2-2-2 Les raids esclavagistes
Très tôt après sa fondation, le royaume se
lança dans le trafic des esclaves qui connaîtra une grande ampleur
avec l'arrivée des sémassi.
En effet, le trafic des esclaves constituait une
activité économique avant l'arrivée des
sémassi. Ainsi, l'esclavage a de tous les temps existé
chez les Tem. Il s'effectuait entre les Kotokoli eux- mêmes ou
entre les Kotokoli et les étrangers. L'enjeu était tel que ceux
qui avaient de nombreux enfants et qu'ils n'arrivaient pas à nourrir,
pouvaient volontiers vendre quelques uns pour s'approvisionner en vivres et
pouvoir assurer leur survie. A ce sujet, Verdier3 écrit :
« Bafilo est un lieu important de commerce où l'on vient
notamment vendre les enfants kabiyè en cas de famine ».
Par ailleurs, les prisonniers de guerre devenaient des
esclaves au service du royaume. De ce fait, ils travaillaient pour ce
dernier.
1 - Entretien avec Ouro-Akpo Kassim, chef de
Yélivo, du 16-08-06.
2 -Gayibor NL (ss la dir), 1997, p347.
3 - Verdier R, 1982, p187.
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Ils allaient en nombre important transporter du sel depuis
Atakpamé jusqu'à Kparatao1. De plus, le souverain
pouvait les échanger contre les produits d'exportation qu'apportaient
les étrangers (cheval, harnachement, etc.)
Devenant de plus en plus important, ce commerce des esclaves
s'accentua avec l'entrée en scène des sémassi.
Rappelons que les sémassi furent des cavaliers
armés qui vinrent de la Boucle du Niger et qui furent cooptés par
Ouro-Djobo Boukari de Kparatao. Par la suite, ils vont se lancer dans le trafic
esclavagiste en raflant les populations dont les plus vulnérables furent
les enfants, les femmes voire les hommes.
Ces cavaliers razzieurs firent des expéditions en
longeant les pistes de champs et fermes et enlevèrent ceux-ci pour en
faire des captifs. Ces derniers étaient lavés dans une
rivière appelée yomaboua2 avant de les vendre
aux trafiquants du sud3. La plupart des esclaves qui alimentaient le
commerce négrier en ce qui concerne le Togo provenaient de l'hinterland
dont les sémassi constituèrent l'un des acteurs.
A ce sujet, Gayibor4 écrit : « De
toutes les sources confondues, il ressort que la traite était
régulièrement alimentée par des captifs provenant de
l'hinterland...Les régions réservoirs se limitaient
essentiellement à celles qui sont situées à au moins une
certaine de kilomètres de la côte ».
Dans son entretien avec Coubadja Touré,
Tchanilé5 rapporte ce qui suit : « Mes
ancêtres étaient des esclavagistes. Ils capturaient des gens
qu'ils allaient vendre à Blitta »
1 -Ouro-Djéri, 1989, p62.
2 - c'est-à-dire la rivière des
esclaves
3 - Alexandre P, 1963, p241.
4 -Gayibor NL, (ss la dir), 1997, p240.
5 - Tchanilé MM, 1987, p34.
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Ainsi, on constate que ces raids esclavagistes avaient aussi
bien un intérêt politique qu'économique.
Un intérêt politique parce qu'ils servaient
à renforcer le pouvoir du souverain qui devint de plus en plus
respecté et craint.
Et un intérêt économique d'autant plus que
les captifs provenant de ces rapts furent essentiellement vendus puis
constituèrent une source de revenus pour le royaume.
Il occasionna le déplacement des villages qui fuyaient
les esclavagistes et qui trouvaient des points de refuge surtout dans les sites
montagneux. Ce fut le cas du village Bouladè à propos duquel
Alpha1 écrit en 2006 en ces termes : « Sous la
menace des chasseurs d'esclaves (les sémassi), les populations de
Bouladè entamèrent une nouvelle phase de migration cette fois-ci
vers le sud et s'installèrent de nouveau sur le piémont de
K'gbafulu... ».
Ceci étant, ces raids esclavagistes ont concerné
aussi bien les peuples frères que les peuples voisins étant
entendu que le village de Bouladè près de Bafilo est aussi une
fondation des Mola de Tabalo.
Ce trafic fut aboli dans le royaume avec l'arrivée des
Allemands2.
L'une des figures qui auraient marqué l'histoire du
royaume fut sans doute celle de Adam Méatchi.
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