La région est en proie à diverses autres
crises. En mai 2010, une émanation de gaz d'un puits fait 5 morts dans
la localité de Roua, département du Mayo-Tsanaga. Entre les 20 et
21 juillet 2010, des pluies diluviennes causent la mort de 15 personnes faisant
150 blessés et plus de 3 000 sans abri à Pouss, localité
du département du Mayo-Danay, à une dizaine de kilomètres
de Maga, chef-lieu de l'arrondissement qui porte le même nom. Ces
inondations font les choux gras de la presse nationale. La charité
internationale se mobilise pour apporter du réconfort moral et
matériel aux sinistrés. Le chef de l'Etat accorde une aide de 50
millions de francs CFA auxquels s'ajoutent les 50 millions du gouvernement aux
sinistrés. Dans cette mobilisation tous azimuts pour secourir les
sinistrés, les médias jouent un grand rôle.
Une année plutôt, le naufrage d'une
pirogue de fortune sur le lac Guéré cause la mort de 19
personnes. Seules 6 personnes survivent à cette noyade survenue le 24
octobre 2009 alors que les victimes originaires des localités de
l'arrondissement de Wina rentraient du marché de
Guéré.
Trois ans avant, les inondations causent d'importants
dégâts dans les villes de Mokolo et de Maroua. Si on ajoute
à ces catastrophes les dégâts causés par la
sécheresse, ou les exactions des coupeurs de route, des pachydermes et
les ravages des acridiens, l'Extrême-Nord constitue une zone d'une forte
« crisogénéité ».
La région de l'Extrême-Nord a été
toujours un terrain de prédilection pour les épidémies de
cholera et de méningite. Pierre FADIBO
souligne d'ailleurs fort à propos que
« l'histoire de l'Extrême-Nord du Cameroun est
jalonnée d'épidémies diverses aux conséquences
multiformes Parmi ces derniers, la maladie dont l'épidémie
paraît plus régulière et plus ancienne est la variole,
annoncée dans les Monts Mandara en 18661 ». Dans sa
thèse de doctorat Ph.D, il recense la rougeole, la méningite
cérébro-spinale, le choléra et la trypanosomiase humaine
comme étant les épidémies les plus meurtrières de
cette région. Il conclut que « ces épidémies
ont été familières aux populations depuis la
période coloniale, et ont persisté jusqu'à l'ère
postcoloniale » (FADIBO Pierre : 2006). Dans la même
veine, Christian Seignobos relève dans son ouvrage
intitulé : la variole dans le Nord-Cameroun :
représentation de la maladie, soins et gestion sociale de
l'épidémie que « les populations du
Nord-Cameroun qui eurent à subir ses effets encore dans les
années de l'indépendance la variole fut un fléau dont les
ravages dépassaient ceux de toute autre
épidémie ». (SEIGNOBOS Christian : 1995).
Pour la période 2005-201, l'épidémie du
cholera a endeuillé plusieurs familles dans l'Extrême-Nord. La
maladie a fait plus de 2000 décès. De mai 2010 à
février 2011, cette épidémie a eu un bilan
particulièrement lourd : 9 373 cas pour 601
décès dont 302 en communauté, c'est-à-dire hors des
hôpitaux et centres de santé. 8 763 malades dont des
Nigérians et des Tchadiens ont été déclarés
guéris. Telle une traînée de poudre,
l'épidémie s'est déclenchée le 06 mai 2010 dans le
district de santé de Makary dans le département du Logone et
Chari, pour se propager ensuite, de proche en proche, dans l'ensemble de la
Région. Compte tenu du poids démographique de
l'Extrême-Nord, du brassage et de la mobilité des populations, de
la porosité des frontières, de l'écologie
fragile, de la saison des pluies, du faible accès des
populations à l'eau potable, privilège dont 29% seulement d'entre
elles bénéficient actuellement (selon un rapport du
Ministère de l'Energie et de l'Eau en 2010), de l'inexistence de
latrines dans certaines concessions, de la superstition qui amène
certains à croire à la transmission du cholera par sorcellerie,
du recours tardif aux soins malgré leur gratuité, le bilan a
été particulièrement élevé. La maladie a
atteint tous les vingt-huit districts de la Région. Mais le
département du Mayo-Tsanaga paie le plus lourd tribut avec 241
décès, soit 40,43% des vies humaines perdues.
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