous nous intéresserons tour à tour au déroulement de la procédure (A) mais aussi à l'existence de certaines modalités permettant de mettre fin au statut de réfugié, qui, on l'a vu, n'est pas définitif (B).

A - Le déroulement de la procédure de reconnaissance

Il faut d'ores et déjà noter que la procédure en question entretient des relations intrinsèques avec les critères d'éligibilité que nous avons analysés plus haut dans nos développements, et qui, comme nous l'avons dit, servent de référence dans la détermination du statut de réfugié. Il est évident donc que ces critères constitueront la base de la procédure que nous analyserons. Toutefois, cette procédure se fait en diverses phases que nous expliciterons ici, mais aussi elle doit suivre certaines règles, en plus du respect de certains principes relatifs notamment aux droits de l'homme. Par ailleurs, avec le caractère non universel des règles procédurales qui s'explique surtout par l'intervention de la législation interne qui apporte plus de spécificité quant aux Etats, nous nous focaliserons surtout sur cette procédure au Sénégal.

Il faut d'abord commencer par dire que l'organisme chargé de conduire la procédure de demande d'asile peut différer selon les pays. En effet, en France par exemple, c'est l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) créée en 1952, qui est compétente en matière de reconnaissance de réfugiés.

Par ailleurs, au Sénégal, c'est la Commission nationale d'éligibilité, régie par le décret n° 78-484 du 5 juin 1978 relatif à la Commission des Réfugiés modifié39(*), qui est compétente en matière de procédure de reconnaissance des réfugiés. Cette commission a été prévue de prime abord par l'article 3 de la Loi 68-27 du 27 juillet 1968 portant statut des réfugiés40(*), et c'est donc ce décret de 1978 qui prévoira les conditions de fonctionnement de cette commission.

Toutefois, il faut noter qu'un certain réaménagement institutionnel est intervenu en 2003. En effet, le décret n° 2003-291 du 8 mai 2003 porte effectivement création d'un comité national chargé de la gestion de la situation des réfugiés, rapatriés et personnes déplacées. Ce comité va ainsi englober en son sein, en plus de la commission nationale d'éligibilité, d'autres structures. Le rapport de présentation de ce décret stipule d'ailleurs que « la diversité des expertises nécessaires à la gestion de la situation des réfugiés, rapatriés et personnes déplacées a conduit à la multiplication des structures d'intervention. »

Ce comité qui sera constitué de quatre commissions, à savoir une commission chargée de la gestion de la situation des réfugiés, une commission chargée de la gestion de la situation des rapatriés, une commission chargée de la situation des personnes déplacées, et une commission nationale d'éligibilité au statut de réfugié. Mais, cette dernière commission, malgré son rattachement au comité, continuera toutefois à être régie par le décret n° 78-484 du 5 juin 1978 relatif à la Commission des Réfugiés, modifié ensuite par le décret n° 89-1582 du 30 décembre 1989 modifiant le décret n° 78-484 du 5 juin 1978 relatif à la Commission des Réfugiés, et donc, cette commission conservera ses propres règles d'organisation et de fonctionnement. Elle est rattachée par le décret n° 2012-437 du 10 avril 2012 portant répartition des services de l'Etat, à la Présidence de la république, dont elle fait partie des services rattachés.

Ainsi, dans le cadre de la procédure, la demande d'asile doit être effectuée auprès de la commission nationale d'éligibilité. Cette commission est composée, comme le stipule l'article premier du décret 78-484 modifié, d'un magistrat, président, désigné par le Garde des sceaux, Ministre de la Justice ; d'un représentant du ministre chargé des affaires étrangères ; d'un représentant du ministre chargé de l'intérieur ; d'un représentant du ministre chargé de l'action sociale. Par ailleurs, le HCR peut siéger à cette commission en tant qu'observateur uniquement.

Ainsi, la procédure proprement dite de reconnaissance du statut de réfugié sera donc essentiellement assurée par cette commission nationale d'éligibilité.

Tout d'abord, il faut noter que toute demande d'admission au bénéfice du statut de réfugié est déposée auprès du président de la commission nationale d'éligibilité, et enregistrée par le secrétaire sur un registre ouvert à cet effet. Il faut dire aussi que cette demande est adressée au président de la république, puisque, rappelons-le, c'est bien un décret présidentiel qui accordera le statut de réfugié.

Ainsi, une fois que le nombre de demandes déposées auprès d'elle, ou que l'urgence de la situation le nécessitent, la commission nationale d'éligibilité se réunit. Toutefois, l'article 10 de l'arrêté présidentiel du 13 avril 2004 précité précise que les commissions du comité national (y compris la commission nationale d'éligibilité) se réunissent au moins une fois par trimestre et chaque fois que de besoin, sur convocation du président. Les séances sont en principe publiques, mais le président peut ordonner l'huis-clos chaque fois que l'ordre public l'exigera. Lors de ces séances, il faut noter qu'un représentant du HCR y assiste, même si c'est uniquement en tant qu'observateur, et qu'il n'est pas totalement associé à la prise de décisions. Néanmoins, il peut être entendu sur chaque affaire.

En vertu du paragraphe 8 du Statut de 1950 et de l'Article 35 de la Convention de 1951, le HCR a la responsabilité de superviser l'application des dispositions de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 dans les États parties à ces instruments. Le HCR exerce son rôle de supervision en suivant à la fois les procédures et les critères appliqués, et par des interventions au nom des demandeurs.41(*)

Par ailleurs, il faut noter que la participation du HCR à la procédure de reconnaissance du réfugié a surtout trait à la protection des droits des demandeurs d'asile, notamment à travers le respect de certains principes comme la confidentialité, qui doivent présider à la procédure. Toutefois, nous étudierons ces diverses questions relatives à la protection dans des développements ultérieurs.

Pour revenir à la procédure et à la commission nationale d'éligibilité, nous pouvons dire que la procédure devant elle est gratuite et sans frais. Aussi, lorsque cette commission se réunit, elle prend des décisions à l'issue de l'analyse des situations des demandeurs d'asile par consensus ou par vote, faute de consensus, avec en cas d'égalité des voix, une prépondérance de celle du président. Il faut aussi noter qu'une certaine obligation de motivation pèse sur les conclusions de la commission sur les affaires examinées.

Ainsi, en cas de décisions favorables à une admission des requérants au bénéfice du statut de réfugié, le secrétariat de la commission doit s'occuper de la préparation des projets de décrets devant porter admission au bénéfice du statut de réfugié. Il est aussi chargé de la notification des décisions intervenues. Il convient ici de noter que les décisions de la commission sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir42(*).

Par ailleurs, le décret de reconnaissance du réfugié, qui est signé par le président de la république, s'accompagne de la délivrance d'un certain nombre de documents pour le réfugié par le ministre de l'Intérieur : il s'agit, conformément à l'article 28 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, d'un titre de voyage mais aussi d'un certificat de réfugié et d'une carte d'identité de réfugié.

D'ailleurs, à propos de la carte d'identité de réfugié, l'article 12 Bis du décret 78-484 modifié précise que sa délivrance vaut autorisation d'établissement.

D'autre part, nous pouvons noter le fait que, même si la procédure est essentiellement de l'apanage de la commission nationale d'éligibilité, le comité national chargé de la gestion de la situation des réfugiés, rapatriés et personnes déplacées, dont le fonctionnement est régi par l'arrêté présidentiel du 13 avril 2004, comprend d'autres structures comme la commission chargée de la gestion de la situation des réfugiés, qui, selon l'article 6 de cet arrêté a pour missions, entre autres, d'accueillir, de recenser, de procéder à l'identification des réfugiés ; de procéder à l'enquête pour l'octroi de visas et de titres de voyages.

Toutefois, l'admission au bénéfice du statut de réfugié est loin d'être définitive, et sous certaines conditions, il pet être mis au statut de réfugié accordé.

B - L'existence de modalités de cessation du statut de réfugié

Le statut de réfugié, même s'il est accordé dans des conditions légales, n'est pas définitif. En effet, il existe certaines causes et conditions dans lesquelles il serait justifié de mettre fin au bénéfice du statut de réfugié. Cela peut surtout correspondre à ce qu'il convient d'appeler les clauses de cessation du statut de réfugié. La cessation, qui fait référence à la décision officielle de mettre fin à un statut de réfugié parce qu'il n'est plus nécessaire ou justifié, signifie donc la perte du statut de réfugié et des droits qui lui sont attachés.

Toutefois, il n ya pas uniquement la cessation qui puisse causer la perte du statut de réfugié. En effet, il peut aussi y avoir l'annulation, la révocation du statut de réfugié, ou même encore l'expulsion, que nous analyserons tantôt.

Ainsi, la loi de 1968 note que la commission compétente en matière de reconnaissance du statut l'est aussi en ce qui concerne la perte de ce statut. L'article 3 stipule : « les décisions admettant une personne au bénéfice du statut de réfugié ou constatant la perte de ce bénéfice sont prises par une commission présidée par un magistrat et comprenant les représentants des principaux services intéressés ».

Ainsi, c'est donc la commission nationale d'éligibilité qui est compétente, comme le précise l'arrêté présidentiel du 13 avril 2004 fixant la composition, les attributions et le fonctionnement des organes du comité national chargé de la gestion de la situation des réfugiés, rapatriés et personnes déplacées, dans son article 9 : « la commission nationale d'éligibilité au statut de réfugié, a pour missions :

- D'émettre un avis à la reconnaissance de la qualité de réfugié ;

- D'émettre un avis à la constatation de la perte de la qualité de réfugié ;

- De formuler un avis préalable et obligatoire à toute mesure décidée en vertu des articles 31, 32 et 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951. »

Par ailleurs, le décret n° 78-484 régissant la commission nationale d'éligibilité précise en son article 2, alinéa 2 que la commission émet un avis favorable à la constatation de la perte de la qualité de réfugié pour toute personne ne relevant plus du mandat du HCR pour les réfugiés ou entrant dans les cas prévus à l'article 2 de la Loi 68-27 et à l'article premier de la convention de l'OUA du 10 septembre 1969 ; Ainsi, ces situations constituent donc les cas essentiels de perte du statut de réfugié.

En outre, l'article 2 de la Loi 68-27 du 24 juillet 1968 portant statut des réfugiés dont il est question pose clairement les cas dans lesquels se perd le statut de réfugié : « le bénéfice du statut de réfugié prévu par la présente loi se perd dans les cas prévus à la section C de l'article 1er de la Convention du 28 juillet 1951, et si le bénéficiaire quitte le Sénégal sans titre de voyage régulier ou ne revient pas au Sénégal avant l'expiration de la validité du titre dont il est muni. »

Il faut d'emblée noter donc que le statut de réfugié ne s'accommode pas lorsque les individus ne relèvent plus du mandat du HCR, ou qu'ils relèvent d'un autre organisme des Nations-Unies.

Par ailleurs, la cessation du statut de réfugié peut s'analyser sur un double niveau avec d'une part la cessation fondée sur certains actes du réfugié, et d'autre part la cessation fondée sur un changement fondamental de circonstances. Rappelons que les clauses de cessation sont prévues à l'article 1.C de la Convention de Genève.

Les actes volontaires du réfugié pouvant entraîner cessation de son statut, et prévus aux articles 1.C (1), (2), (3) et (4) sont les suivants :

1- Se réclamer volontairement de la protection du pays dont il a la nationalité

2- Recouvrer volontairement sa nationalité

3- Acquérir une nouvelle nationalité et jouir de la protection du pays dont il a acquis la nationalité

4- Se rétablir volontairement dans le pays qu'il a quitté ou hors duquel il est demeuré de crainte d'être persécuté.

D'autre part, la cessation du statut de réfugié peut aussi être fondée sur un changement fondamental de circonstances prévu à l'article 1.C (5) et (6), c'est-à-dire si les circonstances à la suite desquelles l'individu a été reconnu comme réfugié ont cessé d'exister. Toutefois, pour que ces clauses de changement de circonstance puissent être appliquées, il faut que la situation objective dans le pays d'origine ou de résidence habituelle ait changé d'une manière stable, fondamentale et durable.

Enfin, relativement à la cessation, il faut noter qu'elle ne fait pas partie de la DSR, par conséquent, les critères énoncés à l'article 1.C ne doivent nullement être pris en compte dès le stade de l'éligibilité.

A coté de ces clauses de cessation pouvant mettre fin au statut de réfugié, il existe des circonstances aptes à justifier jusqu'à l'expulsion des bénéficiaires du statut de réfugié. Ces circonstances sont prévues autant par la Convention de Genève de 1951, la Convention de l'OUA de 1969, mais aussi la Loi sénégalaise n° 68-27 du 24 juillet 1968 portant statut des réfugiés.

Dans ce cadre, l'article 4 de la loi précitée stipule : « les bénéficiaires du statut de réfugié ne peuvent être expulsés du territoire du Sénégal que pour des raisons de sécurité nationale ou d'ordre public, et notamment s'ils s'immiscent dans la politique nationale, s'ils se livrent à des activités contraires à l'ordre public ou s'ils sont condamnés à une peine privative de liberté pour des faits qualifiés de crime ou délit d'une particulière gravité. » L'article 32 de la Convention de Genève abonde dans le même sens en stipulant que les Etats contractants n'expulseront un réfugié se trouvant régulièrement sur leur territoire que pour des raisons de sécurité nationale ou d'ordre public.

Cette expulsion sera toutefois encadrée dans des conditions strictes. Il est en effet défendu par exemple de refouler ou d'extrader un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée.43(*) De plus, le réfugié doit être admis à fournir des preuves tendant à le disculper des accusations pesant sur lui, mais aussi, un délai raisonnable doit lui être accordé par les autorités en vue de chercher à se faire admettre régulièrement dans un autre pays.

C'est ainsi que dans l'affaire Soering contre Royaume-Uni du 7 juillet 1989), la Cour Européenne des droits de l'Homme dit (pour la première fois) que la responsabilité d'un Etat peut être engagée s'il décide d'éloigner une personne susceptible de subir de mauvais traitements dans le pays de destination.

Néanmoins, cela ne décourage pas certains Etats comme l'Israël, pourtant signataire de la Convention, qui a récemment expulsé des africains (sud-soudanais) demandeurs d'asile en Mai 2012 pour satisfaire aux manifestations des populations vers leur pays d'origine où des menaces de toutes sortes pèsent pourtant sur eux, avec la situation au Darfour notamment, malgré la scission du Soudan en deux Etats désormais.

Ainsi, à coté des procédures d'admission du réfugié, procédures encadrées et présentant certaines garanties notamment dans leur conduite, il ya aussi un autre domaine important, à savoir la protection des réfugiés, qui est d'une importance capitale dans l'application de l'asile et dans la pérennité du statut de réfugié. En outre, cette protection s'accompagne aussi d'une certaine assistance au réfugié sur plusieurs plans.

* 39 Le décret n° 78-484 du 5 juin 1978 va entrainer l'abrogation du décret n° 76-014 du 9 janvier 1976, mais sera aussi modifié en 1989 par le décret n°89-1582 du 30 décembre 1982

* 40 Article 3 Loi 68-27 : « Les décisions admettant une personne au bénéfice du statut de réfugié ou constatant la perte de ce bénéfice sont prises par une commission présidée par un magistrat et comprenant les représentants des principaux services intéressés [...] »

* 41 DSR, module d'autoformation, département de la protection internationale du HCR, Septembre 2005, www.unhcr.org, page 18

* 42 Article 3, alinéa 2 de la Loi 68-27 du 24 juillet 1968

* 43 Article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery