I.2. Littérature empirique de l'inflation et de
la croissance économique
Dans un colloque international tenu en Istanbul sur «
Inégalités et développement dans les pays
méditerranéens » en Turquie du 21 au 23 mai 2009,
l'étude menée par deux économistes Teheni EL GHAK et Hajer
ZARROUK «Développement financier et inégalité de
revenu : analyse empirique sur les données de panel », a
révélé le rôle des variables monétaires dans
l'explication des inégalités de revenus. En effet, les
résultats soulignent qu'un niveau élevé d'inflation
entrave la convergence économique des pays. Cependant, un système
monétaire développé aide à réduire les
inégalités des revenus. Les études empiriques ne semblent
pas répondre définitivement et clairement aux coûts et
avantages d'une politique monétaire expansionniste. Toutefois, de
nombreux économistes ont démontré l'existence d'un lien
négatif entre le niveau d'inflation et la croissance économique.
Une inflation élevée peut éroder l'intermédiation
financière en affectant l'utilité des actifs monétaires et
en conduisant à des décisions politiques qui déforment la
structure financière. Elle peut introduire des distorsions dans le choix
des investissements productifs en défavorisant les investissements
à long terme.
Au Sénégal, dans leur travail « Le
Sénégal en quête d'une croissance durable », Abdoulaye
DIAGNE et Gaye DAFFE (2002) ont montré l'existence d'une relation
négative entre le niveau d'inflation et la croissance économique
(le coefficient associé à la variable explicative IPC est de
-0.153).
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Une inflation forte peut être le signe d'une
imperfection du marché financier. Néanmoins, un niveau
d'inflation modéré (7 à 9% par an) n'est incompatible avec
une croissance rapide. En effet, une croissance forte peut contribuer à
la stabilité des prix, en renforçant la base imposable et donc en
réduisant le besoin de création monétaire pour le
financement du déficit budgétaire. Toutefois, une croissance
forte peut également exacerber les conflits sociaux pour le partage du
revenu national et donc conduire à une spirale inflationniste
liée aux coûts. C'est pourquoi l'interprétation de l'effet
de l'inflation sur la croissance économique doit être faite avec
prudence surtout si le taux moyen de la hausse des prix dépasse rarement
12% ; ce qui est le cas du Sénégal.
En France, Olivier BRUNO et Patrick MUSSO (2005), dans leur
étude « Volatilité de l'inflation et croissance
économique », ont montré un modèle simple de
croissance endogène dans lequel la composante systématique
(anticipée) de la politique monétaire a un impact non
linéaire sur le taux de croissance de long terme de l'économie.
Ils ont montré également que, hors sentier régulier, la
volatilité de l'inflation (anticipée et non anticipée)
influence négativement le taux de croissance économique. Il
apparaît notamment qu'en univers incertain, le mécanisme
d'épargne de précaution induit par la volatilité de
l'inflation est toujours dominé par un effet de revenu dû à
l'augmentation du rendement global espéré de l'épargne.
Ces résultats sont compatibles avec les différentes analyses
empiriques de la relation inflation-épargne et de l'influence de la
volatilité de l'inflation sur la croissance économique.
D'après ces auteurs, il est aujourd'hui banal
d'affirmer que les effets de long terme de la politique monétaire sont
difficiles à quantifier. Les nombreux travaux empiriques
réalisés sur le sujet n'ont réussi qu'à
démontrer l'extrême difficulté d'un tel exercice.
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Leurs conclusions sont souvent ambigües et peu robustes.
Les seuls résultats réellement significatifs qu'il semble
possible de dégager de ces études peuvent être
résumés par les points suivants :
- L'inflation est fortement positivement
corrélée avec l'évolution de la masse monétaire
[McCandeless et Weber (1995)] ;
- La croissance économique de long terme est
inversement reliée à la volatilité de l'inflation [Judson
et Orphanides (1966)], [Andres, Domenech et Molinas (1966)] ;
- Il existe une corrélation positive entre
l'évolution de la masse monétaire et la croissance
économique de long terme, mais uniquement pour les pays dont les taux
d'inflation moyens sont relativement faibles (pays de l'OCDE). La relation
n'est plus significative lorsqu'on prend en compte un échantillon de
pays plus étendu [McCandeless et Weber (1995)].
En définitive, le travail de recherche scientifique
fait appel à la littérature antérieure pour montrer sa
valeur ajoutée afin d'en corriger les imperfections éventuelles.
Après avoir interrogé la théorie traitant de l'inflation
et de la croissance économique dans le premier chapitre, il
s'avère indispensable de mener une analyse descriptive sur base des
faits observés. Le second chapitre est consacré à
l'analyse descriptive de l'activité économique et du processus
inflationniste pour le cas du Burundi. Dans cet ordre d'idée, ce
chapitre permet de vérifier partiellement les hypothèses que nous
avons posées au départ.
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