Promotion : 2009-2010
République du Niger
MINISTERE DES ENSEIGNEMENTS MOYEN/SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE
SCIENTIFIQUE
UNIVERSITE ABDOU MOUMOUNI DE NIAMEY Faculté des
Lettres et Sciences Humaines
Département de Géographie
Milieux et Sociétés des Espaces Arides et
Semi-Arides Option : Aménagement et gestion des ressources
naturelles
Mémoire de DEA
Présenté par NOUHOU Ibrahim
Devant le jury composé de :
Sous la direction de :
Pr. YAMBA Boubacar à la FLSH/U.A.M
de Niamey
|
Président : Pr. TOUDOU
Adam à la faculté d'Agronomie de l'U.A.M
Assesseur : Dr. ISSAKA
Hamadou Attaché de Recherche à l'JRSH/GAME de
l'U.A.M
|
2
Table des matières
DEDICACE 5
REMERCIEMENT 6
Sigles et abréviations 7
Avant propos 8
Résumé 9
Introduction générale 10
Chapitre I : Cadre théorique et
méthodologique 13
I.1 Cadre théorique 13
I.1.1 Etude littéraire 13
I.1.2 Définition des concepts/termes 18
I.1.3 Problématique 20
I.1.4 Objectifs de la recherche 24
I.1.5 Hypothèse 24
I.1.6 Les raisons du choix du thème 24
I.2 Cadre méthodologique 24
I.2.1 La recherche documentaire 25
I.2.2 L'échantillonnage 25
I.2.3 La conception d'outils de collectes d'informations 27
I.2.4 L'enquête 27
I.2.5 L'utilisation d'images satellitaires 27
I.2.6 La cartographie 27
1.2.7 Difficultés rencontrées 28
Chapitre II : Contexte général de la
recherche 29
II.1. Caractérisation de la zone d'étude 29
II.1.1. Présentation de la Ville de Zinder 29
II.1.1.1 Localisation et organisation administrative de la Ville
de Zinder 30
II.1.1.1 Caractéristiques physiques 31
II.1.1.2.1 Climat 31
II.1.1.2.2 Type de sols 32
II.1.1.2.3 Hydrographie 34
II.1.1.3 Caractéristiques économiques 34
II.1.1.3.1 Agriculture 34
II.1.1.3.2 Elevage 35
II.1.1.3.3 Commerce 36
II.1.1.3.4 Artisanat 36
Chapitre III : Marché foncier périurbain et
expropriation périurbaine 37
III.1 Dynamique démographique et spatiale de la Ville de
Zinder 37
III.1.1 Dynamique démographique 37
III.1.2 Dynamique spatiale de la Ville de Zinder 38
3
III.2 Développement des marchés fonciers et
expropriations dans l'espace périurbain de
Zinder 39
III.2.1 Le rétrécissement des ressources
foncières périphériques 40
III.3 Les acteurs du marché foncier et de l'expropriation
périurbains pour cause d'utilité
publique 44
III.3.1 Les acquéreurs 45
III.3.2 Les vendeurs (ou cédants) 45
III.3.3 Les intermédiaires 46
III.3.4 Les communes 46
III.3.5 La Direction du Domaine et du Cadastre 46
III.3.6 La Direction de l'urbanisme 47
III.3.7 Le conseil municipal 47
III.3.8 Les autorités coutumières 48
III.3.9 Le notaire 48
III.3.10 Le géomètre expert 49
III.3.11 Les Commissions foncières 49
III.3.11.1 Régulation des marchés fonciers à
travers les institutions du Code Rural 50
III.3.11.2 Les contraintes liées à
l'utilisation du titre de propriété foncière du Code
Rural 50
III.4 Les procédures du marché foncier 50
III.5 Les procédures d'expropriation pour cause
d'utilité publique par les communes 51
III.6 Les articulations entre la vente et l'expropriation des
terres agricoles à la périphérie de
la Ville de Zinder 53
III.7 Contribution du foncier périurbain à la
sécurité alimentaire 54
III.8 Causes des ventes des terres agricoles 54
III.9 Effets des ventes et expropriations des terres sur la
sécurité alimentaire 55
III.9.1 Effets sur la production agricole 55
III.9.2 Effets sur la production maraîchère 57
III.9.3 Effets sur les populations 59
III.9.4 Effets sur le paysage périphérique de la
Ville de Zinder 60
III.10 Insécurité foncière
périphérique 60
III.11 Perspectives de réduction des effets des
marchés fonciers et expropriations pour cause
d'utilité publique 62
Conclusion 64
Bibliographie: 66
ANNEXES 71
4
Table des figures
Carte 1: Localisation des villages
d'enquête 26
Carte 3: Localisation de la zone
d'étude 30
Carte 4: Typologie des sols de la ville de
Zinder 33
Carte 5: Occupation des sols en 1986 41
Carte 6: Occupation des sols en 2011 41
Figure 1 : Articulation entre
insécurité foncière/marché
foncier/expropriation/insécurité
alimentaire 53
Graphique 1: Variations interannuelles de la
pluviomètrie au niveau de la ville de Zinder de
1970 à 2010 31
Graphique 2: Evolution des superficies
cultivées en mil et sorgho de 2001 à 2010 35
Graphique 3: Evolution de la population de la
ville de Zinder de 2006 à 2011 38
Graphique 4: Evolution spatiale de la ville
de Zinder de 1982 à 2000 39
Graphique 5: Taux d'occupation des sols en
1986 42
Graphique 6: Taux d'occupation des sols en
2011 43
Graphique 7: Bilan céréalier de
la ville de Zinder sur 5 ans 56
Photo 1: Pratique du maraichage et de la
riziculture autour de la mare de Kagna 44
Photo 2: Végétation
menacée de disparition au niveau de la mare de Kagna 60
Photo 3: Couloir de passage occupé par
les cultures 61
Table des tableaux
Tableau n°1 : Liste des villages de la
ville de Zinder déficitaires à + de 50% 56
Tableau n°2 : Compte d'exploitation par
campagne dans quelques sites maraîchers de Dakar
..58
Tableau n°3 : Revenu net d'un exploitant
par campagne dans le site de Midic 59
5
DEDICACE
Je dédie ce travail à mon défunt
père, à ma mère, à mon oncle Abdou Aboubacar, ainsi
qu'à toute ma famille.
6
REMERCIEMENT
Au terme de ce travail, nous tenons à remercier et
à exprimer notre profonde gratitude aux personnes qui, par leur
encadrement, leurs conseils et leur soutien m'ont permis de mener à bien
ce travail. Il s'agit notamment de :
Professeur YAMBA Boubacar pour avoir
accepté de diriger ce travail et ses observations pour
l'amélioration de ce travail.
Tous les enseignants du département de
géographie, particulièrement nos enseignants du DEA de
géographie.
A tous mes camarades de promotion, ainsi que
tous ceux qui ont contribué à la réalisation de ce
travail.
7
Sigles et abréviations
AGR : Activités
Génératrices de Revenu
Art. : Article
AREN : Association pour la Redynamisation de
l'Elevage au Niger
Cofocom : Commission foncière
communale
Cofodep : Commission foncière
départementale
FAO : Organisation des Nations Unies pour
l'Agriculture et l'Alimentation
INS : Institut National de la Statistique
IAGU : Institut Africain de Gestion
Urbaine
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PIB : Produit Intérieur Brut
FCFA : Franc de la Communauté
Financière Africaine
POCR : Principe d'Orientation du Code
Rural
FLSH : Faculté des Lettres et Sciences
Humaines
LASDEL : Laboratoire d'études et
recherches sur les dynamiques sociales et le
développement local
LUCOP : Lutte Contre la Pauvreté
IUT : Institut Universitaire de
Technologie
RENACOM : Répertoire National des
Communes
RGP/H : Recensement Général de
la Population et de l'Habitat
SMIG : Salaire Minimum Interprofessionnel
Garanti
UEMOA : Union Economique et Monétaire
de l'Afrique de l'Ouest
UAM : Université Abdou Moumouni
IRSH : Institut des Recherches Sciences
Humaines
SDR : Stratégie de
Développement Rural
Hbts : Habitants
US $ : Dollar United State
I3N : Initiative 3N(les Nigériens
Nourrissent les Nigériens)
IWMI : International Water Management
Institute
SCA : Service Communal de l'Agriculture
SDRP : Stratégie de
Développement Rural et de Réduction de la Pauvreté
SDDCI : stratégie pour un
Développement Durable et une Croissance Inclusive
mm : millimètre
8
Avant propos
Ce travail d'étude et de recherche vise à
approfondir nos connaissances et apporter notre contribution sur le marcher
foncier péri urbain et les expropriations pour cause d'utilité
publique en périphérie des grands centres urbains du Niger,
notamment dans un contexte d'insécurité alimentaire quasi
chronique. Aussi, il consistera ici à mesurer la contribution des zones
périurbaines dans la redéfinition en cours des modèles et
des fonctions agricoles qui ont prévalu jusqu'alors.
Ainsi, dans le cadre de ce travail nous tenterons de donner
une ébauche des contraintes que rencontre la périphérie de
la ville de Zinder quant à l'accès et à l'usage du foncier
agricole périurbain. Ceci, compte tenu de la dynamique
d'étalement que connait le noyau urbain, consécutive aux
marchés fonciers et expropriations pour cause d'utilité publique.
Nous avons d'abord abordé quelques aspects qui seront
développés dans nos futurs travaux de thèse.
Donc, ce travail est centré sur la recherche des
« effets du marché foncier et expropriations des terres
sur les ménages ruraux », particulièrement
dans un contexte où, généralement les politiques et plans
de développement urbains ne prennent pas en compte toute l'importance
qu'ont ces espaces dans la pratique de l'agriculture, ainsi que leur
contribution à la recherche de la sécurité alimentaire.
9
Résumé
Ce travail de recherche s'articule autour du marché
foncier et expropriations périurbains. En effet, dans un contexte de
péjoration climatique et de la diminution des espaces cultivables du
fait de la croissance démographique, cette problématique des
ventes des terres et expropriations a pris de l'ampleur au Niger avec
l'avènement des communes. L'accentuation de ce phénomène
à la périphérie de la ville de Zinder peut s'expliquer par
l'insécurité foncière qui sévit, en raison de la
méconnaissance des procédures de sécurisation
foncière par la plupart des paysans d'une part, mais aussi de l'absence
de mise en oeuvre d'un système de régulation foncière
fiable. Ainsi, compte tenu des enjeux, ce phénomène de
décapitalisation fait intervenir plusieurs acteurs qui vont des
propriétaires terriens en passant par les grands commerçants et
fonctionnaires nantis jusqu'aux communes (actuels arrondissements). Cette
situation affichant un simulacre de bonheur pour les paysans (vendeurs),
constitue en réalité une cause majeure à l'accroissement
de la vulnérabilité des populations par la perte du capital le
plus précieux (la terre) des producteurs ruraux. On assiste ainsi
à une diminution de la production agricole et des ressources naturelles
du fait des changements d'usage du sol, ce qui présente des effets
néfastes sur la vie des populations rurales. Ces derniers
(propriétaires terriens) se transforment en salariés agricoles ou
tout simplement s'adonnent à l'exode permanent pour pratiquer des
activités peu rémunérées.
Mots clés : Expropriation - marché
foncier - marchandisation - périurbain - sécurité
alimentaire - ménage
Summary
This research work is based around the land market and
expropriations suburban. In fact, in a context of climate and impairment of the
decrease in arable land because of population growth, this problem of land
sales and expropriations took of the magnitude in Niger with the advent of the
commons. The emphasis of this phenomenon, at the outskirts of the city of
Zinder can be explained by the land insecurity which prevails, due to the
ignorance of the procedures of securing real estate by most of the peasants on
the one hand, but also of the lack of implementation of a system of regulating
reliable land. As well, given the stakes, this phenomenon of decapitalization
has several players who are going landowners in passing by the big traders and
officials haves up to the House of Commons (current district). This situation
showing a mock of happiness for the peasants (sellers), is in reality a major
cause for the increase in the vulnerability of populations by the loss of the
capital the most valuable (the earth) of rural producers. Attended and to a
reduction in agricultural production and natural resources as a result of the
changes of use of the ground, which presents the adverse effects on the lives
of rural people. The latter (landowners) are transformed into agricultural
workers or simply indulge in the permanent exodus in the practice of low-paid
activities.
Keywords: Expropriation - land market -
commodification - suburban - food safety - household
10
Introduction générale
Dans la perspective de la recherche d'une
sécurité alimentaire, le gouvernement du Niger a adopté
plusieurs documents, dont celui portant sur la Stratégie de
Développement Rural (SDR). Ce document a servi de cadre de
référence pour toutes les actions dans le secteur rural. Parmi
les axes stratégiques retenus il y'a la sécurisation des
conditions de vie des populations à travers la gestion durable des
ressources naturelles (Programme 2 : « Gouvernance locale des ressources
naturelles ») et l'amélioration de la sécurité
alimentaire (Programme 11 : « Lutte Contre l'Insécurité
Alimentaire par le Développement de l'Irrigation »).
Ainsi, malgré toutes les mesures prises et d'importants
progrès accomplis en matière de gestion et de prévention
des crises alimentaires, ces dernières restent chroniques au Niger. Ceci
du fait que les politiques publiques1 restent jusqu'à
présent inopérantes quant à la recherche de la
sécurité alimentaire. Sur la base de la SDR, le Niger vient
d'adopter (en 2012) une autre politique sur la sécurité
alimentaire, dénommée i3N qui dans ses Axes 1, 2 et 3
prévoit respectivement « l'Accroissement et la diversification des
productions agro-sylvo-pastorales et halieutiques », «
l'Approvisionnement régulier des marchés ruraux et urbains en
produits agricoles et agroalimentaires » et « l'Amélioration
de la résilience des populations face aux changements climatiques,
crises et catastrophes ».
L'Etat a donc fait de la sécurité alimentaire,
un objectif prioritaire de lutte contre la pauvreté au Niger.
Il va s'en dire que les causes des crises alimentaires au
Niger sont variées, mais l'une des plus importantes et dont les
réflexions n'ont pas été poussées reste la vente et
les expropriations des terres agricoles pour cause d'utilité publique,
notamment dans le cadre des lotissements en périphérie des grands
centres urbains. Ces transactions revêtent un caractère
préoccupant qu'il faille résoudre, en ce sens qu'elles
créent des paysans sans terre, donc sans activité fixe et sans un
revenu important pour nourrir leurs familles.
1 - Dès les années soixante-dix, le Niger a
fixé comme objectif prioritaire, l'affranchissement des systèmes
de production des aléas naturels par l'accroissement de la production,
sa diversification et la mise en place d'un système de prévision
de crise.
- Les cultures de contre-saison furent lancées et les
habitudes alimentaires des populations bousculées à travers la
valorisation d'un certain nombre d'aliments comme le niébé
(haricot). Mise en place d'un centre de stockage de produits alimentaires
(OPVN) afin de parer à toutes éventualités en cas de
déficit alimentaire aigu. Un système de prévoyance et
d'alerte précoce garantissant au pays un mécanisme de
prévoyance et de lutte contre la sécheresse et la famine.
11
Ainsi, l'espace rural périurbain se trouve
confronté à un double problème, celui de la vente des
terres et de l'expropriation pour cause d'utilité publique
procédée par les collectivités, qui entrainent un
grignotage et un étalement de la ville sur cet espace.
L'explosion urbaine constitue l'une des causes de mutations
des caractéristiques des espaces ruraux. En effet, comme le
démontre Etienne (2005), en 1950 moins du tiers de la population
mondiale vivait dans les villes, mais en 2007 la population urbaine aura
dépassé la population rurale, et en 2030 ce sont deux tiers de la
population mondiale qui seront citadins.
Ni l'Afrique, ni le Niger, encore moins la région de
Zinder n'échapperont à ce mouvement général
d'urbanisation.
Au Niger, l'accroissement démographique de la
population urbaine s'explique par des taux d'accroissement de l'ordre de 9,2%
courant la période 1965-1985. (J. HOSSENLOPP, 1971). La Ville de Zinder
qui comptait à peine 20 131 hbts en 1961, compte aujourd'hui une
population de 265 828 hbts, composée des autochtones et des migrants
venus des villages et autres localités.
Les villages représentent la quasi-totalité de
l'espace périurbain de la Ville de Zinder, où l'agriculture
constitue la principale activité des habitants.
Cependant, et aujourd'hui plus qu'hier la vente des terres et
les expropriations pour cause d'utilité publique, engendre une extension
fulgurante de la ville sur les terres agricoles périurbaines. Cette
situation présente plusieurs effets sur la sécurité
alimentaire des ménages ruraux et même urbains. Elle rend la
pratique de l'agriculture, principale activité des Nigériens
difficile, voire impossible dans le long terme, puisque les espaces y
manqueront dans le périurbain. Et, sans compter l'importante
contribution que cette agriculture périurbaine apporte dans
l'approvisionnement des centres urbains en produits agricoles.
Pour mieux traiter des effets des ventes et des expropriations
des terres agricoles sur la sécurité alimentaire des
ménages ruraux, nous avons organisé le travail en (3) trois
parties.
- La première partie traite du cadre
théorique et méthodologique, où nous évoquerons la
problématique de ventes des terres agricoles et des expropriations, la
revue de la littérature ainsi que les concepts utilisés, et
surtout la méthodologie utilisée pour faire ressortir les effets
de ces actions sur la sécurité alimentaire des ménages.
- La seconde partie est consacrée au
contexte de réalisation de cette recherche, notamment les conditions
dans les quelles les paysans travaillent, ainsi que leur situation de
vulnérabilité qui occasionne les ventes des terres et les
expropriations.
12
- La troisième partie traite des
effets du marchandage des droits fonciers, notamment les ventes et les
expropriations des terres agricoles sur la sécurité alimentaire
des ménages ruraux.
13
Chapitre I : Cadre théorique et
méthodologique
I.1 Cadre théorique
I.1.1 Etude littéraire
- Importance du foncier pour les activités
rurales
La question foncière en Afrique et
particulièrement au Niger, revêt une importance capitale dans la
vie socio économique des populations. Le foncier rural est à la
base du développement économique et sociale du pays, puisqu'il
constitue la base des principales activités rurales occupant ainsi, plus
de 80 % des populations nigériennes.
Selon Shipton & Goween, (1992), « le
foncier n'est pas une relation entre l'homme et la terre, mais une relation
entre les hommes à propos de la terre et des ressources qu'elle porte.
Il est fondamentalement un rapport social, qui a des dimensions
économiques, politiques, juridiques, techniques, institutionnelles. Il
met en jeu les rapports sociaux internes à la société
rurale locale (hiérarchies, différences statutaires,
différenciations économiques), mais aussi les rapports entre
l'Etat et les citoyens. La terre n'est jamais un simple facteur de production,
et le foncier mêle indissociablement des enjeux de richesse, de pouvoir
et de sens ».
Pour Briefing (2009), la terre est
essentielle à la subsistance, la sécurité alimentaire et
l'identité de millions de personnes dans le monde en
développement, en raison de leur dépendance directe de
l'agriculture et des ressources naturelles.
Selon Hubert M et al.,
(2003), dans beaucoup de familles rurales nigériennes, la terre
constitue généralement le seul patrimoine transmissible aux
héritiers. Pour Raulin H., (1961), l'exploitation de la
terre et des autres ressources naturelles est, pour une grande majorité
des Nigériens, les seules opportunités économiques de
participer à la production et d'accéder à des conditions
de vie dignes. Il souligne, qu'à la communauté d'habitat «
guida » se joint la communauté des moyens de production, dont
« la terre ». Il continue en précisant que tout espace
défriché et mis en valeur (maison, champs) sera utilisé
par les descendants du propriétaire. L'auteur montre que la terre, du
moins son acquisition première, se fait par voie d'héritage.
Autrement dit, elle est un bien transmissible aux héritiers dans
beaucoup de sociétés nigériennes.
Sur le plan social, la majeure partie de la
société ouest-africaine assiste actuellement à la
fragmentation des grands groupes domestiques en unités familiales plus
réduites, les principes de réciprocité à long terme
étant remplacés par un calcul de l'avantage économique
à plus court terme ; Amanor., (1999), cité par
Toulmin., et Gueye., (2003). Cela signifie
que les vieux ne peuvent plus compter sur l'offre « gratuite » de
main-d'oeuvre de leurs fils, ces derniers ayant eux-mêmes
abandonné tout espoir d'obtenir des terres de leurs pères, en
raison
14
des pénuries des terres et des ventes foncières
hors de la famille (Chauveau (1997) ; Paré
(2001)), cités par Toulmin., et
Gueye., (2003).
- Dynamique dans l'espace
périurbain
Les travaux antérieurs sur le foncier périurbain
expliquent dans une large mesure les enjeux et les dynamiques existantes. En
effet, les agressions que subit l'espace rural périurbain du fait de sa
proximité avec l'espace urbain sont nombreuses et multiformes.
Pour Lavigne Delville Ph. (1998), le foncier
est perçu comme la toile de fond de la quasi-totalité des
dynamiques de développement rural. La pression démographique, les
mouvements migratoires, la dégradation des ressources naturelles sont
autant d'éléments qui situent la question foncière au
coeur des préoccupations des Etats relativement au développement
durable et à l'aménagement du territoire.
Toute cette situation s'explique par la proximité de
ces espaces ruraux avec la ville, qui leur exerce une forte agression.
C'est dans cette optique qu'Isabel. T (2005)
souligne que l'urbanisation accroît le problème foncier et aboutit
à des situations conflictuelles entre milieux urbains et ruraux.
Pour Ansem Khessairi (2009), les dynamiques
foncières, bouleversent depuis plusieurs décennies l'organisation
et le fonctionnent des activités agricoles et aboutit à la
création d'excroissances urbaines qui semblent peu conformes aux
principes du développement durable. C'est pourquoi elle pose la question
suivante : « Doit-on considérer, dans ces conditions, le
processus d'étalement et ses conséquences comme une
fatalité ? Est-ce l'étalement urbain qui pose le problème
ou les conditions dans lesquelles il se déploie ? ».
En effet, une gestion peu rationnelle et
incontrôlée du foncier aura pour corollaire des lotissements tous
azimuts et des morcellements des espaces d'usage productif. Ces pratiques ne
sont pas sans conséquences fâcheuses sur les populations tant
rurales qu'urbaines.
Ces questions et préoccupations sont liées
à la gestion des ressources naturelles et la productivité des
sols en milieu périurbain.
Ainsi, José. S., (2005), qui a une
vision plus productiviste s'inquiète de la baisse de la capacité
des sols à produire face à l'augmentation de la demande en
denrées alimentaires et à l'extension des villes sur les espaces
ruraux. Pour cet auteur l'étalement urbain ne rime pas
15
avec le développement durable d'une région.
C'est dans cette optique qu'il dénonce la mauvaise foi des élus
locaux en ces termes : « Aujourd'hui, les élus se vantent
d'appliquer les principes du développement durable. Ils cherchent
à préserver le cadre de vie et à maîtriser
l'urbanisation. Pourtant, ces mêmes élus critiquent l'urbanisation
en la qualifiant, de projet de développement ambitieux fort consommateur
d'espace ».
Selon cet auteur, l'étalement et la mutation du foncier
pèsent sur les activités du monde rural notamment sur
l'agriculture et l'élevage: « Bien qu'indemnisées, les
pertes de parcelles perturbent l'activité des exploitations,
l'exploitant pouvant mettre du temps à trouver de nouvelles parcelles.
L'accès au foncier agricole est plus tendu du fait de l'augmentation de
la demande ».
Ainsi, l'étalement urbain sur les espaces ruraux se
traduit par une décapitalisation des paysans aggravant ainsi leurs
conditions de vulnérabilité quant à la gestion
foncière.
Cette vision est partagée par K. Attahi
(2002) qui affirme que : « L'espace rural est le support
d'une activité économique rentable et participe à la
prospérité de la nation, génère des emplois et
constitue un remède pour la déterritorialisation ».
Dans le même sens, Mahamadou A., (2006), souligne
que l'urbanisation galopante entraîne une baisse de la production, car
elle occupe des grands domaines et génère un développement
à sens unique.
Cette situation n'est pas favorable pour l'atteinte des
objectifs en termes de sécurité alimentaire, sachant que la
demande alimentaire ne cessera de croître dans les prochaines
décennies. Elle sera par ailleurs de plus en plus concentrée dans
les zones urbaines, qui ne sont pas productives, et qui ne cessent de grandir
du fait de l'accroissement démographique. Pour répondre à
cette demande il sera nécessaire de mobiliser toutes les formes
d'agricultures. Ainsi, le vrai défi reste l'accroissement de la
production locale disaient Cécilia Bellora et
Mathilde Douillet dans Techniques Financières de
Développement « Refonder les politiques agricoles »
n°94, (2009). Elles précisent que le Rapport pour le
développement dans le monde 2008 rédigé par la Banque
Mondiale a montré que la croissance du secteur agricole est celle qui
contribue le plus à la diminution de la pauvreté.
Ainsi, compte tenu des enjeux du foncier rural, notamment
périurbain, où se développe un marché foncier (la
vente des terres a toujours existé, dès le début du
siècle, des terres familiales étaient vendues à des
planteurs du cacao étrangers dans le sud du Ghana. La charia pour les
musulmans reconnait aussi la vente des terres.
16
Dans le temps, lors des ventes, le chef du segment de lignage
doit donner son accord et les transactions foncières se réalisent
en sa présence, entouré d'autres « sages » du lignage,
des membres de la famille et de témoins, YUNG J. M.,
1985.
Ainsi, des mesures idoines doivent êtres prises pour
freiner ces transactions ventes aux conséquences incalculables.
En effet, les ventes des terres agricoles
périphériques doivent êtres régulées pour
assurer des exploitations viables et durables.
- Développement du marché
foncier
Pour les théories évolutionnistes des droits sur
la terre, on assiste sous l'influence de la croissance démographique et
du marché, à une évolution progressive des systèmes
de propriété commune, vers une généralisation de
propriété privée, individuelle et familiale,
parallèlement à un effritement, puis une disparition du
rôle des autorités coutumières. Cette évolution
n'est encore que partielle, ce qui explique le caractère «
imparfait » de la transformation de la terre en bien marchand. Ces
symptômes (caractère réversible des « ventes » de
terre ; persistance des relations clientélistes entre acheteurs et
vendeurs, etc.) sont des signes d'une situation transitoire, avant le
développement d'un véritable marché foncier
Lavigne Delville Ph. (1998).
La terre, outre son caractère mythique d'antan, est
entrain de connaître une nouvelle valeur qui est cette fois-ci marchande.
Le système traditionnel de gestion foncière subit
également une grande transformation suite à la mutation des
moeurs et traditions. On passe ainsi du droit de propriété de
type collectif à celui de type individuel. La famille élargie qui
était sous le contrôle d'un chef de famille se subdivise en
familles nucléaires. De nouvelles formes d'appropriation de la terre
apparaissent, notamment la vente.
Un certain nombre de travaux empiriques montrent ainsi, pour
les terres agricoles, une tendance à l'individualisation des droits sur
l'espace et les ressources (arbres, résidus de récoltes), avec
régression des formes de contrôle communautaire et
monétarisation croissante des transactions liées à la
terre (« vente » de terre au sein de la communauté puis en
dehors, etc), Lavigne Delville Ph. (1998).
Selon Lavigne Delville Ph., et
Karsenty, (1998), dans certaines régions, la terre
devient un objet de transactions marchandes, parfois ouvertement avec des
procédures locales claires, parfois en cachette, sans que de nouvelles
règles encadrent ces nouvelles pratiques.
17
Les recherches de Garba Belko M. (1985),
illustrent cette situation avec ce qu'il a appelé « les
lotissements tombola », qui apparaissent comme une réponse à
des phénomènes de ségrégation sociale,
résultant de la spéculation foncière sur les lotissements
issus des plans d'urbanisme.
Il s'agit là d'une situation qui résulte du
mauvais respect des procédures de lotissements et de la faible prise en
compte des aspects sociaux dans les plans d'urbanisme.
- Quelle politique foncière adopter pour les
exploitations familiales en Afrique ?
Le premier enjeu d'une politique foncière voulant
sécuriser et stimuler l'agriculture familiale est de sécuriser
les droits, c'est-à-dire de permettre aux agriculteurs, aux
éleveurs, etc. d'exploiter paisiblement les terres et les ressources
qu'ils contrôlent.
Cependant, nous pensons que nos pays ne savent pas quel choix
faire. Ils sont partagés entre encourager les investissements sur le
foncier et la sécurisation des exploitations familiales, ce qui ne peut
être mené ensemble.
Pour Philippe Lavigne Delville et Cécile
Broutin, (2009), éliminer ces exploitations supposées
« non viables » est une des finalités cachés des
politiques de privatisation des terres et de développement des
marchés fonciers.
Ainsi, pour réduire la pauvreté et assurer une
sécurité alimentaire des ménages ruraux, il faut
inévitablement sécuriser les exploitations familiales.
En fonction des contextes, les politiques foncières
peuvent devoir intégrer des mesures sur les structures foncières,
visant à permettre la consolidation des exploitations viables, en
limitant ou contrôlant la spéculation urbaine, en organisant la
mise sous contrat à des agriculteurs des terres non exploitées,
tentant de réguler les marchés fonciers. Les interventions
directes sur les marchés fonciers sont difficiles, mais des mesures
indirectes (alternatives pour l'investissement de l'épargne urbaine, des
appuis au développement d'un tissu d'activités économiques
para agricoles en milieu rural offrant des alternatives de revenus aux jeunes)
peuvent contribuer à desserrer la pression.
A la lumière de toutes ces analyses, on constate que
les espaces périurbains subissent les agressions des villes, qui les
grignotent sans cessent en ruinant tout le système de production. Ainsi,
les villes exercent une influence sur les campagnes en favorisant
l'émergence d'une spéculation foncière, en stimulant la
mobilité des personnes parce que n'ayant plus de terre, en
acquérant une partie du patrimoine du foncier rural, en transformant les
modes d'accès à la terre. Il est clair que le milieu
périurbain et la ville n'en font qu'un, donc ils doivent oeuvrer
18
ensemble. La ville constitue un facteur déterminant
dans la vie des populations périurbaines et c'est ainsi que les
activités des populations rurales périurbaines constituent des
éléments déterminants dans la vie des populations
urbaines. Ceci d'autant plus que les villages périurbains contribuent
significativement dans l'approvisionnement de la ville en produits
alimentaire.
Le problème de l'étalement urbain est
général, toutes les grandes villes du monde connaissent ce
phénomène. Cependant, au Niger très peu d'études se
sont penchées sur les ventes des terres et les expropriations comme
conséquences de cet étalement.
Ainsi, la présente étude constitue une
ébauche des effets de la vente des terres et des expropriations pour
cause d'utilité publique dans la couronne périurbaine sur la
sécurité alimentaire des ménages ruraux.
I.1.2 Définition des concepts/termes
Pour une meilleure compréhension de ce travail, il est
important de définir les concepts et termes suivants :
? Expropriation (pour cause d'utilité publique)
: selon la loi n°2008-37 du 10 juillet 2008,
« c'est la procédure par laquelle l'Etat peut dans un but
d'utilité publique et sous réserve d'une juste et
préalable indemnité, contraindre toute personne à lui
céder la propriété d'un immeuble. L'expropriation ne peut
être prononcée qu'autant que l'utilité publique a
été déclarée à travers une enquête et
qu'ont été accomplies les formalités prescrites par la
loi, et l'utilité publique exprime la nécessité de
réaliser des travaux pour l'intérêt général
».
? Foncier : Ce terme qui est originellement
un adjectif, trouve son origine dans le latin avec le mot fundus qui signifie
fonds de terre. Cet adjectif était utilisé
à l'époque féodale pour désigner une «
seigneurie » ou une « tenure
», puis la rente extraite de la valeur différentielle ou
absolue de la terre (LE ROY E., 1998, in thésaurus du foncier Rome,
1999).
D'après le dictionnaire LAROUSSE, le foncier c'est la
propriété foncière et tout ce qui s'y rapporte (l'eau, la
végétation, les animaux).
Dans le cadre de ce travail, la notion du foncier est
appréhendée dans son sens strict, c'est-à-dire le
substratum terre qui est cette étendue de surface cultivable.
? Marché foncier: C'est le lieu de
rencontre des vendeurs et acheteurs de terre. Ce marché se distingue
cependant d'un marché classique par la particularité du
bien échangé et par le fait qu'il n'est pas
symétrique et généralement en
déséquilibre.
19
? Marchandisation : Processus par lequel les
droits sur la terre deviennent objets de transactions marchandes. Cela suppose
que ces droits puissent être appropriés et qu'ils aient une valeur
pécuniaire.
Selon, LAVIGNE-DELVILLE Ph., 1998, « Ce néologisme
décrit la transformation de la terre en une marchandise, en un
bien susceptible d'être aliéné et vendu.
Ce qui est différent de la monétarisation des relations
foncières (développement de transactions
marchandes de type location, ou passage à une
forme monétaire des redevances autrefois payées en nature)
»
Ceci dit, dans le cadre de ce travail, nous considérons
la marchandisation des droits fonciers comme étant un processus de
transfert définitif de droit à travers la vente ou
l'expropriation.
? Périurbain : Le terme
périurbain désigne l'espace rural situé
en périphérie d'une ville et de sa banlieue.
Cet espace périurbain est l'objet de
profondes transformations fonctionnelles, démographiques, sociales,
voire politiques.
Par manque d'une définition plus précise sur la
zone périurbaine, on est partis de quelques définitions dont
celle de l'espace rural à travers l'Ordonnance N° 59-113/PCN du 11
Juillet 1959 portant réglementation des terres du domaine privé
de la République du Niger et une contribution de Philippe Cadène,
pour en construire une, plus illustrative à notre thème.
Le périurbain constitue ainsi, une couronne autour du
noyau urbain à une distance de 5 ou 15 km au-delà de la couronne
des lotissements et qui est constituée par des villages qui se
différencient par trois caractéristiques principales :
o la population y augmente et la densité y est plus
forte que dans celle des villages ruraux plus éloignés des
centres urbains ;
o une fraction non négligeable des populations qui y
résident ou qui y travaillent les quitte ou les rejoignent
quotidiennement ;
o un double marché foncier opéré dans ce
périurbain, celui des terres agricoles et celui des terres à
bâtir.
Les espaces périurbains sont en évolution
continue, avec une double dynamique à l'oeuvre d'un point de vue
spatial.
- l'agrandissement (ils « grignotent » sur la
campagne),
- et le rétrécissement (ils sont «
mangés » par l'avancement de la ville).
20
? Sécurité alimentaire : au
sommet mondial de l'alimentation (1996), la FAO a défini la
sécurité alimentaire comme étant une situation où
toutes les personnes ont à tout moment un accès physique et
économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive, leur
permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs
préférences alimentaires pour mener à bien une vie active
et saine.
? Ménage : « c'est un ensemble de
personnes, apparentées ou non, vivant habituellement dans un même
logement, mettant en commun toutes ou une partie de leurs ressources pour leurs
besoins communs, mangeant le repas préparé sur un même feu
et reconnaissant l'autorité d'une même personne appelée
chef de ménage » (INS, 2010).
I.1.3 Problématique
Le Niger est un pays enclavé d'une superficie de
1.267.000 km2, dont les 3/4 sont en zone désertique.
La population du Niger est estimée pour l'année
2010 à 15 203 822 millions d'habitants (INS, 2010), avec un taux moyen
d'accroissement de 3.3% par an, l'un des plus élevés d'Afrique.
Cette croissance démographique dépasse celle du PIB agricole du
pays (2.2%). Aussi, il est à noter que le secteur agricole participe au
PIB national à hauteur de 40% et emploie environ 90% de la population
active.
Cependant les revenus agricoles demeurent modiques, en raison
surtout de la faiblesse des rendements, ce qui accentue davantage la
pauvreté en milieu rural (Plan d'Action SDR, 2006). Le PIB des
sous-secteurs agriculture, élevage, forêt et pêche,
rapporté au nombre d'habitants des zones rurales, est de 59 000 F.CFA
par habitant, contre 283 000 F.CFA par habitant pour les PIB des secteurs
secondaires et tertiaires, rapportés à la population urbaine
(SDR, 2003). C'est dire que la pauvreté frappe beaucoup plus les
populations rurales qu'urbaines.
Cette situation montre la fragilité de
l'économie du pays où, selon le profil de pauvreté
établit au plan national, 86% des pauvres vivent en milieu rural, dont
66% d'entre eux sont en dessous du seuil de pauvreté. Cette
pauvreté, qui affecte gravement le milieu rural, constitue un frein au
développement de l'économie rurale et un obstacle à la
croissance du PIB agricole (et même national), qui est dépendante
d'une pluviométrie bien répartie sur le plan spatio-temporel. La
faiblesse du pouvoir d'achat des paysans est une des raisons de la faiblesse de
rentabilité de l'agriculture familiale, et est aussi une des causes de
la vente des terres par les populations les plus démunis.
21
Compte tenu de l'ampleur de la dégradation de
l'environnement et la faible capacité d'accueil des différentes
unités écologiques, qui accentuent les conflits sur l'utilisation
des ressources naturelles, l'Etat du Niger s'est engagé à mettre
en place une politique foncière avec la mise en place du Code Rural. Ce
dernier a entre autres objectifs l'organisation du monde rural et la
sécurisation des opérateurs ruraux, notamment les producteurs
agricoles à travers la sécurisation des exploitations familiales,
puisque le foncier constitue le principal facteur de production des bases
alimentaires et de génération de revenus des paysans
nigériens. Ceci pour faire face à la pression que subissent les
terres agricoles notamment périurbaines, quant à leur devenir
agricole.
Au Niger l'insécurité alimentaire chronique
touche 80% de la population, essentiellement rurale, où chaque
année environ 10 à 30% de la population est déficitaire en
céréales, source principale de la ration calorifique des
ménages (Plan d'Action SDR, 2006). Ce phénomène est
principalement lié à l'improductivité des sols, à
la croissance démographique, à la pauvreté, à la
croissance urbaine de plus en plus forte, exerçant une forte pression
sur les ressources foncières agricoles périurbaines.
Les analyses des systèmes agraires ont largement
démontré la rationalité des pratiques paysannes et leurs
capacités d'adaptation. De fait, en dehors des périodes de crise,
la production a toujours suivi, parfois avec un peu de retard dans des
environnements économiques bien peu favorables. Donc, l'agriculture
familiale est, en Afrique comme ailleurs, la meilleure façon de
conjuguer l'efficacité économique et la distribution de revenus
pour peu qu'on lui offre un cadre institutionnel incitatif.
Toutes les études convergent pour souligner que les
petites exploitations investissent dans une intensification par le travail, et
obtiennent ainsi une productivité de la terre considérablement
plus élevée que les « grandes » exploitations.
DELEPIERRE Gasana (1985), souligne que « ces dernières affichaient
la plus faible production par hectare, à tel point qu'un hectare de
cette catégorie produisait parfois jusqu'à 6 fois moins que les
autres... »2
Ainsi, les exploitations familiales peuvent constituer une
voie pour l'atteinte à la souveraineté alimentaire, qui constitue
un pilier pour la sécurité alimentaire. Pour cela, un clair
soutien aux agricultures familiales s'impose puisque ce sont elles qui, dans un
contexte de libéralisation et
2 Changements fonciers et dynamiques agraires le
Rwanda, 1900-1990, Catherine ANDRE et Philippe LAVIGNE DELVILLE in
Quelles politiques foncières pour l'Afrique rurale ?
22
de mise en concurrence accrue des agricultures à
l'échelle internationale ont assuré la quasi-totalité de
l'accroissement de la production depuis 40 ans. Ainsi, l'agriculture familiale
quelle que soit sa localisation doit être prise en compte dans la
recherche de la sécurité alimentaire durable.
Cependant, on constate dans l'espace périurbain
nigérien, l'installation d'un phénomène de vente des
terres, soit par les propriétaires terriens, se sentant menacés
par une urbanisation incontrôlée des grands centres urbains,
transformant les champs en bâtis, soit par les populations pauvres pour
la satisfaction des besoins immédiats, à des personnes
nanties.
Il existe également des actions d'expropriations pour
cause d'utilité publique faites par les communes (aujourd'hui
arrondissements) pour la réalisation des lotissements.
La terre, qui dans bien des cas était jadis un bien
inaliénable, qui ne peut être vendue et qui n'est
prêtée ou cédée qu'à des conditions
très strictes, a acquis depuis quelques années une valeur
marchande inestimable. Les ventes sont devenues pratiques courantes au cours
desquelles un mouvement de thésaurisation aux fins spéculatives,
d'une ampleur surprenante a été enregistré dans certaines
régions du centre, notamment où est née une
véritable classe de propriétaires terriens. Ainsi, le capital
foncier rural périurbain se trouve grignoté, rendant la
production agricole de plus en plus précaire.
Cette situation contribue à la décapitalisation
foncière des classes sociales les plus pauvres par les ventes des terres
agricoles et les expropriations pour cause d'utilité publique.
La Ville de Zinder constitue l'une des villes du Niger
où le marché foncier périurbain et les expropriations ont
pris une ampleur inquiétante ces dernières années. Ces
actions contribuent à créer une spéculation autour du
foncier rural, et ce, généralement au profit d'un changement de
vocation, alors même que ces espaces agricoles jouent un rôle
stratégique dans la recherche de la sécurité
alimentaire.
Ces transactions foncières se font souvent dans des
conditions irrégulières du fait de la méconnaissance des
propriétaires fonciers des procédures de sécurisation et
de l'absence ou la non mise en oeuvre d'un système de régulation
de marché du foncier rural. Sans contrôle, ce marché
foncier risque de gagner du terrain et accélérer la
décapitalisation des plus démunis avec tous les effets
possibles.
Cette situation est d'autant plus inquiétante qu'elle
accentue la vulnérabilité des populations rurales. En effet, la
ruée vers le foncier agricole périurbain contribue à
décapitaliser les paysans, même si la vente de la terre constitue
un droit pour son propriétaire comme le précise l'art. 14 de
l'ordonnance n°93-015 portant POCR, qui dit que "Le
propriétaire bénéficie de la
23
maîtrise exclusive de son bien". Cependant,
nous pensons que cette disposition ne favorise pas le maintien des petites
exploitations, au contraire elle contribue tout simplement à
créer une classe des paysans sans terre qui, à terme viendront
s'installer dans les centres urbains pour exercer des activités
difficilement adaptables et précaires. L'échec de ces
activités peut pousser ces populations à l'exode, à des
activités illicites ou précaires du fait qu'elles n'ont plus de
bien vendable, ni de revenu pour exercer une autre activité plus
prolifique (plus de terre, plus de revenu ayant servi à la vente des
terres).
L'affectation des terres agricoles à d'autres fins
contribuera sans doute à la destruction du potentiel productif, ce qui
aura comme corollaire, une diminution de la production, un accroissement de
l'insécurité alimentaire, une résurgence des conflits
fonciers ruraux...etc
Et, à travers ces pratiques de marché du foncier
périurbain et d'expropriation se créait une surenchère des
terres dans des conditions qui ne sécurisent pas les
propriétaires terriens, étant donné qu'il n'existence pas
de système de régulation des marchés fonciers ruraux.
Cependant, la vente et les expropriations des terres ne sont
pas un phénomène nouveau, mais c'est l'ampleur qu'elles prennent
qui est récente et préoccupante quant à l'avenir de
l'agriculture familiale.
En effet, dans un nouveau contexte de ruée vers les
terres agricoles périurbaines et de "marchandage en dessous du manteau
", la première question qui vient à l'esprit à travers
notre sujet d'étude « les effets des marchés
fonciers et expropriations des terres » est : quels sont les
effets de la décapitalisation foncière ? Ainsi, nous
déclinons cette question en cinq (5) questions subsidiaires.
i) Quelles sont les procédures de cette marchandisation
foncière ?
ii) Quels sont les effets de ces marchés fonciers
périurbains sur la productivité et la sécurité
alimentaire des ménages ?
iii) Quels sont les effets de l'expropriation des terres
agricoles dans le cadre des lotissements sur les populations, en
considérant l'expropriation comme étant un autre type de
marchandisation de droits fonciers ?
iv) Quelle relation existe-t-il entre l'expropriation et les
ventes des terres agricoles périurbaines ?
v) Comment réguler la vente des terres et
l'expropriation de façon à ce que cela puisse profiter aux
propriétaires fonciers situés à la
périphérie de la Ville de Zinder ?
24
I.1.4 Objectifs de la recherche
Objectif principal :
En partant des connaissances actuelles et par
référence au débat international sur la question du
marché foncier, l'objectif principal de ce travail est de faire un
diagnostic et d'analyser les axes stratégiques de réflexion sur
les effets des marchés fonciers et expropriations périurbains au
niveau de la Ville de Zinder. L'approche proposée met l'accent sur les
dynamiques observées dans le périurbain des grands centres
urbains.
Il s'agit spécifiquement de :
y' Appréhender les enjeux liés aux marchés
fonciers et expropriations périurbains ; y' Identifier comment
fonctionnent ces marchés fonciers et les expropriations pour cause
d'utilité publique ;
y' Faire le lien entre l'expropriation pour raison de lotissement
et les ventes des terres ; y' Faire des propositions pour une gestion
équitable et durable des ressources foncières à la
périphérie de la Ville de Zinder.
I.1.5 Hypothèse
Une hypothèse a été émise pour
atteindre nos objectifs :
y' Les marchés fonciers périurbains et les
expropriations des champs dans le cadre des lotissements, constituent un frein
au processus de sécurisation du foncier périurbain et contribuent
à la baisse de la productivité, compromettant ainsi la
sécurité alimentaire des ménages ruraux.
I.1.6 Les raisons du choix du thème
Le choix de ce sujet se justifie par l'ampleur que prennent
les phénomènes de vente des terres et expropriations dans les
espaces périurbains des grands centres urbains du Niger. En effet, il se
développe une forte spéculation autour du foncier
périurbain et surtout, à des fins non agricoles et au
détriment d'une classe de population de plus en plus
vulnérable.
Aussi, le choix de ce sujet se justifie par le peu de
recherche en lien avec le marché foncier périurbain et la
décapitalisation des habitants des villages périphériques
des grands centres urbains du Niger et particulièrement de la Ville de
Zinder.
I.2 Cadre méthodologique
Dans le cadre de ce travail, l'approche méthodologique
utilisée est répartie en 8 étapes. Il y'a
25
d'abord la recherche documentaire, les entretiens avec les
personnes ressources, l'échantillonnage, la conception d'outils de
collectes d'information, l'enquête, l'utilisation d'images satellitaires,
la cartographie et les difficultés rencontrées.
I.2.1 La recherche documentaire
Cette phase vise à mieux comprendre notre
problématique à travers la lecture des différents travaux
(thèses, mémoires, études) effectués en lien avec
la question, afin d'appréhender leurs portées et leurs limites.
Il s'agit notamment des centres de documentation du Secrétariat
Permanent du Code Rural, de la FLSH de l'Université Abdou Moumouni de
Niamey, du LASDEL, de l'IUT de Zinder. Plusieurs ouvrages
généraux et spécifiques ont été
consultés, ainsi que des textes législatifs et
réglementaires du Niger en lien avec notre thème de recherche.
I.2.2 L'échantillonnage
Pour constituer l'échantillon, on a utilisé les
données du RENACOM en vue d'identifier les villages situés
à la périphérie de la Ville de Zinder.
Notre démarche a privilégié une
enquête qualitative au niveau d'un échantillon de villages
concernés par les phénomènes de vente et expropriations
des terres, compte tenu de leur position périphérique de la Ville
de Zinder.
Ainsi, de manière aléatoire nous avons pris 10%
des villages de chaque commune, dont des villages lotis sans bâtis et des
villages sans lotissements.
L'échantillon a porté donc sur les villages
suivants : Dadin Sarki, Malam Amar, Banguiya, Kagna Malam Gaja, Midik, Babban
Tabki, Doroji.
Ainsi, au sein de chaque village, 10% également de chefs
de ménages ont été enquêtés.
8°5500" 8°57'30" 9°00'00" 9°2'30" 9'501'
9°71'
N
DAKOUSSA
Co CV_ Ln
o b
TIRMINI
Co r-- -d-
Co a
o M
DOGO
Réalisation: Service Cartographie SIG SPCR
Conception: Noiihou Ibrahim, Mai 2011 Source: Base de données
Agrhyrnet
M
2 0 2 4 Kilometers
,
8'S5'00" 8'57'30" 9'00'02 9'231' 9°@01' 9730'
Villages enquêtés
· Ville de Zinder
Route bitumée
I--I Limites indicatives
de le Ville de Zindg
w
co
co
W
Q Q Q
W u
CO CO
Q
26
Carte 1: Localisation des villages
d'enquête
27
I.2.3 La conception d'outils de collectes
d'informations
Il s'agit comme outils, des guides d'entretiens individuels et
collectifs à l'endroit des paysans qui sont les principaux
concernés, des cadres des services techniques et des ONG, pour relever
leurs points de vue et leurs préoccupations. Des questionnaires
individuels ont été élaborés à l'endroit des
populations concernées.
I.2.4 L'enquête
Il s'agit dans le cadre de ce travail, d'une enquête
sommaire qui a permis de collecter des informations plus ou moins
générales et qui seront précisées par la suite dans
les travaux de thèse. Cette phase a concerné tous les villages
échantillons et a permis de voir l'ampleur et les conditions dans
lesquelles se déroulent les marchés fonciers périurbains
et les expropriations pour cause d'utilité publique.
Des questionnaires ont été administrés
aux chefs de ménages issus des villages échantillon, aux
producteurs maraichers rencontrés sur les sites et aux chefs des
villages.
Les guides d'entretiens individuels sont utilisés
auprès des personnes ressources, plus ou moins impliquées dans la
gestion du foncier rural et les responsables des services techniques. Il s'agit
des agents du Secrétariat Permanent du Code Rural, des agents des
services techniques régionaux et communaux de Zinder, des
autorités communales.
Il faut préciser que la méthode qualitative a
été privilégiée dans le cadre de ce travail. Dans
cette méthode c'est l'entretien semi-directif qui est utilisé
dans la perspective de recueillir les informations sur les effets du
marché foncier et de l'expropriation pour cause d'utilité
publique.
I.2.5 L'utilisation d'images satellitaires
Pour une meilleure perception de la dynamique de la ville sur
le foncier périurbain, des images satellitaires Landsat de 1986 et 2011
ont été utilisées, pour avoir une situation actuelle de
l'étalement de la ville sur les ressources foncières agricoles en
périphérie de la Ville de Zinder.
L'utilisation de ces images a permis de faire une analyse
diachronique de la dynamique à la périphérie, pour ainsi
voir l'ampleur de l'évolution des lotissements sur les ressources
naturelles rurales.
I.2.6 La cartographie
Différents types de cartes ont été
réalisées dans le but de mieux illustrer notre champs
28
d'étude, ainsi que les effets des ventes et expropriations
pour cause d'utilité publique. Il s'agit de cinq (5) cartes
représentant la localisation et les aspects physiques de la zone
d'étude et deux (2) cartes sur la dynamique spatiale de la ville de
Zinder.
1.2.7 Difficultés rencontrées
? La principale difficulté est liée à la
proximité des villages à la Ville de Zinder qui fait qu'on ne
peut rencontrer les paysans qu'en fin de soirée
? La réticence des responsables des services techniques
à fournir les données
29
Chapitre II : Contexte général de la
recherche
La région de Zinder fait partie des zones qui
concentrent le plus de personnes vulnérables. Les faiblesses et les
insuffisances des investissements, la forte croissance démographique,
les aléas climatiques (zones septentrionales surtout) et la
dégradation des ressources naturelles, sont principalement à
l'origine de cette vulnérabilité3.
La Ville de Zinder qui est la plus peuplée du Niger
après Niamey, avec une population de 265 828 hbts (INS, projection
démographique 2010) et un taux de croissance urbaine de 6,2%,
présente un déficit agricole quasi chronique.
La forte croissance démographique de la ville,
l'influence des spéculateurs jouant sur la pauvreté des paysans
et surtout l'installation de la raffinerie de pétrole, accentuent le
phénomène de vente des terres que nous appelons de «
détresse », puisque c'est à contre coeur que les paysans
vendent les terres qui représentent leur capital le plus
précieux.
En dehors des ventes, les paysans subissent l'expropriation
pour cause d'utilité publique par les communes. En effet, la
méconnaissance des paysans quant aux procédures modernes de
sécurisation foncière, facilite les expropriations par les
communes, pour la réalisation des lotissements
généralement inopportuns. Cette action se fait au dépend
de l'activité agricole. Tout un marché foncier s'est
installé attirant aussi bien les riches commerçants de la Ville
de Zinder que ceux des autres régions du Niger.
Cette dynamique pousse les communes à faire des
lotissements anarchiques sans réellement penser aux populations rurales,
aux ressources naturelles périphériques. Les terres agricoles,
sensées contribuer à l'amélioration de la production
agricole au niveau communal et à lutter contre
l'insécurité alimentaire en payent les frais.
Ainsi, le déficit agricole de la Ville de Zinder est
principalement lié au prélèvement fait par la ville sur le
foncier rural, ainsi qu'au manque d'intérêt des citadins pour
l'agriculture périurbaine.
II.1. Caractérisation de la zone d'étude
II.1.1. Présentation de la Ville de Zinder
Zinder capitale d'une région très peuplée
comprenant 5 départements, elle est la ville la plus importante du Niger
après la capitale Niamey.
3 Rapport : Profil sécurité alimentaire
au Niger
30
II.1.1.1 Localisation et organisation administrative de
la Ville de Zinder
La Ville de Zinder est construite sur une légère
pente, inclinée du Nord au Sud. Elle se situe entre
13°48'19»N, 8°59'18»E avec une superficie de 12 466
km2 et une densité de plus de 428 hts/km2.
A l'instar de Maradi et Tahoua, Zinder a été
créée par la loi n° 2002-016 du 11 Juin 2002 portant
création des Communautés Urbaines, puis érigée en
ville par la loi 2010-056 portant érection des communautés
urbaines de Niamey, Maradi, Tahoua et Zinder en communes à statut
particulier ou villes et les communes les composant en arrondissements. Elle
compte 5 arrondissements, dont les 4 premiers sont composés de villages
et quartiers de la ville, alors que le 5ème arrondissement
est essentiellement rural.
Chaque commune a la charge de la gestion du foncier rural qui
relève de son entité administrative4.
Carte 2: Localisation de la zone
d'étude
4 loi 2000-012, déterminant les principes
fondamentaux de la libre administration des régions, des
départements et des communes ainsi que leurs compétences et leurs
ressources
31
II.1.1.1 Caractéristiques physiques
II.1.1.2.1 Climat
Le climat de la Ville de Zinder est de type sahélo -
soudanien caractérisé par trois saisons : une saison pluvieuse de
juin à septembre, une saison froide et sèche d'octobre à
février et une saison sèche et chaude de mars à mai.
La Ville de Zinder présente des hauteurs
pluviométriques de plus de 500 mm/an, avec une pluviosité
très marquée. Cette dernière, entraîne à
l'égard de toute la région un déficit de
précipitations depuis une vingtaine d'années, occasionnant un
déplacement des isohyètes vers le Sud. Ce déplacement des
isohyètes, présente des conséquences sur les
activités des populations périphériques.
La moyenne annuelle des précipitations sur les quarante
dernières années est de 410,2 mm comme le montre la figure
n°1.
Graphique 1: Variations interannuelles de la
pluviométrie au niveau de la ville de Zinder de 1970 à 2010
(source : Aéroport de Zinder, 2011)
De manière générale, les données
pluviométriques de 1970 à 2010 au niveau de la station de
l'aéroport de Zinder, montrent que les précipitations fluctuent
d'une année à l'autre, avec un pic de 607,1 mm en 1978.
L'analyse du graphique n°1 montre que de 1970 à
1973, ainsi que les années 1977, 1981, 1983, 1984, 1987, puis de 1989
à 1993, et de 1995 à 1997, mais aussi les années 2002,
2004, 2007 et 2009, présentent des précipitations
inférieures à la moyenne interannuelle.
32
Ces fluctuations ont favorisé le maintien du
déficit agricole, puisque, une année sur deux les
précipitations sont inférieures à la moyenne
interannuelle, et ne permettent pas aux végétaux de boucler leur
cycle végétatif.
Cependant, une analyse à travers la moyenne mobile avec
pas de 5 ans, relève bien le déficit pluviométrique des
années 1970 à 1977, et de 1983 jusqu'en 2000. Cette situation
montre une baisse sensible des précipitations par rapport à la
moyenne interannuelle.
II.1.1.2.2 Type de sols
On distingue du point de vue pédologique, plusieurs
types de sols au niveau de la Ville de Zinder.
? Des sols argileux à horizons imperméables
où sont localisés les bas-fonds et les mares des villages
périphériques. Ces sols sont favorables à la production
maraîchère et à quelques cultures
céréalières, nécessaires à l'alimentation de
la ville et à la lutte contre l'insécurité alimentaire.
? Des sols caillouteux ou à blocs rocheux
composés essentiellement de granites.
? Il existe également des sols érodés. A
l'état actuel, ce type de sol n'est pas propice au développement
d'une agriculture pluviale, et des grands travaux de restauration sont
nécessaires pour leur mise en valeur (banquettes
).
? Des sols limono-sableux qui nécessitent des actions
de restauration pour une meilleure mise en culture et un accroissement de la
production.
Cependant, les paysans exploitent ces sols à travers
une agriculture pluviale et maraîchère qui contribue de
manière significative à la satisfaction de leur besoin
alimentaire.
33
Carte 3: Typologie des sols de la ville de
Zinder
34
II.1.1.2.3 Hydrographie
Le réseau hydrographique de la Ville de Zinder comprend un
important kori saisonnier, drainant un bassin versant de près de 100
km2. Il faut aussi noter la présence de 8 mares en
périphérie de la ville, alimentées par les eaux de
pluie.
II.1.1.3 Caractéristiques économiques
L'économie des populations périphériques
à la ville de Zinder est essentiellement basée sur l'agriculture,
l'élevage, le commerce et l'artisanat.
II.1.1.3.1 Agriculture
L'agriculture constitue la principale activité occupe
environ 75% de la population de Zinder. En ce qui concerne l'agriculture sous
pluie, les principales cultures pratiquées sont le mil, le sorgho, le
niébé, l'arachide, le voandzou, le sésame et autres
cultures de case comme l'oseille
et le gombo5.
Le mil et le sorgho représentent des cultures
d'autoconsommation de la population, même si on constate une tendance au
changement des habitudes alimentaires avec la consommation du riz et des
pâtes alimentaires. Quant au niébé et l'arachide, ils sont
essentiellement destinés à la vente.
En saison sèche, le maraîchage prend le relais
avec la culture des légumes (laitue, chou, tomate, carotte...etc).
L'arboriculture fruitière comme le citronnier, le
Moringa oleifera constitue également une autre source de revenu
pour les populations.
Le taux d'occupation des terres agricoles se situe autour de
100% au niveau de la Ville de Zinder.
Les villages périphériques tel que Midic jouent
un rôle important pour le ravitaillement des marchés de la Ville
de Zinder en produits maraîchers, au point qu'une grève d'un
à deux jours des maraîchers peut entrainer une rupture en
légumes dans le marché Dollé.
Sur le plan alimentaire, en dépit de toutes ses
potentialités, la Ville de Zinder présente chaque année un
déficit agricole, et ce, malgré l'accroissement des superficies
cultivées (par
5 Elaboration du document cadre sur la relance du
secteur de l'élevage, 2001
35
grignotage des espaces réservés au
pâturage) en mil et sorgho principalement entre 2007 à 2008, puis
à partir de 2009.
Cette situation s'explique par les conditions climatiques peu
favorables à l'agriculture, l'insuffisance des terres et l'accroissement
de la population.
Graphique 2: Evolution des superficies
cultivées en mil et sorgho de 2001 à 2010 (Source: Service
Communal de l'agriculture de Zinder, 2011)
Cependant, cet accroissement des superficies cultivées
qui ne rime pas avec l'étalement urbain, trouve son explication à
travers l'occupation des aires de pâturage, le grignotage des couloirs de
passage par les agriculteurs et la mise en valeurs des terres impropres
à l'agriculture. Ceci signifie que dans quelques années les
espaces destinés à l'élevage vont disparaître,
rendant l'exercice de cette activité plus difficile encore.
II.1.1.3.2 Elevage
Tout comme l'agriculture, l'élevage est une
activité déterminante dans l'économie de la Ville de
Zinder. L'élevage de type extensif pratiqué à la
périphérie de la ville, est essentiellement constitué
d'ovins, de caprins et de bovins.
L'élevage des caprins et des ovins, ainsi que la
volaille est généralement pratiqué par les femmes.
Cependant, les espaces affectés à l'agriculture
et à l'élevage subissent les effets conjugués des
aléas climatiques et de la pression humaine, particulièrement en
périphérie de la Ville de Zinder. En effet, la proximité
de la ville engendre une spéculation foncière qui provoque la
détérioration des ressources foncières, base de la
pratique de l'agriculture et de l'élevage.
36
II.1.1.3.3 Commerce
Le commerce constitue une activité complémentaire
pour les populations rurales
périphériques. Il se pratique au niveau des
villages sous formes d'AGR, et dans la Ville de Zinder, où c'est
essentiellement un commerce de bétail.
II.1.1.3.4 Artisanat
Les activités artisanales demeurent largement
traditionnelles dans leurs techniques et leur
organisation, malgré l'appui des certains projets et
ONG. La ville a construit sa renommée grâce à la
qualité incomparable de sa maroquinerie.
Il n'en demeure pas moins vrai que d'autres métiers
(comme la tannerie, la teinture) existants ou introduits par les projets
d'appui à l'artisanat (NIGETECH, DANI) représentent valablement
la ville, et même la région dans toutes les grandes rencontres
nationales et internationales.
37
Chapitre III : Marché foncier périurbain
et expropriation périurbaine
Dans l'espace périurbain de la Ville de Zinder se
développe une importante spéculation sur le
foncier agricole. Cet espace se trouve ainsi confronté
à deux types de problèmes fondamentaux.
Le premier problème est la vente des terres agricoles
par nécessité. En effet, les paysans meurtris par les conditions
de pauvreté dans lesquelles ils vivent, se voient contraints de vendre
les seules terres qu'ils exploitent à une catégorie sociale
urbaine qui n'aspire qu'au gain.
Le second problème concerne l'expropriation des terres
agricoles par les communes (actuels arrondissements) pour faire des
lotissements. Cette expropriation ne répond toujours pas à son
objectif initial qui est d'utilité publique.
En effet, les communes effectuent des expropriations
extrêmes pour lotir l'espace périurbain, non pour satisfaire un
besoin en logement, mais uniquement pour gagner de l'argent sans penser aux
conséquences que ça pourrait avoir sur les ressources naturelles
et leurs utilisateurs.
En réalité les deux problèmes sont
liés, puisqu'ils poussent les paysans à se décapitaliser
de leur principale richesse qu'est la terre, les rendant ainsi plus
vulnérables à l'insécurité alimentaire.
III.1 Dynamique démographique et spatiale de la
Ville de Zinder
La Ville de Zinder connait une forte croissance de sa population
sur le plan régional, avec de
taux d'accroissement de 3% en 2001. Bien qu'inférieur
à la moyenne nationale (3,3), ce taux d'accroissement reste
élevé par rapport à celui des autres régions du
pays.
Cet accroissement démographique constitue l'une des
causes de l'étalement que connait la ville. En effet, la superficie de
la ville est passée de 1397,87 ha soit 13 978 700 m2 en 1986
à 2179,88 ha soit 21 798 800 m2 en 2011. Elle a presque
doublé en 25 ans, compte tenu de l'accroissement des spéculations
foncières.
III.1.1 Dynamique démographique
Selon les 1ères enquêtes en 1956 et 1964,
la population de la Ville de Zinder est estimée
respectivement à 14 295 hbts et 22 900 hbts.
Au 1er recensement de 1977, la population des
quartiers du noyau urbain était de 53 714 hbts. Onze ans après,
c'est-à-dire en 1988 date du 2ème recensement, la
population est passée à 122 100 hbts, suite au rattachement de 28
villages périphériques à la Ville.
38
La décentralisation qui rattache une partie du canton
de Baban Tapki en 2001, fait évoluer la population à 206 260 hbts
(RGP/H, 2001).
Graphique 3: Evolution de la population de la ville de
Zinder de 2006 à 2011 (Source: Service Communal de
l'agriculture de Zinder, 2011)
La forte croissance démographique de la Ville de
Zinder, ainsi que l'espoir d'un développement économique de la
région avec l'installation de la raffinerie de pétrole ont
entrainé un accroissement des ventes des terres agricoles et des
expropriations pour cause d'utilité publique, au profit des lotissements
sans aucun respect des procédures et plans en la matière.
En effet, la Ville de Zinder connait une évolution
spatiale sans précédant depuis quelques années.
III.1.2 Dynamique spatiale de la Ville de Zinder
Au début, la Ville de Zinder se composait de deux
quartiers bien distincts, celui de Birni et de Zengou. Cette division
correspondait aux nécessités de défense et de
contrôle des voies de transit. Birni construit sur une colline dans le
souci d'assurer la défense contre les incursions ennemies, alors que
Zengou était spécialisé dans les transactions
commerciales.
En 1950, Zengou s'agrandit et un autre noyau apparaît au
Nord Est de Zengou, Garin Malam (quartier des marabouts).
En 1960, les surfaces bâties augmentent et les trois
noyaux tendent à se souder en même temps qu'on assiste au Sud de
la ville à la création de l'aérogare et d'un camp
militaire.
39
En 1980, les trois noyaux forment un seul bloc. C'est donc
ainsi que la ville va s'étendre de plus en plus au détriment des
ressources foncières rurales périphériques.
Le graphique n°4 montre la dynamique de l'extension de la
ville sur les ressources foncières périphériques notamment
les champs de 1982 à 2000.
Graphique 4: Evolution spatiale de la ville de Zinder de
1982 à 2000 (Source: Direction Régionale de l'Urbanisme
de Zinder)
Cette extension spatiale de la ville créée de
nouvelles activités, notamment la vente des terres agricoles dans la
perspective des lotissements.
Ainsi en 6 ans, c'est-à-dire de 1988 à 1994 on
constate que la superficie de la ville s'est multipliée par deux par
rapport à celle de la période 1982-1988.
De 1994 à 2000 (290,8 ha) la superficie n'a cessé
d'évoluer, doublant celle de la période 1982 à 1988.
Ces évolutions s'expliquent par le besoin des populations
en lotissement, ainsi que la mise en oeuvre par l'Etat des politiques de
lotissement.
III.2 Développement des marchés fonciers
et expropriations dans l'espace périurbain de Zinder
On constate depuis quelques années une hausse de vente de
terres agricoles à la périphérie de la Ville de Zinder. En
effet, depuis l'installation des communes (2002-2004) auxquelles a
été
40
transféré le droit de lotir6, le
lotissement a constitué leur principale source de revenu. Ainsi, il
s'est de facto développé un engouement pour les lotissements, et
ceci sans une réelle manifestation des besoins en lotissements.
En effet, la dynamique de la parcellarisation est tellement
criarde que, même dans dix (10) ans certains champs lotis ne seront pas
construits.
Cette dynamique de parcellarisation explique le
développement des marchés fonciers dans la
périphérie de la Ville de Zinder. Les paysans se
précipitent pour vendre les terres aux plus offrants ou vont vers les
communes pour leur proposer de parcelliser les champs.
Cependant, certains paysans continuent à mettre en
culture les lotissements. Mais cette mise en culture des champs lotis devient
difficile, puisque les paysans hésitent à investir dans ces
champs parcellisés par crainte d'une éventuelle expulsion.
Il arrive aussi que les propriétaires interdisent aux
paysans toute exploitation de leurs parcelles.
III.2.1 Le rétrécissement des ressources
foncières périphériques
L'étalement urbain consécutif aux ventes des
champs et aux lotissements a modifié les unités d'occupation du
sol de la Ville de Zinder, comme l'indique les cartes n°5 et n°6.
6 Loi 2008-37 modifiant et complétant la loi n°61-37
du 24 novembre 1961 réglementant l'expropriation pour cause
d'utilité publique et l'occupation temporaire et Ordonnance n°
2010-54 du 17 septembre 2010 portant Code Général des
Collectivités Territoriales de la République du Niger.
41
Carte 4: Occupation des sols en 1986
Carte 5: Occupation des sols en 2011
42
Ces cartes permettent d'évaluer l'évolution de
l'occupation des sols de 1986 à 2011, ainsi que les changements
intervenus en périphérie de la Ville de Zinder.
Ainsi, la situation de 1986 et 2011 se caractérise par
la présence des steppes arbustives très denses sur la bande Sud,
Sud-Est, et au Nord-Est. Des steppes arbustives denses au Sud-Est et au
Nord-Est. On constate aussi la présence d'une steppe arbustive
dégradée, s'étalant de l'Ouest au Nord, ainsi qu'au Sud du
périmètre des lotissements.
Quant aux espaces cultivables, ils se localisent tout autour
de la ville.
Ainsi, les cartes n°5 et n°6 montrent un
rétrécissement des superficies consacrées à
l'agriculture, au maraîchage et à l'élevage, du fait de
leur « grignotage » par la Ville de Zinder.
La dégradation de ces ressources naturelles
périphériques, reflet du poids démographique et des enjeux
économiques principalement, consécutive à la vente des
terres et aux expropriations, a changé la situation des années
1986 et a conduit à une situation de rareté, comme l'indique la
carte d'occupation de 2011.
Cette rareté affecte principalement les terres
cultivables et celles destinées à l'élevage, avec comme
conséquence un déficit de production et une disparition des
espaces servant au pâturage.
La dégradation des ressources foncières
périphériques au profit de la ville est illustrée à
travers les graphiques n°6 et n°7, qui montrent le taux de
l'étalement urbain sur l'espace rural.
Graphique 5: Taux d'occupation des sols en 1986
(source : géo référencement de l'image landsat de
1986)
43
Graphique 6: Taux d'occupation des sols en
2011(source : géo référencement de l'image landsat de
2011)
En comparant les deux graphiques on remarque un
rétrécissement des ressources foncières
périphériques au profit d'un accroissement des espaces
urbanisés.
Ainsi, on passe en 15 ans de 20% d'occupation urbaine à
31% soit 3577,7500 ha engloutis par les lotissements.
Les 36% des steppes en 1986, toute catégorie confondue,
sont réduits à 29% en 2011. Ces espaces destinés au
pâturage et qui assuraient un bon développement de ce secteur,
passent de 2547,59 ha à 2041,49 ha soit un écart de 506,1 ha.
Quant aux espaces réservés aux cultures sous pluies, ils passent
de 2788,82 ha à 2562,53 ha soit un écart de 226,29 ha, ce qui
représente 3% des unités d'occupation cartographiées.
La végétation étant réduite, la
production agricole est soumise à une dégradation croissante par
l'action de l'érosion hydrique et éolienne.
Le réseau hydrographique sur l'espace
périphérique cartographié est constitué d'une
importante mare, notamment celle de Kagna où se pratique le
maraîchage et la riziculture.
Avancée du front urbain
44
Photo 1: Pratique du maraichage et de la
riziculture autour de la mare de Kagna (Source: nos enquêtes)
La photo n°1 montre la mare de kagna, qui est un site de
maraichage et de la culture du riz, quoique en quantité réduite.
Ce site est confronté à l'étalement du front urbain,
consécutif aux ventes et expropriations sans aucun contrôle.
Ainsi, les superficies destinées aux cultures
maraîchères dans l'espace cartographié passent de 209,20 ha
à 187,10 ha soit 22,1 ha engloutis par la ville.
Les phénomènes des ventes et expropriations des
terres sont animés par un certain nombre d'acteurs.
III.3 Les acteurs du marché foncier et de
l'expropriation périurbains pour cause d'utilité publique
Au Niger, il existe plusieurs institutions publiques,
privées et même coutumières qui rentrent dans le jeu de
transfert définitif des droits fonciers. Ainsi, l'importance de
l'intervention de ces institutions est surtout, de favoriser la bonne marche
des transactions pour une coexistence pacifique entre les acteurs du foncier,
dans le but de préserver la paix sociale et d'assurer les conditions
minimales d'un développement humain.
Cependant, pour que chaque institution puisse jouer pleinement
son rôle, il faut qu'elle soit fonctionnelle et contrôlée
pour éviter certains abus.
Ainsi, en périphérie de la Ville de Zinder se
développe un important marché foncier qui fait intervenir
plusieurs acteurs.
45
III.3.1 Les acquéreurs
En matière de marchandage des droits fonciers et de
transfert définitif de droit foncier sur les terres agricoles, les
acquéreurs peuvent êtres des personnes physiques comme des
personnes morales.
Les personnes physiques sont généralement des
spéculateurs constitués principalement par des grands
commerçants de la Ville de Zinder, qui achètent les terres pour
revendre plus chères à d'autres spéculateurs. Il arrive
aussi que ces commerçants thésaurisent les terres dans la
perspective d'un futur lotissement, pour ainsi faire du gain en parcelle.
Il peut s'agir également des personnes issues des
autres régions du Niger.
Les personnes morales sont les communes qui, par l'action
d'expropriation pour cause d'utilité publique prévue par la
loi n°2008-377, obligent les
propriétaires terriens à leur céder leurs terres agricoles
pour cause d'utilité publique comme dans le cadre des opérations
de lotissement. En contrepartie, les propriétaires fonciers doivent
bénéficier d'une juste et préalable indemnisation telle
que prévue par la même loi, mais aussi son décret
d'application en l'occurrence le Décret
n°2009-2248.
Cependant, les communes ne respectent pas ces
procédures et attribuent soit 25% de la superficie du champ, soit 2
à 5 parcelles par ha (cas de la commune 5) en guise de
dédommagement.
Il faut préciser que ces procédures ne
relèvent d'aucune disposition juridique réglementaire, il s'agit
d'une simple entente entre les communes du Niger.
III.3.2 Les vendeurs (ou cédants)
Il s'agit généralement des propriétaires
coutumiers qui, influencés soit par les sommes d'argent proposées
par les spéculateurs, soit par les communes pour faire des lotissements,
et se sentent contraints de se séparer de leur capital foncier.
7 Loi n°2008-37 du 10 juillet 2008, modifiant
et complétant la loi n°61-37 du 24 novembre 1961
réglementant l'expropriation pour cause d'utilité publique et
l'occupation temporaire
8 Décret n°2009-224/PRN/MU/H du 12
août 2009, fixant les modalités d'application des dispositions
particulières de la loi n°61-37 du 24 novembre 1961,
réglementant l'expropriation pour cause d'utilité publique et
l'occupation temporaire, modifiée et complétée par la loi
2008-37 du 10 juillet relatives au déplacement involontaire et à
la réinstallation des populations. La base de calcul de l'indemnisation
est définie au cas par cas. Ainsi, il ressort de l'article 20 de ce
texte ceci : « L'indemnisation des personnes affectées pour perte
de parcelles de terre est basée autant que possible, sur la compensation
en nature. Elle inclut outre les parcelles de terre, les intrants agricoles et
zootechniques, les matériaux de construction et tout autre moyen de
production. Pour les terres qui ne sont pas compensées en nature, elles
le sont en espèce. L'indemnité est calculée en
référence aux montants fixés par l'ordonnance n°99-50
du 22 novembre 1999, fixant les tarifs d'aliénation et d'occupation des
terres domaniales de la République du Niger, majorés d'une
bonification d'au moins 50% selon la classification des zones.
46
L'ampleur que prennent les expropriations en
périphérie des grands centres urbains, et particulièrement
celle de Zinder est surtout liée à la méconnaissance par
certains propriétaires coutumiers des dispositions juridiques en
matière d'expropriation (pour cause d'utilité publique) et de
sécurisation foncière.
En effet, certains paysans pensent qu'ils seront
expropriés sans aucun dédommagement, c'est pourquoi ils se
précipitent à vendre leurs terres avant que les communes ne s'en
saisissent.
Il arrive même que certains propriétaires ne
soient pas informés du lotissement de leurs champs, ils ne font que le
constater, pour réclamer par la suite un dédommagement.
III.3.3 Les intermédiaires
Il s'agit des personnes physiques communément
appelées démarcheurs, dont l'activité principale consiste
à faire l'intermédiation dans la transaction vente des terres
agricoles entre les propriétaires terriens et les acquéreurs.
Leur rôle consiste à chercher un acheteur ou un
champ à vendre à la demande d'un propriétaire qui veut
vendre ou d'une personne qui veut acheter moyennant une commission. Cependant
il faut noter qu'en matière d`expropriation il n y'a pas
d'intermédiaire.
III.3.4 Les communes
Les communes constituent également un acteur à
part entière de marchandage des droits fonciers. En effet, certains
paysans font recours aux communes pour qu'elles achètent leurs terres en
contre partie des parcelles. Donc les communes jouent un rôle important
dans le processus de transfert définitif des droits fonciers, même
si le marchandage ne se déroule pas dans les mêmes conditions
qu'avec les personnes physiques.
Dans le cas des ventes directes entre particuliers, les
communes n'interviennent pas.
III.3.5 La Direction du Domaine et du Cadastre
Cette institution est chargée de l'immatriculation des
biens fonciers et d'attribution de titre foncier ou de titre « cheda
». Il faut signaler que les procédures d'attribution des titres
fonciers pour l'immatriculation étaient lourdes, coûteuses et trop
bureaucratiques pour se révéler efficaces, parce que inaccessible
au plus grand nombre de citoyens désireux de sécuriser leurs
immeubles. Pour pallier cette situation, l'Etat à travers La loi des
finances 2006 a introduit
47
une réforme tendant à la simplification des
modalités de réalisation des titres fonciers, ce qui a aboutit
à un nouveau titre appelé « cheda ».
A la différence du titre « cheda », le titre
foncier présente une plus grande valeur hypothécaire, puisqu'il
permet d'évaluer la valeur du bien foncier. (Journal Officiel de la
République du Niger du 6 Décembre 2005).
Les titres délivrés par la direction du domaine
et du cadastre sont inscrits dans le livre foncier national.
A travers les titres fonciers que cette direction
délivre, elle facilite l'indemnisation des propriétaires terriens
expropriés.
III.3.6 La Direction de l'urbanisme
Cette direction intervient uniquement pour la
réalisation des plans de lotissements. Elle a en charge les
opérations de lotissement et la répartition des parcelles entre
les communes et les propriétaires terriens.
III.3.7 Le conseil municipal
Le conseil municipal est l'instance décisionnelle au
niveau des communes pour la réalisation des lotissements et toutes
autres questions9 relevant du développement de la commune, notamment sur
les actions de lotissements.
En cas d'expropriation, la commune en tant qu'autorité
expropriante a la charge d'indemniser les propriétaires terriens, mais
aussi au conseil de veiller à ce que ces derniers soient
indemnisés justement et préalablement
Il est l'instance de validation des projets de la commune. Par
exemple, si les paysans proposent aux communes d'acheter leurs champs, il faut
l'accord du conseil municipal.
Mais dans les faits l'expropriation ne se présente pas
ainsi. Il arrive que les personnes expropriées constate un lotissement
dans leurs champs, pour ainsi faire des réclamations au niveau des
communes qui procèdent par la suite à leur indemnisation.
9 Art. 26 : La politique de développement de
la commune notamment son Plan de développement communal et autres outils
de planification, Initiative, soutien et suivi de la mise en oeuvre des actions
de développement entreprises au sein de la commune pour des
activités comme l'agriculture, l'élevage, la pêche, la
pisciculture, la chasse, l'artisanat; Initiative, soutien et suivi de la mise
en oeuvre des actions de secours et d'assistance sociale entreprises dans la
commune; Préservation et protection de l'environnement ; Gestion de
ressources naturelles Art. 30 : La gestion domaniale et foncière,
aménagement du territoire et urbanisme notamment (Disposition du domaine
privé de la commune; Gestion du domaine public de la commune; Gestion
des couloirs de passage, des aires de pâturages et des points d'eau
pastoraux; Élaboration et adoption des documents de planification,
d'outils d'aménagement foncier et urbain).
III.3.8 Les autorités coutumières
Les autorités coutumières jouent un rôle
important dans la régulation des transactions foncières
puisqu'elles sont considérées comme détenteurs de la
sagesse.
Pendant longtemps la coutume a constitué le moyen
privilégié des populations de Zinder, de légitimation de
leurs transactions foncières.
En effet, en cas de vente des terres agricoles, les
populations préfèrent généralement faire recours
aux autorités coutumières, notamment le cadi pour qu'il leur
établisse un acte prouvant le transfert de droit de
propriété, ou tout simplement faire la transaction dans le
secret, c'est-à-dire entre propriétaire et acquéreur.
Cette situation est surtout liée à l'absence ou
l'insuffisance de fonctionnement des Cofo. C'est pourquoi, jusqu'à
présent, la coutume constitue le moyen de légitimation des droits
fonciers des populations des villages périphériques de Zinder.
En cas d'expropriation au niveau des villages
périphériques, les communes font recours aux chefs de village
pour l'identification des propriétaires des terres agricoles, et
l'établissement d'acte de détention coutumière.
Cependant, ces dernières années avec
l'évolution des mentalités et les sensibilisations, et compte
tenu des conflits de succession et l'exacerbation des expropriations
exercées par les communes, les populations commencent à prendre
conscience de l'importance des voies modernes d'affirmation de droit
foncier.
III.3.9 Le notaire
La Chambre Notariale dont les membres, les notaires
rédacteurs de tous les actes de la vie civile, ont vu leur vocation se
clarifier, et le volume de leurs activités s'amplifier avec le
sempiternel problème d'insécurité foncière. En
collaboration avec d'autres corps professionnels tels que les
géomètres experts, ils scellent et rédigent avec la
précision requise et sans équivoque les accords des
volontés des acteurs du marché foncier.
En effet, la loi n° 98-06 du 29 Avril 1998 portant statut
des notaires en son art. 23, donne prérogative aux notaires
d'intercéder aux ventes des terres agricoles.
En effet, en cas de transaction vente, les personnes
concernées peuvent demander un contrat de vente auprès d'un
notaire pour les sécuriser des cas d'expropriation (indemnisation juste
et préalable).
Les actes délivrés par le notaire facilitent le
processus d'indemnisation.
48
Il existe plusieurs cas de vente chez les notaires :
49
Les ventes peuvent être de gré à
gré, où les deux acteurs de la vente s'entendent du prix de vente
et établissent un acte de vente chez le notaire.
Il y a le cas des ventes dites notariées, où le
notaire intervient dans toutes les étapes de la vente et se
déplace sur le terrain pour constater l'existence du bien.
III.3.10 Le géomètre expert
L'un des nouveaux partenaires des collectivités
territoriales au procès du foncier est le Géomètre-Expert
Foncier exerçant une profession libérale. Planificateur,
arpenteur assermenté, gestionnaire, comptable de l'espace foncier, le
Géomètre-Expert travaille sous le contrôle d'un Ordre dont
le rôle est de réguler et réglementer les interventions de
ses membres. Cette profession libérale qui existe dans la plupart des
pays du monde, ne s'est imposée ici qu'avec les exigences
économiques de la gestion démocratique et celles de justice
sociale des citoyens.
Les Cabinets de Géomètre Expert interviennent
généralement après la vente dans le processus de
délivrance du titre, notamment à travers l'établissement
des plans de masse de l'espace concerné.
Le recours de certains propriétaires foncier aux
géomètres, s'explique par l'abus des communes suite aux mesures
d'expropriation des terres agricoles.
Egalement, les gens font recours aux géomètres
pour l'établissement de plans de masse en vue de l'élaboration du
titre foncier.
III.3.11 Les Commissions foncières
De par sa composition très diversifiée où
se retrouvent cadres techniques, autorités administratives et
coutumières, représentantes des femmes, de jeunes et de la
société civile, les utilisateurs des ressources, la commission
foncière constitue un cadre de concertation, de réflexions et de
prise de décisions en matière de gestion des ressources
naturelles et de prévention des conflits.
Les Cofo ont principalement pour mission la
sécurisation des opérateurs ruraux, notamment les agriculteurs
à travers la délivrance des actes des transactions pour une
meilleure mise en valeur des terres.
Les Cofo participent au processus d'expropriation pour
garantir le droit des propriétaires sur les ressources foncières,
notamment l'évaluation du droit foncier et la proposition de
l'indemnisation conformément aux textes en vigueur.
50
Elles participent également aux ventes par la
délivrance d'attestation de vente.
Il faut relever que la plupart des paysans qui vendent ou qui
se font exproprier ne disposent pas de titres de propriété, ni
d'attestation de détention coutumière pour leurs champs. Les
transactions se font généralement par témoignage des sages
et du chef de village sans aucun écrit.
Les actes délivrés par les commissions
foncières sont inscrits dans le Dossier rural pour la conservation des
traces des transactions et le suivi des ressources naturelles.
III.3.11.1 Régulation des marchés
fonciers à travers les institutions du Code Rural
Le système de régulation foncière
prévu par le code rural présente six avantages substantiels :
- la légitimité sociale dont
bénéficient les chefs traditionnels ;
- la simplicité et la rapidité de la
procédure ;
- le faible coût de l'acquisition de la preuve du droit
;
- la transparence ;
- une publicité foncière
- son caractère facultatif
III.3.11.2 Les contraintes liées à
l'utilisation du titre de propriété foncière du Code
Rural
En dépit de ses avantages, le titre de
propriété foncière présente des contraintes, parce
qu'il ne facilite pas les investissements. En effet, ses détenteurs
trouvent beaucoup de difficultés pour accéder aux crédits
d'investissement auprès des organismes bancaires qui exigent des
garanties « réelles », tel que le titre foncier.
Ainsi, il est important à ce que les deux titres soient
harmonisés pour une meilleure mise en valeur des terres agricoles.
III.4 Les procédures du marché
foncier
La procédure de vente diffère selon qu'elle se
passe entre particuliers ou chez le notaire.
Chez les particuliers, lorsqu'un propriétaire foncier
veut vendre sa terre, il fait appel à un intermédiaire qui
évalue la taille du champ par simple observation.
L'intermédiaire propose au propriétaire un prix
pour la valeur de son champ. Si le prix proposé lui convient,
l'intermédiaire cherche un acquéreur.
Le prix du champ peut aussi être fixé par le
propriétaire du champ, si l'intermédiaire le juge acceptable il
cherche un acquéreur.
51
Après la vente du champ, il est établi un
certificat de vente sur lequel sont apposées les
signatures du chef de village, du vendeur, de l'acheteur et de
l'intermédiaire.
Chez le notaire, le propriétaire du champ,
l'acquéreur et l'intermédiaire se présentent avec
chacun une pièce d'identité et le certificat de
vente. Le notaire leur délivre un contrat de
vente.
Au niveau des commissions foncières en cas de vente, la
procédure à respecter est la
suivante :
V' Enregistrement de la demande écrite et ou verbale
adressée par le demandeur au
président de la Cofob
V' Examen de la demande par la Cofob
V' Présentation effective des témoins devant les
membres de la Cofob ;
V' Déclaration des témoignages pour la confirmation
de la sincérité de la transaction ;
V' Publicité foncière
V' Remplissage de l'Acte par le Secrétaire de la Cofob
;
V' Apposition des signatures des témoins y compris les
témoins de voisinage ;
V' Signature de l'Acte par le chef village ou de tribu,
président de la Cofob ;
V' Délivrance de l'acte au requérant ;
La Cofob conservera une copie de l'Acte pour les besoins
d'archivage.
III.5 Les procédures d'expropriation pour cause
d'utilité publique par les communes
De façon officielle, lorsqu'une commune veut exproprier
un champ pour faire un lotissement par exemple, elle doit :
V' faire la déclaration d'utilité publique,
V' ouvrir une enquête de deux mois portée
à la connaissance du public par les différents moyens de
publicité habituels et par avis au journal officiel.
V' Ensuite, faire une enquête de commodo incommodo qui
consiste à identifier tous les propriétaires des champs en
témoignage de leurs voisins immédiats et à
délimiter la superficie du champ.
V' Convoquer une réunion avec les propriétaires
coutumiers dont les champs sont concernés par le projet. Cette rencontre
consiste à informer les propriétaires de la réalisation du
lotissement et à chercher un accord des parties sur le montant des
indemnités à allouer. L'évaluation se fait sur la base du
contenu des articles 13 (bis, ter et quater) de loi relative à
l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Il en résulte que :
52
? l'indemnisation doit être équitable,
transparente et respectueuse des droits humains des personnes affectées
par l'opération ;
? l'indemnisation sera basée sur le manque à
gagner fixé par consensus pour la perte des espaces agricoles ;
? l'indemnisation est effectuée en nature, en
espèce, et/ou sous forme d'assistance.
Partant de ce constat, on peut dire que le droit ne peut pas
s'appliquer dans sa rigueur dans certains cas, l'objectif étant surtout
d'amener les parties à s'approcher en vu d'une entente à
l'amiable.
Pour s'en convaincre, on peut se référer
à l'art. 13/ter, en son 7ème et 8ème
tiré. Il y est dit : « - pour la perte de parcelles de terre,
l'approche d'indemnisation consiste à privilégier les
compensations en nature dans la mesure du possible. Pour les terres qui ne sont
pas totalement compensées en nature, elles le sont en espèces ; -
pour les arbres fruitiers ou non fruitiers, les pertes sont compensées
en fonction de l'espèce et de sa productivité ».
Il ressort de ces tirés que l'indemnisation doit se
faire par entente à l'amiable. Le consentement des deux parties doit
être recherché pour fixer l'indemnisation. Il faut noter ici que
l'accent est mis plus sur l'arrangement que sur l'application du droit dans sa
rigueur. On peut alors se passer de l'application de la Loi n°2008-37 du
10 juillet 2008, modifiant et complétant la loi n°61-37 du 24
novembre 1961 réglementant l'expropriation pour cause d'utilité
publique et l'occupation temporaire, ainsi que de son décret
d'application (décret n°2009-224/PRN/MU/H du 12 août
2009).
La compensation convenue par consensus doit faire l'objet d'un
suivi évaluation. En effet, pour s'assurer de la mise en oeuvre
effective des actions proposées et l'atteinte des résultats
attendus, un comité de suivi doit être mis en place auprès
de l'autorité compétente (cf. art. 27 et 28 du décret
n°2009-224/PRN/MU/H du 12 août 2009).
? Convoquer une réunion de la commission locale pour
valider les résultats de l'enquête et du lever topographique,
transmettre en commission régionale puis en commission nationale pour
approbation.
Mais généralement ces procédures ne sont
pas respectées par les communes, et les lotissements sont parfois faits
sans même la tenue de la commission locale.
53
III.6 Les articulations entre la vente et
l'expropriation des terres agricoles à la périphérie de la
Ville de Zinder
Il existe entre les ventes des terres et les expropriations
exercées par les communes, une relation symétrique.
En effet, l'évolution du marché foncier au
niveau de la périphérie de la Ville de Zinder est liée
à la dynamique des communes quant à la réalisation des
lotissements. Les paysans vendent les terres aux spéculateurs, qui
revendent ou thésaurisent en attendant les lotissements.
Parallèlement, les communes exproprient les terres
agricoles pour les transformer en parcelles et les vendre
généralement aux citadins, puisque ce sont eux qui ont les moyens
d'acheter.
En général, les spéculations
foncières en périphérie se font sur les parcelles
plutôt que sur les champs. Ces spéculations sur le prix des
parcelles, empêchent aux paysans à faibles revenus de se procurer
des parcelles, hormis celles liées aux transactions avec la commune.
Rareté des terres de cultures ?
Exode rural Rareté des terres de cultures
Vente des terres agricoles Expropriation des terres
agricoles
Décapitalisation
Spéculation ou thésaurisation des terres
Insécurité alimentaire
(Faible disponibilité des produits alimentaires)
Insécurité foncière (Insuffisance de
sécurité pour la mise en valeur : instabilité,
précarité, faiblesse
des investissements) Accroissement de
la vulnérabilité
des populations rurales
? Accroissement des
paysans sans terres
? Salariat agricole
Décapitalisation
Transformation des champs en parcelles d'habitation
Figure 1: Articulation entre
insécurité foncière/marché foncier/expropriation/
insécurité alimentaire (Source : Maman Sani.A, Sabou. I,
Leko. I, 2011, révisé)
La figure n°1 illustre le lien qui existe entre
l'insécurité foncière qui accentue les ventes et les
expropriations pour cause d'utilité publique des terres agricoles et la
sécurité alimentaire. En effet, les deux phénomènes
créent une rareté des terres de cultures au niveau des paysans,
les
54
transformant en des paysans sans terres d'où la
pratique du salariat agricole et l'accroissement de l'exode. Ces pratiques
constituent des stratégies pour la lutte contre
l'insécurité alimentaire.
III.7 Contribution du foncier périurbain
à la sécurité alimentaire
L'espace périurbain est une zone rurale où
l'agriculture constitue la principale activité des populations. Cet
espace fait face depuis quelques années à l'étalement de
la ville, rendant l'activité agricole de plus en plus difficile.
La disparition progressive des espaces périurbains de
la Ville de Zinder rend encore plus aigu le déficit
céréalier aggravant ainsi, les conditions
d'insécurité des populations rurales.
La Ville de Zinder dispose de 82 981 ha emblavés en
2009 pour une production de 12 450 tonnes (SCA de Zinder, 2012), soit 23,28% du
besoin de la population, ce qui n'est pas négligeable vue les conditions
dans lesquelles se pratique l'agriculture périurbaine. Dans le cas de la
Ville de Zinder, le moindre espace doit être mis en valeur et
exploité pour accroître la production, au lieu de tout
urbaniser.
L'agriculture périurbaine peut largement contribuer
à l'atteinte de la sécurité alimentaire des populations,
du fait qu'elle fournit les réserves alimentaires d'urgence de par la
diversité des denrées alimentaires qu'elle met à la
disposition des consommateurs urbains. Cet apport n'est possible en
quantité et en qualité qu'à travers des actions de
renforcement de capacités des paysans et de restauration des terres. En
effet, les paysans peuvent accroître leur production en
bénéficiant d'un encadrement adéquat, en les organisant en
association, en menant une politique tendant à réduire les
morcellements des terres agricoles.
III.8 Causes des ventes des terres agricoles
Aujourd'hui, on observe de plus en plus le passage de la terre
propriété collective (champ familial) à la terre
propriété individuelle (champ individuel). Une des
conséquences directes de cette nouvelle tendance est l'ouverture
à la voie des ventes des terres.
L'individualisation de la terre est un des facteurs qui
rendent possible la vente des terres, brisant ainsi les principes sacro-saints
d'inaliénabilité qui rend impossible tout transfert
définitif de doit de propriété à des fins
pécuniaires.
55
Ceci dit, les ventes des terres agricoles par les paysans sont
toujours des phénomènes de désolation. Elles sont
généralement causées par les besoins sociaux.
Selon les paysans, les ventes des terres sont soit
causées par le manque des ressources financières pour
répondre aux dépenses des cérémonies et
éviter certaines humiliations dans la famille, soit par des
problèmes d'héritage ou par crainte d'être exproprié
sans contre partie, mais aussi compte tenu de la taille du champ n'est pas
viable suite aux multiples morcellements.
En effet, suite à un accroissement démographique
de plus en plus important, on assiste à un morcellement accru des champs
familiaux (gandu), entraînant du coup leur disparition progressive. Cette
situation constitue une des causes des ventes des terres agricoles.
III.9 Effets des ventes et expropriations des terres
sur la sécurité alimentaire
Que ça soit la vente des terres par les paysans aux
spéculateurs ou la dépossession par expropriation faite par les
communes, il s'agit là des actions de décapitalisation des
paysans de leurs terres agricoles. Cette situation impacte la
sécurité alimentaire des populations rurales par la
réduction ou la détérioration des superficies
cultivées.
En effet, dans le cas des ventes, il arrive que certains
paysans en vendant leurs terres n'achètent pas d'autres terres. Ils
essaient difficilement de s'adapter dans la pratique des activités
génératrices de revenus. Généralement ces paysans
se retrouvent sans revenus, sans activité et sans terre.
D'autres par contre, achètent des terres loin de leur
village. Mais l'inconvénient tient au fait que les paysans se voient
confrontés au problème d'apport en matières organiques,
puisque ne disposant pas de moyen de transport pour les acheminer. Et
généralement il s'agit des terres pauvres, ce qui explique le
besoin des propriétaires de s'en débarrasser.
Il est clair que les ventes des terres ont des
conséquences négatives sur la sécurité alimentaire
des ménages ruraux, puisqu'elles réduisent les superficies
cultivables.
III.9.1 Effets sur la production agricole
De façon générale, le bilan
céréalier des 5 dernières années fait ressortir que
la ville de Zinder enregistre chaque année un déficit
céréalier chronique de plus de 50%.
56
Graphique 7: Bilan céréalier de
la ville de Zinder sur 5 ans (Source: Service Communal de l'agriculture de
Zinder, 2011)
Cette situation est ressortit dans plusieurs villages
périphériques comme le montre le tableau n°1.
Villages
|
Population 2011
|
Degré de déficit
|
Djambourou
|
469
|
60%
|
Kachéni
|
565
|
55%
|
Madatey
|
4289
|
55%
|
Banguia
|
290
|
55%
|
Kangna
|
4434
|
55%
|
Midick
|
3526
|
55%
|
Garin Liman
|
989
|
55%
|
Malam Amar
|
1079
|
55%
|
Tableau n°1 : Liste des villages
déficitaires à + de 50% au niveau de la ville de Zinder
(Source : Service Communal de l'Agriculture de Zinder, 2011)
Ce déficit céréalier s'explique en partie
par une croissance démographique galopante (3%), alors que le rendement
des différentes cultures vivrières connait de baisse en raison de
la faible utilisation des engrais, mais surtout de la réduction des
superficies (taux d'urbanisation en 2011 de 16,1% contre 21% pour le Niger).
INS, 2011.
Selon les résultats de l'évaluation
préliminaire sur la campagne agricole (2011), 74 075 personnes sont
concernées par le déficit céréalier au niveau de la
Ville de Zinder, ce qui est considérable et inquiétant compte
tenu des conditions dans lesquelles se pratique cette agriculture, la
réduction de la superficie se traduit par une diminution sensible de la
production.
L'étalement urbain, cause majeure de l'accentuation des
transactions marchandes entraine de plus en plus la transformation des terres
agricoles en habitation, au lieu de servir à produire
57
des céréales pour les populations. Sachant que
dans les conditions actuelles de l'agriculture nigérienne un
accroissement sensible de la production s'explique par un accroissement des
superficies.
Aussi, comme bien d'autres, un paysan du village de Babban
Tapki (village périphérique de Zinder) qui possédait 3
champs d'une moyenne d'un ha chacun, s'est vu exproprié deux de ses
champs. Ce paysan s'est retrouvé après parcellisation de ses
terres avec 7500 m2 dont la production ne dépasse pas deux
à trois mois. Ce qui a réduit considérablement sa
production, alors que les parcelles obtenues ne peuvent pas faire l'objet d'un
investissement conséquent (nos enquêtes, 2011).
Au regard de tout ceci, et tenant compte des critères
de vulnérabilités classiquement retenus au Niger, dont le
déficit céréalier, on constate que cette zone fait partie
des zones vulnérables du Niger (i3N, 2012).
Ainsi, selon le classement fait dans le cadre de l'i3N, Zinder
figure parmi les moyennement vulnérables.
III.9.2 Effets sur la production
maraîchère
De par sa proximité avec les centres urbains et la
diversité des denrées alimentaires qu'elle met à la
disposition des consommateurs urbains, le maraichage contribue à
l'amélioration significative des régimes alimentaires, en ce sens
qu'il permet d'améliorer la qualité alimentaire et nutritionnelle
des populations.
Le maraichage joue un rôle capital dans l'alimentation
des citadins comme l'a souligné la FAO à l'occasion de la
Journée mondiale de l'environnement du 5 juin, (FAO, 2005) et maintient
la sécurité alimentaire en période de crise et disette.
Car, quelque soit le résultat d'une crise grave dans le pays (troubles
civils, sécheresse généralisée, dévaluation
de la monnaie...) ou d'une crise grave du ménage (maladie, perte de
l'emploi, etc.), l'agriculture urbaine joue un rôle important dans la
mesure où elle fournit des réserves alimentaires d'urgence. C'est
dans cette optique que nos pays doivent accorder une importance
particulière à la promotion de cette activité dans tous
les espaces disponibles.
Cependant, les expropriations des terres agricoles
opérées par les communes, entravent la bonne marche de la
production maraichère.
En effet, ces expropriations touchent en plus des terres
agricoles, les sites de productions maraichères. Cette situation est
d'autant plus inquiétante que les produits maraichers ont pris une place
importante dans les habitudes alimentaires des citadins, et contribuent
58
significativement à la sécurité
alimentaire à travers leurs apports nutritifs, ainsi que les revenus
qu'ils génèrent aux producteurs.
Ainsi, dans la ville de Zinder les sites comme Kagna et Midic
contribuent de manière significative à l'approvisionnement du
grand marché de Zinder en légumes.
L'importance des sites maraichers périphériques
de la Ville de Zinder particulièrement celui de Midic, se justifie selon
les paysans au fait que même une grève d'un jour entraîne
une rupture en légumes dans le marché « dolé »
de Zinder.
Cependant, malgré l'importance de ces sites les
communes continuent à mener des actions tendant à leur
disparition. Par exemple dans la commune IV, une partie des parcelles se situe
sur un kori qui draine l'eau vers la mare de Midic. Cette situation limite
l'écoulement vers la mare, ce qui n'est pas sans conséquence sur
la productivité du site.
Au Sénégal, une étude menée
à la demande de l'IAGU en 2001, auprès de 75 maraîchers de
la région de Dakar a permis d'évaluer avec des réserves de
biais et aux rétentions de l'information, que les revenus nets
tirés de l'activité agricole sont supérieurs au SMIG en
vigueur (tableau n°3) qui est de 371 000 FCFA/an.
Sites
|
Revenu moyen (FCFA)
|
Coût moyen du matériel (FCFA)
|
Coût moyen des intrants (FCFA)
|
Bénéfice net par campagne (FCFA)
|
Pikine Nord
|
1 255 660
|
5 645
|
57 297
|
1 192 717
|
Pikine Ouest
|
1 217 500
|
30 820
|
25 560
|
1 161 117
|
Ouakam
|
610 750
|
2 125
|
2 875
|
605 750
|
Cité SHS
|
402 071
|
1 628
|
54 071
|
346 371
|
Tableau n°2 : Compte d'exploitation par
campagne dans quelques sites maraîchers de Dakar (source : Bagnou. A,
2010)
A Kumasi (Ghana), Cornish et IWMI ont évalué en
2001 les revenus nets générés à partir de
l'activité agricole sur 11 900 ha de périmètres
maraîchers dans la périphérie de Kumasi. Ces revenus sont
de 700 à 1000 US $ par an (soit 490 000 à 700 000 FCFA) par
exploitant sur une superficie moyenne de 0,1ha. (Bagnou. A, 2010).
Selon la même source, les revenus nets par campagne d'un
exploitant agricole à Niamey s'élèvent à 856 940
FCFA/campagne (de 3 mois), ce qui est supérieur au SMIG du Niger (en
2012) qui est de 90 141 FCFA sur les 3 mois.
Il ressort donc, que le maraichage a un niveau de
rentabilité économique élevé et supérieur au
SMIG de ces pays.
59
Dans la ville de Zinder, le tableau n°3 fait ressortir le
revenu net d'un exploitant par campagne agricole au niveau du site de Midic.
Nom des spéculations
|
Forme de vente
|
Prix de vente (FCFA)
|
Superficie totale occupée (m2)
|
Nombre de planches
|
Prix total (FCFA)
|
Laitue
|
Planche
|
1250
|
300
|
80
|
100 000
|
Choux
|
Planche
|
2000
|
18
|
36 000
|
Carotte
|
Planche
|
1500
|
15
|
22 500
|
Oignon
|
Planchette
|
600
|
20
|
12 000
|
Pomme de terre
|
Planche
|
3500
|
10
|
35 000
|
Tomate
|
Panier
|
1250
|
10
|
12 500
|
Melon
|
Unité
|
100
|
15
|
1500
|
Oseille
|
Planche
|
400
|
5
|
2 000
|
Tableau n°3 : Revenu net d'un exploitant
par campagne dans le site de Midic (Source : Nouhou Ibrahim, 2012)
Ainsi, selon ce tableau et en tenant compte des retentions
d'information, le revenu moyen net d'un maraicher de Midic pendant une campagne
sur une parcelle moyenne de 300 m2 est de 221 500 (FCFA), un chiffre
nettement supérieur au SMIG du Niger qui est de 30 047 (FCFA) par mois
en 2012. Il faut aussi noter que la campagne des laitues se pratique pendant
toute l'année et dure en moyenne 70 jours.
Cependant, au moment de l'étiage certains producteurs
cessent l'exploitation du site compte tenu des difficultés
d'accès à l'eau, ce qui constitue un frein au
développement de ce secteur et l'amélioration des revenus des
producteurs.
III.9.3 Effets sur les populations
Les ventes et les expropriations des terres présentent
des conséquences sur la vie des populations rurales. Par ces actions,
ces dernières sont entrain d'être décapitalisées de
leur principal moyen de production sur lequel repose l'espoir de milliers de
familles.
En vendant ou en se faisant exproprier une terre, on perd la
propriété et toutes les prérogatives attachées,
notamment les attributs qui se composent de l'usus (le droit d'usage), du
fructus (le droit de jouissance des fruits de la chose) et de l'abusus (le
droit d'en disposer). De la récolte au bois de chauffe, jusqu'au
ramassage des pailles pour les animaux, tout ces intérêts sont
perdus par les paysans décapitalisés.
60
Ainsi, les ventes et expropriations des terres agricoles
périphériques (réduction des superficies cultivées)
exacerbent la vulnérabilité des populations rurales.
Et, la vie au village devient impossible pour les paysans qui
n'ont plus de terre de culture. L'exode devient l'ultime solution pour pallier
le problème alimentaire.
III.9.4 Effets sur le paysage périphérique de
la Ville de Zinder
Le grignotage des espaces ruraux périphériques
par la ville présente des conséquences sur les ressources
naturelles. Selon les populations de nombreuses espèces
végétales bien connues des populations n'existent plus. C'est le
cas par exemple des espèces comme Cassia singueana, Vitex doniana,
Piliostigma reticulatum au niveau du village de Dadin Sarki, et Ficus
sycomorus dans le village de Midic.
Photo 2: Végétation menacée
de disparition au niveau de la mare de Kagna
La dégradation des points d'eau comme la mare de Kagna
qui est presque entièrement lotis et où une grande partie des
arbres est coupé, constitue une menace à la pratique du
maraichage. Cette mare tend à disparaître complètement,
alors même qu'elle joue un rôle important dans l'approvisionnement
de la ville en produits maraîchers.
III.10 Insécurité foncière
périphérique
La sécurisation foncière dans les villages
d'enquêtes reste relativement traditionnelle. Les propriétaires
fonciers continuent à se sécuriser de manière
traditionnelle en se basant sur le témoignage des anciens et des sages
du village.
61
Les Cofocom installées au niveau des communes de la
Ville de Zinder pour assurer la sensibilisation des populations sur les textes
en matière de gestion foncière ne sont pas fonctionnelles. C'est
la Cofodep de Mirriah qui n'est pas très accessible aux populations qui
prend en charge les questions foncières au niveau de la Ville de
Zinder.
Les activités rurales périphériques sont
caractérisées par une forte insécurité liée
généralement à la dynamique urbaine, au non respect des
textes et lois en vigueur par certains responsables, et à la
méconnaissance des procédures de sécurisation
foncière par les paysans.
L'insécurité foncière touche même
les ressources supposées être sécurisées. En effet,
il existe des aires de pâturage balisées qui ont été
vendues par les communes. Dans Garin Mamar un village
périphérique, l'aire de pâturage de « Birni Est
», qui est balisée a été transformée d'abord
en champs, puis en parcelles sans que rien ne puisse être fait. La
transformation des aires de pâturage en champs résulte de la vente
de ces aires par les chefs coutumiers et des occupations anarchiques par les
populations. Ces actions constituent des violations des textes en vigueur
notamment le décret n°87-77/PCMS/MI du 18 juin 1987.
Photo 3: Couloir de passage occupé par
les cultures
Ce couloir de passage finira par être vendu comme champs
ou lotis et c'est la mobilité des animaux qui sera compromise. Cette
situation est contraire aux dispositions de l'ordonnance 2010-29 du 29 mai 2010
relative au pastoralisme qui stipule à son article 3 que « La
mobilité est un droit fondamental des éleveurs, pasteurs nomades
et transhumants. Ce droit est reconnu et garanti par l'Etat et les
collectivités territoriales ».
Plusieurs démarches ont été entreprises
par les structures locales de la société civile, notamment l'AREN
pour le respect des ressources partagées, mais en vain.
62
Cette situation créée des conflits entre
agriculteurs et éleveurs, où ces derniers voyant leurs espaces
occupés par des champs, poussent leurs animaux au-delà des
endroits réservés au pâturage.
Ces actions ont entraîné une disparition
progressive des aires de pâturage. Les quelques aires de pâturage
qui restent sont constituées de rochers, et le pâturage n'est
possible qu'en saison de pluie.
III.11 Perspectives de réduction des effets des
marchés fonciers et expropriations pour cause d'utilité
publique
L'insécurité foncière se concentre
là où les convoitises urbaines et l'instrumentalisation politique
du foncier en l'absence d'un système de sécurisation
foncière et des normes de régulation fiables, du manque de
fonctionnement de celui-ci ou tout simplement de volonté politique
garantissant la sécurisation foncière des producteurs ruraux.
En effet, en milieu périurbain, le développement
du marché foncier s'explique par la dynamique de l'étalement des
grands centres urbains, ainsi que du caractère insécuritaire du
foncier rural, dans un contexte de méconnaissance des procédures
de sécurisation par les populations rurales.
Dans ces conditions, la course vers un marché foncier
miroitant un meilleur avenir pour les populations rurales s'ouvre. On assiste
ainsi à une réduction progressive des surfaces cultivables, ce
qui constitue un frein au développement de l'agriculture, sachant qu'au
Niger l'accroissement de la production est synonyme d'un accroissement des
superficies cultivées. Cette situation d'insécurité
foncière périphérique ne favorise pas le
développement d'une agriculture durable, d'où la
nécessité pour nos régions d'élaborer leurs
Schémas d'Aménagement Foncier (SAF) qui constituent un pilier
important quant à la définition du rôle des
différents espaces ruraux pour assurer une meilleure mise en valeur des
terres destinées à la production agricole.
Ainsi, pour une meilleure régulation des transactions
foncières périurbaines, notamment la vente et les expropriations
des terres agricoles par les municipalités pour la réalisation
des lotissements, l'élaboration du SAF s'avère
nécessaire.
Dans un contexte d'amenuisement des espaces
périphériques et d'extension des zones urbaines avec comme
conséquence la réticence des producteurs dans l'investissement en
zone périurbaine du fait de l'insécurité foncière ;
et compte tenu des opportunités qu'offre le lotissement de nouvelles
parcelles d'habitation en termes de recettes fiscales entraînant une
63
transformation des terres agricoles en parcelles, les
questions suivantes restent émergentes pour nos travaux de thèse
:
* Comment sécuriser les pauvres de la
spéculation foncière actuelle?
* Comment organiser les opérations de lotissements
en tenant compte des producteurs ruraux périurbains ?
* Quelle indemnisation pouvait éviter aux
propriétaires terriens une situation de précarité en cas
d'expropriation pour cause d'utilité publique ?
* Dans quelles conditions doivent s'étendre les
communes urbaines version les communes rurales ?
* Quelle réforme agro-foncière
localisée pour densifier l'occupation qualitative de l'espace ?
* Comment adapter les dispositifs juridiques actuels aux
préoccupations foncières des populations situées en zones
périurbaines ?
* Quelles peuvent être les contributions des
activités agropastorales périurbaines dans l'approvisionnement
des grands centres urbains ?
* Quelles mutations socio économiques subissent les
villages périphériques ?
Ainsi, pour répondre à ces interrogations, on a
prévu d'entretenir 10% des ménages de l'échantillon des
villages à travers un questionnaire individuel. Des images satellitaires
des années 1960 et 2000 seront utilisées pour voir la dynamique
des indépendances à nos jours et d'expliquer les raisons.
64
Conclusion
La terre, qui dans bien des cas est un bien inaliénable
qui ne peut être vendu, et qui n'est prêté ou
cédé qu'à des conditions très strictes, comme le
disait DJIBO Hamani, «la terre est un habit qui ne se déchire
jamais«, a acquis depuis quelques années une valeur marchande
inestimable. En effet, la terre, de part les multiples fonctions qu'elle
assure, fait l'objet d'importantes convoitises. Ainsi, il se dégage des
nouvelles tendances autour de la vente et de la mise en valeur de terres
périurbaines. La vente prend de plus en plus des ampleurs
préoccupantes.
Ainsi, la problématique du marché foncier et de
l'expropriation pour cause d'utilité publique (lotissement) en
périphérie des grands centres urbains en général,
et particulièrement celle de la ville de Zinder, constitue un frein pour
une meilleure mise en valeur des terres destinées aux activités
agropastorales. Ces espaces sont soit vendus par les propriétaires
légitimes, soit expropriés par les communes pour les lotir.
Compte tenu des enjeux que présente le foncier périurbain,
plusieurs acteurs interviennent dans les transactions, et une importante
spéculation au détriment des paysans se développe.
La nouvelle dynamique tendant au « grignotage » des
espaces ruraux peut s'expliquer par les mutations des systèmes fonciers
coutumiers dans le sens d'une appropriation privative, l'installation de la
raffinerie de pétrole, l'accroissement démographique ainsi que la
tentation des communes à faire des gains.
Cette situation présente plusieurs effets pour les
producteurs ruraux, notamment la décapitalisation foncière,
l'amenuisement des revenus des populations périurbaines, l'accentuation
de l'état de vulnérabilité et la dégradation de
l'état nutritionnel des populations.
Ainsi, les espaces périurbains affectés à
l'activité agricole sensés contribuer à
l'amélioration de la production, font place à des logements du
fait de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Cette dynamique urbaine tend à réduire les
espaces agricoles d'une ville en déficit alimentaire chronique, et
où la recherche d'une sécurité alimentaire doit être
une préoccupation de l'heure.
Ces pressions exercées sur les terres agricoles
amènent les paysans à vendre leurs terres, d'où la hausse
de la valeur marchande et spéculative qui explique l'évolution
sans cesse croissante des prix des terres.
Dans ces conditions, les possibilités de
développement d'une agriculture périurbaine s'amenuisent
considérablement.
65
Il s'avère nécessaire si l'on veut transformer
le Niger en un vaste grenier capable d'assurer à sa population une
sécurité alimentaire durable, de rentabiliser tous les espaces
périurbains en vue d'une agriculture périurbaine plus
productive.
Pour atténuer les effets de cette situation,
d'importants outils sont utilisés pour la mise en oeuvre d'une politique
nationale de sécurisation des opérateurs ruraux et des RN
à travers le Code Rural. Il s'agit notamment du Schéma
d'Aménagement Foncier et du Dossier rural. Compte tenu de l'ampleur du
phénomène de décapitalisation, de ses implications quant
à l'accès et la sécurisation des producteurs ; mais aussi
et surtout de ses conséquences sur la productivité agricole, ce
travail apporter un éclairage sur le fonctionnement des marchés
fonciers périurbains. Ainsi en identifiant les effets sur la
sécurité alimentaire, dans la perspective d'appréhender
les enjeux pour l'avenir de l'agriculture périurbaine et des populations
rurales.
66
Bibliographie:
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méthodologique pour l'armature urbaine au Niger, rapport de
mission, p.96
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régulation et création d'un marché foncier à
Nouakchott, Mauritanie : que sont devenues les pauvres ? p.17
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Doctorat en Géographie : La Politique foncière au Niger :
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master : Les effets de l'extension spatiale de la Commune urbaine Niamey IV
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esquisse prospective à l'horizon, 1985. O.R.S.T.O.M., vol. VIII.
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Comment intégrer le processus de décentralisation dans les
pratiques de gestion du foncier et des ressources naturelles ? PNUD-Niger,
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de cycle, Centre de Formation aux techniques de l'Information (CFTI),
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l'épreuve de la poussée démographique dans le canton de
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Quelles régulations pour sécuriser les droits fonciers des
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Réconcilier pratiques, légitimité, légalité,
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69
- Université Abdou Moumouni de Niamey,
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Géographie, p.36
- YAMBA B., (1987). Mémoire de DEA en
Géographie : La dynamique récente des
écosystèmes semi-arides sahéliens/étude
bibliographique, Bordeaux 3, p.119
Textes législatifs et
réglementaires
- La loi n°61-37 du 24 novembre 1961
réglementant l'expropriation pour cause d'utilité publique et
l'occupation temporaire modifiée et complétée par la loi
2008-037 du 10 juillet 2008 ;
- La loi n°61-30 du 19 juillet 1961
fixant la procédure de confirmation et d'expropriation des droits
fonciers coutumiers. Cette loi prévoit la délivrance d'un titre
foncier pour confirmer ces droits, c'est à dire qu'elle
«reconnaît le libre, paisible et total exercice individuel ou
collectif de ces droits coutumiers »;
- La loi n°98-06 du 29 Avril 1998
portant statut des notaires ;
- La loi n°2002-014 du 11 juin 2002
portant création des communes et fixant le nom de leurs chefs lieux ;
- La loi n°2008-03 du 30 avril 2008
d'Orientation sur l'Urbanisme et l'Aménagement Foncier ;
- Ordonnance n°2010-54 du 17 septembre
2010 portant Code Général des Collectivités Territoriales
de la République du Niger ;
- Ordonnance n°99-50 du 22 Novembre 1999
portant fixation des tarifs d'aliénation et d'occupation des terres
domaniales de la République du Niger ;
- Ordonnance n°93-015 du 2 Mars 1993
portant principes d'orientation du Code Rural ; - Ordonnance
n°59-113/PCN du 11 Juillet 1959 portant
réglementation des terres du domaine privé de la
République du Niger ;
- Décret n°97-006/PRN/MAG/E du 10
janvier 1997 portant réglementation de la mise en valeur des ressources
naturelles rurales ;
- Décret n°97-306/PRN/ME/I du 08
Août 1997 fixant les modalités d'établissement,
d'approbation et de mise en vigueur des plans de lotissements ;
- Décret n°97-304/PRN/ME/I du 08
Août 1997, portant création, attributions et organisation des
organes consultatifs de l'habitat en matière d'urbanisme et d'habitat
;
- Décret n°2009-224/PRN/MU/H du
12 Août 2009 fixant les modalités d'application des dispositions
de la loi 61-37 du 24 novembre 1961 réglementant l'expropriation pour
cause d'utilité publique et l'occupation temporaire modifiée et
complétée par la
70
loi 2008-37 du 10 juillet 2008, relative au déplacement
involontaire et à la réinstallation des populations ;
- Journal Officiel de la République du Niger (JO) du 06
Décembre 2005.
Webiographie :
http://www.ceped.org/cdrom/dynamiquesperiurbaines/html/restitution.htm
consulté le 18/04/2011
http://www.ins.ne,
consulté le 18/04/2011
http://www.comby-foncier.com,
consulté le 14/12/2010
71
ANNEXES
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