B) Tentatives de communautarisation de
l'intégration des Roms
Les communautés roms sont dispersées sur
l'espace européen. De nombreuses communautés vivent dans des
conditions précaires. Elles ont un taux d'alphabétisation et de
scolarisation faible et ont un accès au marché du travail
limité. Globalement, les problèmes rencontrés par les Roms
sont les mêmes dans tous les pays européens où ils sont
installés. Bien que ces problèmes demeurent, ils touchent
différemment les communautés d'un pays à l'autre. Cette
différence est, en partie, due au diverses politiques publiques
nationales, des États européens. Nous avons vu que les politiques
nationales d'immigration et d'intégration, ne sont pas en mesure de
s'adapter à la mobilité des migrants. Ainsi, la gestion des
mobilités roms doit être pensée au niveau communautaire.
Premièrement, nous aborderons la question d'une intégration
à l'européenne. Dans un second temps, nous verrons quelles sont
les initiatives communautaires destinées aux Roms.
1) Pour une intégration à l'européenne
?
La communautarisation de la politique migratoire
européenne est en marche, bien que limitée par la volonté
des États d'affirmer leur souveraineté. Cette politique
communautaire est relative au droit d'entrée et d'asile sur le
territoire européen, ainsi qu'au contrôle des frontières et
à la lutte contre l'immigration illégale. De nombreux chercheurs
affirment que les politiques migratoires restrictives, mises en place en UE, ne
sont pas adaptées aux mobilités actuelles. J. Fijalkowski en fait
partie. « Il faut aussi appliquer une politique migratoire flexible,
bien que régulée, qui aurait pour objectifs
l'égalité des chances et l'institution de conditions de vie
dignes et humaines dans
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toute l'Europe. »169 En effet, il est
possible d'instaurer des politiques migratoires flexibles, qui favoriseraient
une intégration à l'européenne. Catherine Wihtol de Wenden
expose l'absence d'européanisation des politiques d'intégration.
« Dans le partage des compétences qui préside à
la gestion européenne des politiques migratoires, l'intégration
fait partie de la subsidiarité : elle est décidée à
l'échelon national ou local, à la différence de
l'européanisation de la décision relative aux politiques
d'entrée et d'asile. »170 Ainsi, différents
modèles d'intégration sont présents en Europe.
Au sein de l'UE, bien que l'intégration demeure du
domaine national, l'intégration des Roms est l'objet d'attentions
particulières. Depuis 1998, le Conseil de l'Europe171 ne
cesse de réunir des groupes de travail, des forums, et des
comités d'experts sur la situation des Roms en Europe. Des projets ont
été rédigés et des suggestions ont
été émises. La situation des Roms n'a pas
évolué significativement. E., ancienne membre de Parudimos en
fait part.
E. - « J'ai travaillé au Conseil de l'Europe
pendant une petite période, et j'ai vu que au niveau européen il
ne se passe pas grand chose. [...] Bon c'est vrai que c'est très
important que au niveau de l'Europe il y ait des mouvements, des impulsions.
C'est très important ça, pour l'image, pour essayer de changer la
vie des gens. [...] Mais ils ne vont pas dans les pays européens voir ce
qui se passe, vraiment. »172
E. met ici en évidence la distance qui subsiste entre
le Conseil de l'Europe et les pays européens. Cette distance est la
raison pour laquelle les décisions européennes n'ont pas
d'influence directe sur le quotidien des citoyens européens. En effet,
sans une réelle connaissance de la situation des Roms au sein de chaque
pays européen, il est impossible de mettre en place des actions
appropriées à leur mode de vie et aux sociétés qui
les accueillent.173
Des fonds européens existent pour promouvoir
l'intégration des Roms et Tsiganes.
S. - « L'Europe aimerait bien que les Roms restent en
Roumanie et se réinsèrent en Roumanie. L'argent il est pour
ça aussi. »174
Pour S., stagiaire de l'association Parada, l'UE soutient
l'intégration des Roms en Roumanie, pour limiter leurs
déplacements. Que cela soit une réalité ou non, les fonds
européens n'ont pas un impact important en Roumanie. « In the
case of the Roma EU citizens this lack of measures is arguably
169Fijalkowski J., « Transformer la politique
européenne en matière de migration », op. cit., p. 83.
170Wihtol de Wenden C., La globalisation humaine, op.
cit., p. 191.
171www.coe.int
172Annexe 1 : extraits d'entretiens.
173Cette affirmation est, également, valable pour tout
autre type de communauté.
174Annexe 1 : extraits d'entretiens.
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more striking considering that Roma are generally
acknowledged to be one of the most vulnerable groups of citizens in the EU.
[...] This includes the lack of use of the Structural Funds and in particular
the European Social Fund to support Roma inclusion and addressing
discrimination and exclusion through information and awareness-raising
campaigns. »175 En Roumanie, la mauvaise utilisation des
fonds européens est un réel handicap à
l'intégration des Roms. Pour recevoir des fonds, de fausses ONG sont
crées, de faux projets sont rédigés et de faux rapports
d'activité sont produits. L'exemple de l'association Kelsen est tout
à fait caractéristique de ce type de détournement des
fonds européens. Tous les acteurs que j'ai rencontré en Roumanie,
ont évoqué ces détournements, lorsque l'enregistrement de
notre conversation était arrêté. Ces malversations sont une
réalité. Elles freinent la mise en place d'une gestion
appropriée de l'intégration des Roms. Cela nous montre que les
organes dirigeants de l'UE ne sont pas au fait du système roumain et des
nombreuses malversations qui y perdurent. Tout cela pourrait être
évité si la distance était réduite entre les
organes dirigeants de l'UE et les pays membres.
Une intégration à l'européenne n'existe
pas encore. Cependant, une réelle volonté de gestion
communautaire des populations roms est observable, bien que globalement
inefficace.
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