Chapitre IV : offre de soins et demandes de soins
Ce dernier chapitre est consacré à l'analyse de
l'offre de soins et des besoins de santé dans la région de
Matam.
1- L'offre de soins
L'offre de soins dans la région de Matam comparée
aux normes de L'OMS montre des déficits importants en termes de
couverture en infrastructure et en personnel de santé.
Tableau 2 : La couverture en infrastructure dans la
région de Matam en 2007
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Situation en 2007
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Normes OMS
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Observations
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Poste de santé
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1/7.187
|
1/10.000
|
Ok
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Centre de santé
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1/158.107
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1/50.000
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Déficit
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Hôpital
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1/474.321
|
1/150.000
|
Déficit
|
Source : Données de l'enquête, mars 2009.
Si pour les postes de santé la couverture est bonne
comparée aux normes établies par l'OMS (un poste de santé
pour 7.187 habitants contre un poste pour 10.000 hts), les centres de
santé et l'hôpital régional sont par contre au-dessus de
celles-ci. Cette situation pose la question de l'accès aux soins et
celle de la prise en charge des malades notamment dans les centres de
santé et à l'hôpital. Cependant, malgré que le
district de Ranérou ait l'effectif le plus faible en structure
sanitaire, sa couverture en poste et centre de santé est meilleure que
celles de Matam et Kanel (7905 hts pour un poste et 47432 pour un centre). Par
conséquent, il serait intéressant d'étudier
l'accessibilité des différents équipements sanitaires,
pour avoir une idée très claire de la situation sanitaire des
habitants de la région de Matam. Car, cette accessibilité joue un
rôle déterminant dans l'utilisation des services de soins. Il
convient alors de distinguer l'accessibilité géographique de
l'accessibilité économique et culturelle. Le premier est
définie comme étant « la distance maximale à
parcourir pour atteindre une unité de soins » (Field et Briggs,
2001).
Si l'on considère que « la population desservie
par un poste et/ou un centre de santé doit pouvoir atteindre ceux-ci en
marchant » (Owen, 1986), l'on peut soutenir que certaines populations ont
véritablement des problèmes d'accès aux services de soins.
La carte sanitaire de la région de Matam permet de voir des
disparités notoires entre les districts sanitaires. Les
habitants de Matam vivent relativement plus près des
postes de santé et bénéficient grâce à cette
proximité de services de soins facilement accessibles. A l'inverse, le
district de Ranérou, malgré sa bonne couverture sanitaire au vu
des normes de l'OMS, est profondément marqué par
l'éloignement des structures de soins pour certaines populations qui
parcourent plus de 30 km pour atteindre un poste de santé.
La carte ci-dessous met en évidence
l'accessibilité des centres de santé sur une distance qui va de 2
à 30 km. L'étude de cette accessibilité s'est faite par la
constitution de zones tampons. Celles-ci sont représentées sous
forme de cercle. Ainsi, plus le cercle est petit plus il est proche du centre
de santé localisé ; plus il est grand plus la distance à
parcourir pour atteindre le centre de santé est élevée. Il
en ressort que la majorité des populations de la région vivent
très éloignées des services de soins de seconde ligne.
Elles peuvent faire plus de 30 Km pour se rendre à un centre de
santé. Ce facteur de proximité ou d'éloignement a des
conséquences sur la bonne prise en charge des habitants en
matière de soins supérieurs.
Lougguéré Tioli
Vélingara
Réalisation : BA T.H (2009)
+ Centres de sante
4km du centre de sante
20 km du centre de sante
10 km du centre de sante
2 km du centre de sante
30 km du centre de sante
8 km du centre de sante
Bkm du centre de sante
Communaut6s rurales
Oudalaye
Oréfondé
Ranérou
ccessibilit~ spatiale
Agnam Civol
Diaba
Ogo
Boki Diavé
0 100 Kilom~tres
Ouro Sidi
Nabadji
Sintiou Banambé
Matam
Orkadiéré
Kanel
Aouré
N
W E
S
Bokéladji
Carte 7 : Accessibilité spatiale des
centres de santé
De plus, si l'on se réfère à la carte
ci-dessous, qui met en relief l'accessibilité des postes de santé
par rapport à une route principale, l'on voit que le département
de Matam se démarque une fois de plus des deux autres districts
sanitaires. La méthode a consisté à créer des zones
tampons le long des routes principales. Par conséquent, tous les postes
de santé qui se trouvent dans le périmètre
créé, se localisent au plus à 5 Km d'une route. Il
résulte de cette analyse qu'il y a dans le département de Matam
plus de postes de santé se trouvant au plus à 5 km d'une route.
Ce qui facilite donc leur accessibilité. Le département de Kanel
vient comme d'habitude en deuxième position avec toutefois beaucoup de
postes de santé se situant hors de la zone tampon. Ceux de
Ranérou semblent plus isolés donc plus inaccessibles encore une
fois pour ses populations.
La dernière carte sur l'accessibilité montre
quant à elle que la quasi-totalité des postes de santé se
trouvent au plus à 5 km d'une piste. Ce qui signifierait que dans
l'ensemble, les villages de la région de Matam ne souffrent
théoriquement d'aucun enclavement et que les habitants peuvent sans
grande difficulté accéder aux postes de santé.
Cependant, la réalité est toute autre sur le
terrain. L'état défectueux des routes à certains endroits
comme celle qui va de Ourossogui à Kanel et celui des pistes constituent
une véritable contrainte à l'accès aux équipements
sanitaires. De plus, pendant l'hivernage, certaines localités se situant
le long du fleuve deviennent entièrement enclavées et le
transport y est assuré par des pirogues. La vétusté et
l'insuffisance des transports en commun entravent également la bonne
prise en charge des populations notamment en cas d'urgence. Par exemple, au
niveau des pistes ce sont généralement les charrettes qui se
chargent du transport des habitants dans des conditions qui laissent à
désirer. Ce qui engendre un sérieux problème de perte de
temps et surtout d'insécurité.
Parallèlement, en raison du rôle central que les
personnels de santé jouent dans le système sanitaire, leur
répartition géographique pourrait avoir « un impact direct
sur le type et le nombre de prestations de soins effectuées. En effet,
il est largement prouvé que le nombre et la valeur du personnel influent
de manière positive sur la couverture vaccinale, l'extension des soins
de santé primaires ainsi que sur la survie juvéno-infantile (OMS,
2006).
L'analyse de la répartition des personnels de
santé dans la région de Matam a fait apparaître
d'importantes disparités entre les départements notamment en
termes d'infirmiers ; mettant ainsi en évidence l'inégal
accès des populations aux services de soins primaires. Pour certains
habitants, l'accès à un médecin, un infirmier ou
même une sage-femme devient de plus en plus difficile voire impossible.
Ils rencontrent des difficultés pour obtenir une consultation
spécialisée dans un délai raisonnable. Cela s'explique par
le déficit notoire des professionnels de santé dans la
région. Par exemple, pour les sages-femmes, la norme nationale est d'une
sage-femme par poste de santé avec maternité. Alors que la
situation actuelle est de 12 sages-femmes pour 44 postes de santé avec
maternité. Ces insuffisances sont plus nettement mises en exergue dans
le tableau ci-dessous.
Tableau 3 : La couverture en personnel de santé
dans la région de Matam en 2007
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Situation en 2007
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Normes OMS
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Observations
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Médecin
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1/59 290
|
1/5 000 à 10 000
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Déficit
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Infirmier
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1/5 212
|
1/300
|
Déficit
|
Sage-femme
|
1/9 429 FAR
|
1/300 FAR1
|
Déficit
|
Source : Données de l'enquête, mars 2009.
Les ratios présentés dans ce tableau montrent
que la région entière est sous médicalisée. Le
nombre d'habitants pour toutes les catégories de praticien est de loin
supérieur aux normes établies par L'OMS (1 médecin pour 59
290 hts contre 1/5 000 à 10 000 et 1 sage-femme pour 9 429 FAR contre
1/300 FAR). Cette
1 Femme en Age de Reproduction (15-49 ans)
situation est à l'origine des longues « files
d'attente » au niveau de certaines structures de soins notamment à
l'hôpital de Ourossogui. Elle explique les débordements souvent
notés dans les services de soins. Elle réduit la capacité
d'accueil des ces derniers et compromet à cet effet l'accès aux
soins et la qualité de la prise en charges des populations.
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