Conclusion
Dans une situation d'après conflit, l'intervention
d'acteurs extérieurs - et moins encore l'application de modèles
extérieurs - ne suffisent pas à construire la paix. Pour trouver
les bons équilibres en matière de justice transitionnelle,
apporter des réponses vraiment adaptées aux problèmes
humanitaires, repérer les bons circuits pour relancer l'activité
économique, mobiliser les acteurs capables de recréer un tissu
social, il faut faire appel à la société civile sous ses
différentes formes. L'appropriation est essentielle. Et il ne sera pas
de trop de reconnaître que l'insécurité consécutive
aux conflits qu'ont connus beaucoup de pays d'Afrique est le fait de la
centralisation du pouvoir, de la non inclusion de la société
civile et de la dégradation des services sociaux de base.
Les interventions successives opérées dans un
pays comme le Haïti démontrent comment l'atteinte des objectifs a
court terme en 1994, visant la stabilisation, n'a pas fait place a une
consolidation durable de la paix, mais a une rechute vers l'instabilité
politique et économique. Les institutions publiques légitimes et
efficaces doivent être bâties par le renforcement de la gouvernance
locale. Une telle action est quasiment impossible a réaliser sans
l'implication et la participation de la société civile. En effet,
pour que les actions de stabilisation initiées soient appropriées
par les populations locales et se pérennisent, il est important de
prioriser la mise en oeuvre des projets locaux de développement, qui
même en comportant un ensemble de contraintes et de risques sont porteurs
de vraies opportunités de redressement. D'oü l'importance de
contempler et d'appuyer les contributions de la société
civile.
En définissant le défi de la RSS par les enjeux
sociétaux, à savoir le besoin de justice dans la
société, et une nécessité de rendre justice comme
condition à une paix durable, la réponse ne peut se contenir dans
la vision étatique des institutions. Il est important de prendre en
compte leur dimension sociétale.
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Reconnaître que les institutions doivent être
fondées sur des valeurs sociétales et ne subsistent que
grâce aux ressources mises a leur disposition par la nation
organisée en régime d'Etat, implique d'admettre de devoir rendre
des comptes aux citoyens. Les institutions sécuritaires doivent
être transparentes et redevables. Il est important de faire valoir la
dimension sociétale de la RSS. Audelà d'un appareil d'Etat,
l'armée et la police congolaises sont des systèmes de valeur en
crise que la société meurtrie reconstruit.
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La société civile congolaise a été
un vrai partenaire dans la marche pour la consolidation de la paix. Elle peut
encore faire davantage pour appuyer les efforts de stabilisation. Des efforts
doivent continuer pour renforcer son organisation et son fonctionnement. Et
dans la thématique qui nous occupe, elle valoriserait davantage ses
actions en :
1° systématisant ses activités de lobbying
au niveau interne et externe notamment par l'harmonisation des positions,
cahier de charge et création d'un réseau de pression permanente
;
2° intensifiant la mobilisation sociale de la population
congolaise en faveur de la consolidation de la paix et la restauration de
l'autorité de l'Etat par la vulgarisation des textes de
référence ( Accord de Lusaka, résolutions du Conseil de
Sécurité, les activités du STAREC...), l'éducation
civique incluant la préparation et la surveillance des processus
électoraux, les manifestations publiques, les pétitions etc...
3° se rapprochant des sociétés civiles
africaines en particulier celles des pays impliqués dans les guerres
pour échanger les expériences ;
4° en évitant systématiquement toutes
compromissions avec les criminels de guerre notoires et prenant le courage
d'engager a leur égard des actions en justice spécifiques ;
5° créant un fond congolais de soutien au processus
de paix en RDC.
6° établissant des alliances stratégiques
avec les composantes, parties prenantes aux multiples rencontres nationales et
internationales organisées pour appuyer le processus de pacification du
pays partageant les mêmes points de vue que la société
civile ;
7° synchronisant les activités de la
société civile partout dans le pays et à l'étranger
;
8° développant un réseau de recherche et de
documentation pour mieux préparer les actions ;
9° organisant lorsque nécessaire de boycott
national de certains produits symboles mis sur les marchés par des
individus, groupes d'individus ou entreprises qui manifestement tirent profit
des situations de guerre et d'instabilité en RDC.
10° travaillant a la promotion du projet de
l'établissement d'un tribunal pénal international ad hoc pour
connaître des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité, des
actes de génocide et des crimes à caractère
économique commis pendant les deux guerres du Congo ;
11° développer une expertise indépendante sur
les allégations de crimes économiques et autres pillages des
ressources naturelles du pays.
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