La voie de fait administrative( Télécharger le fichier original )par Ousmane Bakary KABA Université Hassan II Casablanca Maroc - Etudes fondamentales en droit public 2009 |
Chapitre premier : LA NOTION DE LA VOIE DE FAITLa notion de la voie de fait est l'une des notions les plus indéfinies et les plus complexes du contentieux administratif. La théorie de la voie de fait qualifie un comportement où l'administration agit complètement en dehors du droit. Elle reflète la volonté de ses utilisateurs pour montrer que lorsque l'administration agit en usant des moyens extra-juridiques, elle se trouve dans la même situation qu'une personne qui se donne à des actes de violence. En effet la voie de fait se définie comme une situation dans laquelle se trouve l'administration, lorsque dans l'accomplissement d'une activité matérielle d'exécution, elle commet une irrégularité grossière portant atteinte au droit de propriété ou à une liberté publique, et que le juge de référés doit intervenir pour faire cesser dans l'urgence afin de sauvegarder ce droit ou cette liberté publique. Cependant, la voie de fait n'est pas la seule théorie dont la mise en oeuvre nécessite l'urgence pour la sauvegarde d'un droit ou d'une liberté. Cette définition nous fait comprendre alors, que la théorie de la voie fait présente des traits caractéristiques communs avec certaines notions du contentieux administratif, qui nécessitent l'intervention du juge, en cas de violation de droit ou de liberté publique d'un particulier, pour les faire cesser face à une urgence. Ainsi dans le cadre de ce premier chapitre, nous étudierons d'abord les éléments constitutifs de la notions de voie de fait, ensuite la différence qui existe entre cette notion et d'autres notions similaires. Section I : LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA VOIE DE FAITA travers la définition de la voie de fait, nous constatons que la voie de fait comprend trois éléments distincts, qui sont : exécution matérielle d'une activité, l'irrégularité grossière de l'opération administrative et l'atteinte au droit de propriété ou à une liberté publique. Aussi bien en France qu'au Maroc, la plupart des auteurs s'accordent sur ces trois éléments constitutifs de la voie de fait. Nous pouvons dire que ces éléments constituent les critères d'identification de la voie de fait. A- L'EXECUTION D'UNE OPERATION MATERIELLEPour qu'il y ait voie de fait, il faut que l'administration procède à une exécution matérielle pour modifier l'ordonnancement juridique. De ce fait, une décision administrative qui n'est pas suivie d'une exécution ne peut être constitutive d'une voie de fait. La jurisprudence admet toutefois qu'une menace5(*) précise d'exécution peut constituer une voie de fait, même si elle n'est pas suivie d'exécution. Ainsi le juge peut intervenir pour prévenir cette menace et non de la faire cesser6(*). La voie de fait peut résulter de l'irrégularité soit de la décision elle-même soit de l'irrégularité de l'exécution de la décision. L'arrêt Action française fournit un exemple remarquable de cette catégorie. En effet, dans cette affaire, la saisie du journal Action française opérée par le Préfet de police de Paris, chez tous les dépositaires de ce périodique à Paris, a été considérée comme une voie de fait à la fois parce que la décision de saisie était elle-même, par son caractère exagéré, insusceptible de se rattacher au pouvoir de police de l'administration, et parce que la saisie par voie d'action d'office n'était pas, en l'espèce, justifiée par l'urgence7(*). * 5 _ T.C, 18 déc. 1947, Hilaire, PEISER G. Contentieux administratif, 14e éd., 2006, p. 88. * 6 _ BENABDALLAH M. A. La voie de fait et le droit, in REMALD, n° 14-15, p. 55. * 7 _ Grands arrêts de la jurisprudence administrative, 15e éd. 2005, p. 305. |
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