Etude de la condition de la femme face à la violence du terrorisme intégriste dans le recueil de nouvelles « Oran, langue morte » d'Assia DJEBAR( Télécharger le fichier original )par Lamia AKERMOUN Université Saad Dahleb de Blida - Licence de français 2010 |
I) ETUDE DES ELEMENTS NARRATOLOGIQUESNous entamons notre projet par une analyse interne des trois nouvelles que nous avons choisies. Il est nécessaire de préciser que cette partie dans laquelle nous étudions les éléments narratologiques nous permet d'établir le lien entre le texte et notre thème de recherche. A commencer par l'étude titrologique qui met en oeuvre le thème traité, ensuite l'étude des repères spatio-temporels qui nous permettent de situer le récit dans le temps et dans l'espace. Enfin l'étude des personnages et leur relation avec le réel. I-1) ETUDE TITROLOGIQUELe titre est une forme d'introduction abrégée, c'est un énoncé ou bien un simple mot qui sert à désigner d'une façon peu claire le contenu de l'oeuvre, à éveiller son intérêt et à émettre des hypothèses : « Il doit être stimulation et début d'assouvissement de la curiosité du lecteur »5(*) En ce sens, le titre suscite la curiosité du lecteur et l'incite à découvrir le contenu de l'oeuvre et à éclairer ses ambiguïtés. En outre, le titre comme le message publicitaire doit remplir trois fonctions élémentaires : La fonction référentielle Le titre doit informer le lecteur sur ce que peut avoir l'oeuvre comme contenu. Oran, langue morte nous informe de prime à bord qu'à Oran, ville située à l'ouest du pays, choisie par l'auteur, la langue est morte, cela nous renvoie à plusieurs suppositions négatives puisque le titre même est une ouverture vers le cimetière. La fonction conative Dans ce cas, le titre doit impliquer le lecteur, il ne doit pas le laisser indifférent, mais au contraire, toucher sa sensibilité pour lui faire découvrir l'univers mystérieux de l'oeuvre.
La fonction poétique En plus des deux fonctions citées, le titre doit susciter l'attrait et l'admiration du lecteur, toujours pour la même raison de nous faire entrer dans l'univers du roman. En lisant le titre de notre ouvrage Oran, langue morte, le lecteur est vite attiré par la ville et par ce qui peut la toucher. Claude Duchet l'explique dans son étude sur la titrologie en 1973 : L'un (le titre) annonce, l'autre (le texte) explique, développe un énoncé programmé Jusqu'à reproduire parfois en conclusion son titre, comme mot de la fin et clé de son texte. cependant, installé sur sa page ou inscrit dans un catalogue, le titre vise sa complétude [...] s'érige en micro texte autosuffisant, générateur de son propre code et relevant beaucoup plus de l'intertexte des textes et de la commande sociale que du récit qu'il intitule. »6(*) On pourrait donc dire que le titre consiste à résumer et à annoncer le texte, sans le dévoiler et permet de singulariser le texte des autres. Dans notre cas, le rôle du titre dans Oran, langue morte est très significatif, par conséquent nous examinerons sa fonction par rapport aux nouvelles du recueil, ainsi que ce mécanisme du « refoulé » qu'il y a dans le titre. I-1-1) La symbolique d'Oran, langue morteOran, langue morte est un titre thématique. Nous sommes donc en présence d'un énoncé connotatif qui se compose de deux syntagmes nominaux, juxtaposés ; l'un annonce le lieu « Oran », l'autre la situation ; le silence et la mort.
Nous signalons qu'Assia Djebar a assisté à la guerre civile qui a secoué le pays, et aux traumatismes des algériens pendant cette période, ainsi qu'à la mort de plusieurs intellectuels auxquels elle a rendu hommage dans Le blanc de l'Algérie.
Parmi eux, Abdelkader Alloula, le poète du théâtre des langues qui était l'un de ses amis, assassiné en quatre-vingt treize. En effet, « Oran » est la cité de ce poète, annonce déjà le lieu de la mort pour avoir oser parler. « Oran » devient emblème mortifière ; c'est cette destruction que le titre fait entendre : « Ville morte, la langue est désertée. Langue morte, la ville est innommable, Oran est le non de la mort, la mort a nom Oran. Ville-language sans plus de civilité, de passage, de communauté, vouée à la sauvagerie des crimes de sangs. »7(*) La « langue morte » serait également l'image des femmes algériennes qui ne s'expriment pas librement. Toute leur vie, elles étaient frustrées : « Je pars car je ne veux plus rien voir, Olivia, ne plus rien dire : seulement écrire Oran en creux dans une langue muette, rendre enfin au silence, écrire Oran ma langue morte »8(*)
Cette langue muette est celle du désir qui, malgré tout persiste à se faire entendre, ce désir reflète l'espoir de quitter la ville ensanglante pour une autre plus sereine. Ce désir de changer est un symbole de renouveau.
* 5 C.Achour, A.Bekkat, Clefs pour la lecture des récits. Blida, Ed, Tell, 2002, p 71 * 6 In C.Achour, A.Bekkat in, Clefs pour la lecture des récits, Op.cit, p 72 * 7 Mireille Calle Gruber, Assia Djebar ou la résistance de l'écriture, Op.cit, p 135 * 8 Assia Djebar, Oran, Langue morte, Op.cit, p 48 |
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